[#13] Belles retrouvailles (Briséïs)

Belles retrouvailles

Noah & Briséïs

Noah se regardait attentivement dans le miroir. Il avait essayé de mettre de l'ordre dans ses cheveux châtains, ce qui n'était pas franchement gagné d'avance. En plus d'être épais, donc difficiles à coiffer, ils partaient un peu dans tous les sens. Même son coiffeur, la veille, avait eu toutes les difficultés du monde à ce que ça ressemble à quelque chose. D'ailleurs, maintenant que lui-même s'y collait, il regrettait amèrement de ne pas avoir décalé son rendez-vous d'un jour. Au moins, pour ce soir un peu particulier, il aurait été présentable. Il regarda sa barbe, qu'il avait taillé, sans doute pour la première fois de sa vie. Oh, il n'avait certainement pas utilisé les tutos nombreux que l'on pouvait trouver sur le net. Ca n'avait rien d'un grand art ! Il s'était juste contenté de raser un peu, histoire de faire passer le poil d'un bon centimètre, à un demi. La ligne sur ses paumettes n'était pas tout à fait droite et il n'avait pas délimité dans le cou. Franchement, ce genre de choses, il fallait être une semaine des quatre jeudis pour qu'il s'y adonne. Même au mariage de son frère et de Briséïs, il ne l'avait pas fait ! Au quotidien, on ne le connaissait pas aussi "soigné". Il ne mettait pas de chemise, juste de vieux t-shirts, délavés, aux motifs presque disparus. Le seul vêtement qu'il avait conservé n'était qu'un vieux jean gris foncé dans le lequel il se sentait bien. En gros il ne portait pas ses fringues pour les autres, mais pour lui. Et physiquement, il préférait ne pas trop attirer les regards sur sa personne. En s'affichant classique et monotone, il espérait que personne ne le remarque et qu'aucun projecteur ne l'éclaire.

Mais ce soir, c'était un peu particulier. Il s'était décidé à revoir Briséïs et à se manifester. Deux longues années avaient passé depuis la mort de Colton. Vingt-quatre mois, de silence... focalisés sur leurs métiers respectifs, ils s'étaient perdus de vue. Et Noah avait une capacité étonnante à procrastiner... à reporter les SMS, les appels, aux calendes grecques d'autant plus qu'il doutait qu'elle apprécie qu'il la recontacte. Mécaniquement, elle ne pourrait s'empêcher de repenser à son frère et ça n'aurait fait que rouvrir la blessure, la rendre triste... Il s'y refusait, surtout que depuis Boston, il ne pouvait pas être là pour lui changer les idées ou pour veiller à ce qu'elle ne se détruise pas. Valait-il mieux être lâche et se placer en retrait, se murer dans un silence assourdissant ? Il le pensait, c'était comme ça qu'il avait fait en partant de Wellington la première fois, pour Boston. Noah restait quelqu'un de discret et d'assez indépendant, très pudique. Le silence s'avérait être une seconde nature. Cette attitude n'avait donc rien d'étonnant ou d'extraordinaire. Il fonctionnait ainsi depuis sa tendre enfance. Et dans un sens, sans le vouloir de façon consciente, il cultivait l'attente. Les moments où il était là, présent, où il parlait, ça focalisait l'attention. On le considérait plus que s'il se montrait au quotidien. Il espérait que Briséïs ne s'effondre pas et que les vieilles blessures ne se réouvrent pas. La dernière chose qu'il désirait, c'était de lui faire du mal. Il fallait pourtant qu'il lui fasse part de son retour sur Island Bay. Ses parents étaient au courant et vu son talent de dessinateur, les maisons d'édition n'allait pas tarder à l'être, elles aussi. Il ne voulait pas que sa belle soeur apprenne cela par quelqu'un d'autre.

Après avoir vérifié les derniers détails esthétiques, Noah prit la bouteille de champagne qu'il avait prévu pour l'occasion, du Dom Pérignon, millésime 2004. Il voulait fêter son retour, leurs retrouvailles et pensait que cela permettrait d'instaurer une relation amicale et fraternelle, comme avant. Le pari était risqué, mais pour une fois que Williams franchissait le cap et faisait preuve d'un peu de confiance, il ne fallait pas cracher dessus. Il n'avait pas encore acheté de voiture, aussi avait-il appelé un taxi pour se faire conduire. En chemin, il s'arrêta au niveau d'un restaurant indien, très réputé et entra pour y récupérer la commande qu'il avait passé un peu plus tôt. Clairement, il n'avait pas fait les choses à moitié, parce qu'il ressortit avec deux sacs papiers bien remplis. Le chauffeur de taxi dut ouvrir la vitre pour éviter que l'odeur, agréable au demeurant, ne s'imprègne dans l'habitacle. Le trajet ne fut pas très long. Une dizaine de minutes au total. Pour occuper le temps, il se mit à dessiner sur l'étiquette du champagne. Sacrilège pour les collectionneurs, besoin de se détendre pour lui. L'esquisse représentait la vue de Boston qu'il avait depuis son ancien appartement. Quand Noah arriva devant le domicile, il parut plus nerveux. Il sortit, régla la course et avança. Le moment de vérité approchait. Pas question de faire machine arrière. Il sonna. Derrière la porte, il entendit du mouvement. Elle s'ouvrit sur Briséïs, qui visiblement ne s'attendait pas du tout à cette visite surprise. Noah afficha un sourire sincère. Dans sa poitrine, son coeur s'emballait.

- Hey !!! Surprise ! J'espère que je ne te dérange pas... je suis de retour dans le coin et j'ai pensé que ça serait bien de te dire bonjour. Je viens un peu à l'improviste, je sais... mais j'ai amené de quoi me faire pardonner, regarde !

Il lui montra les sacs remplis de mets de indiens et la bouteille de champagne. Maintenant, deux options, soit Briséïs avait déjà prévu quelque chose et tout tombait à l'eau. Soit elle l'invitait à entrer et là, commencerait pour Noah, l'exercice le plus difficile de sa vie : les retrouvailles. S'il était prêt à relever le défi, il ne pouvait s'empêcher de penser à s'enfuit et à prendre la solution de facilité.

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Belles retrouvailles

Noah & Briséïs

Cette période de l’année, c’était un peu le grand ménage de printemps pour toi. Tu rangeais un peu l’appartement et puis tu faisais le tri dans ta bibliothèque mais également tes affaires de boulot. Il y avait également des affaires de Colton que tu n’avais toujours pas ranger, tu n’avais pas forcément eu le courage de le faire mais cela faisait plus de deux ans maintenant et tu le devais. Tu te sentais un peu seule en ce moment alors, faire cela te permettait de ne pas y penser. Lorsque tu étais occupée alors, cela allait mais si tu étais seule il t’arrivait d’y penser malheureusement. C’était pour cela que tu te retrouvais dans les livres, que tu en lisais. C’était ta façon et le moyen de t’évader que tu avais trouvé, tout comme la musique parfois.

Tu n’avais rien prévu de ton weekend actuellement, hormis ranger mais peut être que tu appellerais une amie afin de sortir, pourquoi pas pour un repas. Encore faudrait-il qu’elles soient disponibles mais bon tu verrais cela après avoir terminé ton rangement. Tu entendis finalement sonner, après avoir rempli un carton. Tu fronçais les sourcils car tu en t’attendais pas vraiment à recevoir quelqu’un. Cela ne pouvait pas non plus être le facteur à cette heure mais qui sait. Tu te lavais rapidement les mains avant d’aller ouvrir la porte. Tu fus surprise en voyant Noah devant celle-ci. Cela te ramenait aussi aux pensées concernant ton époux. Tu étais surprise car tu ne l’avais pas vu depuis un moment. Depuis que tu avais enterré ton époux à vrai dire. Vous aviez échangé quelques messages mais c’était tout, pas grand-chose en fait. Il était parti et tu t’étais tout de même sentie un peu abandonnée, tu avais eu l’impression de perdre deux personnes. Ce n’était pas la même chose puisque Colton, tu ne le verrais plus jamais désormais mais tout de même, cela t’avait fait mal.

« Hey.. non mais je ne m’attendais pas à te voir depuis ce temps.. » Tu lui disais car c’était vrai et tu n’allais pas le cacher ou même mentir. Quelque part, tu lui en voulais un peu enfin, tu étais plutôt triste de cela. Tu te mordillais la lèvre car tu savais que cela avait quand même du être difficile pour lui à la perte de son frère mais vous en aviez jamais vraiment parler. « Mais bon.. si tu ramènes de quoi manger alors tu es pardonné.. entres. » Tu te poussais afin de le laisser entrer et fermais la porte derrière vous. Tu l’invitais dans le salon mais il était déjà venu chez toi et pas grand-chose avaient changées depuis. « Ne fais pas attention au bazar, je rangeais un peu l’appartement. » Tu lui expliquais donc les quelques cartons et le bazar qu’il pouvait y avoir. « Je peux te débarrasser ? » Tu demandais savoir si tu pouvais prendre sa veste ou même les sacs qu’il avait apporté.

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Belles retrouvailles

Noah & Briséïs

- Je sais... je n'ai pas vraiment donné de nouvelles... je suis désolé. C'était compliqué pour moi... puis le boulot...

Noah, gêné, passa une main dans ses cheveux, ruinant au passage sa "coiffure". Il sentait que Briséïs avait souffert, pas besoin d'être Mme Irma pour le deviner. Cependant, il fallait bien qu'à un moment ou à un autre, il prenne son courage à deux mains et qu'il tente de renouer le contact. Evidemment, l'idée n'était pas qu'il se pointe comme une fleur, en pensant que tout allait pouvoir reprendre comme avant. Il faudrait du temps pour ça. Il se sentait prêt à le reprendre, à tisser à nouveau cette amitié, cette complicité, comme autrefois. Ce soir, il avait voulu mettre un terme à des années de silence et mieux valait le faire maintenant que dans six mois... Il entra après y avoir été invité. Par politesse et surtout par respect, comme on le lui avait appris, il retira ses chaussures. Ce geste, chez les Williams, c'était sacré. Pas question de parcourir une maison avec les mêmes baskets que celles utilisées dans la rue. Cette "manie", devait sans doute rappeler à Briséïs bien des souvenirs. Il ne fit absolument pas attention au désordre, trop occupé à jeter des regards discrets à la jeune femme. Elle était toujours aussi belle. Il percevait un peu de fatigue sur son regard, il tâcherait de ne pas rester très longtemps, histoire de ne pas l'épuiser par sa présence. Il lui était reconnaissant de ne pas l'avoir envoyé paître ! A priori, elle semblait seule. Elle n'aurait pas refait sa vie ? Il s'en voulut de penser à cela d'entrée. Mais en même temps, difficile de l'en blâmer, après tout n'avait-il pas suffisamment attendu dans l'ombre, en refoulant ses sentiments ?

- Oh, c'est gentil. Je veux bien que tu prennes la bouteille de champagne pour la mettre au frais. Pour le reste, ne t'en fais pas, je me débrouille !

Il retira sa veste pour l'accrocher au porte-manteau, puis il posa les sacs en papier sur la table basse, dans le salon. Il trouvait ça plus convivial et moins formel, de manger sur le canapé, plutôt qu'autour du table. Comme Briséïs était sortie de son champ de vision pour mettre la bouteille dans le réfrigérateur, il jeta un coup d'oeil au bazar et reconnut l'écharpe de son frère. Cela repondait à deux questions : avait-elle fait le deuil ? Non. Et avait-elle refait sa vie ? Non plus... ou alors c'était creepy... De revoir l'écharpe, ça lui fit quelque chose dans l'estomac. Il ne put s'empêcher de repenser à Colton. Il prit le morceau de tissu dans ses mains avec une infinie précaution. Briséïs revint dans la pièce et il resta mutique, à caresser bêtement ce vêtement que l'on ne sortait que pour l'hiver. La voix un peu enrouée, à cause de l'émotion qu'il sentait monter, il dit :

- Je me rappelle de cette écharpe... tu la lui avais offerte pour Noël... il y tenait beaucoup... Une fois, il l'avait oubliée chez moi... il a fait demi-tour pour frapper à ma porte... je m'étais déjà rendormi...

Pas sûr qu'en parler soit vraiment une bonne idée. Quoique... ni elle ni lui n'avait vraiment réussir à surmonter la disparition de Colton. Et si Briséïs avait sorti les affaires, c'était pour les trier et leur donner une finalité. S'en débarasser et en garder quelques unes, peut-être ? En tout cas, cela voulait dire qu'elle avait forcément repensé à son mari. Il reposa l'écharpe aussi délicatement qu'il l'avait prise et humblement, il proposa :

- Si tu as besoin d'aide... moralement... ou physiquement, pour mettre de l'ordre, tu peux compter sur moi, d'accord ? Je ne te garantis pas de me retenir de chialer comme un gosse, mais je crois que faire ça, à deux, ça nous fera du bien... du moins si tu le veux, je ne veux pas te forcer.

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Belles retrouvailles

Noah & Briséïs

En effet, Noah n’avait pas donné de nouvelles depuis le décès de son frère. Du moins, vous aviez échangés quelques messages mais c’était tout, rien depuis. Il faisait sa vie de son côté quand toi tu tentais de faire la tienne et de survivre aussi. Oui, tu avais toujours mal même ces deux années après. Tu t’étais simplement habituée à cela, du moins, est-ce qu’on pouvait s’habituer ? Tu ne savais pas mais tu vivais en tout cas. Tu n’avais pas trop le choix. « Oui je comprends.. » Enfin tu crois bien oui, tu comprenais qu’il ait pas voulu te donner de nouvelles ou quoique ce soit car c’était douloureux pour lui aussi. Il avait perdu son frère après tout. Il avait apporté de quoi manger et boire pour se faire pardonner. Du moins, c’était aussi sûrement pour ne pas venir les mains vides. « Je vais la mettre au frais. » Tu lui disais donc avant de prendre la bouteille pour la mettre au réfrigérateur afin qu’elle refroidisse un peu. Après tout, c’était tout de même mieux de le boire frais avec le repas.

Tu revenais ensuite dans le salon où tu vis Noah, tenant l’écharpe de son frère. Tu ne pus t’empêcher de sentir les larmes te monter aux yeux alors que tu tentais de les refouler et ne pas pleurer. « Oui il l’aimait beaucoup mais.. je crois que ça ne sert à rien de garder éternellement ce qui ne sera plus que souvenirs maintenant. » C’était la vérité après tout, tu ne pouvais pas garder les affaires de ton époux encore des années chez toi. D’une part, cela ne te le ramènerait jamais et tu en avais parfaitement conscience. « Je faisais un peu de rangement de mes affaires et de celles de Colton car je ne l’avais pas encore fait. » Tu lui disais pour expliquer l’écharpe et les autres affaires qui se trouvaient dans le salon. Tu t’installais sur le canapé, laissant Noah en faire de même. Tu le laissais s’occuper des sacs et de la nourriture qu’il avait apporter. « Tu sais.. ça fait plus de deux ans alors je crois que c’est un peu trop tard pour ça. »

Tu lui disais cela un peu tristement car il n’avait pas été là alors que tu en aurais eu besoin. Oui, il revenait maintenant mais tu avais du faire ton deuil toute seule. « Alors.. j’ai appris à faire avec et à vivre sans les deux frères Williams.. » Ce n’était pas un reproche, mais une constatation et une période de ta vie qui avait été douloureuse. « Mais.. si tu veux m’aider à ranger et peut être récupérer des affaires qui peuvent t’intéresser alors.. tu es le bienvenue. » Bien sûr, tu comprendrais s’il ne voudrait pas car cela pouvait être douloureux pour lui.

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Noah & Briséïs

Finalement, les choses s'avéraient bien plus difficiles que ce qu'il s'était imaginé, avec son esprit de gosse. Il ne suffirait pas qu'il vienne la voir et qu'il lui apporte de quoi manger et de quoi boire pour que tout redevienne comme avant. Briséïs lui mit les points sur les "i" à sa façon, avec une certaine logique mais sans se montrer non plus très acerbe. Il comprit le message. Non, il n'avait pas été présent et ça avait cassé quelque chose. Il était bien assez honteux et gêné pour insister. Il se contenta de continuer à sortir la nourriture sur la table basse et à bien disposer les mets de sorte à les rendre facilement accessible. Ca sentait bon, dans le salon, de quoi ouvrir l'appétit, en dépit des vieux souvenirs, de la tristesse et puis des erreurs passées. C'était compliqué pour Noah, de lui donner des explications sensées et sincères. Comment lui expliquer que s'il était parti c'était parce qu'elle avait épousé Colton, qu'il était fou amoureux d'elle et que cela lui brisa le coeur ? Comment lui dire qu'à la mort de son frère, il n'avait pas réussi à rester, parce que tout était difficile, sa disparition et sa tristesse ? Il n'aimait pas le malheur, ça ne collait pas du tout avec sa personnalité. Dès que quelque chose de malheureux se produisait, il s'en allait en courant. Il hocha la tête, tête baissée sur la nourriture pour ne pas croiser son regard.

- Tu peux compter sur moi pour t'aider à ranger...

Il fallait passer à autre chose, maintenant, pour éviter que cet instant compliqué ne dure plus longtemps. Noah sortit les couverts en plastique et les assiettes glissées par le restaurant. Il en tendit une à Briséïs et posa les sauces au centre de la table. Chacun allait se servir. Il la laissa commencer, par galanterie. Dans la famille, on ne pouvait pas nier qu'ils étaient bien élevés. Leurs parents ne rataient jamais une occasion pour s'en vanter, d'ailleurs. Le jeune homme prit peu de nourriture. Il ne mangeait pas énormément de base, même si son estomac émettait des gargouillis insistants. Au pire, s'il avait encore faim, il y retournerait. Noah attendit d'avoir avalé sa première bouchée et il parla de son nouveau boulot :

- J'ai trouvé un travail dans une maison d'éditions de livres jeunesse. Ils ont beaucoup aimé mes dessins. J'ai commencé il y a quelques jours, ça m'a permis de pouvoir m'installer. J'ai trouvé un appartement dans West Bay. Au numéro 15, pour être exact. C'est sympa, pas trop grand, plutôt lumineux, le loyer est correct. Je t'inviterai si tu veux, une fois que j'aurais acheté quelques meubles et de la déco...

Il préférait commencer à parler de sa vie, pour meubler la conversation et surtout pour diriger l'attention de Briséïs sur autre chose que son absence ou Colton. Noah n'y connaissait pas rien en décoration. S'il y avait une faute de goût à faire, c'était forcément pour lui... Mais ça l'ennuyait de demander de l'aide à son hôte. Il ne voulait pas la déranger pour ça.

- J'ai un nouveau numéro de téléphone, au fait... il faudrait que je te le donne, au cas où, si tu en as besoin...

Il sortit son mobile et composa de tête le numéro de Briséïs, pour faire sonner le sien. A le voir faire, c'était flippant. Il possédait une mémoire photographique impressionnante, qui lui servait beaucoup dans son quotidien professionnel. Ca trahissait aussi quelque chose : malgré les deux années, il ne l'avait pas oubliée au point de connaitre son numéro par coeur. Ce qui au passage, ne lui donnait pas cette excuse pour son silence. Il avala une nouvelle bouchée de nourriture puis il demanda :

- Et toi ? Comment va le travail ?  

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Noah & Briséïs

Tu tentais de ne pas être désagréable avec Noah car tu ne voulais pas l’être après tout. Non, mais tu lui faisais tout de même comprendre que tu étais triste que les choses se soient passées ainsi entre tous les deux. Tu aurais aimé que cela se passe autrement mais tu ne pouvais pas changer le passé et lui non plus. Tout comme tu ne pouvais pas récupérer ton époux. Les deux ans qui s’étaient écoulées ne pourraient pas se rattrapées mais, vous pouviez faire en sorte que vous n’alliez pas perdre plus de temps que cela. Tu ne savais pas comment votre relation allait évoluée mais, prendre un repas ensemble c’était un bon début. Il te disait qu’il allait t’aider et tu hochais la tête, le remerciant. Finalement, Noah te parlait du boulot qu’il avait trouvé. Tu savais que vous partagiez le même amour pour les livres. « Oui, avec plaisir pour venir enfin tu n’es pas obligé mais prends le temps de t’installer. » Oui car bon, s’il venait d’arriver il avait probablement des choses à faire, en plus que de décorer et acheter des meubles. Cela lui prendrait sûrement du temps, surtout qu’il devrait jongler avec son travail. « Et félicitations pour ton boulot, j’espère que les choses se passeront bien. » Tu savais que cela pouvait être stressant que de commencer quelque part un nouvel emploi. C’était aussi une bonne chose, commencer à zéro, découvrir le tout et tout ça.

Il te donnait son numéro de portable, faisant sonner le tien. Tu attrapais celui-ci en enregistrant le numéro de téléphone. « Merci. » Tu lui disais avant de le poser de nouveau. Tu mangeais quelques bouchées du repas qu’il t’avait apporté et c’était délicieux d’ailleurs, cela réveillait ton appétit. « Le boulot ? Ca va très bien, et c’est même une des rares choses qui fonctionnent actuellement. » Tu lui disais avec un léger sourire. Au moins, c’était quelque chose que tu contrôlais et que tu ne risquais pas de perdre. Tu faisais cela depuis un petit moment maintenant et cela marchait plutôt bien. Bon, c’était parfois difficile mais le monde du livre fonctionnait toujours et heureusement. Bien que des personnes préféraient maintenant lire sur leur portable ou autre. « Tu as quelques récents dessins que tu as fait, avec toi ? » Tu lui demandais car tu t’intéressais à son travail et ses dessins.

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Noah & Briséïs

Noah préférait attendre avant d'inviter Briséïs chez lui. Pas à cause des meubles mais pour mettre un peu d'ordre et donner un peu de personnalité à son appartement. Pour le moment, il s'était contenté de faire le strict nécessaire, acheter un sommier, un matelas, des draps, un frigo. Sa cuisine était équipée pour le reste, ça faisait ça de moins à acheter. Ah et il avait mis aussi des veilleuses un peu partout, parce qu'il avait une phobie du noir, depuis qu'il était gosse. En grandissant, ça demeurait en lui ! Il n'avait pas prévu la coupure d'électricité... si jamais elle se produisait, ça serait Hiroshima, au moins ! Pour le reste de son émménagement, il verrait au fur et à mesure. Il n'était pas du tout matérialiste, plutôt l'inverse, même. Pourquoi s'acheter une armoire, par exemple, alors que ses affaires pouvaient rester dans sa valise ? Absurde ? Pas tant que ça quand on connaissait le bonhomme ! Il avait une méthode bien à lui pour s'y retrouver dans son fouillis. Il fut ravi d'apprendre que le travail de Briséïs se déroulait au mieux. Comme elle le disait, ça faisait au moins ça de positif. Elle méritait de réussir. Jamais Noah n'avait vu quelqu'un d'aussi déterminé et travailleur. Elle s'était fait un nom, dans un monde qui n'était pas franchement facile. La compétition entre les maisons d'édition donnait des frissons dans le dos. Entre les bassesses et les coups impitoyables, il fallait posséder des reins solides pour garder ses auteurs et pour en trouver de nouveaux.

Au départ, Noah avait pensé se rendre chez Briséïs pour lui proposer sa candidature. Mais ses parents lui avaient appris une chose ! On ne mélange pas l'amitié avec le travail. Et encore moins les sentiments. Tout ce mélange ne pouvait être que néfaste, pour l'un ou pour l'autre, voire même pour les deux. Du reste, le style de dessins de Williams était assez particulier, plutôt orienté pour les enfants, les jeunes. Il ne convenait pas à toutes les oeuvres. Et appartenir à une maison d'édition jeunesse, ça correspondait plus à son profil. Il afficha un air surpris quand elle demanda s'il avait emporté des dessins avec lui. Elle se rappelait sans doute qu'il ne sortait jamais sans un petit cahier ou un bloc-notes. Pourquoi est-ce qu'elle voulait regarder tout ça ? Il n'y avait rien d'exceptionnel dans ce qu'il réalisait. Il baissa la tête, gêné et bredouilla :

- Euh... oui... dans ma veste... attends, je vais chercher ça...

Il se leva et se dirigea vers le porte-manteaux. Il fouilla dans la poche intérieure de sa veste pour en sortir le précieux sésame, dont il n'y avait plus beaucoup de pages blanches. Il revint s'asseoir et volontairement, il ouvrit à une certaine page. Pourvu qu'elle ne décide pas de regarder avant, parce que les esquisses la représentaient. Le dessin qu'il lui mit sous les yeux, c'était son appartement de Boston au moment où il était parti. Ensuite, il y avait une scénette à l'aéroport, où des grands-parents serraient fort leur petite-fille dans les bras. Tout dans cette image suscitait l'émotion, car Noah savait les retranscrire avec une précision rare. Il continua à manger, le temps que Briséïs jette un oeil à tout ça, nerveux, le regard fuyant. Cette situation était très inconfortable pour lui. Il sentait que les compliments allaient arriver et ça l'angoissait. Alors avant qu'elle n'ait pu reprendre la parole, il leva les mains et lui dit :

- Non... non... ne dis rien... je n'aime pas ça... ce sont juste des dessins... ils n'ont rien d'exceptionnel. Je dessine comme d'autres cuisinent ou écrivent des livres... ça me plait de dessiner tout ça... mais tous pourraient tout aussi bien le faire... Il suffit d'avoir le coup de crayon... tu vois ?

Evidemment que tout le monde ne possédait pas son talent, mais Noah avait souffert enfant d'être considéré comme différent par sa personnalité atypique. Adulte, il refusait que ça soit encore le cas. Il avait besoin qu'on le considère comme banal, parce qu'il voulait l'être. Il jeta un oeil à la page sur laquelle Briséïs se trouvait. Le dessin représentait un homme en train de filmer Island Bay depuis l'avion. Dans l'écran du téléphone, la multitude de détails témoignait de l'incroyable mémoire photographique qu'il possédait.

- Oh je me rappelle de ça... ça a été le pire moment de ma vie, je pense... je ne m'attendais pas à ce qu'il filme quand je me suis tourné vers lui... Tout ce vide... ces petits points en contrebas... cette hauteur... bon sang...

Ce n'était un secret pour personne, il avait le vertige. Pour prendre l'avion, il était contraint de prendre un comprimé qui le faisait dormir les 3/4 du voyage. Mais une fois réveillé, il devait gérer sa claustrophobie et la peur du vide... et ça, c'était extrêmement compliqué. La seule façon d'y arriver, c'était de dessiner...

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Noah & Briséïs

Tu préférais ne pas continuer cette conversation sur des reproches et ce genre de choses. Cela ne servait à rien et puis tu ne lui reprochais pas vraiment. Tu lui expliquais simplement que cela t’avait blessée et que tu t’étais sentie seule. Malheureusement, vous ne pouviez rien changé à cela. Tu préférais donc parler d’autre chose, à savoir de votre boulot à tous les deux. Tu lui avais donc demandé s’il avait des dessins sur lui, que tu pourrais voir. Des choses qu’il avait dessiné. « Super alors. » Tu n’étais pas très calé en dessin et moins en jeunesse mais bon, si tu pouvais lui donner ton avis ou simplement regarder c’était déjà bien.

Il revenait à tes côtés et tu regardais donc, tournant les pages après avoir observé ceux-ci. Tu relevais la tête vers lui mais il n’aimait pas les compliments et avait pris les devants. « Je ne pense pas tu sais, ce n’est pas donné à tout le monde. Tout le monde ne peut pas dessiné ou écrire un livre mais d’accord.. je dirai juste qu’ils sont très réussi. » Tu lui disais, ne faisant ainsi pas trop de compliments. Néanmoins, tu ne pouvais pas ne rien dire après les avoir vu. Tu regardais celui dont il te parlait. « Je n’ai jamais pris l’avion enfin, hormis quand j’étais petite donc je ne me souviens plus. Mais je crois que j’aurais peur de tomber ou que quelque chose arrive. » Et ce n’était pas impossible quand on voyait les infos et tout ceci mais il ne fallait pas y penser. C’était pire. C’était nous angoisser pour rien. Tu continuais de manger ton plat et pris une gorgée de ta boisson. « Et sinon, qu’est-ce qui a changé dans ta vie ? Je veux dire.. en deux ans il s’est passé des choses en deux ans alors qu’est ce que tu as fait ces deux années ? » Oui, deux ans c’était beaucoup et quoiqu’on en dise il avait dû se passer des choses tout de même. Bon d’accord, dans ta vie pas vraiment mais peut être pas pour Noah après tout. « Est-ce que… tu as rencontré quelqu’un ? » Tu demandais afin de savoir s’il y avait quelqu’un dans sa vie.

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Noah & Briséïs

Voilà quelque chose de bien étrange. Entendre Briséïs formuler ces quelques compliments lui faisait bien plus plaisir qu'il ne l'aurait supposé. Comment était-elle parvenue à réussir cet exploit ? Il l'ignorait complètement, mais au delà de la gêne qu'il ressentait actuellement, elle lui instillait un sentiment de fierté, minime oui, néanmoins il était présent. Et ça, quand on connaissait le personnage, c'était particulièrement étonnant. Il lui fut reconnaissant de ne pas insister et de ne pas partir dans une liste d'éloges. Bien souvent, quand on regardait ses dessins, c'était ce qu'il se produisait. Ce qu'elle venait de dire s'avérait amplement suffisant. C'était concis, efficace, clair, raisonnable. Il serait le dernier à s'en plaindre. Le fait que la conversation parte sur le fameux dessin dans l'avion l'arrangeait beaucoup. Il préférait parler de cette situation plutôt que de "talent". Briséïs semblait partager la même peur du vide que lui. En tout cas, elle tombait d'accord sur le fait que l'être humain n'était pas fait pour aller dans les airs, sinon il aurait été muni de plumes et d'ailes ! A défier la gravité, l'espèce humaine semblait vouloir se libérer de chaines invisibles. Alors que franchement, sur terre, la liberté était aussi totale, il suffisait de l'admettre. Bon il n'allait pas la lancer sur ce débat là, mais cela le rassurait de savoir qu'elle n'était pas du tout tentée par l'avion ! Une bonne nouvelle, bien qu'il ne sache pas dire pourquoi il pensait ça ! Etait-ce parce qu'il se projetait en couple qui voyage avec elle ? Clairement oui, même si par pudeur pour son frère et pour elle, il n'osait pas l'admettre. La route serait longue avant qu'il ne fasse officiellement le premier pas. Ni courageux, ni téméraire, le garçon.

- C'est ça... tu ne contrôles rien... si l'avion tombe, tu n'as aucune maîtrise ! C'est angoissant...

La peur du vide complétait l'impressionnant panel de phobies diverses et variées qu'il cumulait. Quand il en parlait, on sentait le niveau de terreur qui grandissait en lui. Bien vite, Briséïs changea de sujet et là encore, ça l'arrangeait clairement. Il préférait que l'on parle d'autre chose que de ses peurs. Le hic, c'est qu'elle aborda l'évolution de sa vie. Voilà bien un truc qui ne lui inspirait rien ! Que s'était-il passé en deux ans ? Pas grand chose... et le peu de choses qui s'étaient produites, Noah n'y avait jamais repensé. Il se laissait porter depuis la mort de Colton. La disparition de son frère aîné avait été extrêmement brutale. Il avait perdu son phare, celui qui depuis qu'il était né, l'avait guidé et l'avait amené à être une homme. On se remet difficilement de la perte d'un être cher, quand bien même celui-ci vous rend jaloux car il a épousé la femme dont vous êtes amoureux. Quelquefois, Noah repensait à ces soirs où il ne fermait pas l'oeil, à cause de la crainte de devenir "oncle". Il n'aurait eu aucun problème avec le gamin, au contraire, le feeling passait extrêmement bien avec tous. Mais l'idée de savoir que son frère et Briséïs avaient fondé une famille, ça aurait piétiné son coeur. Une pensée égoïste, que l'on ne pouvait pas lui reprocher. Il était humain, et quand quelque chose lui brûlait l'âme, il ne pouvait qu'avoir un brin d'amertume. Cela dit, Williams n'avait rien du type aigri, il évacuait le négatif par du positif, toujours. Et il avait continué à vivre en dessinant, en s'occupant l'esprit à 100% avec ce qu'il aimait. La description de sa vie risquait de faire pathétique, mais il n'en avait pas honté, c'est la raison pour laquelle il fut assez bavard :

- A part le travail ? Eh bien... j'ai beaucoup dessiné, même si je sais que tu t'en doutes. J'ai fait d'autres choses aussi, plutôt sympas. Je me suis refait l'intégralité de tous les Disney dès que je rentrais du travail. J'ai beaucoup progressé au tir à l'arc, ça m'a aidé à me concentrer. J'arrive à toucher le centre de la cible quand elle est en mouvement ! Ca nécessite un peu d'échauffement, mais je me débrouille pas mal, d'après le professeur. Il doit me complimenter pour me faire plaisir, parce que dans notre groupe il y a des personnes beaucoup plus douées que moi. J'ai fini tous les livres de Stendahl, ce qui n'a pas été évident à lire, mais passionnant. Pour le reste, ma vie n'a pas énormément changé...

Et vint alors la question fatidique... sur ses amours. Et là, Noah était confronté au néant absolu de sa vie sentimentale... Il secoua négativement la tête.

- Il y avait Amanda... mais depuis que Colton est... parti... notre relation n'était plus bénéfique, ni pour elle, ni pour moi... Alors nous nous sommes séparés, peu de temps après l'enterrement... Et depuis, c'est... le vide. Ca n'a jamais été mon fort, les relations amoureuses...

Il haussa les épaules, et posa son regard sur Briséïs. Timidement, il questionna :

- Et toi ? Tu as rencontré quelqu'un ? Si c'est le cas, ça ne pose pas de problème... je veux dire, tu aurais le droit... Colton n'est plus là et tu es quelqu'un de bien, tu mérites d'être heureuse avec quelqu'un d'autre, si tu le souhaites...

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Belles retrouvailles

Noah & Briséïs

Tu n’avais jamais pris l’avion alors tu ne pouvais pas vraiment juger. Néanmoins, tu entendais déjà assez de choses comme cela pour avoir peur. Peut être que si tu prenais l’avion cela se passerait bien et tu n’aurais ainsi aucune crainte à avoir. Ce n’était pas comme si tu allais le prendre de si tôt de toute façon, à moins que tu ne partes à New York avec ton amie mais tu n’avais pas encore pris ta décision. Tu ne savais pas encore si tu allais accepté même si cela te tentait mais c’était la question financière qui te posait soucis. Tu savais que cela ne devait pas mais tu étais ainsi malheureusement. Tu ‘n’allais pas changer. « Oui c’est vrai quoique, on a pas toujours le contrôle en voiture non plus. » Non, on ne l’avait jamais dans la vie et on pouvait mourir en sortant dans la rue également et en traversant mais bon, c’était ainsi. Il ne fallait pas y penser.

Tu finissais par demander au jeune homme ce qu’il y avait de nouveau dans la vie de celui-ci. Il te racontait donc son boulot et puis ce qui s’était passé là où il était mais bon, en deux ans, il avait dû se passer des choses. Ceci dit, tu pensais à ta propre vie et tu te disais que finalement, pas tant que ça. « C’est déjà pas mal. » Tu lui disais avec un sourire. Tu te demandais aussi s’il avait fait sa vie avec quelqu’un, du moins, s’il était de retour en ville seul ou bien accompagné. Il ne t’avait rien dit. Tu hochais la tête quand il te parlait de cette Amanda. Apparemment, la mort de Colton n’avait pas aidé dans leur relation. « Je vois.. et tu es amoureux d’elle encore ? Je veux dire, peut être que cela peut s’arranger ? » Oui, tu étais toujours du genre à voir le positif des choses. Tu ne connaissais pas la jeune femme, ni même la relation qu’ils partageaient mais tu partais toujours du principe que cela pouvait s’arranger.

Finalement, Noah te retournait la question et tu passais une main dans la nuque, gênée. Ce n’était pas quelque chose dont tu pensais de ton côté. « C’est gentil mais.. non ce n’est pas le cas je.. après la mort de ton frère je n’ai fait que travailler. » Tu avouais un peu honteusement. « Je crois que je ne suis pas encore prête pour ça, de nouvelles rencontres. » Et tu ne sais pas trop quand tu le serais malheureusemet.

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Noah & Briséïs

S'il était tombé amoureux ? C'était triste à dire mais pas vraiment. En fait, il avait un peu subi cette relation, pour essayer d'être normal, de faire un peu comme tout le monde. Mais même au moment où tout allait bien avec Amanda, il devait admettre qu'il ne ressentait rien sur le plan amoureux. Le nier serait mentir et il ne pouvait le concevoir, pour lui-même en premier lieu. Briséïs n'avait jamais cessé d'occuper ses pensées et son esprits. Avec ses ex, il n'y avait aucune accélération de son coeur, aucun désir suscité, même par un baiser. Les efforts, il ne lésinait pas dessus, toujours à chercher à éprouver des choses, un tout petit peu. Mais rien n'avait été sincère. Et cela expliquait que rien ne durait vraiment. Amanda restait quand même un échec cuisant pour lui. Parce que cette femme là, il l'appréciait vraiment. Elle était drôle, elle savait prendre les devants là où lui fuyait comme un lâche. Et elle avait réussi à provoquer des sentiments, même s'ils n'étaient finalement qu'amicaux. Avant de partir de Boston, il avait appris qu'elle vivait désormais en couple avec un autre homme, un architecte, qui prendrait soin d'elle. Elle donnait quelques nouvelles de temps en temps, histoire de ne pas perdre la petite partie complice qu'il restait, mais maintenant, voilà qu'elle partait sur un autre chemin de vie. Sans lui. Dans le fond, Noah n'en voulait à personne. Le problème, il le savait, venait intégralement de lui. Comme Briséïs semblait vouloir l'aider à réparer les morceaux, il secoua négativement la tête de gauche à droite.

- Parfois, dans la vie, tu fais des choses parce que tu es persuadé que c'est l'idéal pour toi, que c'est vraiment la meilleure opportunité que tu puisses avoir. J'ai cru qu'Amanda et moi, ça pouvait fonctionner... mais je l'ai cru sans être convaincu. En réalité, je crois que je me suis menti à moi-même. Et je le regrette... Aujourd'hui, elle vit avec un autre, elle file le parfait amour. Je n'étais pas l'homme qu'il lui fallait, elle n'était pas la femme qu'il me fallait. C'est comme ça. Parfois, certaines personnes sont inatteignables...

Sa dernière phrase tombait comme un regret. Briséïs était l'amour de sa vie, mais aussi son drame ultime. Dans sa situation, sans optimisme, on finissait avec le coeur aigri et froid, incapable alors d'aimer. Fort heureusement, ça n'était pas son tempérament. Il aimait positiver et aller de l'avant, sans se morfondre. C'est pour ça, sans doute, qu'il fit un sourire à la jeune femme. Il ne désespérait pas qu'un jour, quelque chose naisse entre elle et lui. Bon, maintenant qu'il se trouvait face à elle, il se sentait terrifié. Oserait-il lui dire un jour ce qu'il ressentait ? L'envie ne lui manqua pas lorsqu'elle indiqua qu'elle n'était pas prête à faire de nouvelles rencontres. Qui parlait de voir de nouvelles personnes quand d'anciennes pourraient faire l'affaire ? Evoquer cela aurait été malvenu et clairement, Williams n'en possédait pas le courage. Il se contenta de faire une moue désolée et d'un geste naturel, il posa sa main sur son épaule. Il s'était sensiblement rapproché mais il ne prit pas conscience de leur proximité, en tout cas pas dans le mauvais sens du terme.

- Je comprends... je sais que c'est très dur... ça l'est pour moi et je n'étais pas marié à Colton, contrairement à toi... C'est... Ca finira par s'arranger pour toi, avec du temps... toujours... Colton était le meilleur frère de la terre. Il n'avait de cesse de me dire que je devais être heureux. Je sais qu'il voudrait la même chose pour toi, quel que soit ton choix... que tu restes seule ou non. Il me manque et c'est affreux de sentir ce vide dans ma vie... J'espère que de là où il est, il continue à être fier de moi...

Le regard de Noah se perdit dans le vide et il recula doucement. Cette proximité soudaine n'avait rien d'anormal pour lui, mais ça pouvait sembler troublant pour elle. Il continua, en changeant volontairement de sujet, sans savoir qu'il allait mettre les pieds dans le plat :

- Mardi prochain, je participe à une sortie scolaire organisée par une institutrice. Le thème c'est "Dessine-moi la nature". On va en forêt. J'ai accepté son invitation, parce qu'elle et moi, nous nous connaissons depuis des années. Je l'ai recroisé totalement par hasard dans le magasin bio près de chez moi. Elle cherchait des volontaires. Si ça te tente, on peut faire ça à deux ? Pour nous changer les idées ? Ca te ferait du bien de cotoyer des enfants, leur présence est un puissant remède. Qu'en dis-tu ?

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Noah & Briséïs

Tu n’étais pas très très avancée niveau relations amoureuses, loin de là. Tu n’avais pas connu grand monde à part ton mari et quelques relations mais rien de bien exceptionnel. De ce fait, tu n’étais pas la mieux placée pour donner des conseils à Noah mais tu pouvais l’écouter. Il avait été en couple avec une jeune femme mais cela n’avait pas fonctionné. Tu avais comme l’impression que le décès de Colton y était pour quelque chose mais tu pouvais le comprendre. La perte d’un être cher était toujours quelque chose de très difficile et tu savais quelque chose. Tu l’avais perdu et tu avais du mal à te remettre de cela. De toute façon, quand deux personnes s’aiment réellement et sont faites pour être ensembles alors, elles se retrouvent forcément à un moment donné. Apparemment, cette Amanda avait tourné la page et Noah ne semblait pas tant affecté que cela. « Oui je comprends, au moins vous ne vous êtes pas quittés en mauvais termes. Vous pouvez toujours être amis même si je suppose que c’est toujours particulier. » Tu n’avais jamais été amie ou même en contact avec tes ex mais tu supposais que c’était particulier. « Je suis sûre que tu finiras par trouver la bonne personne. » Il fallait attendre pour cela, ça finirait bien par lui tomber dessus. Il ne s’y attendrait sûrement pas d’ailleurs mais on ne choisit pas de qui on tombe amoureux. Ce serait beaucoup trop simple.

Noah t’avait également demandé si tu avais refait ta vie. Il ne te jugeait pas et ne t’en voudrais pas non plus, te disant que tu avais le droit. Oui, tu le savais mais tu n’étais pas prête pour cela et puis, tu n’avais rencontré personne. En même temps, tu ne t’en étais pas donné les moyens. Tu n’étais pas sortie non plus et avait pas spécialement cherché à rencontrer du monde. « Oui.. je sais que c’est ce qu’il voudrait mais je ne sais pas.. je n’en ressens pas le besoin pour le moment. Enfin, bien sûr des fois j’envie quelques couples mais, je n’aurais pas envie de perdre une autre personne. » Cela ne voulait rien dire, ce n’était pas parce que tu avais perdu Colton que ça se passerait toujours comme ça mais tu avais peur. Noah te proposait finalement une sortie et tu ressenti un pincement au cœur à ses mots. Parler d’enfant était difficile. « Je n’aurais jamais pu en avoir.. » Tu soufflais, en te rappelant de cela. Tu aimais pourtant les petits. « Je veux bien t’accompagner enfin.. si ça ne dérange personne. » Oui, sortir te ferait sûrement du bien, ce que tu ne faisais plus beaucoup. Tu ne voulais pas dérangé pour autant.

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Noah & Briséïs

Les enfants, il rêvait d’en avoir un jour et en fait peu lui importait la façon dont ce serait le cas. Il n’était pas ultra-attaché à perpétuer ses gênes. Bien sûr, quand on est un homme on aime bien savoir que l’enfant que l’on chérit, est de soi, qu’il a au moins 50% de ses chromosomes, le même sang. Qu’il laisse un héritage à la postérité. Bien sûr, Noah aimerait que ça se déroule ainsi mais il ne pouvait pas prédire l’avenir et en définitive rien ne le bloquait, psychologiquement, sur ça. Dans cette époque moderne, il existait des solutions pour devenir père. L’adoption, par exemple. L’aide à la fécondation. Ou encore le recours à une mère porteuse. Éthiquement chacune de ces solutions possédait ses avantages et ses inconvénients. Opter pour l’une d’elle ne serait pas un choix aisé et anodin, il en était pleinement conscient. Il ne put cacher sa surprise lorsque Briséïs lui confia qu’elle n’aurait jamais pu avoir d’enfant. Pas parce que ça ruinait ses projets mais plutôt parce que sans le vouloir, il avait mis le doigt sur un sujet sensible et visiblement douloureux.

- Je suis désolé... je ne savais pas...

Des excuses logiques, pour compenser sa maladresse. Noah comprenait mieux pourquoi ils n’avaient jamais eu de progéniture. Il ne cherchait pas à connaître les raisons, après tout, la décision ne lui appartenait pas du tout. Cela expliquait aussi la pudeur extrême avec laquelle Colton lui répondait quand il parlait de gosses. Briséïs n’avait pas l’air fermée à côtoyer des gamins et ça paraissait positif. Il enchaina, en essayant de positiver sur cette sortie à deux, originale.

- Bien sûr que tu es la bienvenue ! On va passer un bon moment ! Je suis sûr qu’ils sont gentils ! Tous les enfants le sont ! Et puis ça va nous sortir de notre quotidien, on aura l’esprit plus léger ! Je vais leur montrer mon nouveau tour ! Tu ne l’as pas vu encore ! Regarde !

Il sortit une pièce de sa poche et s’approcha de Briséïs. Il posa la pièce sur son genou la couvrit de sa main. Il mit son autre main sur son genou libre. Il agita ensuite ses jambes en marmonnant des mots savant et claqua rapidement ses jambes pour ponctuer la fin de sa formule magique. Il demanda alors à Briséïs de lui où se trouvait la pièce. Et alors qu’elle allait designer sa main, il l’interrompit :

- En fait, la pièce n’est plus dans mes mains. Elle est de nouveau dans ma poche...

Il leva les mains pour le lui démontrer puis fouilla dans sa poche pour en sortir la fameuse pièce. Il afficha un sourire enfantin.

- T’as vu ça ? Pas mal hein ? Je connais un autre tour aussi. Je peux faire disparaître ton poulet-curry ! Regarde bien ! Hocus ! Pocus ! Ratatata-tatam !

Il engouffra alors le fameux poulet. Alors qu’il avait la bouche pleine, il se mit à rire, bon enfant, et lui dit :

- Ch’t’ai eu !

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Noah & Briséïs

Non, parler de tes problèmes d’avoir des enfants, ce n’était pas vraiment ton sujet favori à vrai dire. Puis, tu pensais que peut être Colton en aurait parlé à son frère mais il est vrai que celui-ci ne vivait pas dans la même ville que vous. Il aurait pu lui en parler par le biais de téléphone mais bon, ce n’était pas le genre de sujet dont on évoquait ainsi. Quelque part, tu n’avais pas forcément envie que cela se sache par tout le monde donc tu lui étais reconnaissante qu’il en ait pas parlé. Vous n’aviez jamais pu avoir d’enfants mais tu te disais que c’était une bonne chose, dans le sens où tu aurais dû l’élever seul. Tu l’aurais aimé oui, mais l’élever seule aurait été difficile. « Ce n’est pas grave. » Tu lui disais avec un léger sourire. Tu ne lui en voulais pas pour ça, ce n’était pas marqué sur ton front.

Noah t’avait finalement proposé de te joindre à lui et d’autres personnes pour une petite sortie. Des enfants, pour être exact mais tu aimais les côtoyer malgré tout. Tu n’en étais pas devenue allergique. « Oui je m’en doute et tu fais de la magie maintenant ? » Tu lui disais avec un sourire. Il côtoyait peut être des enfants et du coup apprenait certaines choses pour les petits. Il semblait avoir un bon feeling avec eux. Cela ne t’étonnait pas vraiment. Tu le laissais donc te faire son petit tour et il est vrai que ça avait marché. « Il va falloir que tu m’apprennes tes secrets. » Bon bien sûr, un magicien n’apprenait pas ses tours et ses secrets, même s’il était pas vraiment magicien. Néanmoins, ce n’était plus difficile que de faire des tours, on avait des tutos un peu partout. « Ah c’est malin, tu me laisseras mourir de faim maintenant. » Tu lui disais en rigolant. De toute façon, tu avais presque terminé ton assiette et il ne restait plus grand-chose. « Tu as encore de la place pour le dessert ? » Tu lui demandais s’il avait faim en tout cas, sinon vous pourriez toujours mettre ceci au frais. « Tu as toujours mon numéro au fait, je veux dire.. pour s’organiser pour cette sortie ? » après tout, il aurait pu supprimer ton numéro ou, tu ne sais pas trop pourquoi tu pensais ainsi.

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Noah & Briséïs

Il rit de bon coeur à la réponse de Briséïs. Bien évidemment qu'il ne l'aurait jamais laissée mourir de faim ! Elle était bien trop précieuse à ses yeux ! Il se refusait à la laisser dans le besoin, plus maintenant. Il se sentait bien car elle souriait. Et après tout ce qu'elle avait vécu, il sentait bien que ça n'était pas du luxe. Un clignement d'yeux lui apprit également bien plus qu'un long discours. Elle n'était pas fermée à l'idée qu'ils parlent d'enfants et de ce que Noah aimait faire auprès d'eux. Instinctivement, il savait que le contact passerait bien avec les enfants. La plupart du temps, ces derniers n'attendaient rien d'autre que de la spontanéité. Le deuil n'effaçait pas l'esprit espiègle de la jeune femme. Et ça faisait du bien de constater que dans le fond, elle avait souffert mais pas au point de devenir amère, brisée. Noah se sentait d'autant mieux qu'il voyait leur complicité renaître. Ils repartaient sur de belles bases, sans faire table rase du passée et sans à-priori. En tout cas, il le ressentait comme ça. Evidemment, le spectre de Colton planait sur eux. Mais rien n'était voué à perdurer éternellement. Il espérait pouvoir lui faire tourner la page, accepter la réalité et avancer. Une partie de lui voulait que ça soit avec lui, et soyons franc, c'était un souhait très vif, car elle avait le don de faire battre son coeur comme un dératé ! Ce moment de proximité partagé, elle lui demanda s'il avait encore faim. Noah répondit :

- Non, ça va ! J'ai bien mangé, je vais m'arrêter là ! Je pense que tu peux garder les restes pour plus tard ! Attends, je vais débarasser !

Tout naturellement, il commença à rassembler ce qui était vide et ce qui contenait encore des choses. Noah n'était pas un gros mangeur mais il détestait le gaspillage. Quand il pensait au nombre de personnes qui crevaient de faim un peu partout à l'étranger, ça lui donnait la nausée. Le gaspillage alimentaire, ça le rendait dingue et c'était l'un des sujets pour lesquels il pouvait de mettre énergiquement en colère. Une fois que son premier tri fut fait, il se leva et se dirigea vers la cuisine pour y stocker les restes au frigo. Il jeta les déchets à la pouvelle, en veillant bien à faire le tri. Il revint dans le salon, avec la bouteille de champagne dans la main. Il voulait fêter leurs retrouvailles, parce que ça comptait beaucoup pour lui. Il reprit sa place et commença à retirer ce qui protégeait le bouchon. Spontanément, il répondit à sa question :

- Bien sûr ! C'est le premier numéro que j'ai rajouté dans mon nouveau téléphone portable ! Le plus important pour moi !

Il ne prit pas conscience de ce qu'il venait d'avouer. En fait, il était occupé par le bouchon de cette bouteille, qui, une fois libéré de sa sécurité en aluminium, sauta joyeusement dans les airs, en émettant un bruit d'explosion caractéristiques. Williams prit le verre de Briséïs pour le remplit. Il répéta l'opération avec le sien. Et il porta un toast :

- A toi ! Parce que tu m'as manqué et que tu es une femme exceptionnelle, avec beaucoup de courage et de dignité. Et parce que je t'admire. Tu ne m'as pas foutu à la porte, alors que tu aurais pu ! Pour l'absence, pour le silence... et même pour le poulet que je t'ai piqué d'ailleurs !

Il se mit à rire une nouvelle fois. Il voulait lui faire comprendre qu'elle comptait pour lui, comme amie, dans un premier temps. Parce qu'il voyait bien qu'elle n'avait pas réussi à avancer sur le plan sentimental. Il fallait éviter de brusquer les choses, et de toute façon, il ne voulait pas la gêner.

- Et puis on va trinquer aussi à mon nouveau boulot ! Tiens, d'ailleurs, j'ai entendu dire qu'il allait y avoir un salon du livre, sous peu. Je suppose que tu vas t'y rendre ? S'il te reste de la place, je veux bien t'accompagner, histoire de découvrir de nouveaux auteurs ! J'ai épuisé mon stock de bouquins là... et je me sens nu comme un ver ! J'ai besoin de me mettre de nouvelles choses sous les yeux ! Promis, je ne ferais pas de blague, ni de tour de magie. Je me ferais même discret ! Tu ne me remarqueras même pas ! S'il te plait... dis oui...

Il adopta des yeux de biche, avec un air de gamin plein d'amour et d'espoir. On remarquait souvent ce comportement similaire aux enfants, chez lui. En fait, ce n'était ni plus ni moins qu'une facette de sa personnalité. Noah n'aimait pas être adulte et ça se voyait.

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