All you need is beer. | Chance & Gabriel. [Beer festival]

t'étais véritablement un fan de bière. Tu pouvais en ingurgiter plusieurs litres sans finir malade comme un chien le lendemain; conséquence de tes dix ans d'engagement et de tes permissions passées à te bourrer à la bière avec tes coéquipiers. Pour toi, rien de plus convivial que de partager une bonne bière. Alors apprendre qu'un festival de la bière arrivait à Wellington, ça t'a rendu fou. T'aurais aimé le partager avec Medrick, ce moment. Vous passiez votre temps à vous faire découvrir des bières, toutes aux goûts les plus étranges les unes que les autres. T'as même entendu qu'en Pologne, ils avaient inventés une bière à la cyprine.* Forcément, tu te doutais que c'était pas le genre de bières que t'allais découvrir ici, mais de toutes manières, t'étais même pas sûr de vouloir y goûter, à celle-ci. C'était le genre de festival qui aurait plu à ton acolyte de l'armée, si seulement il était encore en vie. Tu pensais encore régulièrement à sa fiancée. Tu te demandais si elle vivait encore à Wellington, si elle avait refait sa vie... T'aurais pu la recontacter en revenant dans le coin, mais pour elle comme pour toi, ça n'aurait fait que raviver le brasier, juste endormit. Parce que quand tu pensais à lui, ça te serrait toujours là, dans la poitrine. Tu ne pouvais pas ne pas te rendre aux festivités au moins une fois, et te conaissant, tu risquais même d'y venir à plusieurs reprises. Mais c'était quelque chose que tu voulais partager entre hommes, avec un ami. T'avais besoin de retrouver cette proximité avec quelqu'un qui te comprenait, qui savait ce que tu avais vécu pendant dix ans et à qui tu n'avais rien besoin d'expliquer. T'avais besoin de passer un moment sans regretter le passé, tes erreurs et ce que tu avais raté. Alors même si tu avais pensé à partager ça avec Liam, tu t'étais ravisé. Et rien ne t'empêchais de lui proposer, plus tard dans le mois. En revanche, il y a bien une connaissance à qui tu as pensé presque immédiatement. Gabriel Jenkins, que tu présentais comme ton "parrain", quand tu parlais de lui à tes proches. Parrain dans l'association des anciens combattants. Il y était depuis un moment, par rapport à toi. Ancien pilote de chasse, il était à la retraite depuis quelques années. L'armée et les traumatismes, il conaissait. Il t'avait rapidement mit à l'aise dans l'association, comme s'il t'avait prit sous son aile dès ton arrivée. T'avais pas encore parlé de ce que t'avais vécu, c'était peut-être encore trop tôt. Tu devais t'habituer à ce que tout le monde écoute tout le monde, dans cette association. Le jour où tu parleras, tu devras t'attendre à ce qu'une partie de toi change complètement. Pour l'instant, tu oubliais. Les cauchemars, tu les minimisais. Les peurs dans la rue, tu les enfouissait. Apparemment, c'était commun. Fallait pas t'inquiéter. Mais toi, t'en avais marre; tu vivais pas normalement. Rien qu'ici au stade, tes yeux furetaient partout. Tu sursautais dès le moindre bruit un peu trop sourd. Les réflexes intuitifs, tu les avais pas oubliés. Mais ça, t'en discutais parfois avec Gabriel. Il comprenait ton malaise, en public, et c'est tout ce que tu lui demandais. Lui même, il cherchait pas à en savoir trop, et ça te permettait de souffler. Ce point commun avait permit votre rencontre, et une rencontre qui te faisait du bien.
A ta grande surprise, il avait accepté de venir au festival avec toi, et tu lui avais donné rendez-vous à l'intérieur du stade, près d'une sortie. Tu l'attendais depuis quelques courtes minutes quand tu as vu son visage se frayer un passage parmi la foule. « Je ne suis pas là depuis très longtemps ! Excuse moi si je t'ai inquiété, je me rend compte qu'on aurait dû se donner rendez-vous dans un endroit un peu moins fréquenté. Je pensais pas qu'il y aurait autant de monde, déjà. » tu lui dis en souriant, en guise de salutation. « Ça peut aller, j'ai encore du mal à m'habituer quand il y a foule comme aujourd'hui. J'ai des yeux partout, c'est fatiguant. » Mais maintenant que Gabriel était là, il allait t'aider à penser à autre chose qu'à de la surveillance pure et dure; il y avait déjà des militaires présents pour ça. Maintenant, c'était obligatoire durant les grands rassemblements. « Tu vas bien toi ? Tu as réussi à faire garder ta fille aujourd'hui? » tu savais qu'il était jeune papa célibataire, et tu devinais que bien souvent, la question de la garde se posait. Bienveillant comme il l'était avec toi, c'était normal de l'être aussi avec lui. Le brun t'annonce alors qu'il n'était pas grand connaisseur en matière de bière, et tu laisses échapper un rire taquin quand tu vois le regards de quelques puristes se poser sur lui. « T'inquiète, il est jamais trop tard pour commencer. On va déjà commencer par des bières soft, j'en ai vu un stand là-bas. T'as une préférence ? Blondes, brunes, blanches, ambrées ? » Tu ris une nouvelle fois en le voyant ouvrir grand les yeux et lui explique rapidement les différences entre toutes ces bières. Pour le coup, tu pensais pas en savoir autant, alors tu t'étonnais toi-même. Tu l'embarquais avec toi vers un stand alors que tu lui parlais, puis finis par sortir un billet de ta poche et le donner au vendeur qui tenait ce premier coin de dégustation. « Goûtes moi celle-ci, c'est une ambrée. Personnellement, c'est mes préférées quand je veux déguster. Pour une gueule de bois, je conseille la blanche. » tu rajoutes cette dernière phrases accompagnée d'un coup de coude pendant que tu porte le goulot de la bouteille à ta bouche, observant les alentours. Des scènes laissaient deviner que des artistes allaient se produire dans quelques heures, puisqu'ils étaient en train de tout installer. Le stade était bondé, mais bien indiqué. Et finalement t'improviser guide ne te déplaisait pas.


*: fait réel  

:

C'était uns des avantages à traîner avec des personnes qui ont vécu les mêmes choses que toi. Ils ne te posent pas de question. Se mettent à sa place plus facilement, puisqu'ils ont probablement vécu les mêmes choses, lors de leur réintégration à la vie normale. Tu lui fais rapidement comprendre que ça devrait aller et lui demande pour sa fille. T'acquiesce à sa réponse: après tout, c'est logique qu'elle soit chez sa mère. C'est probablement le premier choix, dès qu'un parent doit s'absenter. Enfin, t'y connait pas grand chose pour le coup, t'as pas de gosse et encore moins d'ex femme. Le sujet des bières arrive alors : c'est là que tu t'amuse. Clairement, t'es dans ton élément. Si l'eau devait disparaître et que tu devais choisir une boisson à boire toute ta vie, ce serait la bière. Evidemment, tu finirais avec un bide de femme enceinte et tu passerais tes jours à roter, m'enfin. Le goût, tout pour le goût ! Tu ris à sa réponse et lui explique les particularités des différentes bières. T'aurais dû lui demander s'il aimait la bière avant de l'emmener dans un festival dont elle est la reine. « Pardon, j'aurais dû mener l'enquête avant de te faire débarquer ici. Mais t'inquiète, on trouvera bien un bière qui te plaira ! » Tu l'emmène alors vers un premier stand qui, comme son nom l'indiquait, servait de l'ambrée. T'aimais beaucoup les ambrées, elles avaient ce goût caramélisé qui était très agréable en bouche. C'était comme une dégustation de vin, et toi qui n'était pas un très grand connaisseur de vin, te voilà en train de faire faire une dégustation de bière à un ami. Mais la bière avait ce côté communauté que le vin n'avait pas. Pour toi, un vin se dégustait tranquillement autours d'un dîner. Tu n'as jamais vu personne trinquer avec du vin ou sortir du vin lors d'un apéritif (hors vins blancs et rosés). La bière, elle, se sortait pour toute occasion. une après-midi aux températures estivales. Autours d'un pique-nique. A l'apéritif. Parfois pendant le repas, mais aussi après, devant un film, une émission ou un match. Dans les bars, l'ambiance autours de plusieurs pintes de bières était particulièrement géniale. Pas parce que vous les renversez partout, trois fois sur quatre. Mais parce que pour toi, il y avait quelque chose de festif avec la bière. Ça réunissait beaucoup de monde. C'est la boisson que tout le monde à commencé à boire vers l'âge de quinze, seize ans. Pas besoin d'un verre, uniquement d'une bouteille miniature et d'un décapsuleur. C'est bien mieux qu'un verre de champagne, pour toi. Après une gorgée savourée, Gabriel complimente le choix. Tu souri, de cette manière qui veut signifier que tu n'avais pas finit de lui en faire goûter. L'ajout qui fait ensuite à sa première remarque te fait rire. Tu avais bien comprit qu'il parlait de la ambrée, mais c'est vrai qu'avec la suggestion que tu lui avais faite il y a quelques secondes, il y avait de quoi se perdre. « J'en doute pas une seconde ! t'es le mieux placé de nous deux pour pouvoir le dire. Mais pour en avoir déjà été ivre à cause des blondes, je peux t'assurer de ne pas essayer si l'envie te prend un jour où tu n'aurais pas ta princesse. » tu rigole, sachant pertinemment qu'il ne tenterait pas. En tout cas, tu l'espérais vachement, parce que t'en a encore un très mauvais souvenir. T'avais dormi comme un loir, ça oui. Mais le mal de crâne le lendemain s'était ressenti jusqu'à ce que tu t'endormes le soir. T'étais un légume, ce jour là. Bon ou mauvais souvenir de tes permissions à l'armée ? T'avais du mal à choisir. Tu l'emmène vers d'autres stand, zieutant les bières qu'ils proposaient sans qu'une ne te plaise pour l'instant. Tu voulais faire goûter à Gabriel les meilleurs, et par la même occasion, goûter les meilleurs. Un festival, ça sert à ça ! « Du tout. C'est la première fois. Je ne suis pas souvent revenu à Wellington pendant mes permissions, et encore moins à cette periode de l'année... » ton regard s'assombrit en repensant à cette periode que tu aimerais effacer de ta mémoire. Celle ou tu avais décidé de ne plus revoir ta famille, pour une raison que tu as toujours du mal à nommer aujourd'hui. T'avais la trouille de rentrer, de ne pas pouvoir repartir. Parce que c'était dur, l'armée. Et les revoir en sachant que tu devais repartir, ça t'aurais bouffé plus tôt que ça ne l'a finalement fait. « J'imagine que toi non plus, ça ne t'était jamais arrivé ce festival de la bière ? T'as pas un frère ou un beau'f qui a essayé de t'emmener ? » c'est le genre de festivités auxquelles ont vient entre hommes, ici. Même si t'étais pas surprit d'y trouver des femmes quand même. C'est vrai que c'était peut-être un peu macho de penser qu'il n'y a que les hommes pour boire des bières. « Dans ma famille, ils sont pas très bières. Même mon petit frère. J'ai beau leur faire goûter, ils ont vraiment du mal avec le goût ! Il n'y a que les fruitées qu'ils apprécient, tu dois connaître. C'est des bières aux fruits rouges. C'est pas mauvais, mais y'a clairement mieux. » Vous vous arrêtez, ayant trouvé un nouveau stand pour goûter quelques spécialités artisanales. « Tu préfères quelle type de boissons du coup, toi ? » Gabriel devait bien avoir une préférence, qu'elle soit alcoolisée ou non. Tu pouvais comprendre vu les responsabilités qu'il avait, avec sa fille.

Le vétéran était comme un mentor pour toi, dans ce monde que tu avais quitté pendant dix ans, alors que tu te ferais à ta vie d’adulte. Il y avait des choses que tu ne savais pas faire, dont tu avais besoin pour mieux comprendre dans quoi tu t'embarquais. L’association, en plus de vous permettre de vous exprimer et de partager vos expériences, parfois traumatisantes, avec d’autres personnes, d’autres anciens militaires, vous permettait de rencontrer ceux qui ont finit par réussir à se réinsérer dans cette vie, différente de la vie militaire. Le brun était rapidement venu vers toi, s’était montré amical et à l’écoute. Tu t’étais senti à l’aise, très vite, mais tu t’étais rendu compte qu’hormis l’association et son passé militaire (vague), tu ne connaissais pas grand-chose de lui. Alors passer cette soirée avec lui, découvrir le festival, tu pensais que c’était une bonne idée. Déjà parce que tu n’aimais pas les relations trop carrées, trop administratives. T’avais besoin de ce côté pote, festif, qui se rajoutait à la confiance que tu apportais à ceux de ton entourage. Sinon, y’avait quelque chose qui ne se faisait pas. Une connexion, impossible. Pas aboutie. T’avais eu le pressentiment qu’avec Gabriel, c’était possible. T’es rassuré quand il te dit ne pas être si perdu que ça, et qu’il dormira moins bête cette nuit. Tu ris avec lui alors qu’il blague sur sa possibilité d’ouvrir sa fabrique de bière. Pour le coup, ça, ça ne t’avait jamais attiré. « Je préfère largement la déguster que la faire. T’imagines ? C’est comme ceux qui taffent dans les fast-foods, ils connaissent toute la chaîne, tous les secrets, parfois pas très glorieux. Alors au bout d’un moment, ça donne plus envie d’en bouffer. J’pense que ça me ferait pareil avec la bière, ça serait dommage, quand même. » non, t’aimais définitivement trop la bière pour prendre le risque de t’en dégouter un jour. « Mais si tu te lances là-dedans, appelles moi. J’serais ton gouteur, mon palais il a développé de sacrés sens, à force. » tu ironise. Tu te doutais bien que la remarque de ton partenaire était une blague, mais autant le suivre jusqu’au bout de sa blague ! Puis, devenir goûteur, ça devait être pas mal. Payer à se bourrer la tronche. Bon, t’avais bien vu quelques reportages sur les goûteurs de vins : en fait, ils recrachent tout pour pas finir ivres, justement. ça devait être pareil avec la bière. Quel dommage, quand même, de gâcher. C’est là que tu conseilles à Gabriel de ne jamais se murger à la blonde, car ni son estomac, ni son cerveau le remercieraient le lendemain. Tu remarques le sourire discret sur les lèvres de ton nouvel ami sans pour autant t’interroger plus que ça. Mais c’était le genre de sourire qui pensait au passé. Vous discutez de choses et d’autres, et Gabriel s’interroge sur l’histoire entre le Beer Festival et toi. Non, t’étais jamais venu, pourtant, tu savais que c’était un festival récurrent ici. Seulement, quand tu vivais à Island Bay, t’étais encore trop jeune pour boire de l’alcool légalement, et t’es parti avant de pouvoir en profiter. Il te fait part de son plaisir d’être ici avec toi, et tu approches ta bouteille de la sienne, pour trinquer. « C’est un plaisir aussi. Peut-être le premier d’une longue série ? » tu ris avec lui en l’accompagnant avant qu’il ne rajoute quelques paroles sur ce qu’il a pu vivre, à son retour. Tu l’écoutes en acquiesçant, sincèrement intéressé par ce qu’il te disait. Tu te retrouvais même un peu dans ses paroles. Un intru dans sa propre maison, oui, c’était aussi ton cas. D’ailleurs toi, on t'avait foutu dehors. Bon, pas vraiment, mais on t’avait conseillé gentiment que tu devrais trouver un autre logement. Mais après tout, t’avais bien compris la décision de tes parents. T’étais parti pendant dix ans, sans nouvelles. Ils avaient perdu leur fils, et avaient besoin de temps, pour le retrouver. « Ça devait être dur, ce temps de réadaptation. Autant pour toi que pour tes proches. Moi j’ai dû partir, et ma sœur a mis plusieurs mois avant d’accepter de me revoir… et voilà qu’à peine on se retrouve, elle est part en France, dans notre famille, pour deux mois. » On sentait la déception dans ta voix. Forcément, t’avais passé ces derniers mois à attendre que ta sœur te réponde, qu’elle accepte que tu reviennes, et elle avait quitté la ville juste après que vous vous soyez revus. Après tout, c’est un peu ce que tu lui avais fait aussi pendant dix ans. Elle a attendu dix ans que tu répondes à ses dernières lettres. Dix ans que tu reviennes, ou ne serait-ce que tu les appelle, juste. Alors au fond, tu pouvais bien attendre quelques mois. Finalement, tu avais plus de choses en commun avec le vétéran que tu ne l’aurais pensé au premier abord. Et ça te faisait du bien, d’en discuter avec lui. Vous repassez sur les bières, et tu parles des bières aux fruits rouges. Tu ris une fois encore à sa réponse alors qu’il évoque sa fille. « C’est dingue comme les adultes et les enfants peuvent se ressembler, n’empêche ! Mais oui, ça doit être pour ça. Moi je les trouve écœurantes, après chacun ses gouts. Sinon pour ta fille, tu peux aussi lui en mettre histoire qu’elle aime et réduire petit à petit le sucre. Ça peut marcher comme un appât, à force, elle va s’habituer ? » t’avais aucune traître idée de comment élever un gosse, alors forcément, tout semblait facile à dire, mais jamais autant à faire. Alors que vous étiez bien partis pour parler goûts, tu lui demande quel était son type de boisson à lui, vu qu’il n’était pas un grand fan de bière. Toi, t’alternais entre la bière et le whisky. La bière, c’était pour les débuts de soirée, les apéros, les pique-niques, le goûter. Parfois pour te rafraichir, quand les températures étaient plutôt chaudes. Le whisky ? C’était dans les bars, boîtes de nuits et autre, pour fêter quelque chose. Ça te montait plus vite à la tête, puisque tu n’en buvais pas tant que ça, alors c’était mieux. L’ancien pilote te répond qu’il était plutôt soda, et tu ris un coup en mettant ta main sur son épaule. « Tu m’épates. Je suis sérieux. Tous mes potes à l’armée se détendaient avec quelques verres, enfin, beaucoup ; moi-même c’est comme ça que j’ai commencé. » t’étais redevenu sérieux, parce que le sujet l’était. Pour le coup, tu faisais attention à une possible addiction que tu pouvais avoir. T’avais pas envie de te retrouver dans un cercle vicieux comme ça. « Je trouve ça cool que tu ais réussis à tenir là-dessus, je veux dire, pas trop en abuser. Aujourd’hui on me demande ce que je préfère boire, ce n’est pas du soft que je réponds… » tu hausses les épaules. D’un certain côté, ça voulait dire beaucoup ce genre de réponse. Parfois, ça pouvait même être alarmant. Mais t’arrivais à te passer de ce genre de boisson quelques jours, alors c’est que t’en était pas accroc. Disons que c’était ton petit plaisir à toi. Vous vous étiez rapprochés d’un nouveau stand et Gabriel prit les devant pour regarder la carte. Il te proposa la bière « epic » dont le nom te disait vaguement quelque chose. « Allez, goûtons là. En plus, c’est toi qui l’as choisie. Moi j’te dis, c’est un signe. Le début d’une grande histoire d’amour avec la brasserie, peut-être ? » tu ris et récupères rapidement deux bouteilles au stand, en laissant un billet. Tu tends la sienne à Gabriel et trinque avec lui avant que vous ne vous éloigniez un peu pour déguster cette nouvelle trouvaille. Une bonne gorgée, y’avait que ça de mieux pour savourer une bière. Le goût restait sur le palais mais tu regoûtes immédiatement après. T’hoches la tête, approuvant plutôt le choix de ton partenaire pour ce soir « Elle est vraiment pas mal, attends ! » tu lances avant de regarder l’étiquette de la bouteille. « Oh bah, tu m’étonnes qu’elle soit bonne. Elle fait parti des meilleures bières du pays. T’as l’œil mon Gabe. »

Le principe même de se réunir dans un festival autours d'une seule et même chose, c'était d'en parler. Et c'est parfaitement ce que vous faisiez avec Gabriel. Parler bière, ou plus largement boisson. Tu t'y connaissais un minimum puisque c'était la boisson que tu consommais le plus. Quand Gabriel parle de se lancer dans la brasserie, ça te fait rire. Tu peux pas t'empêcher de t'imaginer toi-même dans ce domaine. T'es presque sûr que tu finirais dégouté par la boisson, à force de la sentir tous les jours. En tout cas, tu ne l'aimerais pas autant que maintenant, en ne travaillant pas dessus. Dans tous les cas, si ton partenaire de ce soir s'y lançait, forcément, tu le soutiendrais. Mais tout ça n'était qu'un peu d'humour; il n'y avait que très peu de chances que Gabriel se lance là dedans, si ce n'était pas aucune. Tu ris a sa remarque, et peut-être qu'il n'avait pas tord, ton palais n'allait peut-être pas apprécier. Mais pour le coup, il avait déjà dû gouter bien pire. Il rentre tout de même dans ton jeu ajoutant qu'il pensera à toi, si l'idée germe un peu plus. Il semblait apprécier lui aussi ta compagnie puisqu'il trinque avec toi quand tu vous souhaite peut-être d'autres festivals comme celui-ci. Dans ce cas, tu feras tes recherches pour d'autres soirées de ce style qui pourraient vous intéresser tous les deux. Puis vient le sujet de la réadaptation à la vie normal, une étape compliquée pour la plupart des militaires qui avaient passé de longues années à servir pour le pays. Et encore plus pour ceux qui n'ont pas retrouvés une civilisation normale pendant longtemps. C'était ton cas, dix ans sans rentrer à Island Bay, c'était long. Même pendant tes permissions. Le plus près, c'était Wellington et pour annoncer une mauvaise nouvelle à la fiancée de ton frère d'armes. Depuis, t'avais jamais vraiment remis les pieds au pays. T'avais tout fait pour l'éviter. T'acquiesce à ce que te dis Gabriel. Il avait vécu ça, lui aussi. Et il y a plus longtemps que toi, depuis, il avait eu l'habitude, même si comme il te le disais, parfois, certaines vices de l'armée refaisaient surface. « Si c'était simple, l'association n'aurait même pas lieu d'exister. » tu rajoutes à ses paroles, accompagné d'un rire jaune. T'aurais aimé que ce soit plus simple, que tes erreurs soient vite oubliées. Mais la vie était connue pour ne pas être simple, et tu devais faire avec. « On verra quand elle rentrera, elle a besoin de temps, je la comprend. J'ai pas été le meilleur des frères. » tu hausses les épaules. Evidemment t'étais déçu et triste. Mais t'allais jamais en vouloir à Loreleï de prendre ses distances comme toi tu l'avais fais. Le sujet des bières revient, notamment celui des bières plus sucrées. Pour le coup, c'était pas ce dont tu raffolais. Alors vous en venez à une comparaison entre les adultes et les enfants qui réussissaient, à leur échelle, à manger lorsque c'était un peu plus sucré. Et puis, tu lui proposes de mettre du sucre dans la nourriture de sa fille, pour lui faire aimer et petit à petit de le réduire, mais il t'explique qu'ils pouvaient développer des carries plus facilement, avec leurs petites dents. « Aie, oui. Bon, disons que son palais va s'affiner, comme toi avec la bière ! Elle finira bien par aimer plus de choses en grandissant. » tu lui fais un clin d'œil. Tu connaissais rien sur les gosses, et heureusement que t'avais personne avec qui partager ta vie pour l'instant, ça voulait dire pas d'enfant à l'horizon pour ton futur proche. Tu te surprend à espérer ne jamais recevoir d'appel d'une nana prétendant t'avoir connu il y a quelques années, pendant une de tes permission, et demandant que tu reconnaisse un gosse de trois ans. Mais bon, normalement, t'avais pris tes précautions. Tu le félicite quant à sa façon d'avoir pu résister à l'alcool. T'en connaissais pas beaucoup qui s'en étaient sortis sans; alors quand il t'explique la raison, tu t'arrêtes quelques instants de marcher. Non, tu n'étais pas au courant de ce qui lui était arrivé; ou peut-être que t'en avais entendu parler sans jamais te douter que c'était de Gabriel dont il était question. Tu l'écoutes te raconter son histoire en silence, respectueusement. Il réussit à s'en sortir, à se relever après un accident pareil. Aujourd'hui, ça ne se voyait pas du tout. ça ne s'entendait pas non plus. Tu esquisses un sourire quand il évoque la soupe de l'hopital. « Pendant un an ? J'leur aurait demandé de mixer mon Mc Do, j'aurais préféré !  » tu ris. Gabriel avait réussit à garder un ton d'humour malgré des souvenirs pas très heureux qui devaient refaire surface. Tu l'admirais pour ça aussi. De ton côté, c'était encore trop récent pour pouvoir en parler sans que tes idées ne deviennent noires quelques instants. « T'as eu un coup de bol, c'est clair. Et heureusement. » tu rajoutes finalement. « Je peux comprendre pour les médocs. » tu fais une moue attestant que toi aussi, t'avais connu. Sans pour autant en rajouter, ce n'était pas de toi dont on parlait. Pour le coup, ton compagnon de soirée n'avait pas la tête à avoir perdu face à l'addiction aux médocs, alors là dessus aussi, il s'en était bien sorti. Tu lui lâches une tape dans le dos, compatissant. C'est là que vous découvrez un nouveau stand aux bières alléchantes que Gabriel s'empresse de vous proposer de goûter. Tu ris avec lui, l'alcool commençant à te monter au nez avec les quelques bières que vous vous étiez enfilés en peu de temps. L'euphorie de la soirée et la température ayant leur part de responsabilités aussi. Mais t'étais quelqu'un pour qui l'alcool montait vite, t'étais dans cet état de joie pendant très longtemps avant d'en être malade : tu pouvais encore bien profiter de la soirée avant de décider de t'arrêter quand tu sentiras que ça sera la dernière. « On s'en fout que ce soit trop facile pour le coup. Je repasserais ici pour m'en prendre une deuxième plus tard dans la soirée je pense. » tu souris tout en continuant de boire au goulot de ta bouteille en main. De fil en aiguilles, les confidences de ton ami te reviennent en tête. « ça devait être dur. Un an à l'hosto, à te demander si tu pourrais avoir à nouveau une vie normal... » Les dégâts que l'armée faisaient étaient parfois irréversibles. « J'ai perdu un ami il y a quelques années, j'me suis comme senti mourir avec lui. » Tu prends une nouvelle gorgée, comme si tu voulais enlever le goût amer de la perte qui stagnait depuis cinq ans. Au loin, t'entends la musique commencer. Tu te tournes vers le brun pour lui proposer de se diriger vers les scènes. « ça te tente ? Pas trop près non plus, ça serait con qu'on se retrouve embarqués dans un pogo. J'suis pas le seul à être mûr dans le coin, j'ai l'impression. »

Ce moment avec Gabriel était plutôt agréable. ça faisait un moment que tu n'étais pas sorti comme ça, avec un ami. En général, tu sortais seul et tu rencontrais du monde sur place. Plutôt sociable, t'avais pas peur de rencontrer du monde, ni même de parler avec des inconnus. En soirée, tes angoisses disparaissaient avec un peu d'alcool et une plante pas tout à fait légale dans une feuille à rouler. Mais ce soir avec Gabriel, t'avais juste eu besoin d'une bière et de bonne compagnie. Ce n'était pas un drame avec lui d'avoir des angoisses. Il comprenait, au moins. C'était plus difficile d'expliquer ça à des fils à papa bourrés et complètement euphoriques. Tu riais bien avec lui, à parler de plusieurs sujets différents, en passant de l'armée à vos familles respectives pour la manière de faire apprécier les aliments à sa fille. Tu aimais bien sa philosophie, cette manière qu'il avait de prendre les choses du bon côté. T'aimerais pouvoir faire comme lui. Finalement, peut-être que ça finira par arriver. Il en vient quand même à te parler d'une partie plus sombre et moins heureuse de sa vie, son accident et son année à l'hopital. T'étais plutôt surprit, toi qui n'était arrivé qu'il y a quelques semaines dans l'association. Mais Gabriel était un ancien du groupe de parole, alors les plus vieux étaient au courant. Il n'y avait que les nouveaux comme toi qui débarquaient tout juste et n'avaient aucune idée des histoires personnelles des uns et des autres. D'ailleurs, tu n'avais toujours pas évoqué la tienne, te faisant discrets lorsqu'il était question de parler. Tu préférais laisser la parole à d'autres qui en avaient plus besoin. Toi, t'étais pas prêt. « J'en doutes pas, j'aurais pas tenu moi. » tu dis en ouvrant grand les yeux quand il t'annonce qu'il soudoyais sa famille pour manger autre chose que de la purée en boîte. Une tape dans le dos, signe de compassion malgré tout, accompagne tes paroles. Même si votre conversation était sur le ton de l'humour, le sujet n'en était pas moins important. ça avait dû être une periode compliquée pour Gabriel. Tu comprenais cependant qu'il te parlait avec cette expérience de vétéran. Et il ne manque pas de te le rappeler. Cette periode était bien plus sombre pour lui qu'il ne le raconte, il ne le vit plus de la même manière. Alors oui, le temps passe. Et ce qui était un mauvais souvenir finit par devenir une expérience. Heureuse ou malheureuse, là n'est pas la question. Mais une expérience, dont on peut rire dans le respect. Alors tu acquiesces pendant que vous arrivez près d'un nouveau stand, une nouvelle bière que Gabriel te propose de goûter. Et elle n'est pas désagréable, loin de là. Alors pendant que tu annonces que tu reviendras en chercher une dans la soirée, lui te dit qu'il retiendra le nom. Tu souris, dévoilant de belles rangées de dents. « Ah, j'aime entendre ça ! Monsieur Jenkins à trouvé la bière qu'il appréciera, c'est le début d'une nouvelle vie. » tu le taquine un peu. T'étais plutôt content, parce qu'il avait pu découvrir quelque chose qu'il n'appréciait pas forcément jusqu'ici. C'est toi qui lui a permit, et t'en étais fier. Quant à lui, il t'aidait, sûrement sans s'en rendre compte, à penser à ton futur. Ton état actuel n'était sûrement qu'éphémère, l'ancien Chance reviendra sûrement avec quelques changements. Et ça, ça te mettait du baume au cœur. Tu revient sur son années d'hospitalisation. Toi, tu n'avais fais que quelques semaines maximum pour te remettre, tu repartais bien vite, détestant l'odeur de l'hopital militaire. Alors un an, t'avais du mal à imaginer. « Je comprend. Pour beaucoup, c'est aussi un métier de passion. Un besoin. C'était mon cas. Quand on te dit que c'est finit, tu fais une crois sur toutes les années de ta vie où tu as donné ton corps pour quelque chose. C'est dur, surtout si on a abandonné des gens à cause de ça... Tu te dis que c'était en vain, tu te retrouves à avoir fait des erreurs pour... Faire juste des erreurs. » Il n'y avait rien derrière. Aucune reconnaissance. Juste des reproches. C'est après ça et une nouvelle gorgée de bière que tu te lance à lui raconter un extrait de ce que tu as vécu. Tu t'en rend à peine compte, t'as juste envie de lui raconter. Parce que c'est ce jour là que quelque chose s'est brisé en toi, avant même que tu ne doive rentrer de force. Presque instantanément, tu sors ton paquet de clope de ta poche et pendant que tu lui en parle, tu allumes une clope. « Ouaip, c'était mon binôme. Il m'a en partie formé, aussi. » tu hausses les épaules en inspirant la fumée pour la recracher dans un sens qui ne gênerait pas Gabriel. C'est là que tu lui proposes de vous rapprocher un peu du concert qui commençait, blaguant sur la distance et que tu ne voulais pas te retrouver emporté dans une de ses danse de fou où tout le monde se rentrait dedans. Le sentiment était partagé puisque Gabriel n'avait pas non plus l'air d'apprécier. Alors autant profiter du concert à l'écart, tout en continuant de pouvoir discuter. Vous vous retrouvez assez près d'un nouveau stand, un muret pour pouvoir vous asseoir, et une belle vu sur la foule qui s'amassait devant la scène. Le spectacle pouvait commencer. « Tiens, j'ai une blague. » tu lances en voyant une barraque à frite. « Comment appele-t'on une frite enceinte ? » Tu souris, les joues rosies par l'alcool avant de poursuivre. « Une pomme de terre sautée.» tu te retiens de rire, pouffant un peu en voyant la réaction de Gabriel, pas franchement convaincu.

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