report of the evening (lou)

La soirée de la veille avait bien commencée, très bien même, mais elle s'est terminée de manière assez étrange. En effet, suite à un rapprochement entre Natalie et moi, la jeune femme m'a avoué la raison de son arrivée en ville et j'ai quelque peu mal réagit. Elle n’a tué personne, c’est vrai, mais a tout de même été accusée d’agression sexuelle. Bien souvent en ce moment, les accusés sont plus défendus que les accusateurs et je trouve cela scandaleux. Alors pour qui est-ce que je passerais si j’acceptais cette révélation sans broncher, en faisant comme si elle n’avait rien dit. Et puis, je ne la connais pas vraiment en réalité. Serait-elle capable de faire cela ? À première vue, je dirais que non. Mais les surprises ne sont jamais loin. Prise de court par cette révélation, je suis rentrée chez moi juste après. N'ayant pas à récupérer Elliot directement après, j'ai passé le reste de la soirée seule, la nuit aussi. C'est finalement assez rare, alors j'en ai profité un peu pour prendre soin de moi avant d'aller retrouver les bras de Morphée.

Mon réveil sonne, j'aurais peut-être dû l'éteindre hier. Je n'ai rien de prévu, alors autant prendre mon temps. Même s'il faut que j'aille récupérer mon fils et que libérer ma sœur assez tôt sera certainement mieux, cela lui permettra de pouvoir faire d'autres choses. Après un petit-déjeuner gourmand, je file dans la salle de bains, afin de me laver et de me préparer dans la foulée. Avant de partir, je regarde une dernière fois ma montre. Dix heures et demi, c'est plutôt pas mal comme horaire. Ce n'est ni trop tard, ni trop tôt. Et puis, connaissant Elliot, je sais très bien qu'il n'a pas laissé l'occasion à Lou de faire une grasse matinée. Je traverse la ville en voiture et arrive à trouver une place non loin de l'appartement de ma sœur, qu'elle partage avec l'un de ses amis. Je monte à pied jusqu'au logement et je sonne, attendant alors qu'on vienne m'ouvrir. C'est ma sœur qui le fait, mais c'est mon fils qui me court dans les bras. Je l'attrape et le serre alors contre moi. « Coucou mon grand ! » Je me relève, le petit garçon dans les bras. « Ça va, tata n'a pas été trop méchante avec toi ? » Je souris, amusée, alors qu'Elliot commence déjà à me raconter en détails ce qu'il a fait de sa soirée. Après plusieurs minutes d'explications, je le repose et le laisse aller s'occuper un peu plus loin, nous laissant toutes les deux dans l'entrée. « La question vaut pour toi aussi, il n'a pas fait trop de bêtises ? »

Pouvoir retrouver mon fils, ça me fait du bien. Ce n’était qu’une nuit et pourtant, j’ai l’impression que ça fait une éternité. Nous n’avons pas vraiment l’habitude d’être séparés et ça, depuis sa naissance. Il passe des nuits chez des membres de ma famille, de temps en temps, mais là, bizarrement, ce n’est pas pareil. Sûrement à cause de ma déception d’hier. J’aurais aimé pouvoir aller le voir à mon retour, me caler contre lui et le sentir dormir à mes côtés. « Mais oui, bien sûr, je suis une tata sorcière… » C’est elle qui le dit, pas moi. À en voir le petit garçon, il a passé une bonne soirée et c’est bien ça le plus important. J’ai ma vie à côté, c’est vrai, mais ça ne doit pas aller à son encontre. « J’aime beaucoup m’occuper de lui, tu le sais bien, il faut surtout pas que tu hésites à me le demander. » J’ai bien conscience de cela et je sais que je suis chanceuse d’avoir du monde autour de moi, surtout en voyant comment ça se passe avec Archie. Je suis née dans une grande famille, aimante et soudée, et j’aimerais pouvoir apporter la même chose à mon fils. « Tu veux pas entrer et boire quelque chose ? Ne crois pas que j'ai oublié ton rencard, je veux tous les détails croustillants. » Je grimace légèrement. Au vu de notre discussion de la veille, je devais me préparer à une telle interrogation et pourtant, ce n'est pas le cas. « Des détails croustillants ? Ça va aller vite alors. Mais je ne dis pas non à un verre d'eau ou un jus de fruits. » Je n'ai pas l'habitude de parler de mes histoires de coeur, car en réalité, hormis quelques personnes, je n'y prête pas d'attention. Si je décide de me lancer dans quelque chose de sérieux, je dois prendre Elliot en considération. Il faut que la personne l'accepte et se fasse une place avec lui. « Pour être honnête, j'ai connu de meilleurs rendez-vous. » Je n'ai pas l'habitude d'en parler, mais ça ne peut pas me faire de mal. Surtout que Lou est là pour m'écouter et j'ai besoin de pouvoir parler de ce qu'il s'est passé hier, des révélations que Natalie m'a faite et de la réaction que j'ai pu avoir. « J'ai passé la nuit seule, dans mon lit. » Je sous-entends par là que ça ne s'est pas fini comme elle pourrait l'imaginer, que je n'ai pas fini la soirée en charmante compagnie. Et même, à en voir ma tenue, bien différente de la veille, que je n'ai pas découchée.

L'invitation lancée par ma sœur, de rester un peu, est tentante, alors j'accepte. Malgré le fait que cela signifie aussi que je vais devoir parler de ma soirée de la veille. « Ananas » « Merci. » Dis-je, tout en récupérant le verre qu'elle me tend. « Il a beaucoup joué avec Nana aussi, hier soir. Il ne t'a jamais demandé un chien ? Enfin bon, j'imagine que même si c'était le cas, tu n'aurais pas beaucoup le temps de t'occuper d'un animal. » Le temps oui et pour l'instant, l'envie aussi. Il arrive que ce soit la course, alors rajouter à cela un chien, ça risque de faire un beau carnage. Et puis, ne pas avoir d'animal pour l'instant, ça nous permet d'être un peu plus "libres". Elliot est encore petit, mais j'aimerais bien pouvoir lui proposer de voyager un peu et avoir un chien, cela oblige à penser à la solution pour le garder durant ce temps. « Il a déjà essayé. Nous en croisons souvent au parc et à chaque fois, il me dit qu'il aimerait bien en avoir un plus tard. Mais il est encore petit. Peut-être plus tard, quand il sera plus en âge de s'en occuper. » Ce qui me fait peur, c'est que l'envie d'en avoir un à la maison soit vite remplacée par autre chose une fois la bête adoptée et je vais devoir alors m'en occuper seule. Un chien, c'est assez contraignant, il faut le sortir plusieurs fois dans la journée, jouer avec lui pour éviter qu'il ne s'ennuie trop et fasse des bêtises, durant notre absence ou même notre présence. Finalement, pour un premier animal, je pense que ma préférence se porterait plus sur un chat. Désormais installées et le petit garçon occupé à autre chose, je décide de m'aventurer sur le sujet sensible de la veille, ce rendez-vous qui ne s'est pas vraiment fini comme je l'imaginais. « Oh, je suis désolée de l'entendre. » Je hausse légèrement les épaules. Ce sont des choses qui arrivent, même si pour le coup, la manière dont ça s’est passé hier, c’était un peu nouveau pour moi. « C’était à ce point-là ? Si tu as besoin d’en parler, n’hésite pas. » En arrivant ici, je ne pensais pas que j’allais vouloir m’étendre dessus, mais finalement, en parler est peut-être une bonne chose. Ça me permettra peut-être de passer à autre chose plus rapide, enfin ça, c’est si la brune sort de mes pensées. « Ça commençait plutôt bien. On passait une bonne soirée. Du vin, de la bonne nourriture et une charmante compagnie, que demander de plus. » Un sourire se dessine naturellement sur mes lèvres lorsque j’évoque le début de la soirée. « On s’est rapprochées, on s’est même embrassées. Mais j’ai ensuite appris qu’une personne l’avait accusée d’agression sexuelle. » Et autant dire que cela m’a un peu refroidit. Ne la connaissant pas tant que cela, il était difficile pour moi de savoir si c’était vrai ou si c’était une information calomnieuse. « Je ne suis pas toute seule, je dois penser à lui. » D’un mouvement de la tête, je montre mon fils. À première vue, Natalie n’est pas dangereuse, mais si j’ignore beaucoup de choses sur elle, comment est-ce que je peux imaginer un futur avec elle ? Pour ne pas rester trop sur ce sujet, peu agréable, Lou change alors de sujet. « Vous avez des projets, pour aujourd’hui ? Il fait assez beau pour la saison, je me dis que ce serait dommage de ne pas en profiter. » « Je pense que nous allons aller au jardin botanique, pour voir les fleurs de saison. Tu peux venir avec nous si tu veux, si jamais tu n’as pas d’autres plans. »

À l’évocation de la demande du petit garçon pour un chien, je ne suis pas surprise. En réalité, il a déjà tenté à plusieurs reprises, mais c’est pour moi encore un peu trop tôt. « Alors d’ici une dizaine d’années, ça devrait aller » Je ne peux qu’approuver ses mots. Même si d’ici là, je risque d’avoir plusieurs réclamations. « Maman m’a souvent dit qu’à l’âge d’Elliot jusqu’à l’adolescence, je la harcelais avec ça. » Et pourtant, nous n’avons jamais eu de chien. Il faut dire qu’avec tout ce qu’il a pu se passer dans notre famille, ce n’était pas forcément la meilleure des idées. Avoir cinq enfants dans une maison, c’est sûrement suffisant, inutile de se rajouter à ça une bête à quatre pattes. Ce sujet de discussion est léger, celui qui suit l’est beaucoup moins et pour cause, je lui raconte ma soirée et ce qui a mis court à cela. « Euh… C’est un mec avec qui tu avais un premier rencard ? » « Non. Une femme. » Je ne suis pas en train de faire mon coming-out, j’ai déjà eu des relations avec des femmes. Avec une en particulier et ma famille était au courant. Les autres personnes, peut-être moins, mais c’était moins important pour moi. Que le voisinage approuve mes relations, je m’en fiche un peu, alors que les membres de ma famille, ça compte. « Est-ce que ça change quelque chose ? » Que ce soit un homme ou une femme, l’accusation est là et ça n’enlève rien à la gravité des choses, enfin selon moi. « Enfin, je te comprends. » Avec un hashtag bien connu, les agressions sexuelles ont fait un bon dans l’actualité et bien souvent, je me suis rangée du côté des victimes, parce que face à des personnes de pouvoir, elles sont impuissantes. Et là, aujourd’hui, mes sentiments me donnent envie de me mettre du côté de la coupable et ce n’est tout bonnement pas possible. « Et j’imagine que… Tu te demandes si l’accusation est vraie ou pas ? » En simple réponse, je hoche la tête. Depuis la révélation de Natalie, je n’arrête pas d’y penser. Si vraiment elle avait été coupable, est-ce qu'elle m'aurait vraiment balancé cela, surtout à ce moment-là de la soirée ? Elle voulait être honnête, c'est vrai, mais elle devait bien se douter que j'allais prendre la fuite. Est-ce qu'il existe beaucoup de personnes qui reste et qui font comme si de rien était ? Si cette soirée me reste encore dans la tête, c'est peut-être parce que je suis un peu comme eux finalement. Je devrais sinon passer à autre chose et vite. La discussion s'oriente ensuite vers le reste de la journée et j'évoque le fait que nous allons sûrement aller au jardin botanique avec Elliot. Selon les plans de ma sœur, je lui propose de nous accompagner. « C'est une super idée, le jardin botanique. Il n'essaye pas de cueillir les fleurs ? Même pour moi, ce serait tentant... Ça fait un moment que j'y ai pas fait un tour, alors je vous accompagnerai avec plaisir. J'avais prévu de m'affaler devant Netflix la moitié de la journée, alors mes plans ne sont pas très palpitants. » À l'entendre prononcer le mot Netlflix, je ne peux m'empêcher de rire un peu. « Tu nous préfères à Netflix, j'en suis touchée. Je t'offrirais un snack pour cette tendre attention. Et pour l'avoir gardé aussi. » Oui, autant trouver une excuse valable à la gâter. Netflix ne fait clairement pas partie des possibilités. « Elliot adore le jardin botanique. Il court partout, mais pas pour s'attaquer aux fleurs ou pour saccager quoique ce soit, il veut juste s'assurer de pouvoir tout voir. » Et autant dire que dans ces moments-là, il est tellement adorable. Bon.. c'est vrai, il l'est toujours. « On y va assez souvent, deux à trois fois par mois. Je crois que ça l'apaise un peu, ou alors c'est qu'il se dépense plus, car bien souvent, les soirs de nos sorties au jardin, il s'endort en quelques minutes. »

« Ça change que... Je me rends compte de mes préjugés, on va dire. » Pour le coup, je ne peux pas lui en vouloir. Ma réaction a plus ou moins été la même, j'étais bien loin de m'imaginer que Natalie allait me faire une telle révélation. Quand elle a pris son air grave, je m'attendais plutôt à ce qu'elle m'annonce être en couple avec quelqu'un d'autre. Cela aurait été grave aussi, un peu moins qu'une accusation d'agression sexuelle, c'est vrai, mais cela aurait mis tout autant à mal le fait que quelque chose de sérieux soit possible entre nous. « Sinon, sur le fond, non. » Il fallait que ça tombe sur moi. Après avoir eu un enfant avec un homme en couple avec une autre femme, il fallait que la personne qui me plaît soit accusée d'une telle chose. Visiblement, l'amour ne veut pas de moi pour l'instant. « Tu te donnes le temps de la réflexion ou c'est mort ? » Je grimace légèrement et hausse les épaules. « Je ne sais pas trop. Je vais voir dans les jours à venir, si jamais elle me recontacte pour une quelconque explication. » Peut-être que cette histoire en restera là, à une soirée complètement ratée, ou alors il y aura un après. Quoiqu'il en soit, je dois garder la tête froide et ne pas laisser mes sentiments prendre le dessus, ils pourraient facilement m'aveugler sur certains points. Ce sujet maintenant clôturé, Lou s'intéresse à ce que l'on va faire durant le reste de la journée. Hormis une balade au jardin botanique, je pense que nous n'allons pas faire grand-chose. Si jamais elle est libre, je lui propose de venir avec nous et Lou accepte. « En tout cas, je préfère mon neveu à Netflix. J'ai pas encore décidé pour toi. » Je la regarde d'un air outré, bien que peu sérieux. Je comprends pour Elliot, mais tout de même, je suis sa sœur et durant plusieurs années, j'ai aidé à son éducation, ce n'est pas rien ! « Mais je veux bien garder le snack quand même. » « Je vois. » Dis-je, amusée par la situation. C'est qu'elle est intelligente la plus jeune des Wade. « Tu veux qu'on y aille maintenant ? Je pense que pour le coup, il a de l'énergie à dépenser et à revendre, avec les pancakes qu'on s'est enfilés... » « Et les bonbons aussi, je suppose. » Je ne suis pas dupe, je sais qu'en venant ici, le petit garçon a été choyé et gâté, et qu'il a pu avoir l'occasion de manger des choses dont il n'a pas l'habitude chez nous. « On peut y aller maintenant oui. Je suis venue en voiture, ça sera plus rapide pour y aller. » Le jardin se trouvant à Wellington, ce sera plus pratique que de prendre les transports en commun. Ma petite sœur file enfiler quelque chose de plus chaud, alors que j'appelle Elliot pour lui mettre son blouson. Il est ravi à l'idée d'aller là-bas : très vite, il commence à évoquer tout ce qu'il aura l'occasion de voir. Une fois toute la troupe prête, nous montons dans la voiture, direction le centre de Wellington. À l'entrée du jardin, nous tombons sur un stand de nourriture, ce qui tombe étonnant bien. « Qu'est-ce que tu veux ? » Dis-je, à destination de Lou. Je sais par avance que ce sera une glace pour mon fils.