Et toi, dis moi comment tu vas ! (ft. Love)

“Oui, promis ça va aller ! Le bus est méga rapide pour aller en centre-ville et puis, il faudra bien un jour ou l’autre que je redevienne indépendant !”. J’essaie de rassurer Maël comme je le peux. Il faut dire que depuis que j’ai quitté mon fauteuil, les déplacements en béquilles ne sont pas de tout repos. Ma jambe me fait souvent mal au bout d’un moment et mes bras sont tout endoloris. Mais bon, je ne peux pas vraiment me plaindre, je retrouve peu à peu l’usage de mes jambes et ce n’est qu’une question de temps avant que tout ne refonctionne comme avant. Heureusement, les médicaments sont là pour aider face à la douleur. Je dois dire que j’en prends assez souvent, parfois même un poil plus que ce qui est recommandé quand la douleur est dure à supporter, mais je fait ça à l’abri des regards. Je sais que ce n’est pas trop recommander et j’essaie de ne pas en abuser, mais des fois, c’est la seule solution pour moi de passer une nuit tranquille.
“Et puis si il y a le moindre souci je t’appelle ! Tu peux même venir me récupérer en voiture si tu veux, on sera chez Martin’s, tu sais le petit coffee shop à North Bay. Et puis tu connais Morgan…”. Maël arque un sourcil. “... Love quoi, s’il y a un quelconque problème, elle t’appellera !”.
Nos embrassades terminées comme si je partais pour une traversée du Yukon pendant 1 mois, je me retrouve finalement dans le bus qui me mènera en quelques minutes à North Bay. Ça me tenait à cœur de faire cet effort. Pour moi, mais aussi pour Maël ! J’ai besoin de savoir que je suis encore capable d’être autonome et puis cela me permet d’offrir du temps libre à mon petit ami qui a quand même mis sa vie sur stop pour moi depuis l’accident.

Le trajet est plutôt tranquille, une jeune femme me cède bien volontiers sa place dans le bus à mon arrivée et, une dizaine de minutes plus tard, j’arrive à destination. A l’arrêt de bus, je reconnais cette longue chevelure bouclée qui fait naître automatiquement un sourire sur mes lèvres.
“On avait pas rendez-vous au café directement ?” Je me doute que si la jeune femme est venue m’attendre, c’est pour s’assurer que tout s’est bien passé. Faut dire que nos récents échanges par sms l’ont sûrement un peu inquiétés.
“Franchement, t’aurais pu mettre une pancarte avec mon nom dessus comme à l’aéroport quand même ! C’est pas comme ça qu’on t'accueille quand tu débarques à LA ?”. Je conclus ma plaisanterie en venant l’enlacer amicalement. Qu’est-ce que ça fait plaisir de la revoir ! Il faut dire qu’entre ses tournages et mon accident, ses derniers mois ont été bien chargés pour nous deux.
Tant bien que mal, nous prenons côte à côte la direction du Martin’s Coffee pour un café qui nous permettra assurément de rattraper le temps perdu.

J’ai vraiment halluciné en recevant le message d’Alex qui disait qu’il avait eu un accident. Grave, puisqu’il était en fauteuil roulant jusqu’à maintenant. J’en reviens pas. Je n’ai pas pris le temps de prendre de ses nouvelles depuis la dernière fois, avec l’histoire des photos de nous qui sont sorties, puis son petit ami, j’ai préféré prendre un peu de recul pour ne pas continuer de foutre le bordel dans sa vie. Mais bon, même si je n’étais pas trop aux alentours, faut croire que la vie ne lui a quand même pas fait de cadeau, c’est moche !
Nous finissons par nous donner rendez-vous dans un café, et je dois dire que je suis vraiment impatiente de le voir. Notre rencontre a été vraiment naturelle et j’aime beaucoup ce que ce gars dégage, il m’apaise, et je me sens pas jugée avec lui. Je peux être qui je veux, qui je suis, sans qu’il n’ait aucun a priori. C’est rafraichissant !

Je suis un peu en avance sur l’heure du rendez-vous, et je fais le choix d’attendre Alexander directement à l’arrêt de bus où il est censé descendre. C’est un garçon ponctuel, et je sais que je ne l’attendrai pas bien longtemps. D’ailleurs, voilà le bus qui arrive, et je vois le brun descendre, clopin clopant. « On avait pas rendez-vous au café directement ? » « Tu me manquais trop ! » dis-je naturellement, sans parler bien entendu de mon inquiétude. Mais son sourire me rassure. « Franchement, t’aurais pu mettre une pancarte avec mon nom dessus comme à l’aéroport quand même ! C’est pas comme ça qu’on t'accueille quand tu débarques à LA ? » J’éclate de rire le plus naturellement possible, il est vraiment un des rares avec qui je peux être aussi naturelle. « Putain j’y ai même pas pensé ! Amie en carton ! » Je viens le serrer contre moi, doucement, parce que je ne sais pas s’il a encore des douleurs, des blessures, je préfère ne pas faire de connerie. Parce que j’aurai juste envie de le serrer super fort, au moins autant que je me suis inquiétée en apprenant son accident, tardivement.

« Bon, t’as grave de trucs à me raconter du coup ! » Nous marchons côte à côte jusqu’au café, et je ne manque pas de lui faire remarquer : « En tout cas, tu te débrouilles bien avec ça ! » Je me souviens d’un tournage où j’avais dû jouer une fille qui venait de se péter le pied aux sports d’hiver, et ils m’avaient vraiment plâtré le pied. C’était l’enfer, et j’ai bien failli me casser autre choses en me vautrant lamentablement à cause de ces foutues béquiller. « Ça va te faire des méga biceps ! » En ajoutant le geste à la parole, je tâte son bras en riant. « Ah merde putain faut que je fasse gaffe à pas te toucher. J’ai double risques maintenant… les paparazzi, et ton mec. » Je dis la fin de ma phrase un peu plus bas, parce que je sais pas encore trop bien où ils en sont, si leur relation est officielle, assumée, tout ça, c’est pas toujours évident…

Il faut dire que ces derniers mois, ma vie sociale était proche du point mort. Maël et moi nous sommes enfermés dans une petite bulle, nous tenant à l’écart de tout contact avec l’extérieur. Que ne l’on se méprenne pas, je ne reproche rien à mon petit ami, tout ça c’est de ma faute ! Me retrouver en fauteuil à été un vrai choc. Et même si j’ai eu la chance de voir cette situation ne durer que quelques semaines, j’ai eu beaucoup de mal à assumer ce “nouveau” moi; mais depuis que j’ai troqué le fauteuil pour les béquilles, je commence à retrouver le goût des sorties extérieures. Contacter Morgan pour cette première vraie sortie autonome fut donc une évidence !

A ma descente du bus, celle que le monde entier connaît sous le nom de Love Stewart, m’offre une accolade chaleureuse avant que nous ne prenions la route en direction du café. Je tente tant bien que mal de suivre la cadence avec ma paire de béquilles. C’est pratique ces trucs mais franchement, c’est pas très agréable, notamment pour les mains.
"Ça va te faire des méga biceps !" plaisante-t-elle en me tâtant les biscotos.
“Ça me fera pas de mal ! Quand je vois Maël qui s’est donné corps et âmes à la salle pendant ma convalescence, moi j’ai l’impression d’avoir grave perdu…”. Bon j’ai jamais eu le corps de Schwarzenegger mais j’ai toujours eu un physique assez entretenu, notamment parce que je ne tiens pas en place et que j’ai besoin de me dépenser, ça aide!
“Et entre mon mec et les paparazzis, je ne sais pas vraiment qui est le plus redoutable…”

Arrivé au café, nous commençons à faire la queue devant le guichet de commande devant lequel une bonne dizaine de gourmands sont déjà en train de patienter. L’attente avec une jambe en l’air va être longue… Derrière le comptoir, les portes battantes de la cuisine s’ouvre et en sort une belle jeune femme rousses vêtue d’un tablier bleue.
“Et voilà pour la fournée de muffins !” dit-elle avec son habituelle voix enjouée. Cette voix, je la connais, c’est celle de Lesly, la patronne du Martin’s. Nous nous sommes rencontrés quelques années en arrière lors d’une formation sur la gestion d’un établissement de restauration, peu de temps avant que je reprenne le truck.
“Oh Alex !” lance-t-elle à l’autre bout du comptoir ! “Viens pas içi ! Olala, j’ai appris ce qu’il t'était arrivé… ça va ?”
“Plus de peur que de mal comme tu peux le voir ! Ça aurait pu être pire en tout cas…”.
Après un bref résumé de mes péripéties à la jeune femme, nous finissons par passer commande et à trouver une table libre.

Nous reprenons alors la conversation là où nous l’avions laissé : “Tu sais que vous pourriez super bien vous entendre avec Maël ! Je ne perds pas espoir qu’un jour il oublie cette histoire… Mais rassure toi, il a bien compris que c’était du vent tout ça, même si je crois que ça l’a tout de même bien marqué !”.
J’ôte le couvercle de mon gobelet pour verser un petit sachet de sucre dans ma boisson.
“Bon avant que je te raconte l’affaire du siècle… parle moi de toi ! Il s’est passé quoi ces derniers mois ? Au fait, tu sais que pendant ma convalescence j’ai ENFIN regardé ta série… Dis moi que t’es partie tourner la suite !”.