Shatter me ❋ Felix

Cette impression que tout peut s'effondrer à tout moment. Cet instant où il a été obligé de renoncer à ce qu'il aime faire le plus au monde et puis, ce moment, où il a compris qu'il se passait quelque chose avec Jude et plus rien. Cette frustration en lui, cette envie de crier, alors que rien ne veut sortir de sa bouche et aussi, parce qu'il aurait l'air tout simplement stupide, il déteste ce sentiment, cette impression qu'une minute à l'autre, tout va basculer, pour le meilleur ou pour le pire. Ces dernières semaines, Felix ne peut pas dire que tout va bien et il a même repris ses entraînements, une bonne manière à lui de se défouler, de se concentrer, de pouvoir penser à autre chose que la vie quotidienne, plus particulièrement de ses relations, celle avec Jude, tout particulièrement, au même moment où tout se dégrade avec Milo. Il n'a pas parlé beaucoup aux autres membres du groupe, quelques paroles ici et là, mais rien d'intéressant, loin du Felix enthousiaste, parce qu'il est sans réponse et qu'au fond, il ne sait pas s'il veut découvrir la vérité. Enfin, si, il le souhaite, mais il appréhende l'après tout cela. Il y a Jude qui veut le voir et pour être honnête, il n'en a pas envie, ni la force, se prendre la tête, encore une fois ? Ce n'est pas vraiment dans le caractère du jeune homme, pour tout dire, c'est plutôt quelqu'un qui préfère refouler et se concentrer sur une seule et unique chose : le sport. On lui a même proposé de revenir en France et pourquoi pas ? Ce n'est pas comme si quelque chose ou quelqu'un le retenait ici, si ? Peut-être son boulot, celui d'entraîneur, mais ça, comme tous les coachs, ils trouvent tous un nouvel emploi ailleurs. Il tourne en rond, jusqu'à entendre la sonnette, il soupire, il la laisse attendre, puis finalement, il avance jusqu'à la porte et l'ouvre. Ils doivent effectivement parler, même si l'envie ne se fait pas, il suppose que c'est maintenant ou jamais, donc, sans dire un mot, il se pousse pour la laisser entrer avant de refermer derrière elle, se dirigeant vers le salon. Toujours sans un mot, il s'assoit et il la regarde, car bizarrement, c'est elle qui semble avoir quelque chose à lui dire.

Felix savait qu'il se passait quelque chose, entre eux, avec Milo, tous les trois, un secret qui ferait tout basculer, évidemment, qu'elle n'attend pas pour lui dire, enfin, si, quand même un peu. Elle aurait mis du temps avant que sa conscience la ronge de l'intérieur, pas une seule fois, mais deux. L'information s'est déjà rendue jusqu'à son cerveau, qui bouille, mais qui s'embrouille aussi, parce qu'il a une tonne de question, la première serait de savoir pourquoi, mais d'un autre côté, son ego lui dit plutôt de ne pas réagir, de ne pas se laisser emporter par cette putain de bêtise. Pour être honnête, il n'est pas certain de savoir quelle est la meilleure façon de s'exprimer face à cela. Ils n'ont jamais été un couple, bien sûr, ils ont eu des rapprochements, enfin, apparemment, pas autant qu'avec Milo, eux, c'était plus flirt, romantique, peut-être ? Il a trop tardé ? Elle n'a peut-être jamais voulu de lui, au fond, qu'il est con, voilà ce qu'il se dit, puis en même temps, ce n'est pas de sa faute, il comprend bien pourquoi elle n'a jamais voulu franchir le pas. Il reste muet, il a beau avoir appris à se taire, parce que son père, qui est ministre, n'aurait jamais voulu de scandale, mais avec les années, Felix a changé et même s'il reste plutôt discret de ce côté-là, il reste humain, il a des sentiments, bref, c'est ce qu'il croyait, comme un château de cartes à la con, tout s'effondre rapidement, d'un simple coup de vent. Il ne regarde plus la brune, mais le sol, un hochement de tête sans fin, ses dents se serrent, tout comme ses doigts qui se referment au point de laisser des marques dans ses paumes de main, sa respiration se fait plus forte, il se lève finalement de son canapé, il ne tient plus en place. « C'est juste arrivé, oui, bien évidemment, à la deuxième fois, ce n'est plus un accident, tu as tout simplement décidé de jouer l'allumeuse de service et ce, depuis le début. » Il pèse ses mots, il trouve des synonymes, être méchant, ce n'est pas dans son caractère, cela dit, il a ses limites et à force de cacher ses émotions, tout explose. Dommage que Milo ne soit pas, il aurait voulu le frapper, pas sûr que cela l'aurait soulagé, que le passé se serait effacé d'un seul coup, mais bon, ils en sont là. « C'est dingue ça. Tu me fais marcher depuis le début. T'as quand même pas cru que j'étais ton putain de toutou ?! »

Ce sentiment de frustration est terrible, ne rien pouvoir faire, même s'il pouvait l'insulter de tous les noms, cela ne changerait rien au passé et il le sait. Néanmoins, ses entrailles se crispent et se tordent, ce n'est pas sans exagération, il se sent mal, cette sensation l'énerve et il ne peut absolument rien faire pour atténuer cela. Il oublie de respirer, ses techniques pour mieux se sentir, au diable tout cela, il laisse sa colère prendre le dessus, sur tout le reste, laissant le contrôle à une autre partie de lui. S'il savait pleurer, il le ferait, mais non, ce serait montrer ses faiblesses et ça, il sait comment éviter de le faire, en tout cas, des larmes ne couleront jamais de ses joues, certainement pas pour lui faire plaisir, serait-elle contente ? Qu'importe, il est agacé, ses mots peuvent dépasser sa pensée, mais comme l'acte, il ne peut pas revenir à l'arrière et au fond, c'est lui le con dans cette histoire, pas elle, ni son ami, celui qu'il voyait comme un frère, celui qu'il n'a jamais eu, c'est ainsi que tout ça se termine ? Un rire nerveux sort de sa bouche. Pour les deux ? Est-ce vraiment possible ? Bien sûr, il est différent de Milo, ils ne sont pas identiques, mais tout de même, ça le dégoûte de l'entendre dire cela à voix haute. Alors, il se met à applaudir de façon exagérée. « Wow. Pour les deux, rien que ça. » Il s'arrête et soupire longuement, ses mains tremblent, ses jambes s'épuisent rapidement, à cause des émotions, de la situation, mais il refuse de se montrer sous ce jour, comme quelqu'un de faible, aussi cliché que cela puisse paraître venant d'un mec. « Je voulais vraiment.. Je voulais vraiment qu'on soit.. quelque chose ? Qu'on soit plus que des amis.. je me sens vraiment con d'y avoir cru, d'avoir été mené en bateau par une fille qui pensait pouvoir avoir deux mecs en même temps. » Il la regarde finalement. « Satisfaite de toi ? »

On dirait un mauvais rêve dans lequel il n'arrive pas à se réveiller, à se dire que ce n'était qu'un cauchemar, rien de plus, qu'un mauvais souvenir. Néanmoins, rien ne se passe comme on le veut, n'est-ce pas ? C'est vraiment ce qui est en train de se produire, cette conversation est hallucinante, il se sent complètement trahi, aussi bien par Jude que par Milo. Il le savait. Il savait que Felix en pinçait pour la brune, mais il ne s'est jamais posé la question sur la moralité, sur la fidélité d'une amitié, ni n'a repoussé Jude, sinon ils n'en seraient pas là, à se prendre la tête. Ils en sont au point de non-retour, bien qu'elle l'ait déjà franchi sans qu'il le sache, mais maintenant que tout est réel, que rien ne peut être effacé, la douleur est réelle. Il la laisse parler, pendant qu'il fait les cent pas, qu'il rigole nerveusement à ce qu'elle lui raconte, il arrive même à se servir un verre de whisky, croyant que cela va l'apaiser, mais pas du tout, ce serait trop beau pour être vrai. Ils se regardent finalement dans le blanc des yeux et il ne sait même pas comment il fait pour continuer à le faire, dès qu'elle a ouvert la bouche pour lui raconter ce qui s'est passé, tout s'est transformé en rage et déception. « Ah. Donc, tu avais déjà choisi depuis longtemps, mais tu as préféré me faire poireauter. De mieux en mieux cette histoire. » C'est ce qu'il comprend quand elle lui dit qu'elle s'est fait avoir avec Milo et rien que l'entendre, encore une fois, il a honte, il se sent dégoûté et déteste de plus en plus la présence de Jude dans son appartement, parce qu'elle l'enfonce dans une situation qu'il n'a jamais vécue et il voit cela comme un échec, il s'est toujours refusé d'échouer. Il faut croire qu'on ne peut pas tout contrôler, ni avoir ce qu'on voudrait. « D'toute façon, je n'ai plus envie de te croire. Tu as brisé ma confiance, tu as tout détruit. Si j'avais su.. j'aurais préféré ne jamais avoir des sentiments pour toi, une perte de temps. »

Il n'arrête pas de se dire que s'ils avaient été en couple, cela aurait été pire, mais la vérité c'est que sa confiance a quand même été trahie, sinon il aurait fait la même chose, il serait allé voir ailleurs et peut-être qu'il aurait dû finalement, non ? Après tout, elle ne s'est pas gênée pour le faire avec son ami d'enfance, cependant, Felix n'est pas le genre à courir deux personnes en même temps, voilà pourquoi il n'a pas cédé aux tentations des autres. Bref, qu'importe, cela n'a plus d'importance, ce qui a été fait, ne peut être défait, il est trop tard pour se mettre à cogiter sur ce qu'il aurait pu être fait ou non. Le jeune homme n'a plus envie d'entendre la voix de Jude, de la voir s'expliquer, de donner des excuses à ce qu'elle a fait, un sens à cette situation qui ne peut actuellement pas être désamorcée. Elle ose lui dire qu'elle ne regrette pas, sauf que là, tout de suite, il ne peut pas dire le contraire, il ne peut dire qu'il s'excuse pour ses paroles, il n'en a clairement pas envie et ce serait vraiment stupide de sa part de se mettre à genoux après cette trahison, jamais Felix ferait une telle chose, il préfère la laisser partir et c'est vraiment ce qui a de mieux à faire. Elle lui demande même de pardonner à Milo, il n'en a pas envie, il mérite aussi que le brun lui crache à la figure avec des mots, bien entendu et dans son état, il serait capable de prendre sa voiture pour lui rendre visite, quitte à prendre le risque d'avoir un accident ou un excès de vitesse, il ne peut pas attendre un mois ou deux avant de le faire. Felix ne répond pas, néanmoins, il lui tourne le dos, s'approchant des grandes vitres qui donnent sur le grand balcon de son penthouse, pour pouvoir regarder l'extérieur, dans l'espoir qu'une fois qu'il se sera retourné à nouveau, elle ne sera plus chez lui, les secondes passent, puis une porte se ferme derrière lui. Il ferme les yeux, soupire lourdement et il frappe dans le mur tout juste à côté, ne soulageant pas sa frustration, il prend ses clés et voiture et quitte l'immeuble.