misunderstanding, priceless situation | Ashton & Maxwell

Tout le monde avait entendu parlé de ce mini festival itinérant qui passait quelques jours dans les petites villes sur la côte Néo-zélandaise. Il permettait à de jeunes talents ou des groupes locaux sans trop de visibilité de se produire sur scène comme de véritables professionnels avec tout le matériel nécessaire, une aubaine pour certains qui espéraient faire décoller leur carrière. Pour Maxwell c'était l'occasion rêvée de se changer les idées, de sortir de chez lui, aller écouter des groupes en ville ou sur la plage. En bon amateur de musique, il appréciait cette manifestation. Aujourd'hui il était en ville, un concert allait commencer d'ici quelques temps, une bonne heure à priori, un jeune groupe de rock, il allait voir ce que ça pouvait donner. L'idée était simple, il voulait s'asseoir à une terrasse de café toute proche et profiter de l'ambiance devant une bonne bière. Mais pris par un mouvement de foule qui semblait s'agiter face à un panneau d'affichage, il patienta tranquillement que les choses se tassent. Une fois les badauds éloignés et piqué par la curiosité, il alla lire ce qui semblait être si intéressant. Une feuille blanche avec écrit à la hâte au stylo rouge que le groupe recherchait un chanteur au pied levé pour remplacé celui qui leur avait fait faux bond, ils allaient reprendre des standards de la chanson. Haussant les épaules, Max resta dubitatif un instant, ça commençait mal pour les petits jeunes... Bon s'ils avaient cherché un guitariste pas trop mauvais, peut-être qu'il aurait pu les aider... quoi qu'avec sa main en vrac ça semblait compliqué. Mais un chanteur, clairement il ne pouvait rien pour eux.
Il allait se retourner et se commander sa fameuse bière avant que toutes les tables en terrasses ne soient prises d'assaut quand on le retint par l'épaule. C'est toi, le grand blond ! Il resta interdit une seconde à fixer la jeune fille d'une vingtaine d'années qui semblait attendre une réponse de sa part. Ou... Oui, on peut dire que je suis grand et blond. C'est p... Elle le coupa, visiblement pressée. Viens, on t'attend, on m'a dit de venir te chercher au panneau. Ashton veut voir ce que tu donnes. Elle le pris par la main, avec une poigne dont il n'aurait pas douté, le forçant à la suivre en fendant la foule et Maxwell n'y comprenait rien. Une fois dans les coulisses de fortune, elle s'arrêta et lui offrit une petite moue encourageante. Si c'est de l'à peu prêt c'est pas bien grave, ce qui compte c'est qu'on s'amuse. Elle le fixait avec de tels yeux implorants que notre blond en tomba des nu et ne su quoi répondre. Un jeune homme arriva derrière elle. Ash ! Voici Dylan, le mec qui vient remplacer l'autre lâche. Je vous laisse faire connaissance. Et alors Maxwell compris, un frisson glacial vint lui courir dans le dos, elle l'avait pris pour un autre, c'était certain, mais pour leur futur chanteur surtout. Il y avait clairement erreur sur la personne.

repère pour comptage des points, merci de ne pas retirer.

Une heure. Plus qu’une toute petite heure avant qu’on nous demande de monter sur scène devant ce public intransigeant si propre aux festivals, si différent de celui qui remplit les bars dans lesquels nous nous produisons habituellement. Et rien n’est prêt. Peu rodés aux concerts en plein air, le test son a pris plus de temps qu’à l’accoutumé, et Ashley a même réussi à péter une des cordes de sa basse – ce qui, soyons honnêtes, est totalement invraisemblable. Comble de la malchance, je viens de recevoir un coup de fil de notre chanteur m’annonçant qu’un empêchement familial le retiendrait pour la journée et qu’il nous envoyait une de ses connaissances en remplacement. Je suis loin d’être un mec stressé, mais j’ai tendance à beaucoup m’investir émotionnellement dans ce qui me plaît et surtout dans ce groupe dans lequel j’ai placé beaucoup d’espoirs, alors l’absence de Loar ne fait qu’accroître cette nervosité qui ne cesse d’augmenter depuis le début de la journée. Ce petit festival est une chance incroyable pour un groupe local aux rêves de gloire tel que le nôtre, on ne peut pas se permettre de passer à côté en annulant au risque que je m’en veuille toute ma vie. Plongé dans mes pensées, je manque sursauter à la voix d’Ashley qui vient de débarquer dans la loge de fortune mise à notre disposition. « Ash ! Voici Dylan, le mec qui vient remplacer l'autre lâche. Je vous laisse faire connaissance. » Un long soupir soulagé s’échappe de mes lèvres en réponse, comme si un poids énorme venait d’être retiré de mes épaules. « Super ! Je commençais à désespérer. » Je remercie la bassiste avant qu’elle ne retourne préparer son instrument, puis adresse un grand sourire au nouveau venu tout en lui serrant la main pour le saluer. Il est un peu plus âgé que ce à quoi je m’attendais mais son air sincèrement gentil me fait l’apprécier instantanément. « Hey Dylan, moi c’est Ashton. Bienvenue chez les Snow Planet… Enfin deux d’entre eux puisque notre chanteur a eu un empêchement de dernière minute. » Je balaye toute explication d’un geste de la main, préférant éviter d’aborder ce dernier sujet prompt à m’agacer. Sans perdre une seconde, j’invite Dylan à me suivre hors de la petite pièce en direction des coulisses où est rangé tout le matériel indispensable au bon fonctionnement du concert. « On a pas beaucoup de temps, il faut encore qu’on accorde nos instruments et qu’on voit un peu la setlist ensemble histoire d’être sûrs que tu connais et maîtrises toutes les chansons. Mieux vaut éviter une humiliation publique, pas vrai ? Les tomates ça tache. » Le visage soudain pâle du grand blond me fait éclater de rire, brisant net le ton faussement sérieux que je viens d’employer. « Je plaisante, détends-toi ! On improvisera au pire, c’est pas bien grave. » L’objectif premier est de s’amuser et ça le sera toujours, stress ou pas. Après quelques minutes de recherche, je mets enfin la main sur la feuille de papier listant les chansons que nous avons prévu de jouer. Certaines sont plus connues que d’autres, mais toutes sont des classiques du rock et je préfère m’assurer que notre chanteur remplaçant se sent à l’aise avec ce programme. Je lui tends la feuille et patiente un instant le temps qu’il en prenne connaissance, mais le silence prolongé dans lequel il s’est plongé commence à me rendre nerveux. Ses yeux ne volent même plus sur les titres de chansons, il semble perdu dans ses pensées, hésitant. « Hmm… Dylan ? Est-ce que tout va bien pour toi ? Un problème ? »

Des gamins qui jouaient du rock, c'était parfait ! Maxwell ne jugeait pas, loin de là, il avait vu jouer bien des groupes dont les membres parfois plus jeunes que ces Snow Planet, s'en sortaient comme des chefs et lui faisaient passer un super moment. Le problème avec les jeunes, c'était surtout leur inexpérience, le fait qu'ils paniquent pour peu, comme s'ils jouaient leur vie sur un concert, celui qu'ils prennent les choses trop à cœur comme s'ils étaient déjà de vraies rock-stars. Et là, le fait qu'ils aient été lâchés par leur chanteur et qu'en plus il y ait erreur sur le remplaçant, ça pouvait faire beaucoup pour leur ego. Parce que clairement, Max n'était pas leur homme, il n'était pas ce messie que ce Ash semblait attendre si impatiemment, en gros il allait tout foutre en l'air s'il montait sur scène. Ashton, il avait l'air sympa, plein d’entrain, déjà il serrait la main de notre amateur et l'entraînait dans les coulisses pour ne pas perdre une seconde. Max était perdu, incapable d'en placer une, de lui faire comprendre qu'il allait y avoir un problème... et puis il n'avait pas envie de se faire crier dessus alors que l'erreur venait de la fille, son but à la base c'était juste de passer une soirée tranquille et sympa. Ashton parlait beaucoup, il lui donnait des instructions, on ne pouvait pas lui en vouloir, il ne savait pas encore qu'il y avait un malentendu et plus le temps s’égrenait, plus notre blond s'enfonçait dans son mutisme et donc dans le mensonge, avec son air d'ahuri qui débarquait de nul part. Pourtant c'était simple, il avait juste à lui dire qu'il ne s'appelait pas Dylan mais Maxwell, qu'il y avait eu un malentendu et la chose serait réglée. Pourtant il pris cette feuille que l'autre lui tendait, la set list, qu'il étudie avec intérêt, leur programme était sympa, que des classiques du rock, de quoi faire un bon concert, de quoi plaire au public, en théorie. Mais pour ça il leur fallait un bon chanteur et c'était là que les choses coinçaient. Max était déjà monté sur scène, enfin dans des bars surtout, en vrai amateur avec ses potes. Et puis surtout avec une guitare à la main, parfois il avait fait les cœurs, on disait même qu'il avait une voix particulière qui pouvait être intéressante, mais lui ne l'aimait pas, sa voix, il la détestait et puis surtout il n'avait aucune assurance pour chanter devant un public comme leader ! A la question d'Ashton, il releva un regard inquiet sur son nouveau partenaire de fortune qui comprenait bien que quelque chose n'allait pas. Soupirant une seconde, il allait lui dire la vérité. Vos chansons sont supers. Mais j'suis pas certain d'être celui qu'il vous faut, on ne peut pas dire que je chante vraiment, pas en public, comme ça. J'veux pas tout faire foirer, c'est votre concert ! Dans la précipitation et le stress, il en oubliait de dire qu'il n'était même pas le fameux Dylan qu'ils attendaient.

« Vos chansons sont supers. Mais j'suis pas certain d'être celui qu'il vous faut, on ne peut pas dire que je chante vraiment, pas en public, comme ça. J'veux pas tout faire foirer, c'est votre concert ! » Je lève les yeux au ciel sans pouvoir cacher par ce geste mon léger amusement. Si, comme il le prétend, le grand blond ne sait pas chanter, alors Loar ne nous l’aurait pas envoyé en remplacement. J’ai pleine confiance dans le jugement de mon ami, alors je balaye l’excuse de Dylan d’un geste de la main. Evidemment, j’aurais préféré  qu’il ait un peu d’expérience en la matière, mais tant pis. On n’a pas vraiment le choix de toute manière. « Au point où on en est tu sais, c’est soit tu montes sur scène avec nous, soit on annule ! Alors crois-moi je vais privilégier la première option. » Clairement, je m’en fous qu’il ait ou non une voix de dingue tant qu’il est juste et surtout à l’aise. C’est ça qui fait toute la différence entre un basique chanteur et véritable artiste. Sourcils froncés, j’étudie l’expression inquiète du chanteur, ma déclaration n’ayant pas l’air de l’avoir rassuré. Ce n’est donc pas à un problème de setlist que nous faisons face, mais à un gros manque de confiance en soi, ce qui n’est pas l’idéal lorsqu’on s’apprête à performer devant un public. Je n’aurais peut-être pas dû lui faire la blague des tomates, le gars est franchement nerveux maintenant. Bon, aux grands maux les grands remèdes. J’ai une idée de dernier recours. « Je vais te montrer la scène pour que tu saches à quoi t’attendre. Suis-moi. » Quelques pas effectués à travers les coulisses et nous débouchons sur ce grand espace en plein air qui accueillera notre groupe d’ici une demi-heure. Pour l’instant, des tas de caisses, d’instruments et de câbles en tous genres encombrent le lieu peuplé de techniciens qui s’affairent à le préparer. Je m’avance au milieu de la scène, faisant face à un public encore imaginaire, et écarte les bras comme pour y englober tout l’espace. « Cher ami, te voilà sur mon terrain de jeu préféré. Bien sûr ça paraît impressionnant comme ça, mais une fois qu’on a essayé, on ne peut plus s’en passer. » Un sourire involontaire retrousse mes lèvres à peine ces quelques mots prononcés. Il me faudrait bien plus de temps pour décrire toutes les sensations éprouvées à chaque performance, cette connexion avec le public, cet état de transe qui me donne l’impression d’être le roi du monde, le partage d’une musique aimée. Le seul endroit où je me sens capable d’accomplir mes rêves les plus fous. Où je me sens à ma place comme nulle part ailleurs. Drogue merveilleuse. Je tourne enfin la tête vers Dylan à mes côtés, attentif à la moindre réaction de sa part. « Alors ? T’es partant ? » L’horloge tourne, j’espère vraiment qu’il ne nous lâchera pas lui non plus.