i just want a friend has my quote tonight. × Tomilla

« Tu vas où ? » « Chez ta sœur ! » On aurait dit un gamin insolent, quand Tom a quitté le loft ce soir pour descendre dans la rue. Pourtant, il n'y avait rien de plus vrai : Camilla lui avait proposé de venir passer la soirée chez elle. Il ne s'était pas fait prier, avait renoncé à sa propre glandouille avec ses colocataires pour accepter. Il ne ferait rien de mieux de sa soirée, et en plein milieu de semaine, comme ça ? La jeune femme devait vraiment avoir besoin de compagnie. Il pouvait comprendre ça, saisir qu'on puisse ne pas supporter une soirée seul. Et puis la brune avait tendance à l'inquiéter ces dernières semaines. Il y avait eu la perte de son meilleur ami tout d'abord, et ensuite c'était comme si son état s'était dégradé. Tout ne semblait que façade ; elle souriait quand on lui parlait, riait quand on lui faisait des blagues. Mais dès que l'esprit n'était plus stimulé, il n'y avait plus le moindre sourire et le regard triste refaisait son apparition. S'il pouvait lui éviter cela ce soir, alors il le ferait volontiers. Ça lui permettrait aussi de taquiner Felix le lendemain sur son acceptation dans la famille Clarke, bien qu'en réalité il n'assumerait jamais d'être présenté comme le petit-ami du blond. Il y avait des secrets qui étaient bien mieux gardés silencieux. De toute façon, vu l'ambiance qui planait dernièrement, cette scène ne risquait pas d'arriver un jour.

Il avait embarqué une clé USB avec quelques films et sur la route, s'était même arrêté au supermarché pour acheter des chocolats, les boules fourrées au praliné ou une connerie du genre qu'ils descendraient très rapidement et qui remonteraient un peu le moral, ainsi qu'une bouteille de vin rouge. Pas que cela soit la boisson la plus adaptée aux pizzas, mais c'était bien là l'un des seuls aspects adultes de sa personnalité : il aimait boire du vin quand il sortait chez des amis ou allait au restaurant. On ne pouvait pas dire qu'il s'était mis sur son 31 ; jean trop large commençant à être usé jusqu'à la corde, baskets, tee-shirt blanc et chemise à carreaux de bûcheron par-dessus. Sans parler des cheveux en vrac et de sa barbe qui aurait bien mérité un peu d'entretien.

Au moins, il était propre et à peu près à l'heure. Sans surprises, il fut accueilli par les aboiements, la voix de la brune qui ronchonne pour accéder à la porte, et enfin le grand sourire masqué par les efforts pour éviter une attaque d'animal poilu. « Ouep, c'est moi ! T'attendais quelqu'un d'autre ? » Il s'avança un peu, repoussa le chien d'un bras sans manquer de le flatter au passage. « T'en fais pas, j'ai eu affaire à des animaux plus sauvages que ça. J'te montrerai ma collection de blessures de guerre ! » La dernière en date étant la morsure de zèbre qui cicatrisait lentement sur son avant-bras. « Ça me fait plaisir de venir. » lui assura-t-il en passant un bras autour des épaules de la jeune Clarke. Comme à chaque fois, il devait baisser la tête et avant tendance à préférer poser un baiser sur sa tête plutôt que d'aller chercher sa joue. Ceci dit, il lui avait fait assez de blagues sur sa taille pour avoir envie d'en rajouter une couche ce soir.

Il abandonna enfin l'entrée, le chien sur les talons pour rejoindre le salon. Il tendit au passage le sac plastique à la brune. « J'ai pris des vivres. » Comme à son habitude, il ne se fit pas prier pour aller se poser sur le canapé où le deuxième chien décida de venir dire bonjour. « Boarf ça va, c'est la routine ! Et toi ? Tu t'ennuyais ce soir ? » Pour lui demander aussi spontanément de venir, il espérait qu'il n'y avait pas de démons qui l'y aurait poussée.

Il connaissait Camilla depuis tellement d'années maintenant qu'il avait perdu le compte et le sens de la réalité. Pour lui, elle était toujours cette gamine brune qui passait la tête dans la chambre de son grand frère pour finir par s'incruster dans leurs jeux, l'enfant qui les imitait et qui boudait quand elle était laissée derrière. Si elle n'avait plus rien à voir avec cette petite fille d'il y a vingt ans, une seule chose persistait : la confiance et l'affection sans bornes que Tom éprouvait à son égard. Il savait qu'elle traversait une passe difficile et cela lui semblait être le minimum qu'il puisse faire, être à ses côtés et l'épauler. Même si visiblement, moral ou non, la taquinerie était toujours de la partie. « Mais le démon de Hell's Kitchen ne t'apportera pas de vin ou de chocolat. Puis qu'est-ce qu'il a de plus mignon que moi, hein ? Pas la chevelure soyeuse en tout cas ! » Il fit exprès de l'attraper, mimer une étreinte pour lui coller ses cheveux toujours trop longs, toujours trop désordonnés dans le visage. Il ne craignait ni la riposte, ni le chien qui continuait de vouloir lui faire sa fête. Comme il le lui avait dit, il avait vu pire lors de ses rencontres avec de vrais animaux sauvages. Dans tous les cas, il finit par se calmer au même titre que l'animal, faisant du câlin quelque chose de plus tendre et de plus affectueux. Comme un ami ou un grand frère le ferait, à l'exception du nez qui s'attarda un peu trop longtemps pour humer son parfum.

Il finit tout de même par s'écarter et présenter le contenu du sac. C'est sans orgueil mal placé qu'il s'autorise un grand sourire et penche la tête vers Cam. « Dis le que j'suis le meilleur, j'attends ! » Il avait toute la soirée pour entendre ces doux mots ô combien mérités et en attendant, la boule de poils à peine insistante lui tiendrait compagnie et lui réchaufferait même les genoux. Le blond n'y prête pourtant pas vraiment attention, plus concerné par le mensonge qui franchit naturellement les lèvres de la jeune femme. Elle n'avait pas l'air d'aller spécialement bien, il ne goberait pas cela. Il se tourna vers elle, bras appuyé contre le dossier du canapé. « T'as bien fait. Tu sais que je suis là, n'importe où, n'importe quand si tu as besoin de parler. Même pour tremper mon tee-shirt si y a besoin, il est là pour ça. » Il tend le bras sur son genou qu'il serre une seconde pour illustrer ses paroles. Visiblement ils ne discuteraient pas tout de suite vu qu'elle s'enfuit en direction de la cuisine. « Bien essayé, patate. C'est ok pour moi tant que tu ne rajoutes pas d'ananas, de banane, ou je sais pas trop quoi. » Il aimait la pizza. Au point qu'il préférait se gaver de médicaments plutôt que d'assumer son intolérance au lactose, et donc au fromage des pizzas. Mais ça n'occultait pas le problème. « T'as fait quoi de ta journée ? Et hier ? » Avait-elle vu du monde ? Profité un peu de ses journées ? Il risquerait de changer radicalement de comportement s'il apprenait que la brune préférait rester à se morfondre chez elle plutôt que d'essayer de suivre le cours d'une vie normale.

Il avait toujours été un type tactile. Il aimait les étreintes, les caresses, les baisers quand la situation s'y prêtait, toutes ces marques d'affection qui inévitablement le faisaient se sentir bien. Rien qu'un câlin pouvait suffire à lui égayer une journée alors il avait peut-être un peu l'espoir que chahuter de la sorte et serrer la petite brune dans ses bras lui suffirait pour un peu oublier ses démons, au moins pour ce soir. Parce que ce contact avait une saveur assez délicieuse, au goût de Tom. C'était doux et tendre, plus que lorsqu'il la cajolait gamine quand elle venait de tomber pour qu'elle arrête de pleurer. Tous les enfants grandissent, mais il fallait avouer que c'était une réalité à laquelle il ne se ferait probablement jamais. Dans tous les cas, l'amadouer n'aura pas servi pour lui faire avouer la vérité. C'était lui, le meilleur ! Et la voir ainsi le narguer, faire mine de l'admettre pour finalement lui lancer ce regard narquois, ça le fit rigoler de plus belle. « Quelle saleté, j'y crois pas ! » Il lui colla un bisou sur le front, puis finit par se réinstaller sur le canapé, un peu plus sérieux cette fois. Il n'était pas venu pour rire, en fait. Elle n'allait pas bien, c'était évident. Ils pourraient se changer l'esprit et tout ce qu'ils voulaient, mais cela n'enlèverait pas le problème de fond. C'était comme repeindre un mur en train de s'écrouler. On maquille la façade, on rend les choses plus belles, mais derrière, c'est l'effondrement. Cela n'en valait pas la peine. Ça lui pince quand même un peu le cœur de la voir admettre que s'il lui laissait la possibilité, son tee-shirt pourrait bel et bien se retrouver trempé de larmes. « Je ne dis jamais de paroles en l'air. Si t'as besoin de pleurer sur moi, tu peux y aller. »

Mais au lieu de se laisser aller à une séquence émotion, la brune ficha le camp pour aller mettre les pizzas au four. Ce qui fit râler un peu le blond, il fallait bien l'admettre. Ceci dit, le prétexte alimentaire était valable, ce qui le retint d'aller la chercher par la peau des fesses pour la ramener sous le canapé. Au moins, il eut droit à l'air théâtral de honte de la jeune femme. « T'inquiète, j'ai mes médocs. J'ai pris l'habitude. » Et c'était pas bien du tout. Mais il n'avait jamais pu se résoudre à abandonner pizza, gâteaux, produits laitiers à cause de ce foutu lactose. Il préférait de loin passer un court mauvais moment. Le temps de la digestion, quoi. Camilla ne vivait pas exactement le genre de mauvais moment, et c'était le sujet sensible sur lequel le blond voulut revenir. Rien. Elle n'avait donc rien foutu, s'était laissée couler dans son coin. Faire des reproches n'était pas la bonne solution, aussi, Tom préféra soupirer en se rapprochant d'elle. Elle se cache, fuit le regard, passe aux aveux. Le pincement au cœur revient ; s'il avait eu la chance d'avoir assez d'optimisme dans sa vie pour ne pas trop se laisser happer par ses pensées sombres, il avait eu de l'entourage pour le faire. D'abord, ça se renfermait, ensuite il y avait la recherche désespérée d'un échappatoire. Malheureusement, il était bien rare que cela se solde par du sport, une activité manuelle, un engagement, ce genre de résultat positif. Il y avait d'autres vices plus accessibles, plus addictifs. Sexe, alcool, drogue. « Cam. » Il l'appelle, doucement, vient prendre ses mains pour qu'elle puisse le regarder au lieu de se cacher. « Tu n'es pas obligée d'aller travailler si tu ne t'en sens pas capable. Mais ne t'enferme pas, sors voir des gens. Viens me voir, même si je suis au boulot. Tu peux me parler ma belle, tu le sais. » Il embrasse ses mains tendrement, lui sourit. « Tu ne pourras pas toujours tout garder pour toi. Ça va finir par t'étouffer et ce n'est pas ce dont tu as besoin.Tu ne penses pas ? » C'était son avis à lui, en tout cas. Tout ce qu'il voulait, c'était qu'elle aille mieux.

Il avait pourtant fait son temps à jouer le grand frère entre Bonnie et Aline. Deux têtes de mule comme pas possible qui préféreraient se ridiculiser en public plutôt que d'avouer leur amour fraternel, certes. Dans un sens, Camilla faisait pareil. Ils étaient toujours à se chamailler et se lancer des petites vacheries inoffensives. Peut-être que la seule chose qui différenciait la jeune Clarke des tignasses blondes Berenson, c'était que jusqu'à aujourd'hui, ils n'avaient pas encore affronté de sales moments ou de tension. De mémoire, Tom ne se souvenait pas d'une seule fois où cela avait été tendu entre eux au point qu'ils n'aient même pas envie de se voir. Enfin, du côté du jeune homme, il avait déjà voulu fuir la petite brune pendant approximativement trois jours après sa coucherie avec Felix, avant de se dire tout simplement que cela serait un secret que personne ne saurait. Dans tous les cas ce soir, l'ambiance n'était pas vraiment légère, absolument pas joyeuse. Il n'y avait pas de sourires vraiment spontanés, encore moins de rire venant du fond du cœur. Le problème était que Tom n'était pas de ceux qui optaient pour la facilité, qui se disait que changer les idées de Cam un soir suffirait. S'il y avait un problème de fond, alors c'était lui dont ils devaient s'occuper. Tant pis si cela devait mener à des larmes et à un moral au fond des chaussettes.

Et malgré tout, il ne peut s'empêcher d'avoir le cœur serré de la voir aussi malheureuse. L'armure finit par tomber, les larmes perlent au bord des cils, et il en vient même à regretter d'avoir voulu la faire parler. Parce que sans savoir le fin fond de la vérité, il sait que ça l'atteindra aussi directement. Alors il la laisse juste parler, aller à son rythme, a juste une main posée près de son genou pour marquer un contact physique. La mort de son meilleur ami, il savait. Mais qu'il y ait autre chose derrière de bien assez important pour la couper du reste du monde et d'elle-même ? Il ne voulait pas laisser son imagination s'affoler. La vérité se suffit à elle-même puisqu'elle franchit les lèvres de la belle et donne le feu vert pour les larmes amères. Elle a été agressée. C'est donc pour ça, ce comportement. « Merde, Cam... » Complexité de l'être humain et des émotions, maelstrom de colère, d'inquiétude, de curiosité, de compassion. Il préfère ne pas parler à ce moment précis, prend juste la jeune femme dans ses bras, enfouit son nez dans ses cheveux. Juste pour la bercer, la calmer. Se détendre lui aussi pour pouvoir l'aider. « Qu'est-ce qu'il s'est passé ? Tu as vu à quoi il ressemblait ? On pourrait... faire quelque chose, au moins aller faire une déposition. » Il ne croyait pas franchement qu'ils retrouveraient le collier et à vrai dire, c'était le cadet des préoccupations de Tom à cet instant. Mais s'il y avait des caméras à proximité, ils pourraient peut-être retrouver ce connard et lui faire payer le fait de s'en être pris à une femme. À Cam, surtout.

« Cam. » Il desserra son étreinte, pencha la tête pour avoir son attention. « C'est fini. Tu es saine et sauve, et surtout bien plus forte que lui. Ne le laisse pas avoir la victoire sur toi, d'accord ? » Il prend sa main, dépose un baiser sur sa paume, regard toujours rivé sur la paire d'yeux toujours remplie de larmes. « Tu n'es pas toute seule. »

En temps normal, quand il se retrouvait face à une situation difficile, Tom prenait les choses à la dérision. Il pouvait plaisanter de n'importe quoi juste parce que cela lui donnait la sensation de mieux gérer. Mais là, il n'arrivait pas à sourire, pas à trouver le moindre mot pour alléger cette tension. Il saisissait bien trop la gravité des faits. Camilla avait été agressée, et c'était ce qui justifiait son état craintif et abattu. La mort de son meilleur ami, un des seuls vers qui elle aurait pu se tourner et qui l'aurait connue assez bien pour pouvoir la soulager de ce traumatisme, n'avait pas pu aider. « Je vais pas m'attirer de problèmes Cam. J'suis pas capable de me battre ou quoique ce soit. Mais... T'avais pas à faire ça seule. Tu as été courageuse quand même, je suis fier de toi. » Il lui embrasse le front doucement, continue de serrer sa prise sur les épaules de la brunette. Il n'irait pas chercher des noises à ce type, non. Il était plutôt le genre à faire ses recherches, aller expliquer aux proches quel genre de connard leur fils/frère/ami était avec une femme sans défense. Lui pourrir sa réputation, générer la honte dans les yeux des personnes qu'il aime. Il faudrait donc prendre contact avec le détective Hammond. C'était noté. Juste que pour l'instant, ses idées de revanche étaient laissées derrière. Il voulait juste que Cam aille mieux et aussi tragique que cela soit, ce n'était pas retrouver ce type qui changerait quoique ce soit.

Il ne veut pas voir de peur, de tristesse ou quoique ce soit tâcher ce beau visage. Il le dit avec une telle conviction, un tel besoin qu'elle le croit qu'il sent son cœur se détendre un peu en voyant le sourire revenir. Ça lui fait du bien, au point que l'affection déborde. Il resserre son bras, enfonce doucement ses doigts dans le creux de ses reins, vient glisser les doigts de sa main libre dans la chevelure bouclée. Les baisers sur sa joue, l'intensité du regard noisette. Il ne sait pas trop à quoi il s'attend à ce moment précis. Certainement pas à ce qu'elle se lève, comme montée sur ressort. Elle les ramène brusquement à la réalité avec la mention d'une odeur évidente de brûlé. « Merde. » Il hésite entre grogner et rigoler, se lève un peu plus mollement que la jeune femme pour la rejoindre dans la cuisine. La fumée noirâtre qui s'échappe du four ne laisse que peu d'espoir pour les pizzas. Par acquis de conscience, il jette quand même un œil. Rien à sauver, juste du brûlé carbonisé. « De la chance ? » Il grimace, vient se coller dans son dos et passer ses bras autour de ses épaules. « Et tu vas me nourrir comment maintenant, hein ? » Il esquisse un sourire qu'elle ne peut pas voir, avant de fourrer son nez dans les cheveux pour trouver un coin de peau du côté de son cou et y coller un baiser. « J'sais que j'ai pris un peu de poids et que techniquement, ça me fait des réserves pour tenir en cas de famine. Mais je m'attendais à ce qu'on m'affame ce soir. » Il rigole encore ; ça semble plus facile maintenant que leur drame commun prend la forme d'une pizza immangeable.

Il n'avait plus envie de parler de cette agression. Pour elle comme pour lui, il n'avait pas la sensation que cela puisse leur être bénéfique. Tom savait que si ça ne tenait qu'à lui, il irait directement voir ce foutu détective pour lui tirer les vers du nez. Il savait qu'il serait parfaitement capable de laisser la diplomatie de côté s'il s'agissait de faire amèrement regretter à cette ordure ce qu'il avait pu faire. Mais du côté de Camilla, ça ne changerait rien à la fin. Le mal était fait, l'absence du collier n'était qu'une preuve de ce que ce type lui avait pris. Un bien matériel auquel elle tenait, mais aussi sa tranquillité d'esprit. Comment sortir de chez soi quand on assimilait la rue à un endroit dangereux dont on avait déjà fait les frais ? Cela semblait compliqué. Ça mettrait du temps bien évidemment, mais le mieux était d'oublier et de laisser ça derrière. En reparler encore et encore n'aiderait absolument pas. Au moins, la pizza leur faisait une bonne distraction. Dramatique distraction, qui annonçait que le repas tant attendu ne serait finalement pas composé de pizza. Il doit avouer qu'il cligne un peu bêtement des yeux, relève la tête qu'il avait reposée contre le cou de la jeune femme pour l'observer. De la soupe, genre... vraiment ? « Hein ? » Elle a ce sourire taquin qui lui va tellement bien alors il se laisse aller à rire lui aussi. Pas définitivement traumatisée la crevette, la preuve, elle gardait du répondant. Il ne comptait pas manger de la soupe, quitte à patienter sagement que le livreur se ramène jusqu'ici. C'était pour lui. Ceci dit, s'il avait su, il l'aurait plutôt invitée au restaurant. Remarque, il n'était pas trop tard, et ça lui ferait du bien de sortir...

Toujours emprisonnée dans ses bras, Cam finit par se retourner, continuant de l'observer avec cet air malicieux qui fait pétiller ses yeux. Tom ne sait pas trop quoi en penser, se contente de sourire bêtement sans desserrer sa prise. Il y a de la tendresse qui déborde pour ce petit bout de femme, ça a toujours été le cas. Mais qu'elle répète le menu décevant du soir en venant pincer la peau du ventre qui a pris un peu ses aises ? Elle ne le lâche pas des yeux, peut capter toutes ses émotions. « Qu'on soit clairs ma belle, tu ne me feras pas avaler une seule cuillère de soupe. » Il relâche sa prise doucement, surtout pour que ses mains puissent atteindre les côtes de Cam et les chatouiller. Il s'arrange pour qu'elle ne puisse pas filer. Coincée. « Non mais tu vas voir ce que ça fait d'essayer de mettre un estomac à la diète ! » Prestement, il se baissa, passa un bras sous les fesses de la jeune femme pour la hisser jusque sur son épaule tel un sac à patates. Un bras pour la maintenir, un autre pour continuer de la chatouiller. Geste qui la faisait gigoter avec une telle force que malgré sa concentration sur le chemin qui reliait la cuisine au canapé, Tom finit par perdre l'équilibre, trébucher sur le chien qui s'était mis en travers de sa route. Et là, c'était la chute.

Le blond eut tout juste le temps de repousser le sac à patates vivant avant de tomber lamentablement sur le dos, Camilla sur son torse. « Outch. » Étendu au sol, les bras en croix, il releva la tête pour s'assurer que la brune allait bien. Oui, visiblement. « Tu vois, je manque déjà d'énergie. » Il rigole puis ferme les yeux quelques secondes. Il était bien, au sol. Aussi étrange que cela puisse paraître, il y avait un côté reposant à relâcher tout les muscles, ne plus avoir conscience que de son corps et celui de Cam, écrasé sur le sien.

Allongé sur le dos, les yeux fermés, il grogne en entendant la jeune femme se moquer. Il utilise le prétexte de l'absence de nourriture, de pizza plus spécifiquement, mais il faut avouer qu'il s'est bien ramassé. Et puis d'une certaine manière, il est bien allongé au sol, Cam sur lui. Elle lui tient chaud, et puis les baisers qu'elle vient balader sur son visage n'arrangent pas les choses. Il se sent juste bien, a même le réflexe de lever un bras pour le passer dans le dos de la jeune femme, faisant ressembler cette proximité à une étreinte. « Ca irait mieux si j'avais une pizza, mais vu que tu as fait ta miss catastrophe, je vais m'en contenter. » Il lui tire la langue, jouant le gamin, et ça le fait rire une seconde avant de tout simplement refermer les yeux. Mais la main glisse dans son cou, les lèvres de l'autre côté de son visage, et il a du mal à se concentrer sur le fil des événements. C'est ce qui le fait rouvrir les yeux, lancer un regard interrogateur qui ne trouve pas de réponse. Lui, il caresse juste le dos de la blonde, distraitement. « J'ai encore de la force. J'ai pas besoin de ta soupe. Ça sert à rien d'insister, j'en mangerai pas. » Et il ferait son borné jusqu'au bout, c'était une question de principes à ce niveau là !
Cependant, il n'avait pas la sensation que la soupe soit vraiment le sujet principal à ce moment là. Elle ne se tenait pas tranquille, à califourchon sur lui. Les baisers déviaient un peu trop. Et lui.... lui, il ne savait pas comment il devait réagir. Il y avait son bras qui resserrait la pression, gardant le corps frêle contre lui, et l'esprit qui commençait à avoir de mauvaises idées. Au point que sans prévenir, il se redressa et fit basculer la belle pour venir la surplomber, échangeant ainsi leur place. « Tu vois que j'ai encore de la force. » Il hausse un sourcil, ironique. Mais à vrai dire, collé à elle sans lui laisser assez d'espace pour s'échapper, il se sent perdre pied. Les iris clairs se rencontrent, s'accrochent. Il y a cette vague d'affection qui le bouscule. Putain ce qu'il peut l'aimer ce bout de femme. « Essaye de t'enfuir tiens. » Il murmure, la voix plus rauque qu'à l'accoutumée, avant de faire une connerie bien trop tentante. Il ne prend pas la peine de faire des détours comme elle l'a fait, colle directement ses lèvres contre les siennes. Et lui, ça lui fait tout oublier à cet instant précis. Cam devrait essayer de faire de même.