○ event saint valentin (maya & robin)

C’est vrai, au moins ils auraient vu son appel, c’était déjà pas mal. Et puis il faudrait s’en contenter pour le moment en tout cas. Elle rangea son téléphone mais pas dans le fond de son sac à dos, de manière à ne pas avoir à le retourner si jamais les organisateurs venaient à les rappeler mais jeta un coup d’œil à son écran puisque Maya venait de lui poser la question par rapport à ce qu’il lui restait de batterie de son côté. La vérité, c’est qu’elle n’attendait pas grand-chose de son Iphone. Robin n’était pas une très grande fan de la marque Apple, n’achetait pas toutes les nouveautés qu’ils sortaient parce que bon, elle n’était pas des plus riches non plus, c’était donc surtout un question de budget mais elle avait tout de même un Iphone. Un modèle plus ancien qui tenait encore dans la paume de la main. Tout ça pour dire qu’en termes de durée de vie de batterie, on a connu mieux. Mais à sa grande surprise, ç’aurait pu être pire.

« Dans les 70%, je vais couper la 4G. »

Elle pourrait économiser sa batterie autant que possible en le mettant en mode avion mais serait-ce bien judicieux ? Ça reviendrait à louper l’appel des organisateurs si jamais ils rappelaient, donc non. Bon, se passer de la 4G était de loin la meilleure des solutions.

Oups, il semblerait qu’elle ait parlé trop vite et c’est la nature elle-même qui la rappela à l’ordre. Suivie de la jolie blonde qui lui fit comprendre qu’elle ferait mieux de la boucler au lieu de leur attirer malheur. Elle n’avait pas tort pour le coup, raison pour laquelle la médium sourit et fit le signe de sceller ses lèvres. S’ensuivit alors une discussion ce qu’elles savaient toutes les deux des orages. Car oui, très clairement, il ne fallait pas être Einstein pour savoir que se trouver au beau milieu de la forêt par temps orageux, ça craint. Elle fouilla rapidement sa mémoire pour en ressortir tout ce qu’elle savait de ce phénomène naturel.
« Hum j’ai lu que moins tu as de la hauteur et moins tu risques de te transformer en paratonnerre ambulant mais je me demande si je n’ai pas aussi lu que c’était une intox. En théorie, la semelle de nos baskets va nous aider à ne pas finir carbonisées. Et dans le pire des cas, même si on se fait toucher par la foudre, on peut y survivre. D’ailleurs ça laisse une très jolie cicatrice. »
Ce qui n’était même pas une blague, elle avait vu à quoi ça ressemblait et elle trouvait ça joli. Bien que ça soit effectivement une cicatrice.

« Cherchons une grotte ou bien un refuge de chasseurs. »

Ça devait bien se trouver, non ?

Dans une situation telle que celle-ci, c’est toujours les bons vieux Nokia 3310 que l’on devrait emporter avec soi. Bon okay, ça signifiait pas d’internet mais une chance que la batterie ne se vide pas avant une semaine, ce qui était quand même pas mal si jamais il fallait appeler à l’aide comme c’était le cas en l’occurrence. C’est la conclusion que Robin en tira lorsque Maya lui annonça qu’elle avait déjà 5% de batterie en moins et plus de réseau. Ma foi, le réseau avait toujours été un problème de toute façon. La médium répondit elle aussi d’un haussement d’épaules avant de la suivre d’un coup de pédales. La remarque au sujet de la cicatrice laissée par la foudre la fit pouffer ; les cicatrices ne l’avaient jamais dérangée, au contraire, elle trouvait que ça donnait un certain charme à la personne parce que ça témoignait qu’elle non plus, comme personne d’ailleurs, n’avait eu droit à un traitement de faveur par la vie. Mais ça ne voulait pas non plus dire qu’elle avait plus envie que ça de se faire foudroyer, alors elle chercha des yeux un abri, quel qu’il soit mais c’est son binôme qui fut la plus rapide. Pile au moment où il se mettait à pleuvoir à verses, la blonde venait d’apercevoir une cabane. Possiblement celle d’un chasseur comme elle venait de le mentionner ou encore celle du garde-chasse, peu importait tant qu’elles parvenaient à se mettre au sec.

« Ouais bien sûr, allons-y ! »

C’est qu’elles n’avaient pas tellement le choix de toute façon ; elles avaient même déjà pas mal de chance d’être tombées là-dessus. Non bien sûr, les cabanes dans les bois pas non plus quelque chose de rare mais elles auraient pu mettre du temps avant de trouver quelque chose. Il n’y avait donc plus qu’à croiser les doigts pour qu’elles ne se retrouvent pas face à une porte close. Mais non, la porte se laissa ouvrir sans opposer la moindre résistance. Robin posa son regard sur ce qui l’entourait. En vérité, malgré le fauteuil posé dans un coin de la pièce, ça ressemblait plus à un abri de jardin qu’autre chose. Aucune trace d’électricité ni d’eau courante mais hé, ça ferait bien l’affaire ; après tout, elles cherchaient à s’abriter une heure ou deux, en fonction de l’orage, et pas à y passer le week-end. Maya revint ensuite vers elle en lui montrant les vivres qu’elle avait trouvé. En précisant qu’elle n’y toucherait pas parce qu’elle était vegan.

« Ça m’étonne pas, doit pas y avoir l’électricité. »

En revanche, elle avait vu quelques livres tout à côté du fauteuil. Robin imita la jolie blonde et se défit de ses vêtements trempés histoire de ne pas attraper la crève par-dessus le marché.

« Merci pour ça. Je pense pas y toucher non plus, va savoir depuis quand ça traîne là. Mais en temps normal, je ne suis pas vegan, non. Je pourrais mieux me rapprocher des végétariens à la rigueur… Je peux te poser une question ? N’y vois pas d’attaque quelconque, je suis juste curieuse. Comment on en arrive à bannir tous les produits d’origine animale ? »

A moins bien sûr que ça ne soit une nécessité.

Apparemment, Maya avait pris la peine de vérifier la date de péremption avant de lui proposer ces victuailles. Et de toute manière, Robin n’était pas vraiment du genre à les suivre au pied de la lettre ; elle savait que c’était une obligation pour les magasins d’en apposer une et pas trop tardive qui plus est. Sans doute pour qu’on consomme plus, c’est toujours le but. Mais elle ne savait pas ce qui la chiffonnait. Peut-être le simple fait de voler les vivres du propriétaire ; elle n’aimait pas trop non plus l’idée que la personne se retrouve sans rien lorsqu’elle viendrait. Même s’il s’agissait en effet d’un chasseur. Alors qu’on est pourtant tous d’accord là-dessus, ces gens-là méritent carrément de se faire empaler par le cerf qu’ils chassent. Mais bon soit, il y avait tout de même le risque qu’il s’agisse juste d’un amoureux de la nature et c’était là que se trouvait le problème.

« Ah, c’est gentil merci mais ça ira. D’ailleurs, j’ai des barres de céréales dans mon sac à dos si jamais t’as besoin. »

Puis s’ensuivit un cours sur le véganisme, comme elle l’avait demandé. C’était toujours intéressant de connaître les motivations des gens, surtout lorsqu’ils se lançaient dans des causes telles que celle-là. La médium écoutait en hochant la tête de temps à autre. Ça lui semblait assez logique qu’on se dévoue pour le bien être des animaux. Du moins à ses yeux. En revanche, il y avait quelques points qu’elle ne saisissait toujours pas.

« Hum, je vois. Mais dans le cas du miel par exemple, ça fait du mal aux abeilles ? »

Ou bien le lait ? C’étaient toujours ces questions précises qui lui revenaient en tête lorsqu’on parlait des vegans. Mais bon clairement, Robin n’avait rien d’une apicultrice ou d’une agricultrice : qu’est-ce qu’elle en savait ?
Là-dessus, la blonde l’informa de l’état des fauteuils mais trouvait le canapé douteux. Ça ne lui faisait pas peur à Robin. Après tout, elle était l’aînée de cinq enfants à peu près tous élevés par leur mère uniquement donc elle n’avait pas pour habitude de faire la difficile. En revanche, elle n’était pas contre l’idée d’un petit jeu de société s’il y en avait parce qu’elles étaient coincées là pour allez savoir combien de temps et que, bien qu’elle soit plutôt du genre sociable, c’était peut-être un peu compliqué de meubler une conversation tout du long avec quelqu’un qu’on ne connaît pas encore plutôt que de se regarder dans le blanc des yeux. Elle se mit donc en quête d’un Monopoly ou d’un Scrabble mais ce qu’elle trouva était bien mieux : un Cluedo de voyage. Bon okay, c’était plus marrant quand on était plus nombreux mais bon.

« Un petit Cluedo, ça te tente ? Promis, je tricherai pas, je regarderai pas les cartes. Sinon y a un jeu de cartes classiques. »

Le fait qu’elle n’était pas apicultrice n’avait jamais été plus flagrant qu’en cet instant. Effectivement, Robin n’avait pas la moindre idée que récolter du miel pouvait faire autant de mal aux abeilles. Tout ce qu’elle savait c’est qu’en les enfumait et certes, ça peut évidemment créer un stress comme ça serait le cas pour n’importe qui mais c’était tout. Bon ben, elle aurait au moins appris plein de trucs. De là à dire que ça la persuaderait de ne plus consommer de miel en revanche, c’était une autre histoire mais ce n’était pas comme si elle en avalait des kilos non plus. D’ailleurs, c’était une sacrée chance que ça soit une denrée non-périssable car clairement, son pot avait dépassé la date de péremption depuis belle lurette. Enfin bref, au moins maintenant, elle était au courant et c’était le plus important. Robin hocha donc une fois de plus la tête tandis que Maya lui disait qu’elle n’épiloguerait pas plus sur le sujet puisque, de toute évidence, ça lui tenait vraiment beaucoup à cœur, ce qu’elle comprenait parfaitement.

« Ben tu vois, ça, je le savais pas donc merci d’avoir éclairé ma lanterne ! »

Là-dessus, elles optèrent pour une petite partie de Cluedo. La jolie blonde lui fit savoir qu’il ne valait mieux pas qu’elle triche, sans quoi elle risquait de piquer une crise. Ce qui fit sourire la médium ; elle avait l’habitude, avec ses frères et sœurs, il y avait même eu une époque où elle faisait exprès de perdre pour éviter de les entendre chouiner durant des heures. Elle se tourna pour lui montrer qu’elle faisait le signe croix de bois, croix de fer. Robin se chargea alors de mettre tout en place et la partie commença.

Jusqu’à ce qu’un bruit retentissant vienne les interrompre. Ça ressemblait effectivement à un moteur, raison pour laquelle elle se leva pour jeter un coup d’œil par la fenêtre. Elle s’attendait à voir un quad ou quelque chose comme ça. Mais elle ne vit rien. Elle haussa les épaules.

« Y a rien dehors en tout cas. »

Mais le bruit résonna de nouveau. Et c’est là qu’elle le vit. Un ours. La peur lui serra l’estomac une seconde.

« Euh… en fait si. Y a un ours dehors. Faisons le moins de bruit possible. »

A vrai dire, Robin n’avait pas la moindre idée de ce qu’il fallait faire dans ce cas précis mais elle n’avait pas la moindre envie d’attirer son attention d’une quelconque façon. Elle tira tout doucement le verrou comme si allait les protéger d’une attaque d’ours.

Il est vrai qu’on peut tous faire des efforts en ce qui concerne le véganisme. Boycotter le cuir – même si c’est tellement hors de prix que beaucoup de gens le font déjà -, réduire sa consommation de viande – pas très difficile pour Robin qui n’a de toute façon jamais été une grande fan, sans compter qu’entre son job au musée et celui de médium, elle n’en mangeait que tous les trente-six du mois, préférant les pizzas et les pasta box qu’on peut réchauffer au micro-ondes – ainsi de suite. Même en ce qui concernait le miel, elle faisait déjà des efforts sans forcément s’en rendre compte. Au final, là où ça péchait vraiment en ce qui la concernait, c’était au niveau des œufs et du lait. L’un des jumeaux étaient intolérant au lactose et il avait fallu faire avec lorsqu’il était question de faire des gâteaux et des cookies mais Robin avait été ravie de quitter le foyer familial pour de nouveau pouvoir goûter aux joies du vrai lait et pas de ses mille et un substituts qui font pâle figure à côté. Mais bref, d’un hochement de tête, la médium promit qu’elle tâcherait de faire encore un peu plus attention. Pas spécialement pour faire plaisir à Maya mais parce qu’elle aimait les animaux. Pratiquement tous. Même les ours, tiens. Ce qui est une excellente transition, étant donné qu’elle était justement en train d’en voir un par la fenêtre.

Son binôme du jour la questionna alors sur ce qu’il fallait faire dans un cas pareil. Et, si Robin avait un peu regretté de ne pas être apicultrice il y a quelques minutes à peine, elle regrettait à présent de ne pas être ranger. Sûr que ça serait utile, elle pourrait répondre à cette question.
Pour l’instant, l’ours n’avait pas du tout l’air de se soucier de leur présence, pas plus que de l’orage ainsi que des trombes d’eau qui lui tombaient sur le dos. Bon, Robin fouilla sa mémoire à la recherche de potentielles infos sur les ours mais il s’avéra que la plupart provenaient de jeux vidéo auxquels elle jouait avec ses frangins parfois.

« Alors j’y connais rien mais je pense qu’attirer son attention soit la pire des idées qui soit. S’il nous voit, il nous foncera probablement dessus et là, on peut dire adieu à la vie parce qu’il courra toujours plus vite que nous. Non, si on doit vraiment sortir d’ici, faisons dans la discrétion. »

Elle avait dit ça dans un murmure et puis si ça se trouve, il n’y aurait même pas besoin de sortir de là, peut-être que l’ours finirait par aller voir ailleurs tout seul comme un grand. En revanche, elle pouvait oublier la partie de Cluedo pour le moment, elles étaient et seraient un peu trop tendues pour ça jusqu’à ce qu’il parte.