(maxyne) manqué de peu, touché en plein coeur

10 mars 2020, wellington.
with @Maxyne Oakley

Piotr était arrivé en Nouvelle-Zélande il y avait seulement quelques jours de cela. Et dans trois jours, c'était son anniversaire. Il allait avoir vingt ans et allait sûrement passer cette date fatidique seul, comme un con, dans sa chambre d'hôtel. A moins qu'il fasse justement quelque chose de cool pour cette journée là ? Ça pourrait être chouette ça, non ? Oui, sûrement, mais bon... être tout seul le jour de son anniversaire, c'était quand même franchement la merde. Depuis son arrivée, Piotr logeait à l'hôtel et il avait eu le temps de visiter un peu la ville. Il aimait beaucoup la Nouvelle-Zélande, c'était différent de l'Australie, c'était... plus calme, plus doux et surtout plus tranquille. Il n'y avait cependant rien de comparable avec la Russie, c'était un fait indéniable. Les journées du petit russe étaient toutes différentes les unes des autres. En véritable touriste, il s'amusait à tout découvrir, à s'arrêter manger dans des petits restaurants, à sortir le soir dans le centre-ville, à faire tous les endroits cultes de la ville qu'il se devait de voir. Le seul point négatif à tout cela, c'était qu'il s'était rendu compte qu'il avait perdu son passeport. Il avait voulu réserver un billet sur internet pour prévoir son « après » Nouvelle-Zélande, sauf que là... impossible de mettre la main dessus. Il avait donc appelé l'aéroport, essayé d'appeler la société de taxi ou même l'hôtel où il se trouvait. Il ne parvenait pas à se souvenir de la dernière fois où il l'avait trouvé. Et c'était un peu embêtant, car il ne pourrait pas repartir comme prévu de cette petite île. Ça l'angoissait beaucoup, et il avait même écrit à son père pour lui demander quoi faire. Mais ce dernier n'avait pas encore prit le temps de lui répondre, bon en même temps, cela ne faisait que quelques heures qu'il s'en était rendu compte. Bref, pour le moment, il se disait juste qu'il l'avait perdu et qu'il allait bien finir par le retrouver, donc en soi : il n'y avait rien de grave, pas vrai ? Mais dans le doute, Piotr avait décidé de se rendre à l'Ambassade, histoire de demander ce qu'il pouvait faire au cas où. Alors qu'il était sur le chemin pour celle-ci, son téléphone sonna. Par réflexe, il enfonça sa main dans sa poche, pour en sortir son portable. C'était son père qui le rappelait. En russe, il décrocha donc « allô papa ? » avant de s'arrêter devant le passage piétons. « Ouais ouais ça va, et toi ? » son regard se perdait sur la rangée de voiture qui n'allait pas tarder à passer devant lui. « Ouais j'arrive plus à le retrouver, je vais à l'ambassade là justement pour demander ce que je dois faire » il roula les yeux et ajouta en soupirant « non mais j'ai déjà cherché partout papa, j'ai appelé tous les endroits que j'ai fait depuis que je suis arrivé » avant de laisser son père parler dans un monologue sans fin. Il lui expliquait qu'il était irresponsable, mais qu'il était surtout sûr qu'il n'ait pas regardé partout correctement. Mais qu'au cas où, il connaissait des gens qui le feraient rentrer au pays. Sauf que Piotr lui, n'avait pas envie de rentrer en Russie. « Je dois te laisser papa, j'arrive à l'ambassade » menti alors le jeune russe. Après quelques secondes, il raccrocha en soupirant. Un homme à côté de lui commença à avancer sur le passage piéton. Par réflexe, il suivi le mouvement en pensant que le feu était au vert. Grosse erreur. Un moteur se fit entendre, des cris résonnèrent. Il vit une moto arriver droit sur lui et la peur le tétanisa. Le seul réflexe qu'il eu, c'était de se tourner au trois quarts, comme si son dos allait être plus résistant. Il senti simplement sa chemise -ouverte sur un petit marcel- se prendre dans quelque chose. Il fut alors tiré en avant, par la moto et après seulement un mètre, il perdit l'équilibre pour tomber sur le béton de la rue. Son pouce craqua. Aïe.

Maxyne était dans de beaux draps. Un de ses voisins s’était encore plaint auprès du proprio de son appartement pour tapage nocturne. Il l’avait avertie : encore un seul retour négatif de la part du voisinage et il la virerait. Ça n’avait pas manqué. La blonde avait moins d’un mois pour dégager les lieux. Si son frère avait été présent et vivait toujours avec elle, le propriétaire n’aurait jamais osé agir de la sorte mais il se disait que la nageuse était plus facilement impressionnable. A tort. Max était bien entourée et était capable d’user de tous les recours possibles pour faire trainer l’affaire. Cependant, elle hésitait à lui créer des ennuis ou à saisir l’opportunité pour déménager. En effet, l’entente entre le propriétaire, le voisinage et elle n’était plus au beau fixe depuis qu’elle sortait tous les soirs ou organisaient des fêtes jusque tard dans la nuit. De plus, Max rencontrait des difficultés à payer pour un appartement dans le centre qu’ils occupaient à deux avec son frère avant. Elle n’arrivait plus à gérer toute seule et toutes ses économies y étaient passées. Voilà donc que Max rentrait d’avoir visité un autre appartement, une visite peu concluante puisque l’endroit était un véritable taudis délabré. La jeune femme n’était pas désespérée à ce point mais le temps pressait. Dans la lune sur sa moto, elle redémarra machinalement lorsque le feu passa au vert pour les automobilistes. Un piéton s’avança et recula aussi vite. Elle cria et adressa un geste pour qu’il recule. Cependant, elle sentit très vite un poids sur la moto et un regard vers l’arrière lui donna une vision d’horreur. Le vêtement d’un second piéton, qu’elle n’avait pas vu, s’était accroché à sa moto et il venait de perdre l’équilibre sur la rue, tiré par l’engin. Max freina aussi sec et manqua de passer par-dessus sa machine sous la violence de l’arrêt. Elle déposa rapidement la moto sur le bas-côté pour ne pas gêner la circulation et retira son casque, catastrophée. « Oh mon dieu ! Est-ce que vous allez bien ? » Max abandonna son casque près de sa Triumph et se précipita aux côtés du jeune homme qu’elle avait percuté pour l’aider et vérifier son état. « Je suis tellement navrée. Le feu était vert et je ne t’ai pas vu à temps. Tu veux que j’appelle les secours ? » Face à la jeunesse apparente de son interlocuteur, elle était passée au tutoiement. Au diable les manières dans un tel contexte. Les mains de la nageuse tremblaient sous le coup du stress et de l’adrénaline. Une partie des vêtements de la victime étaient déchirés, la peau était écorchée à certains endroits mais il n’avait pas l’air d’être touché à la tête. Ebranlée, Max se repassa le film du télescopage. A vrai dire, il avait grillé le feu mais elle n’y pensait pas pour l’instant. Elle n’avait jamais eu d’accident de moto, encore moins percuté quelqu’un. Pour l’heure, elle priait pour ne pas l’avoir sérieusement blessé. « Viens, on va s’écarter de la route. » Max l’aida à se redresser et à reculer pour se mettre à l’abri sur le trottoir et récupéra le téléphone qui était tombé par terre pour le lui rendre. Une voix criait à l’autre bout du fil dans une langue qu’elle ne connaissait pas.

Piotr s'était retrouvé entraîné par la moto sur le goudron. Ses pieds n'allant pas aussi vite que l'engin, il ne tarda pas à chuter et malheureusement à mal tomber. Son pouce craqua, mais il ne s'en rendit pas compte tout de suite. L'adrénaline, le choc, la chute toute entière sur le goudron... il y avait trop de choses. Alors qu'il était par terre, après que son genoux ait touché le sol, que ses vêtements aient craqués et que sa peau se soit écorchée, il entendit rapidement une voix féminine venir à lui. Une jolie blonde, propriétaire de la moto, s'approchait de lui, paniquée. Piotr avait du mal à comprendre ce qu'elle disait, parce que sous le coup du stress, elle parlait très vite. Et lui, sous le coup du choc, il ne comprenait pas comme d'habitude l'anglais. Alors, un peu perdu, il répondit juste « ça va, ça va » avec son gros accent de l'est. Il lui leva sa main dans un geste rassurant. Elle voulait appeler les secours, et Piotr ne s'était pas encore rendu compte ni de son état, ni de ce qu'il s'était vraiment passé. Quand la jolie blonde l'entraîna vers le trottoir, il la suivi et se rendit seulement compte à ce moment-là que son corps fonctionnait. Il pouvait marcher, il ne semblait pas s'être foulé quoi que ce soit à ce niveau là. Par contre, arrivant sur le goudron, il se pencha en avant pour voir son jeans déchiré, sa chemise aussi (avec un bout de tissu qui pendouillait) et puis il se rendit compte que son pouce était légèrement gonflé et surtout douloureux. Il grimaça en l'observant « aïe... » lança t-il en russe, mais sur son visage, on pouvait bien voir la douleur. Une passante, qui avait assisté à la scène, lança qu'ils devraient appeler les secours. Piotr fronça les sourcils et lança alors « non non non » un peu paniqué. En fait, ici, il ne savait pas comment ça pourrait se passer pour lui, puisqu'il avait perdu ses papiers. En fait, il ne connaissait pas trop la politique par rapport aux étrangers et il ne voulait pas prendre le risque que cet incident le ramène en Russie. « Enfin... je sais pas si on est obligé ou pas, mais je préférerai pas » expliqua t-il à la blonde. Piotr la regarda alors et jeta un coup d'oeil à sa moto qu'elle avait laissé quelques mètres avant. « Vous allez bien vous ? » s'inquiéta t-il enfin. « Je suis désolé » commença t-il à dire, la voix un peu tremblante. Sa main non douloureuse vint se poser sur son front, tandis qu'il regardait la scène où avait eu lieu l'accrochage « y'a quelqu'un qui a commencé à... » il chercha le mot en anglais, un peu perdu pour le coup. « A traverser et j'ai cru que c'était le moment... » il croisa le regard de la blonde. Perdu, un peu sous le choc, un peu déboussolé et compléta « je suis désolé, c'est de ma faute ».

Toute personne censée aurait appelé les secours tout de suite et sans hésiter. Encore sous le choc de ce qui venait de se passer, Max n’avait pas encore adopté les bons réflexes si ce n’est de s’approcher du jeune homme pour vérifier son état et dégager la route pour que cet accident ne prenne pas des tournures plus dramatiques encore. Elle n’avait jamais touché quelque chose avec sa moto, encore moins percuté un piéton. Si la blonde était si troublée, en dehors de l’inquiétude qu’elle ressentait pour celui qu’elle avait heurté, c’est parce que cet incident la renvoyait violemment à son propre accident survenu sept ans auparavant, celui où son ex conduisait en lui prenant la tête par jalousie et où il avait perdu le contrôle de la voiture. Le véhicule était parti en tête à queue et ils avaient terminé à l’hôpital grièvement blessés. Paniquée à la simple idée d’infliger le même sort à une autre personne, elle n’était plus en pleine possession de ses moyens et se concentrait surtout à vérifier si le jeune homme allait bien et à le mettre à l’abri en s’écartant de la route. Navrée, elle se confondit en excuses et cacha mal les tremblements qui la parcouraient. Ce n’était pas dans les habitudes de Max de perdre pied aussi vite. Mais elle ne tarda pas à se ressaisir quand elle comprit que son interlocuteur n’était pas originaire de la région, voire du pays. L’inconnu lui assura qu’il allait bien mais en regardant son état de plus près, elle ne partageait pas son avis. Avant que la monitrice de plongée ne le contredise, il déclina la proposition d’appeler les secours, arguant qu’il ne préférait pas. Comme il semblait étranger, il avait peut-être peur des soins prodigués dans le pays ou tout simplement des hôpitaux. A moins que ce ne soit les coûts mais Max était assurée. En tout cas, il ne paraissait avoir rien de grave mais mieux valait en être certain. « Il n’y aucune obligation mais tu as l’air un peu amoché. » Il se tenait la main et grimaçait. La blonde remarqua le gonflement qui commençait. Face à la détresse du jeune homme, elle réussit enfin à se détendre et à parler d’une voix plus posée. « Ce serait mieux d’aller voir que tout va bien. » L’ambulance n’avait pas l’air nécessaire mais elle tenait quand même à l’accompagner chez un médecin ou à un endroit où il pourrait avoir un check rapide. « Tu as l’air de souffrir à la main. Ça a craqué ? Tu as mal à un autre endroit ? » L’inconnu se montra ensuite désolé et tenta d’expliquer dans un anglais brouillé ce qui s’était passé. Posant une main rassurante sur son épaule, elle lui adressa un sourire et détacha ses mots. « Ce n’est rien. J’étais tout aussi distraite. Ce sont des choses qui arrivent. L’important c’est que tu ailles bien, que rien de grave ne soit arrivé. » Il paraissait sous le choc et déboussolé, alors elle tenta de ramener la conversation à un sujet moins compliqué. « Tu viens d’où ? Tu es en vacances ici, en Nouvelle-Zélande ? » Le jeune homme avait encore l’air d’un adolescent, elle se demanda soudainement s’il était mineur et si c’était la raison pour laquelle il préférait ne pas se rendre dans un hôpital. « Je m’appelle Max et toi ? Viens, on va aller te soigner, je vais t’accompagner. » Cette fois, la voix de la jeune femme était légèrement plus ferme. Le garçon était un peu perdu et paniqué. A elle de prendre les bonnes décisions, les décisions qui s’imposaient. Elle avait foiré alors elle comptait bien l’aider.

Amoché ? Il n'était pas sûr de comprendre ce mot, mais il comprit cependant bien vite ce que cela pouvait bien dire quand ils cherchèrent à deux, les traces de l'accident sur ses vêtements ou sur son corps. La jolie blonde s'intéressa à sa main, parce que tous les deux étaient en train de l'observer et qu'effectivement, le pouce n'avait pas l'air en grande forme. Piotr observa le membre en question et quand l'inconnue lui demanda si ça avait craqué, il fit oui de la tête tout en lança tout bas « oui ». Il avait entendu un crac, c'était la vérité. Pourtant, malgré les brûlures du goudron sur sa peau, Piotr ne semblait pas avoir d'autres dommages corporels. « Non non » répondit-il alors quand aux autres dégâts. Là, il était encore un peu sous le choc, il n'était pas capable de faire de l'humour, comme il le faisait en temps normal pour se sortir d'une situation. Là, il était juste là, face à lui-même et cette femme. Il savait juste qu'il ne serait pas capable d'aller à l'hôpital. Après son agression en Russie, il n'en était pas capable. Il n'avait en plus de cela, pas ses papiers. Alors il ne voulait prendre aucun risques. La jeune femme qui l'avait accroché avec sa moto était toujours là, près de lui, à s'inquiéter pour lui. Piotr trouvait ça très gentil. Elle avait l'air de vraiment se causer du souci pour lui, à moins que ça ne soit justement un truc de psychopathe pour mieux l'enfermer dans une cave par la suite ? Piotr n'était plus en mesure de réfléchir. La jolie blonde expliqua alors son point de vue quant à l'accident. Avant de finir par demander gentiment à Piotr s'il était ici en vacances, et d'où pouvait bien venir son accent. Il hocha la tête et lança « je suis russe, je suis arrivé il y a une semaine ». Pour le fait d'être en vacances ou pas, pour le moment, il n'était pas encore capable de répondre à cette question. Sans son passeport, il allait sûrement rester plus longtemps que prévu « j'ai perdu mon passeport... je n'ai plus mes papiers » expliqua t-il alors à la jeune femme. « J'allais à l'ambassade de Russie là » dit-il en pointant du doigt l'immense bâtiment, caché derrière un autre bâtiment, à l'angle de la rue en face. Piotr passa sa main sur son visage pour souffler dedans, encore un peu chamboulé par ce qu'il venait de se passer. La jeune femme se présenta enfin, et Piotr fini par lui répondre aussi « je m'appelle Piotr ». Bien sûr, en entendant le prénom de la jeune femme, il ne pu s'empêcher de penser à Maximoff. La motarde lui lança alors qu'ils allaient ensemble aller se faire soigner, enfin, surtout lui pour le coup. Piotr regarda le sol, pour être sûr de ne rien avoir fait tomber sur le sol durant sa chute. Il tâta ses poches pour sentir son portable et son portefeuille dans ses vêtements. Il lança alors à la jeune femme « où est-ce qu'on va ? » pour montrer ses petites blessures. « Tu prends ton casque ? » demanda t-il en se tournant vers la moto, laissée tout près. Les gens autour d'eux avaient continué leur route, traversant le passage piéton, marchant sur le trottoir, s'asseyant en terrasse ou bien sortant du starbucks. Il y avait du monde et tant qu'il y avait du monde, ça le rassurait un peu. Pour le reste, il avait un peu peur d'avoir des problèmes. Bon, si c'était le cas... il appellerait son père, non ? Peut-être qu'en quelques coups de fil ça serait réglé ? Piotr suivi donc la jeune femme, marchant à côté d'elle sur le trottoir, se laissant totalement guidé puisqu'il ne connaissait pas encore la ville. « Tu es aussi en vacances ? » demanda t-il en tenant les morceaux de sa chemise qui pendouillaient dans le vide.

« Je suis vraiment désolée. » Répéta Max quand le jeune homme lui confirma que sa main avait craqué. La grimace de douleur qu’il afficha l’encouragea d’autant plus à l’accompagner chez un médecin, à défaut de l’emmener à l’hôpital. Il avait peut-être ses raisons de ne pas vouloir y aller. Afin de briser la glace et d’aider l’inconnu à encaisser le choc, la blonde fit la conversation. Ayant entendu son accent, la nageuse lui demanda s’il était en vacances. En effet, elle misait sur cette hypothèse car il n’avait pas beaucoup développé son anglais dans le cas où il vivrait en Nouvelle-Zélande. « Russe ? Oh wow, tu viens de loin. Je suis déjà allée en Russie une fois mais c’était il y a longtemps. » Max ne connaissait de ce pays qu’une compétition internationale à laquelle elle avait participé là-bas, elle ne s’était pas éternisée et ça remontait à plusieurs années. « Tu as des amis ou des proches ici ? On peut les contacter si tu veux. » Rejoignait-il des connaissances à Island Bay ? La blonde s’interrogeait car il se promenait visiblement en solitaire mais elle s’abstenait de lui poser trop de questions indiscrètes, juste le nécessaire pour qu’il soit rassuré. Il lui expliqua alors qu’il avait perdu son passeport et qu’il se rendait justement à l’ambassade russe pour remettre ses papiers en ordre. Le regard de la nageuse suivit le doigt pointé vers un grand bâtiment plus loin. Max comprenait mieux qu’il n’ait pas envie de se rendre à l’hôpital dans ces conditions. « C’est toujours embêtant de perdre ses papiers, surtout dans un autre pays. T’as déjà déclaré la perte à la police ? Normalement, ils te remettent un document. » Face à la détresse du jeune russe, la blonde se présenta enfin et proposa de l’accompagner pour se faire soigner. Il lui partagea son prénom à son tour et accepta de la suivre. « Je connais un bon médecin pas loin, il te donnera les premiers soins. » Max était née et avait grandi à Island Bay et à Wellington. C’était une enfant du pays et même de cette ville. La jeune femme connaissait énormément de gens dans les quartiers avoisinants et notamment le médecin de famille qui s’occupait des Oakley depuis qu’elle était petite. Son cabinet n’était qu’à quelques rues du lieu de l’accident. Il ne ferait pas d’histoires pour un papier manquant pour autant que Max soit aussi présente. Au moment de partir, Piotr s’inquiéta du casque de la jeune femme. « Oui. Je vais bouger un peu la moto aussi. Ne pas la laisser trainer. » Elle s’assura de garer sa moto plus près du trottoir et de la verrouiller correctement, puis elle emmena effectivement ledit casque. Alors que les deux impliqués de l’accident commencèrent à marcher côte à côte, le russe se demanda si elle aussi jouait les touristes. « Non, je suis originaire d’ici, je vis près de Wellington. » Répondit Max dans un sourire. « Et toi, tu restes jusque quand ? » Il lui avait dit qu’il était arrivé depuis une semaine alors elle supposait qu’il devait repartir prochainement. « J’aurai préféré qu’on évite ça mais au moins tu te souviendras de ton expérience ici. » Essaya-t-elle d’ajouter d’un ton léger pour détendre l’atmosphère. Le fait qu’il ne lui soit rien arrivé de grave l’aidait aussi à prendre du recul. La blonde avait bien compris que les torts étaient partagés, en grande partie à cause d’une distraction de son côté et du sien. Elle se montrait d’autant plus impliquée qu’il semblait complètement perdu et dépassé par la situation. Et surtout, très calme malgré les circonstances. D’autres se seraient montrés complètement haineux et imbuvables. « Voilà, c’est ici. » Max s’arrêta et lui indiqua la plaque du médecin devant le cabinet, histoire qu’il ne la prenne pas pour une folledingue. Elle sonna à l’interphone pour s’annoncer et résuma brièvement la situation. Il accepta de les recevoir et la porte s’ouvrit. Max donna le temps à Piotr de décider s’il venait puis elle l’accompagna dans la salle d’attente. Le médecin terminait de s’occuper de sa consultation d’avant. Du coup, la jeune femme reprit le fil de la conversation. « Ça va toujours ou tu as mal ailleurs maintenant ? » Le fait d’avoir marché un peu avait peut-être réveillé d’autres endroits douloureux.

La jeune femme aux cheveux d'or fut semble t-il un peu impressionnée d'apprendre le pays d'origine de Piotr, et quand elle lui annonça qu'elle était déjà allé dans son pays, le jeune homme prit une mine surprise et lança « ah ouais ? Tu as été dans quelle ville ? » parce que son pays, malgré tous les défauts qu'il avait, il restait son pays. Et il y était attaché. Maxyne s'inquiéta de savoir s'il avait quelqu'un a appeler ici. Piotr leva le regard vers le sien, triste et gêné. Il fuit son regard et puis, observant un autre côté de la rue, il lança avec son gros accent de l'est « en fait je n'ai personne à appeler ni ici, ni ailleurs » enfin si, il y avait son père. Mais bon, son père il était surtout là en dernier recours, pour payer une note ou un avion et puis finalement, c'était tout ce qu'il pouvait faire de la Russie. Piotr se gratta la tempe du bout du doigt, légèrement mal à l'aise et profondément triste de devoir dire ça à voix haute à une parfaite inconnue. Quand ils abordèrent le sujet du passeport, et qu'elle lui expliqua qu'il aurait pu aller à la police, il prit une mine un peu désolée, haussant les épaules « en fait, je savais pas trop quoi faire et j'avais peur d'aller à la police et qu'ils... » il chercha ses mots, ne trouvant pas forcément d'équivalent. « Hum... » il continua de chercher. Puis, il sorti son téléphone pour écrire le mot « Иммигрант » qui signifiait immigré. Il montra son portable à la jeune femme, en espérant qu'elle comprenne ce qu'il voulait dire en utilisant ce mot. Maxyne lui avoua alors connaître un médecin à deux pas, et qu'elle préférerait qu'il se fasse osculter quand même. Piotr accepta, parce qu'il sentait que son pouce était clairement en train de souffrir. Et puis, elle était là, donc s'il y avait un souci... elle pourrait l'aider à le gérer, non ? C'était pas comme s'il était tout seul, n'est-ce pas ? Alors après avoir déplacé la moto de la jeune femme, récupéré son casque et qu'ils se mirent en marche en direction du cabinet médical ; il s'intéressa un peu à elle. La jeune femme vivait ici depuis toujours, c'était l'endroit où elle était née. Il sourit à cela. Il existait donc des gens, comme lui avant, qui ne ressentait pas le besoin de voir le monde ? Ils avaient un truc en commun tous les deux et tout de suite, ça le mis à l'aise. A la question de la jeune femme, il haussa les épaules « en fait je sais pas » il faisait attention à là il posait le pied désormais. « J'étais en Australie avant, c'était pas vraiment prévu que j'passe par ici ni que j'y reste mais du coup » il haussa à nouveau les épaules. « Je sais pas quand je pourrai repartir » avoua t-il finalement. Il rigola quand elle parla de ce fameux souvenir de voyage. Effectivement, peut-être qu'il s'en rappellera quand il ira dans un autre pays, ou quand il racontera son périple à son père à son retour ? Les deux jeunes gens ne tardèrent pas à arriver chez le médecin, effectivement, ce n'était vraiment pas loin. Maxyne entra en première et il la suivi jusqu'à la salle d'attente. Ils s'y installèrent en silence et Piotr se tourna légèrement vers elle quand Maxyne voulu savoir s'il avait mal autre part. Il murmura alors en sa direction « non j'crois pas, mais... » il ne savait pas non plus le dire en anglais, alors il prit à nouveau son téléphone. Là, au lieu de pianoter, il parla directement face à son écran en russe, afin que la traduction se fasse oralement. Son téléphone, mécaniquement, répéta donc en anglais « je me suis cassé le poignet et le pouce il n'y a pas très longtemps, j'espère que ça n'a pas tout recassé encore »

« Juste Saint-Pétersbourg. J’y ai fait une compétition sportive donc je n’ai pas vraiment eu le temps de découvrir la ville. » Max avait manqué les championnats du monde de Kazan en 2015 puisqu’elle avait arrêté sa carrière de nageuse de haut niveau pour blessure deux ans auparavant. Et quand elle se déplaçait pour des compétitions, elle n’avait pas le temps de jouer aux touristes. C’est pourquoi, elle n’avait vu que la place principale avec la célèbre cathédrale colorée, elle était passée devant le musée de l’Ermitage aussi mais n’avait rien visité de fond en comble. Rares étaient les pays où elle avait eu le temps de prolonger son séjour pour les découvrir davantage. Face à l’air perturbé de Piotr après son accident, Maxyne lui proposa de contacter un de ses proches, cependant il expliqua qu’il n’avait personne à appeler en Nouvelle-Zélande, ni même ailleurs. La réponse, formulée étrangement, sous-entendait qu’il n’était pas spécialement entouré. « D’accord, pas de soucis, on va voir ce qu’on peut faire. » Sans jugement, la blonde prit la décision de l’aider, puisqu’il lui confia également ne pas être en ordre au niveau de ses papiers suite à la perte de son passeport. Elle s’étonnait qu’il ne soit pas allé voir la police mais elle oubliait qu’elle était dans son pays et pas lui. Maxyne réagissait comme une néo-zélandaise et n’avait pas le bon sens de se mettre à la place de Piotr qui avait peur de passer pour un immigré comme il en chercha la traduction en anglais sur son téléphone. Après, ça arrivait à tout le monde d’égarer ses papiers ou de se les faire voler mais dans ces conditions, il avait raison de passer d’abord à son ambassade pour demander un document officiel avant de se tourner vers les administrations du pays. « Oui, je comprends. On ne sait pas toujours sur qui on va tomber. C’est une bonne idée d’aller chercher un document à ton ambassade avant. » Le nombre de vidéos étrangères qui tournaient en ligne ces derniers mois sur des policiers peu scrupuleux envers des citoyens étaient en plus un des sujets sensibles de l’année. « Mais d’abord, on va aller te soigner. » La blonde lui parla du médecin qu’elle connaissait non loin de leur accrochage. Elle gara sa moto près du trottoir et accompagna ensuite Piotr chez le spécialiste. Dans la salle d’attente, ils continuèrent à faire connaissance. Le Russe apprit ainsi que Max était originaire d’Island Bay. Quant à lui, il avait voyagé jusqu’en Australie et n’avait pas prévu de passer par la Nouvelle-Zélande et encore moins d’y rester. « Oui, l’Australie est beau pays. Qu’est-ce qui a changé tes plans ? » Piotr semblait très indécis sur son avenir : il ne savait pas combien de temps il resterait ici. C’était peut-être lié à la perte de ses papiers mais Max avait l’impression qu’il y avait autre chose. Ne voulant pas le brusquer, elle s’enquit plutôt de son état pour voir si d’autres douleurs intenses étaient apparues en dehors de la main. Il secoua la tête et chercha une phrase sur son téléphone, qui la dicta en anglais. La voix d’automate résonna dans la pièce. Max entendit que Piotr s’était déjà cassé le poignet et le pouce récemment. « Ah oui, c’est fragilisé. Tu t’es fait ça comment ? On verra bien ce que le médecin dira, on le lui signalera. » Vu le niveau d’anglais de Piotr, qui le comprenait plus qu’il ne le parlait, elle proposa de l’accompagner dans le cabinet de consultation. Le médecin venait justement de terminer avec son autre patient et il accueillit Max chaleureusement. Elle lui réexpliqua la situation ; ce n’était pas très protocolaire mais il accepta de s’en occuper et il invita Piotr et la jeune femme à le suivre. Faisant retirer sa chemise déchirée au Russe, il s’occupa de désinfecter et soigner les écorchures du garçon, il ausculta sa main et vérifia que rien d’autre n’était cassé et qu’il n’avait pas pris de coup à la tête. Le médecin s’arrangea ensuite pour stabiliser le pouce effectivement cassé avec une sorte d’attelle du doigt, histoire de dépanner Piotr, puis il prescrit des anti-douleurs et une radio à faire dès que possible pour voir ce qu’il en était réellement au niveau de sa main. Il ne disposait en effet pas de tout le matériel d’un hôpital dans son cabinet. A espérer que le jeune homme ait une couverture santé et qu’il accepte de se rendre dans un hôpital. La nageuse se souvenait qu’il n’était pas très chaud pour y aller. En attendant, le médecin avait soulagé Piotr autant que possible. « Très bien, merci beaucoup. » Auteure de l’accident, Max régla naturellement la consultation et remercia une nouvelle fois le médecin, puis ils sortirent peu de temps après. « Bon. Tu as tout bien compris ? Il conseille quand même d’aller à l’hôpital pour une radio quand tu auras le papier. » Celui qui confirme qu’il avait perdu son passeport et était en attente de son document d’identité. « Si tu es détenteur d’un permis de conduire, ça peut le faire aussi. On l’utilise ici quand on perd nos autres documents. » Maxyne n’y avait pas pensé avant. « Je t’accompagne à la pharmacie pour les médicaments, puis on va te racheter une chemise avant de passer à l’ambassade ? » La nageuse avait bien détaché ses mots pour qu’il la comprenne et avait montré le vêtement déchiré pour l’aider sur le mot chemise.

Cette jolie blonde était vraiment gentille. Sa voix était douce, les traits de son visage aussi ; elle avait un côté... maternelle, qui faisait du bien à Piotr. Parce que lui, il n'avait jamais connu ça. Enfin si, avec sa nounou, qui était décédée il y a quelques années maintenant. Il avait ressenti ça avec sa sœur, les dernières années avant qu'elle ne disparaisse ; mais là encore, on le lui avait arraché cruellement. Alors ce sentiment de tendresse, cette façon affective de son comporter avec l'autre, il n'était pas habitué, mais il savait qu'il aimait ça. Il aimait bien la façon dont cette inconnue était avec lui. Elle le conforta dans ses démarches, le rassurant sur le fait qu'il avait eu un bon raisonnement sur la marche à suivre et Piotr lui sourit en hochant la tête simplement. Quand ils parlèrent de l'Australie, et que Maxyne lui demanda pourquoi il en était donc parti, il regarda devant lui, à la recherche de réponse. En fait, il ne savait pas vraiment. Il aurait pu y rester en Australie, il s'y était fait des copains en plus ; mais quelque chose l'avait poussé à partir. Peut-être cette sensation autour de Reira ? Qu'il n'ait pas senti sa présence ? Qu'il se soit dit que non, elle n'était pas sur cette île ? C'était comme crier son nom dans la vallée d'une montagne, sans écho. Et lui, il recherchait son écho. Alors un peu perdu, il tourna son regard vers celui de la blonde à côté de lui et répondit « en fait, je sais pas trop » en souriant rapidement, l'un de ces sourires rapides, en coin, légèrement gêné. Avant d'entrer dans la salle d’auscultation du médecin, Piotr prévint la jeune femme que son pouce avait déjà subi un traumatisme, et bien évidemment, elle voulu savoir ce que c'était. Tout de suite, il eu des flash de cette fameuse nuit. Cette fameuse nuit où il rentrait d'une soirée avec Max, où des ombres surgirent de l'obscurité, les attrapant. Dans la tête du petit russe, il entendit à nouveau leurs cris, le bruit des craquement de leurs corps roués de coups sur le sol de cette ruelle. Les insultes, les coups de pieds, cette douleur immense qui se propageait partout, la peur d'y rester, la peur de mourir. Ce sentiment d'être en train de mourir, que sa vie se termine là, tout de suite, comme ça. Il se racla la gorge et puis, au lieu de le dire à voix haute, parce qu'il en était incapable, il écrivit sur son téléphone, qui répondit pour lui « je me suis fait agresser » avant d'à nouveau, refaire son fameux petit sourire en coin, mi-triste mi-gêné.
Finalement, ils entrèrent tous les deux dans la salle, Piotr salua d'un signe de tête le médecin tout en disant bonjour en anglais. Il s'installa sur la table d'auscultation comme le médecin le lui demanda. Il retira sa chemise en lambeaux et laissa le médecin le regarder et le soigner, sous le regard doux de la jeune femme qui restait tout près. Quand le médecin regarda son pouce, et qu'il posa ses mains dessus, Piotr grimaça. C'était très douloureux maintenant et effectivement, son pouce avait beaucoup gonflé. Il jura en russe, espérant qu'aucune des deux personnes ici présentes ne comprennent. Le médecin lui posa alors une atèle, non sans douleur pour le jeune homme. Puis, alors qu'il était en train d'essayer d'enfiler sa chemise trouée et déchirée, il n'essaya pas de comprendre ce que les deux néo-zélandais se racontaient. Simplement, il vit la jeune femme sortir de l'argent. Il fronça les sourcils et s'empressa de mettre sa main dans son porte-monnaie pour sortir quelques billets (différents de ceux de son pays, il ne savait pas encore lequel représentait quelle somme à ses yeux) et les tendit vers la jeune femme pour qu'elle prenne celui qu'il fallait et en russe, il expliqua, oubliant qu'ici personne ne comprenait cette langue « c'est pas à toi de payer, j'ai de l'argent ». Piotr remercia à son tour le médecin et puis se laissa entraîner par la jolie blonde qui tenait un papier dans la main. Bon, il n'avait rien comprit, alors quand elle lui résuma tout, il hocha la tête. Alors, il fallait aller à l'hôpital, mais pour y aller il lui fallait le papier de l'ambassade ou alors son permis de conduire. A l'entente de ce mot, il chercha dans son porte-feuille et le sorti, en souriant. Ca, il l'avait bien sur lui oui ! Maxyne parla d'aller chercher les médicaments, et puis d'acheter une nouvelle chemise ? Elle était en train d'ajouter le bout de tissu qui pendait et Piotr lui demanda alors « tu as sans doute d'autre chose à faire, non ? » parce que bon, ils ne se connaissaient pas après tout. Peut-être qu'elle travaillait, ou qu'elle avait une famille, ou des impératifs ? Il ne voulait pas lui gâcher davantage sa journée. Déjà qu'elle avait fait beaucoup pour lui... mais en même temps, il était bien content et soulagé qu'elle s'occupe de lui. Parce que là, il était perdu. Encore sous le coup de l'accident, de son pouce, de tout ce qu'il fallait faire...

Piotr ignorait pourquoi il avait quitté l’Australie pour la Nouvelle-Zélande. Le jeune homme semblait perdu, pas seulement à cause de l’accident mais de façon plus générale. Après, Max ne le connaissait pas alors elle ne creusa pas plus loin, préférant hocher silencieusement la tête, signe qu’elle avait entendu. Lorsqu’il lui expliqua qu’il s’était déjà cassé le poignet et le pouce, elle l’interrogea tout naturellement sur les circonstances de cette fracture, à mille lieues d’imaginer la réponse qu’il lui donnerait. Un accident, une mauvaise chute, un faux mouvement, une blague entre potes qui avait mal fini. Non, rien de tout ceci. Il s’appliqua à écrire en russe sur son téléphone qui fournit une réponse à glacer le sang. Elle ne put s’empêcher d’ouvrir de grands yeux étonnés mais elle mordit sur sa langue pour se retenir de poser d’autres questions. Le sujet était d’autant plus sensible pour elle qu’elle en avait déjà subi une pour se faire voler son portefeuille dans le passé, ce qui l’avait poussée à apprendre à se battre un minimum pour réussir à se défendre. Alors, elle s’en voulut d’avoir manqué de délicatesse en l’interrogeant de façon aussi directe et insouciante. « On vit vraiment dans un monde de dingue. » Elle afficha un air désolé mais n’hésita pas à montrer une dureté intransigeante envers ses agresseurs. Toujours à cause de l’écho auquel ça renvoyait pour elle, même si le contexte était probablement très différent. « Le karma finira bien par rattraper le ou les bâtards qui t’ont fait ça. » Si Piotr voulait en dire plus sur le sujet, libre à lui, elle ne l’y pousserait nullement. Pour l’heure, le médecin les invitait à les suivre dans le cabinet de consultation. Il examina le Russe et s’occupa de le soigner. A plusieurs reprises, Max entendit Piotr baragouiner en russe sous le coup de la douleur, elle avait beau ne pas comprendre cette langue, il ne fallait pas être Einstein pour deviner qu’il jurait. Le médecin fit de son mieux pour le dépanner mais il lui prescrit ce qu’il fallait pour de plus amples examens. Pendant qu’il se rhabillait, Maxyne remercia le spécialiste et régla la consultation sous l’étonnement du Russe. Il s’empressa de vouloir la rembourser en lui tendant des billets (pas besoin de traducteur pour comprendre son intention) mais elle repoussa la main du jeune homme en laissant l’argent dedans et en la refermant doucement. Son but n’avait pas été de le vexer ou d’insinuer qu’il n’avait pas les moyens de payer un médecin, mais elle se sentait responsable de ce qui était arrivé et refusait qu’il paie à cause de sa distraction de conductrice. « Non, j’y tiens. C’est moi qui ai causé l’accident. » Le débat pourrait encore tourner longtemps sur qui la faute incombait ou non, mais Maxyne ne céderait pas, un retour de flamme de son caractère. Après la consultation, ils sortirent de chez le médecin et elle songea que le permis de conduire était aussi un document d’identité valable quand on perdait son passeport ou autre. Au moins, Piotr en avait un et pourrait se dépanner en attendant de se remettre en ordre administrativement. « Parfait. » La blonde proposa ensuite de l’accompagner à la pharmacie avant d’enchainer les autres étapes mais Piotr l’arrêta dans sa marche en lui demandant si elle n’avait pas mieux à faire. Tout d’un coup, Max se rendit compte qu’elle devenait trop envahissante. Elle avait lancé cette suggestion dans le but de l’aider mais il préférait peut-être s’en occuper tout seul. « Non, enfin je veux dire, ça ne m’embête pas, ça me parait normal même. » La blonde marqua un temps d’arrêt avant de reprendre. « Je… J’ai déjà eu un accident, par le passé. Je sais que ce n’est pas facile. » Grièvement blessée à l’hôpital, elle avait lutté durant de longs mois pour s’en remettre, notamment via de la rééducation. Ça remontait à sept longues années alors ce n’était plus visible bien évidemment. Ici, il n’y avait rien de très grave à déplorer mais la situation de Piotr était compliquée. Il avait notamment perdu ses papiers, ne parlait pas très bien l’anglais, ne connaissait pas le coin. Elle se sentait investie mais ne voulait rien lui imposer. « C’est comme tu préfères. Pour moi, c’est pareil. » Cette fois, un sourire étira les lèvres de Max. « Mais c’est dommage de rater la meilleure partie, moi qui comptais te proposer d'aller boire un verre tout à l’heure pour se remettre de nos émotions. » Il avait l’air d’en avoir besoin, bien plus qu’elle d’ailleurs.

Piotr était franchement très gêné et mal à l'aise que Maxyne lui ait payé la consultation chez le médecin. En Russie, ce n'était pas quelque chose qui se faisait que de laisser payer les filles. Au contraire, les hommes devaient avoir assez d'argent pour qu'elles n'aient plus besoin de se poser de questions sur l'argent. C'était une vision archaïque, mais Piotr avait été élevé de cette manière, et là, il se sentait mal à l'aise. Lui et sa conscience. Il ne savait pas trop quoi dire, ni quoi faire pour remédier à cela, parce que la jolie blonde quitta le cabinet du médecin et qu'il en fit autant, rangeant son portefeuille dans sa poche arrière. Maxyne venait d'à nouveau prendre la parole, pour lui expliquer ce que le médecin préconisait et le petit russe avait fini par lui demander si elle n'avait pas mieux à faire que de s'occuper de lui, comme elle était en train de le faire. Elle lui avoua que non, et surtout, qu'elle savait ce que ça faisait que d'avoir un accident. Leurs regards se croisèrent, longtemps, et Piotr sourit doucement. Alors ils étaient de grands blessés tous les deux ? A croire qu'il n'y avait pas que les contraires qui s'attiraient. Après l'agression, il avait passé plusieurs jours à l'hôpital, et il avait du rester des semaines à la maison. Maximoff lui, n'avait pas eu cette chance. Et ça avait beaucoup marqué Piotr. Alors oui, si elle avait connu ce même genre d'accident, ils semblaient se comprendre. Piotr rigola enfin, pour la première fois, quand la jeune femme lui expliqua avec humour qu'il louperait la meilleure partie de la journée s'il partait maintenant. « Bon déjà, j'crois que c'est une phrase parfaite pour un serial-killer » commença t-il toujours en rigolant doucement. « Mais justement, j'allais te proposer de commencer par aller boire un truc » proposa t-il en levant son doigt et en l'agitant. Il se tourna légèrement pour observer les rues qui étaient autour de lui. Il constata qu'il y avait des banques, des restaurants, mais peu de bar. Il y avait un starbucks, un fast-food aussi, mais pas de vrai bar. Bon, peut-être qu'elle en connaissait un pas loin ? Après tout, ils devaient passer acheter une chemise et filer à l'ambassade et à l'hôpital surtout ! Ca leur faisait une sacrée journée. « Vu que tu as payé le médecin » commença t-il alors « je veux t'inviter pour te remercier » déjà pour tout ce qu'elle avait fait jusqu'à présent. « En Russie, on n'aime pas se faire payer des trucs quand on est un mec » grimaça t-il. Ouais, c'était peu flatteur pour lui et son pays, mais il était honnête. « Donc, soit on va boire un verre vite fait, et on fait tout le reste après, soit on fait l'inverse ? » lança t-il en pianotant seulement quelques mots sur son portable, dans le doute. Mais non, il avait bien vu de lui même comment formuler ses phrases. « Ou alors je t'invite au restaurant un de ces quatre ? T'es la seule personne à qui je parle vraiment depuis mon arrivée » avoua t-il en se grattant la tête. Oh, mais peut-être qu'elle allait se méprendre sur ses intentions ? Ou qu'elle allait trouver ça bizarre de sa part ? Ils étaient là, face à face, au milieu d'une rue agitée, lui ; portant des vêtements déchirés, avec le pouce dans une atèle, s'avouant alors qu'effectivement, si elle le laissait ici, maintenant, il serait totalement perdu.

Quand Maxyne avoua qu’elle aussi avait déjà eu un accident, Piotr sembla comprendre pourquoi elle s’impliquait de cette façon depuis qu’elle l’avait touché avec sa moto. Il rigola ensuite à sa dernière proposition et insinua que sa phrase pourrait émaner d’un serial-killer avant d’ajouter qu’il songeait à lancer la même idée. « J’ai bien fait de la formuler avant alors, comme ça, s’il arrive quelque chose, je serai la vilaine de l’histoire. Avec un peu d’imagination, je pourrai être une psychopathe crédible, non ? » Le feeling passait entre les deux infortunés du jour, de sorte qu’ils en plaisantaient facilement mais on ne savait jamais sur qui on pouvait tomber. A la recherche d’un bar, Piotr jeta des regards autour de lui mais ce quartier-ci de la ville n’en regorgeait pas. Il exprima le souhait de l’inviter pour la remercier. A travers ses explications, Max comprit qu’elle l’avait mis mal à l’aise quand elle avait réglé la consultation, car dans la culture russophone, il n’était pas de coutume qu’une femme paie pour un homme. La Russie vivait encore ancrée dans des traditions d’un autre temps. Voilà une des nouveautés à laquelle il devrait s’habituer en Nouvelle-Zélande. « Oh d’accord, je comprends. Je ne voulais pas t’offenser, c’est juste qu’ici, on a une vision un peu différente. » Comme Max l’avait percuté et qu’elle se sentait responsable, il était normal pour elle d’assumer. « Oui, allons boire ce verre, ça nous fera du bien. On verra pour le reste plus tard. » Le plus urgent qui consistait à l’ausculter et voir si tout allait bien pour lui ayant été fait, la nageuse n’avait plus de raison de s’inquiéter. Max se détendit et invita Piotr à la suivre plus loin, vers le quartier du centre où les bars pullulaient. Tout en marchant, il continuait de pianoter des mots sur son téléphone mais il prenait enfin confiance en lui pour parler plus librement, maintenant que le choc était passé. Le jeune homme souhaitait aussi emmener Maxyne au restaurant une autre fois, car elle était celle à qui il avait le plus parlé depuis son arrivée. La jeune femme ignorait si c’était une sorte de proposition maladroite ou non mais elle choisit de n’y voir aucune intention bizarre derrière surtout s’il était seul dans le pays. Il cherchait sans doute juste à se raccrocher à un visage familier. « Pourquoi pas. On pourra se revoir. Si tu as besoin d’aide pour tes papiers, sur une question pratique ou juste l’envie de passer un bon moment. Sans soucis. » Ils échangèrent un nouveau sourire et Max s’arrêta finalement devant un bar en particulier, un de ceux où elle avait ses habitudes. « Ça te dit le pub irlandais ? Il y a toujours une super ambiance. » La nageuse y croisait souvent des connaissances, que ce soit des personnes qui faisaient partie de son club de moto ou d’autres têtes de la région. Ici, en plein après-midi, elle risquait moins d’en voir mais l’ambiance était toujours sympa avec les matchs de rugby en fond, sport qui était une véritable institution en Irlande et en Nouvelle-Zélande aussi. Ils rentrèrent, commandèrent leur boisson, une bière pour Max, et s’installèrent à une table plus loin. « Ici, si tu connais les All Blacks et les Kiwis, tu trouveras vite ta place. Et je ne parle pas du fruit. » Expliqua-t-elle en riant. Elle lui montra l’équipe de rugby en photo et l’animal national du pays. C’était un petit intermède léger avant de reprendre le fil de la discussion et de faire plus ample connaissance. « C’est quoi d’ailleurs le sport national de la Russie ? Vous avez tellement de bons athlètes dans plein de disciplines… ! Tu en fait aussi ? » Pour un jeune dont elle ignorait toujours l’âge, il était plutôt bien bâti. Maxyne pensait notamment que la Russie brillait en gymnastique ou au patinage artistique mais Piotr serait mieux placé pour lui répondre. « Tout à l’heure, tu m’as dit que tu avais voyagé en Australie avant de déposer tes valises ici. C'est donc un voyage improvisé autour du monde en solitaire ? » Ou alors il cherchait peut-être à fuir quelque chose ou à retrouver quelqu’un, qui sait.

Maxyne n'eut pas l'air de trouver la proposition de Piotr -pour le restaurant- étrange, puisqu'elle lui répondit que ça lui ferait même plaisir. Lui, il était content, peut-être qu'il était en train de se faire sa toute première amie ici, en Nouvelle-Zélande ? Quand elle lui proposa le pub irlandais, il accepta d'un signe de tête, en se mordant l'intérieur de la joue en réflexe. Oui, ça lui allait, tant qu'il y avait de quoi s'asseoir et boire un coup, tout lui allait très bien. Le petit russe suivit la néo-zélandaise jusqu'à ce fameux pub. Découvrant alors l'ambiance de ce pub, pour le moment un peu désert vu l'heure qu'il était. Piotr regarda un peu les différentes boissons. En Russie, on préférait les alcools forts à la bière, c'était quelque chose de culturel apparemment, mais ça protégeait aussi du froid, c'était certain. Il regarda un peu ce qu'ils faisaient ici, mais c'était surtout du whisky. Il lu un peu les différentes sortes, et puis opta pour un whisky irlandais, un Dalmore. Le barman lui demanda son âge, ce qui le fit grimacer un peu. Il sortit son porte-feuille à nouveau de sa poche arrière pour en sortir son permis de conduire, il le montra au barman, qui fini par accepter de le servir. Ils attendirent leurs verres et allèrent s'installer autour d'une table. Une fois installés, il regarda un peu la déco, tandis que Maxyne lui parlait de l Nouvelle-Zélande, il sourit devant l'image de leur animal national « c'est vraiment ça votre animal représentatif ? » rigola t-il. Il sorti son portable et pianota quelque chose sur l'écran tactile, avant de le retourner vers la jolie blonde. Il s'agissait de l'ours, l'animal emblématique de la Russie. Enfin, l'un des animaux, mais c'était surtout celui qui était vraiment reconnu comme tel. « Chez nous c'est ça » rigola t-il en imaginant un combat entre les deux animaux. Finalement, la jeune femme s'intéressa un peu au sport national russe, et cette question plu à Piotr. « On en a plusieurs, mais chez nous c'est le hockey » lança t-il en souriant. « J'en fais depuis que j'suis p'tit » ajouta t-il alors, fier. Ouais, Piotr il adorait le hockey, c'était sa véritable passion dans la vie. Même si physiquement, il n'avait pas l'air de pratiquer ce sport, où les hommes sont plutôt costauds, il savait qu'il ne pourrait pas s'arrêter de jouer, même s'il jouait moins qu'avant, à l'heure actuelle. « Vous avez des équipes ici ? J'aimerai bien m'inscrire pour en faire » mais bon, on ne peut pas dire que la Nouvelle-Zélande ait le climat pour cela, alors ça serait sûrement dans un complexe sportif ? Mais où ? « Tu fais du sport toi ? » demanda t-il alors, curieux. La jeune femme s'intéressa alors à son voyage, essayant sûrement de comprendre un peu son histoire au travers du peu d'éléments logiques qu'il lui avait sorti jusqu'ici. Piotr se racla la gorge et chercha une façon de lui répondre. Pouvait-il être sincère ? Devait-il l'être ? Ou bien peut-être que c'était un peu trop pour une première rencontre ? Peut-être qu'ils ne se reverraient pas comme ils le disaient. Alors, à quoi bon se confier ? « J'ai voulu un peu bouger de la Russie » lança t-il simplement. « J'ai pas trop prévu quoi que ce soit en fait, je me laisse porter » avoua t-il en haussant les épaules. C'était la vérité, mais il n'entrait pas dans les détails. Il n'allait pas sortir à une parfaite inconnue qu'il avait voulu voir ce que le monde avait de si merveilleux, pour que tous ses proches le préfèrent à lui ? Qu'il espérait qu'on lui parle de sa sœur disparue justement pendant un voyage ? Qu'il avait surtout fuit la Russie parce qu'il était gay et qu'il avait peur de continuer sa vie là-bas ? Non. Il n'en avait jamais parlé à personne, hormis à Maximoff, alors pourquoi le dire à une inconnue ?

Malgré un passé parfois compliqué, Maxyne continuait de vivre dans une relative insouciance. C’est pourquoi quand un garçon qu’elle connaissait à peine l’invitait, elle n’y prêtait pas toujours de mauvaise intention, encore moins dans le contexte de leur rencontre. Après avoir accepté sa proposition, elle l’entraina au pub irlandais où ils choisirent leur boisson. Alors qu’ils attendaient leur commande au comptoir, le barman demanda une pièce d’identité à Piotr. Ce n’était vraiment pas son jour. La blonde faillit lancer un regard de travers à l’employé. Elle était plus qu’une habituée, ici. Il pouvait bien laisser le jeune tranquille. Mais en prenant du recul, elle aussi s’était demandé s’il était mineur tout à l’heure, au moment de l’accident, c’est pourquoi Maxyne ne broncha pas finalement. C’est ainsi qu’elle apprit l’âge exact du Russe. Un mystère en moins. Voilà bien un mot qui qualifiait parfaitement Piotr. Mystérieux. Il lui avait délivré des bribes d’explication sur son arrivée en Nouvelle-Zélande, sur un passage en Australie. Dans la confusion, la nageuse n’avait rien relevé mais elle n’avait pas saisi tout ce qu’il lui avait raconté. En attendant, le barman valida enfin la commande et leur tendit leurs verres. « Amateur de whisky ? Bon choix. » Elle avait beau n’avoir mis les pieds en Russie qu’une fois, pas besoin d’y être allé pour avoir entendu leur légendaire résistance à l’alcool et bien sûr à la vodka. Elle se souvenait en avoir goûté une pour se réchauffer, le lendemain de la compétition, la Russky Standart. On lui avait appris l’art et la manière, parce qu’ils avaient leur façon bien à eux de boire un verre. A défaut d’avoir le temps de visiter la plupart des pays où elle avait concouru, Max avait néanmoins eu le temps de s’imprégner pendant une soirée dans chaque grande ville et donc d’avoir un petit aperçu de différentes cultures. « За здоровье ! » Lança-t-elle, en trinquant son verre contre le sien dans sa langue, vieux souvenir gardé de là-bas. Elle parla ensuite de choses connues ici à Piotr en lui montrant l’équipe nationale de rugby, puis l’animal emblème de la Nouvelle-Zélande. Les mignons kiwis. Un rire s’échappa des lèvres du jeune homme. C’est vrai que c’était comique, surtout quand il lui montra celui de son pays. Elle siffla, admirative. L’animal respirait toute la force de caractère de la culture. « Oui, nous on a un oiseau qui ne sait même pas voler et vous, vous avez Teddy Bear version plus féroce. » Glissa Maxyne, une pointe d’humour dans la voix. La Nouvelle-Zélande regorgeait d’autres trésors que Piotr aurait peut-être l’occasion de découvrir s’il restait dans le coin. Quant au sport national de son pays, elle tomba des nues. « Oh wow. C’est marrant, je n’aurai jamais pensé à celui-là. Le hockey, je croyais que c’était celui du Canada. » D’ailleurs, Piotr en pratiquait depuis toujours. « Du coup, tu es bon patineur aussi ? Ce n’est pas trop violent avec le palet et les crosses ? » Maxyne mima les objets à l’aide de ses gestes pour qu’il comprenne la traduction sans avoir besoin de chercher sur son téléphone. « Je ne saurai pas te dire. C’est pas très connu chez nous. Mais oui, il y a peut-être moyen de trouver un club. » Il lui retourna ensuite la question et lui demanda si elle pratiquait un sport. Ah, l’histoire de toute une vie. « Oui, la natation. J’étais nageuse avant, d’où les compétitions à l’étranger. Maintenant, je fais de la plongée, c’est mon travail. Monitrice de plongée. » Lui résuma-t-elle. Quand sa carrière de sportive s’était brusquement terminée, il lui avait fallu plusieurs années pour s’en remettre et se réorienter. Aujourd’hui, Maxyne était épanouie dans son travail. Elle aimait ce qu’elle faisait, c’était toujours lié à sa passion de l’eau. La blonde aimait bien partager et échanger ainsi sur leurs deux pays. Les rencontres venues d’ailleurs étaient toujours des moments riches et excitants, qui sortaient de l’ordinaire. Alors qu’ils étaient plus à l’aise, à boire un verre en mode tranquille et à papoter de tout et de rien, elle lui reparla de son voyage pour voir s’il avait prévu un tour du monde ou s’il voyageait pour une raison en particulier. Cependant, la nageuse se mordit la lèvre inférieure. Dans la décontraction, elle se laissait emporter et elle s’était montrée trop curieuse, elle le sentait. Alors quand Piotr lui répondit qu’il avait juste ressenti le besoin de bouger, de se laisser porter au gré de ses destinations, elle hocha la tête. « Oui, en route pour l’inconnu. Peut-être que la Nouvelle-Zélande te plaira. T’avais jamais voyagé avant ? »

Ils trinquèrent à la russe, et ça ne pu que ravir le jeune homme. Cela faisait plusieurs mois maintenant qu'il n'avait pas entendu cela, et ça lui faisait toujours chaud au cœur. Maxyne sembla surprise d'apprendre le sport national russe et également d'apprendre que Piotr en jouait depuis des années. C'est vrai qu'en le regardant, c'est pas vraiment ce qu'on imagine tout de suite. Il rigola alors et hocha la tête « beh j'espère bien quand même, depuis le temps » sourit-il. Oui, il était bon patineur, mais il était un bien meilleur joueur encore. Mais bon, cela faisait désormais depuis son agression en Russie qu'il n'avait ni patiné, ni même joué au hockey. Bien sûr, ça doit être comme le vélo et on ne peut pas oublier autant d'année de pratique d'un coup, mais il faudrait tenir compte de cette absence de pratique aussi dans les calculs la fois où il reprendrait son sport favoris. Il hausse les épaules en répondant à nouveau à la jeune femme « pas plus que certains autres sports » en souriant. « Le rugby c'est pas mal non plus dans le genre » plaisanta t-il. Piotr prit alors son verre pour en boire une gorgée. Il aimait les alcools forts, c'était indéniable. Et les russes étaient peut-être de ces rares peuples à ne pas grimacer en buvant ces liquides là. La force de l'habitude peut-être. Quand le petit russe s'intéressa de savoir si Max faisait elle aussi du sport, il marqua la surprise sur son visage quand elle lui annonça que oui. Et davantage encore quand elle lui avoua son travail. Un large sourire s'étendit sur ses lèvres et naturellement, il lança très joyeux « c'est vrai ? » c'est pas vraiment le genre de travail qui existe en Russie ça. Alors pour lui, c'est vraiment très exotique. D'ailleurs, il ne sait pas très bien nager non plus, parce qu'encore une fois, c'est pas une pratique courante dans son pays natal. « Ca doit être génial comme travail, tu le fais depuis combien de temps ? » s'intéressa t-il. « C'est bientôt mon anniversaire en plus, je cherchais quelque chose de sympa à faire » lança t-il en rigolant doucement. « Mais j'imagine qu'il faut savoir bien nager, non ? » grimaça t-il alors.
Quand ils abordèrent le sujet des voyages et notamment ceux de Piotr, le petit russe essaya de ne pas faire transparaître son malheur. Quand elle lui demanda s'il avait déjà voyagé avant cela, il fit un non de la tête et répondit ensuite « jamais, en fait ça m'a jamais donné envie pour être honnête ». Il marqua une pause et fini tout de même par avouer « pour être honnête, ma mère et ma sœur m'ont abandonné chacune à leur tour pour justement, voir le monde, alors moi... on va dire que j'avais aucune envie de voir ce qu'il proposait de plus que moi ». Ouais, c'était pas très bien dit, il n'utilisait sûrement pas le bon vocabulaire. Mais voilà, c'était dit. Il n'abordait jamais le sujet de sa famille, c'était même quelque chose d'assez exceptionnel qu'il en parle aussi facilement là, maintenant. Mais voilà, au moins, Maxyne allait comprendre que les sujets des voyages et de la famille étaient un peu particuliers, voire sensibles, pour lui.

HRP : Trop mignonne pour la déclaration à dix