bittersweet reunion (lane ft. maxyne)

Le jour J était arrivé. Après des mois à essayer de tourner la page, Lane avait accepté de revoir Maxyne. Ils s’étaient bien recroisés quelques fois depuis leur « rupture », mais chaque fois, le jeune homme avait esquivé. Il se souvenait mot pour mot du discours qu’elle lui avait servi pour mettre fin à leur aventure, jugeant que trop d’années les séparaient pour qu’ils puissent envisager d’officialiser. Lane avait accepté en serrant les dents. Courir après les gens n’était pas son fort et avant de mettre des substantifs sur ce qu’il se passait, Maxyne avait pris soin de s’éloigner, comme pour le préparer à la sentence. Il l’avait vu faire et il n’avait rien dit. Même s’ils avaient partagé peu de temps ensemble, le brun savait que l’étouffer n’était pas la bonne solution et qu’il se condamnerait définitivement alors il avait suivi la cadence. Les mots qui avaient suivi avaient été animés. De leur cassure, il avait appris : les paroles franches de la blonde l’avaient motivé à trouver sa voie, l’armée, et ce biais avait suffi pour qu’il exploite tout le potentiel qu’il retenait depuis des années. Si amuser la galerie était son trait de caractère majeur, Lane savait aussi rentrer dans le rang et être sérieux. La transformation de sa période d’essai en contrat long terme l’avait prouvé, mais Maxyne ne devait pas être au courant des bouleversements qu’il avait connus. Il savait qu’elle avait vécu une idylle avec un autre homme peu après s’être éloignée de lui et avait morflé dans son coin, se répétant que cette histoire avait été plus importante qu’elle ne l’aurait dû pour lui. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’il l’avait évitée jusque-là, pas encore totalement guéri de leur tentative. A présent qu’il se sentait à sa place en exerçant un métier valorisant, il avait davantage confiance en lui et même s’il lui restait du chemin avant d’atteindre la perfection, il pouvait aisément dire exit à l’adolescent complexé qui était tourmenté par l’idée de faire ses preuves du matin au soir. C’est cette bascule qui l’avait poussé à répondre à la relance de Maxyne (la fatigue d’une journée de vol avait probablement eu son rôle aussi, mais il préférait rester sur l’hypothèse que sa blessure était cicatrisée) et à rétorquer à l’affirmative quand elle lui avait proposé de boire un café à Island Bay. Dans le pire des scénarios, ils auraient essayé et reprendraient le cours de leurs vies.

Arrivé sur place avec quelques minutes de retard la faute à une circulation dense qu’il n’avait pas prévue, il ôta son casque de moto de son crâne et le glissa autour de son poignet avant de rejoindre la table où l’attendait la trentenaire. Il ouvrit la fermeture de sa veste en cuir tout en remettant ses cheveux en place et plongea ses pupilles rieuses dans celles de son ex-amante. « Salut, désolé pour le retard, j’ai pas l’habitude des bouchons » marmonna-t-il en déposant soigneusement son casque sous la table, profitant de ce moment pour se remettre des frissons que les traits de Maxyne lui procuraient de sorte à éviter de montrer qu’il ne parvenait pas encore à lui être totalement indifférent.

@Maxyne Oakley

La porte du bar s’entrouvrit, faisant griser les gonds avant qu’elle ne se referme derrière Maxyne. Le profond silence qui résonnait dans sa tête contrastait étrangement avec le brouhaha ambiant et crispa les muscles encore un peu plus. Allait-il une nouvelle fois fuir devant l’inévitable discussion qui s’imposait ? La ponctualité inattendue de la blonde serait un autre mystère à classer sans suite dans les bizarreries de la journée. Coutumière des lieux, la monitrice de plongée s’installa confortablement sur une des banquettes. Elle n’était pas habituée à relancer des gens par téléphone sauf quand elle tenait un minimum à eux. Sans surprise, le lien qui la reliait à Lane s’était réveillé lorsqu’ils s’étaient recroisés au cours d’une soirée. La distance qu’elle avait tenu après leur première séparation par respect et pour rendre l’éloignement plus facile à vivre avait fondu comme neige au soleil. Pourquoi devaient-ils rester en froid alors qu’ils ne s’étaient pas déchirés ni par colère ni par crasse ? Pourquoi cette histoire avait-elle pris de l’ampleur si elle signifiait réellement si peu officiellement ? A l’époque, Maxyne avait refusé d’ouvrir la porte à une relation sérieuse, elle s’était battue pour que la vérité de son passé ne devienne pas l’écueil qui bousillerait le cœur de Lane comme son ex avait jadis détruit le sien à Auckland. Cette flamme de sentiments, elle avait commencé à la lire dans les yeux du Wade, une flamme qu’elle aurait été incapable d’alimenter à l’époque, elle n’était pas encore prête. Alors, au lieu d’entretenir le début de braise, elle avait choisi de l’éteindre par une douche froide, un prétexte arrangeant sur la différence d’âge pour combler la vérité par une autre, avant qu’il ne soit trop tard et qu’aucun retour en arrière ne soit plus possible. Si Maxyne avait mis un terme à cette relation améliorée, c’était à la fois par peur et pour ne pas le blesser davantage.

En attendant l’arrivée de Lane, la nageuse commanda un latte macchiato et traina sur son téléphone, à échanger des messages avec son frère à propos de son filleul. Depuis le retour de Trey à Island Bay, Arun avait bien grandi. Dix, quinze, vingt-minutes. Le temps s’égrenait et Lane n’apparaissait toujours pas. Peut-être avait-il changé d’avis. Elle comprendrait et ne lui en voudrait pas, si tel était le cas, pas certaine de ce qu’elle attendait de cette conversation. La chance de tourner la page ou de renouer avec lui plus souvent ? Difficile à dire. Une partie de ses intentions était claire dans sa tête, l’autre ne l’était pas. Maxyne sentait qu’elle lui devait juste la vérité. Premier café terminé, elle s’en commanda un deuxième. Elle choisit de faire confiance à son intuition. Son ventre se détendit enfin à la vue de Lane. Ses vingt-quatre printemps lui sautèrent aux yeux, pas dans le même sens qu’auparavant. En dépit des traits juvéniles qui le caractérisaient toujours, il s’était pourtant transformé en l’espace d’un an et demi. Ce n’était pas la première fois qu’elle le revoyait, cependant elle n’avait pas encore assimilé ce changement par rapport à celui qu’elle avait connu. « Salut. Pas de soucis ! T’as sorti la moto ? La mienne est restée au garage ce soir. » Son appartement n’était qu’à quelques rues du café, monter sur sa bécane aurait été idiot pour un si court trajet. Le blouson en cuir… Elle l’avait repéré, évidemment. Maxyne envoya un dernier message à son frère pendant que Lane s’installait, puis elle rangea son téléphone et se reconcentra sur le brun. « J’suis contente que tu sois venu, ça fait un bail. Bientôt, je ne te reconnaitrai plus. » Petite taquinerie destinée à mettre à l’aise. Certes, la nageuse espérait que la discussion permettrait d’éclaircir des non-dits mais elle attendait aussi le bon moment.

@Lane Wade

La séparation avec Maxyne avait laissé des stigmates sur le cœur de Lane. Lui dont le romantisme était dissimulé derrière une carapace d’humour n’avait connu que deux histoires, deux aventures qui l’avaient marqué chacune à leur façon. Avec Max, le voyage avait pris fin au moment même où il commençait à devenir trépidant. Après plusieurs semaines de babillements, la blonde et Lane avaient entamé le chemin vers l’apprivoisement et leurs rapports étaient de plus en plus étroits si bien que le désormais pilote n’avait pu s’empêcher de croire à une relation durable, un espoir que son aîné se presque dix ans avait douché rapidement sans même qu’il n’ait repéré le moindre signe avant-coureur. Saisi à la gorge par ses arguments, blessé d’avoir été le seul à y croire, il avait battu en retraite et s’était éloigné de la blonde, une distance qui lui avait visiblement ouvert les portes vers une nouvelle histoire d’amour, ce que Lane avait eu du mal à encaisser, mais qu’il parvenait enfin à digérer. S’il avait accepté ce rendez-vous, c’était aussi pour se prouver qu’il avait tourné la page.

A son arrivée, Lane remarqua que Maxyne le regardait différemment. Il y avait mille raisons à cela ; le temps - les quelques fois où ils s’étaient croisés n’avaient pas suffit à admirer l’évolution - en faisait partie. Depuis son entrée dans l’armée, le jeune homme avait pris bien du muscle. Ses épaules étaient plus carrées et ressortaient davantage sous sa veste en cuir. Il avait pris en maturité et cela s’en ressentait sur son physique. « Effectivement, il faut en profiter tant que les températures restent convenables » dit-il tout en s’étonnant que Maxyne n’ait pas opté pour le même moyen de transport que lui. Lane n’avait que sa moto personnelle pour se déplacer. Les véhicules de l’armée étaient réservés aux soldats en service et si le jeune homme possédait sa carte de militaire ce soir, il avait quitté l’uniforme pour ce rendez-vous. « Ça fait un moment, ouais. J’imagine qu’il a dû s’en passer des choses depuis ». En tout cas, c’était vrai pour lui. Sa barbe de trois jours lui donnaient un côté plus assuré qu’ii se plaisait à cultiver. Au fond de lui, Lane avait bien des choses à changer, mais il préférait souvent botter en touche en public. « Alors, qu’est-ce qui te pousse à revenir vers moi ? Pas que je me sois forcé à venir, mais j’imagine que ce n’est pas que par courtoisie. De quoi t'as besoin ? » dit-il par honnêteté. Depuis qu’il était pilote, bien des individus rêvaient d’un baptême de l’air. Dans son esprit, Maxyne avait quelque chose à lui demander au sujet de son copain star de la chanson.

Pendant un instant, Maxyne considéra sa première réponse tout en songeant aux moments qu’ils avaient passés depuis leur rencontre, entre périodes incertaines, chamailleries ponctuelles et une complicité naissante. Elle repensait à ce qui l’avait liée à lui. Les blessures passées, la présence réconfortante et rafraichissante de ce jeune homme insouciant que la vie n’avait pas encore écorché, leurs délires légers et merveilleux, de ceux qui n’engageaient à rien jusqu’à ce que l’attachement s’en mêle. La femme intrépide qu’elle était avait trouvé, auprès de Lane, un moyen d’oublier sa solitude et sa souffrance, autrement que par des fêtes et l’enchainement d’aventures sans saveur. Combler le vide qu’elle ressentait par quelque chose de plus fort qui l’avait extirpée du gouffre dans lequel elle plongeait. Pendant quelques mois, elle s’était sentie différente, et aussi indépendante qu’elle était devenue, elle avait pris goût à cette « relation » refuge, un abri de façade qui avait fini par apaiser la rancœur du passé. Une rancœur et une peur qui s’étaient réveillées quand tout avait pris une autre ampleur, une relation qui n’avait pas résolu les problèmes de fond dont Maxyne souffrait à l’époque, car très vite, la réalité s’était rappelée à son bon souvenir et avait fait volé en éclats l’espoir d’une histoire plus tangible, au point qu’aujourd’hui, ils étaient devenus des étrangers qui s’échangeaient des banalités sur la météo. Jusqu’à ce que Lane ouvre une première porte. Il a dû s’en passer des choses depuis. Il ouvrit ensuite une seconde porte, celle de ce qui les amenait autour de cette table.

La monitrice de plongée esquissa un grand sourire, tandis qu’il tirait des ricochets dans l’eau trouble de leurs retrouvailles pour tâter le terrain. Elle lui offrit ce sourire sincère qui indiquait qu’elle ne se démontait pas. Jamais. La nageuse pouvait rebondir aussi adroitement qu’une pierre qui glissait sur l’eau. Depuis la séparation récente avec Sunwei, elle était différente, la sérénité qu’elle avait retrouvée l’avait changée, elle plongeait dans l’inconnu avec une quiétude encore jamais égalée. Non pas que son meilleur ami ne lui manquait pas ou bien même qu’elle ne déplorait pas la fin de leur histoire, étrangement, elle ne se sentait ni incomplète ni en manque d’affection. Maxyne avait écrit ce chapitre à ses côtés et celui-ci s’était conclus dans la plus grande douceur avec la bienveillance et l’amour qui les lieraient à vie. En revanche, ce qu’elle avait partagé avec Lane restait sur une note inachevée qui méritait elle aussi de trouver sa fin autour d’une discussion honnête qui n’engageait à rien d’autre que cette simple raison, une discussion qu’elle avait toujours repoussée pour ne pas rouvrir de vieilles blessures. Des blessures avec lesquelles elle était en paix aujourd’hui. A voir si Lane était lui prêt à l’entendre, à rouvrir les siennes le temps d’un soir pour les cicatriser d’une meilleure façon : avec les véritables raisons entre ses mains. Et s’il refusait de l’écouter, alors au moins Maxyne aurait tenté le coup de reprendre contact.

« Crois-tu aux remises en question ? » La question flotta dans l’air, rhétorique et puissante. Si quelqu’un était bien placé pour comprendre ça, c’était bien Lane. A l’époque, la nageuse aurait dû lui dire toutes ces choses qu’il attendait, elle aurait dû prendre le risque de s’exposer, mais pour elle, cela s'était apparenté à sauter dans le vide, sans filet de sécurité. Parce qu’elle avait eu encore tout un cheminement d’obstacles à surmonter pour se remettre d’une relation violente et toxique. Ce qui était donc le cas aujourd’hui. « Pourquoi penses-tu que j’attends quelque chose de toi ? » Continua-t-elle, surprise par la tournure de l’interrogation. Il semblait croire qu’elle devait lui demander un service ou une faveur. « J’espère bien que tu ne t’es pas forcé. C’est pas le but, sinon tu peux toujours faire demi-tour. » En aucun cas, Maxyne ne l’obligeait à lui parler alors s’il préférait rebrousser chemin, il était encore temps, elle ne le retiendrait pas. Courir après les gens n’était déjà pas dans sa nature alors les forcer – à moins de devoir demander un truc qu’elle voulait absolument à ses amis – c’était encore moins à l’ordre du jour. Si Lane était venu, c’était sans doute par curiosité et pour se prouver qu’il le pouvait. Elle le connaissait suffisamment pour déchiffrer les motivations sous-jacentes. Sur ces entrefaites, Maxyne l’invita à s’asseoir et elle tourna sa tête vers un membre du bar afin de prendre une nouvelle commande. « Nous nous sommes recroisés récemment et ça m’a donné envie de te revoir, parler un peu, c’est tout. Tu disais que pas mal de choses se sont passées... Que deviens-tu ? »

@Lane Wade  

« Crois-tu aux remises en question ? » dit Maxyne pour donner le ton de la conversation. Une part de Lane se doutait de ce à quoi elle faisait référence, mais à ce moment précis, il ne savait pas encore s’il était prêt à mettre les mains dans le cambouis alors qu’il avait pourtant espéré tant de fois être en mesure de le faire. S’il croyait aux remises en question ? Peut-être bien. Il doutait simplement du bienfondé de certains retours en arrière. « Tout dépend du sujet de la remise en question et du temps qu’elle prend » répondit-il, ne sachant pas vraiment si la blonde attendait une réponse. La relation qu’ils avaient eue par le passé avait été si fluide et légère qu’il lui était difficile de voir comme les choses avaient changé. Il se demandait pourquoi Maxyne revenait maintenant, pourquoi elle avait attendu si longtemps et ce qu’elle avait à lui dire. Pire encore, il redoutait d’entendre des mots qui concrétiseraient les nombreuses hypothèses douloureuses qui lui étaient passées par la tête, celles qui avaient été nourries par sa déception et que son cerveau avait créées de toutes pièces pour mieux le torturer. « Je ne sais pas. C’est la première chose à laquelle j’ai pensée quand tu m’as recontacté » dit-il en toute honnêteté. Quelque part, se dire qu’elle avait besoin de lui pour une chose ou une autre était plus léger à appréhender. Malgré tout, Lane ne ferait pas demi-tour. Refuser une telle invitation ou mettre fin à leurs « retrouvailles » à ce moment-là retarderait le processus. L’ambiance finirait bien par se relâcher au fil de la discussion. Parler de ce qu’il était devenu était une bonne porte d’entrée vers une conversation normale et détendue. Avant de s’élancer, il commanda un soda. Maxyne le savait, Lane n’était pas un grand consommateur d’alcool. « Euhm... Pour commencer, je suis devenu pilote dans l’armée de l’air. » Quand ils s’étaient quittés, Lane venait de terminer un contrat en tant que serveur dans un bar, un domaine bien éloigné de celui qu’il avait choisi et qui ne manquerait pas d’étonner la jolie blonde. « Ce qui veut dire que j’ai quitté le cocon familial et que je vis sur la base militaire avec des gens dont le dressing est assez limité et qui manquent un peu de folie dans leurs tenues » lança-t-il en faisant allusion au pyjama Bob l’Éponge que Maxyne l’avait vu porter et dont il y avait une chance sur deux qu’elle se souvienne. Quelque part, ce test tacite était une façon de prendre la température du moment. « Et toi, alors, quoi de neuf ? Tu t’occupes toujours des baptêmes de plongée ? » demanda-t-il innocemment dans l’attente que le sujet de sa vie amoureuse arrive sur la table. Il savait qu’elle avait refait sa vie entre temps, il l’avait vu sur les réseaux sociaux au détour d’une publication dans laquelle elle avait été identifiée et qui la montrait très complice avec un homme, ce qui était probablement la pire façon d’apprendre qu’elle avait réellement tourné la page de leur histoire.

Les portes que Lane avait cru ouvertes devant lui s’étaient refermées brutalement quand Maxyne avait rejeté la possibilité d’exposer leur relation au monde extérieur. Le secret gardé sous couvert de leur différence d’âge servait de refuge pour protéger ce qu’elle avait espéré conserver pour elle, dans une bulle pure et intacte de toute intervention de leur entourage. Quand Lane et Maxyne avaient eu cette énième conversation sur la tournure que leur amitié améliorée devait prendre, son corps s’était liquéfié sous la crainte croissante. Dans ses bras, elle s’était crispée, alors qu’il avait tenté de l’attendre, de lui affirmer qu’il n’en demanderait pas plus. Menteur, avait-elle eu envie de lui crier. Il espérait plus justement. Cette aventure légère, qui lui apportait une joie et une allégresse insoupçonnées, bonheur qu’elle avait cru toucher du bout des doigts, se révélait n’être qu’un passeport pour baisser la garde, s’exposer et être blessée à nouveau. A cause du regard des autres, de son propre regard à elle, de ses peurs. Peut-être pas tout de suite, mais à la longue, Maxyne savait qu’il aurait besoin de plus et qu’elle aurait sombré, alors elle avait fui comme elle fuyait toute forme d’attachement depuis son accident. D’autres en avaient fait les frais avant Lane mais les choses n’avaient jamais été aussi loin. Entretemps, elle avait trouvé le moyen de se réconcilier avec son passé et de se reconstruire au cours des derniers mois. Si la néo-zélandaise avait d’abord mal vécu le retour de son ex toxique en ville, celui-ci avait en réalité été bénéfique pour qu’elle puisse enfin tourner la page.

Et Lane, qu’était-il devenu ? Avait-il réussi à l’oublier comme elle pensait qu’il parviendrait à le faire ? S’était-il relevé de cette déception ou celle-ci avait-elle assombri le cœur insouciant du jeune homme qu’il était à l’époque ? Sans doute avait-il réussi à passer à autre chose. Alors aurait-il envie de rouvrir ce chapitre ? D'entendre les véritables raisons de leur "séparation" ? Rien n’était moins sûr mais il lui suffirait de le faire comprendre. Sa venue démontrait néanmoins la curiosité de Lane sur la raison de ces retrouvailles. Inutile de sauter trop directement dans le vif du sujet, Maxyne envisagea de prendre des nouvelles et le rassura d’abord sur le fait qu’elle n’attendait rien de lui, contrairement à ce qu’il semblait penser. Il lui apprit alors qu’il était devenu pilote dans l’armée de l’air. En un an et demi ? Impressionnant et rapide surtout. « Wow ! Changement radical. D’où vient ? C’est ton père qui t’a inspiré ? » La monitrice de plongée se souvenait que le défunt paternel avait fait partie de l’armée lui aussi. Elle ignorait que Lane se tournerait vers les mêmes ambitions professionnelles. De barman à pilote se trouvait un fossé aussi large que les chutes du Niagara, chutes qu’elle n’avait jamais eu la chance d’aller admirer jusqu’à présent d’ailleurs. « T’es toujours en formation ou tu es déjà une recrue accomplie ? » La jeune femme ne savait pas très bien comme toute cette grande institution fonctionnait. Il lui apprit alors qu’il vivait sur la base militaire et glissa une petite référence qui suscita un sourire chez la nageuse. « J’me souviens aussi que t’avais pas spécialement besoin d’un grand dressing pour la nuit, ça réduit déjà les quantités. » Remarque mi-taquine, mi-coquine. A part son pyjama Bob l’Eponge, elle ne souvenait pas de l’avoir vu dormir habillé très souvent. Cependant, le contexte de leur relation n’avait rien avoir avec une chambre ou un dortoir partagé(e) à l’armée. Pour le reste, l’uniforme était de mise.

Après avoir commandé son soda, Lane lui retourna ensuite la question. Tellement de choses s’étaient passées dans la vie de la blonde qu’il était difficile pour Maxyne de sélectionner l’une d’entre elles mais tout comme lui, elle choisit de se concentrer sur l’aspect professionnel de sa vie. « Oui, toujours mais plus pour très longtemps. J’ai quelques petits soucis de santé qui m’obligent à arrêter, c’est devenu un peu compliqué de plonger tout le temps. Alors, je ferai une dernière saison comme monitrice l’été prochain, puis je chercherai autre chose, je ne sais pas encore dans quoi. » Adroitement, Maxyne avait évité tout sujet délicat et susceptible  d’alourdir une atmosphère qui venait de se détendre, pourtant il faudrait bien passer par cette étape.

@Lane Wade  

Après Maxyne, la vie sentimentale de Lane avait été une longue traversée du désert. Le brun n’était vraiment pas habitué à papillonner. On ne pouvait pas dire qu’il avait été baigné dans les longues histoires d’amour, le seul modèle familial qu’il avait connu consistait à voir sa mère pleurer le sort de son défunt mari. Heureusement, depuis peu, il pouvait compter sur le mariage de Robin et Matthew pour éclaircir sa vision du couple. Quelque part, il espérait qu’à son tour, il trouve sa Matthew et qu’il puisse à nouveau envisager une relation. Il avait bien eu quelques étincelles avec l’une de ses supérieurs au détour d’une mission, mais Lane avait rapidement mis les holàs de peur qu’un détail de subordination ne compromette le moindre de leurs tentatives. Bonne joueuse, elle avait accepté sa décision et il avait gardé un lien professionnel, une maturité que le pilote appréciait sincèrement. Il aurait qu’il en soit de même avec Maxyne, mais les choses avaient été différentes. Avec elle, tout était toujours différent, de sa façon d’embrasser aux ondulations de son corps, tout lui était bien singulier et même si sa mémoire commençait à lui faire des faux, il lui restait suffisamment de bribes de leurs moments ensemble pour se souvenir de ses particularités. L’une d’entre elles était de savoir mettre le doigt sur les choses qui étaient importantes au moment opportun. Comme à ce moment-là où elle tirait la carte de son père à la minute où elle le devait. « Plus ou moins. Il a joué son rôle à distance. C’est l’un de ses anciens gars qui m’a embarqué et je m’y suis plu. J'y suis pour de bon. » En une remarque, il avait réussi à poser la première pierre de leurs « retrouvailles ». Elle avait rétorqué sur le ton de la taquinerie, il pouvait donc se permettre de puiser davantage dans ses ressources « Faut dire que tu ne m’as pas souvent laissé l’occasion de piocher dedans » dit-il avec un sourire discret en même temps qu’il détaillait ses traits. Elle semblait fatiguée et il apprendrait bientôt pourquoi, regrettant presque sa question sur ce qu’elle devenait. Du peu qu’il pensait savoir sur elle, il avait retenu que la natation était l’une de ses passions et que son rapport à l’eau était essentiel à sa survie. Il fronça les sourcils tout en cherchant une répartie à la hauteur. « T’es si à l’aise dans l’eau que tu pourrais peut-être tenter la plomberie, non ? » lança-t-il avec un rire dans la voix, celui qui traduisait sa compassion sans pour autant tomber dans la pitié. « Trêve de plaisanterie, tu as des pistes ? ». Il remercia le serveur pour les verres et rapprocha celui de Maxyne du bout du pouce. « Et tu vis toujours seule ? ». Avant de dégoupiller d’autres remarques ambiguës, il valait mieux que les choses soient claires entre eux. Cette question lui permettrait peut-être de savoir où Maxyne en était dans sa vie personnelle, bien que certains détails ne lui avaient pas échappé, mais il n'arrivait pas à croire qu'elle puisse s'adonner à faire des remarques comme celle qu'elle avait faite en étant engagée. Il connaissait suffisamment la blonde pour savoir qu'elle était réglo sur ce point.