tattoo me on your skin // lova #3

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crédit/ tumblr ✶ lova #3

Le problème avec moi, c'est que je n'arrive pas vraiment à décrocher. Jamais. Même quand je m'accorde des vacances, il faut toujours que je trouve le moyen de faire des photos. De créer du contenu, pour mes réseaux. Je me dois de poster plusieurs fois par jour, juste par principe. Même si parfois, comme tout le monde, je n'ai pas grand chose à raconter. Si, si, je vous jure, je peux aussi avoir des journées comme quelqu'un de normal. Mais après ma victoire dans l'émission Danse avec les stars, ma communauté a connu un nouvel élan. Et je ne peux pas me reposer sur mes lauriers. Pour autant, j'ai envie de profiter quand même de cette croisière pour souffler un peu. Le rythme de ces dernières semaines a été compliqué à suivre... je crois que mon corps a besoin de repos. C'est le moment de lâcher prise, ou au moins d'essayer un peu. Rien de mieux pour ça que de profiter pleinement des activités proposées sur le bateau. Je suis joueuse, et peut être un peu hyperactive sur les bords je l'admets, mais je ne vais pas non plus rester à me tourner les pouces sur un transat' et ne rien faire de mes dix doigts. On dirait pas comme ça, mais c'est pas trop mon style. Bon ok, même si j'avais promis de ne pas penser boulot, il y a eu comme un petit contre temps. C'est pas de ma faute si le directeur du bateau est venu me voir pour me proposer de faire un petit coup de promo pour sa compagnie. Il aimerait que je mette en avant l'activité body painting d'aujourd'hui sur mes réseaux. Bingo. Autant lier l'utile à l'agréable comme on dit. Ce n'est pas pour me déplaire, loin de là. En maillot de bain pour l'occasion, je rejoins le petit groupe qui a déjà commencé à se former pour cet atelier. L'organisatrice désigne les binômes au hasard, et mon coeur manque un battement lorsque je croise le regard de ma partenaire pour la prochaine heure. Morgan. Ou Love, de son nom le plus connu. Mon visage se décompose, et je ne sais plus vraiment où me mettre. Qu'est-ce qu'elle fait là ? Et si elle me reconnaissait ? Tous un tas de questions qui se bousculent brusquement dans mon esprit. Je ne peux m'empêcher de sentir une boule se loger inconsciemment au creux de mon ventre... « Si tu veux, on peut toujours changer de partenaire. » En ouvrant la bouche, je prends le risque qu'elle me reconnaisse. Ma voix peut facilement me trahir, et puis, elle l'a dit elle-même qu'elle le sentirait surement si elle était amené à me croiser. Mais ce n'est pas comme si je pouvais rester là, à la regarder sans rien dire non plus. J'ai la vulgaire impression d'être prise à mon propre piège. Et merde. Et pourtant, au plus profond de moi-même, je suis quand même contente de la voir. C'est justement ça mon problème...

Je sais toujours pas trop ce que je fous sur ce bateau. Enfin si, à la base, le deal était clair : alimenter mes réseaux sociaux et faire plusieurs séries de photos avec des photographes pro présents sur le bateau. Netflix a été catégorique, je dois reprendre en main mes réseaux pour aider à la com de la prochaine saison d’Under my skin. J’aime pas trop être forcée à faire les choses, mais mon père m’a bien fait comprendre que poster des trucs en rapport avec la série sur mes réseaux - principalement Instagram - c’était dans mon contrat. Donc je ne peux pas y échapper.
Me voilà donc partie pendant un certain temps sur ce bateau, avec l’angoisse de ne pouvoir en sortir. Heureusement, ma cabine est immense et je peux toujours m’enfermer ici si j’en ai marre. Evidemment, tout le bateau ou presque est au courant de ma présence ici, et si les premiers jours ont été difficiles parce que j’ai dû jouer l’actrice heureuse de signer des autographes et faire des selfies, maintenant, je suis un peu plus tranquille. Il est temps pour moi de profiter de cette croisière pour faire quelques activités qui feront passer le temps.
Aujourd’hui, body painting. Pourquoi pas, ça peut être marrant. Je rejoins l’endroit du bateau renseigné sur le plan. L’application est extrêmement bien faite, je dois dire qu’ils ont été ingénieux sur ce coup là, et je me sens un peu comme dans Harry Potter, de voir mes petits pas se rapprocher de l’endroit où se passe l’activité. Méfaits accomplis. Je relève la tête et balaye du regard les participants. Principalement des femmes, et quelques hommes plutôt bien bâtis. Je suis encore en short et en t-shirt, quand d’autres se pavanent déjà en petite tenue. Mon regard est attiré par une blonde un peu plus loin, peut-être cette foutue habitude que j’ai depuis les discussions avec Alex, à vouloir chercher des blondes - alors qu’à la base je ne les aime pas particulièrement. C’est là que je me rends compte que… merde. Lexa. Qu’est-ce qu’elle fout là, sérieux ?
Je n’ai pas vraiment le temps de continuer à grommeler dans ma tête que déjà, l’organisatrice de l’activité nous place en binomes, et que je me retrouve avec elle. Non mais la vie se fout vraiment de ma gueule c’est pas possible !!!! « Si tu veux, on peut toujours changer de partenaire. » Mon regard énervé posé dans le sien, je sens tout mon corps bouillir, mes oreilles bourdonner, si bien que je ne reconnais pas sa voix. Je serre les dents et tente de garder mon calme, alors que je suis à deux doigts de juste me barrer et la laisser en plan. Mais l’organisatrice nous apporte une boîte avec la peinture et les pinceaux, et me la met dans les mains. « Vous avez décidé qui de vous deux commence à peindre ? » Je pose furtivement mon regard sur Lexa et la désigne du menton. « Elle est déjà presque à poil, ça ira plus vite que ce soit moi qui peigne ! » Et je vais m’en donner à coeur joie. Faire un truc bien moche. Je déteste ce qu’elle fait ressortir de moi. Je ne suis pas ce genre de personne, mais elle me met hors de moi, et je n’aime pas ça du tout. Pourtant, l’eau a passé sous les ponts, je devrais pouvoir passer au dessus de ce qu’elle m’a fait, mais je n’y arrive pas. Pas tant pour ce qu’il s’est passé, mais pour tout ce que ça représente…

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Comment ai-je pu passer à côté de sa présence sur le bateau ? Non, je ne savais pas que Love était parmi les passagers de cette croisière. Comme elle ne savait pas pour moi, apparemment. Vu la tête qu'elle tire en me voyant, c'est plutôt facile à comprendre. Si j'avais su... je ne serais pas venue faire cette activité. Depuis notre rendez-vous dans le noir, moins je la vois, mieux je me porte. C'est trop dangereux de passer du temps avec elle, de lui parler, au risque qu'elle finisse par me griller. C'est déjà pas évident de ne pas la croiser dans les couloirs de l'immeuble, voilà maintenant que le hasard décide de nous foutre sur le même bateau. Est-ce que c'est une blague ? Ok, peut être que le destin essaye de me faire passer un message là, c'est pas possible autrement. Il faudrait sans doute que je me remette en question. Que j'arrête de jouer avec le feu, comme je le fais depuis des semaines. Et pourtant, j'adore ça ! J'adore la relation que nous nous sommes créées sur Lovemaker. J'adore apprendre à la découvrir plus en profondeur au fil de nos messages. Et je commence vraiment à m'attacher à elle... L'organisatrice s'approche de nous, et donne à la jeune femme le matériel nécessaire. « Vous avez décidé qui de vous deux commence à peindre ? » Le regard qu'elle porte sur moi est détestable, et je ne peux m'empêcher de grimacer, malgré moi. Nous sommes à dix milles lieux de la complicité que nous avons pu avoir lors de notre diner dans le noir. Et lors de tous nos échanges via écrans interposés. « Elle est déjà presque à poil, ça ira plus vite que ce soit moi qui peigne ! » Ok, grosse ambiance. Cette séance de body painting promet d'être vraiment agréable. Ce n'est pas pour rien si je suis réticente à lui donner un réel rendez-vous sur l'application. Quand elle apprendra que c'est moi qui se cache derrière ce pseudo... ouais, non, c'est impossible. Même si elle n'arrête pas de dire qu'il n'y aucune raison qu'elle soit déçue. Alors étrangement, si, il y en a beaucoup. La preuve. A cet instant, je me promets d'ailleurs secrètement de mettre un terme à tout ça. De tout arrêter. Je suis allée beaucoup trop loin dans la supercherie, cela ne peut plus durer - même si ce n'est plus une supercherie en soit puisque je suis véritablement sincère avec elle. « Vas-y, fais toi plaisir ! Je suis toute à toi ! » Je n'avais pas envie d'être désagréable avec elle, mais avec son comportement, je ne peux que rentrer dans son jeu. Et comme toujours avec moi : l'attaque est la meilleure des défenses. Si elle veut que je joue avec ses nerfs, je vais m'en donner à coeur joie. Ça m'évitera de penser à ce que j'ai fait, et à la merde dans laquelle je me suis inconsciemment mise. Heureusement qu'elle n'a pas reconnu ma voix... j'imagine même pas ce qui aurait pu se passer si ça avait été le cas. Mon dieu.

Je ne suis pas agréable. Ce n’est pas dans mon tempérament, mais il faut croire qu’elle fait ressortir les pires mauvais côtés que je peux avoir. Je ne comprends pas bien pourquoi j’ai encore autant de rancoeur envers elle. Le passé c’est le passé, je me fous aujourd’hui de ce mec qu’elle m’a ‘piqué’ quand on était au lycée. Mais je ne supporte pas l’image qu’elle renvoie, son air suffisant et hautain, sa manière de prendre les gens de haut, comme si tout le monde était des merdes. Mais pas elle non. Bien sûr. Ça me sort par les yeux, et je ne prends pas de pincette pour lui faire comprendre. Sauf que le destin est clairement en train de nous faire chier, elle comme moi. Pas une plus ravie que l’autre, je décide de me coller à la peinture. Flemme de me déshabiller, et puis elle est déjà prête. « Vas-y, fais toi plaisir ! Je suis toute à toi ! » Un frisson me parcourt. Au premier abord, il est plutôt négatif, comme si elle me donnait froid dans le dos. Pourtant il y a autre chose, sans que je comprenne bien quoi. Le son de sa voix peut-être, qui me rappelle quelqu’un, sans que je n’y prête trop attention. Ne pas réfléchir. Et puis, je n’ai pas vraiment l’occasion de trop réfléchir. « J’te préviens, je suis pas la plus grande artiste qui soit, mais je vais quand même pas te dessiner des saucisses un peu partout… » Quoi que ce serait marrant, sauf que j’ai passé l’âge. Je vais essayer de m’appliquer un peu, pour pas passer pour une gamine de 4 ans qui découvre la peinture.
Je récupère les matériaux, la peinture spéciale, pinceaux et autre accessoires, et soupire un peu avant de m’y mettre. Je n’y vais pas de gaité de coeur, mais je n’ai pas envie de faire de vagues non plus. Quand faut y aller, faut y aller. Je me relève et me retrouve nez à nez avec elle. Merde. Pourquoi mon coeur bat plus vite d’un coup ? J’avais déjà remarqué qu’elle avait d’aussi jolis yeux ? N’importe quoi Mo, remets-toi ! Je me racle un peu la gorge. « Je vais commencer par ton dos. » Voilà, c’est mieux que de l’avoir face à moi, ou devoir peindre son ventre ou pire sa poitrine. Quoi que son cul ce sera pas mieux. Bordel. Inspire. Expire. Je choisis de la peinture, je sais pas encore trop ce que je vais faire. Une fois face à son dos, je vais pour poser mon pinceau à même sa peau, mais je m’arrête nette. Ce tatouage. Je le connais. Non… « Je… je dois aller… aux toilettes. En urgence. » Je repose le pinceau et quitte la salle pour aller me réfugier dans les toilettes. Appuyée contre un lavabo, je prends quelques grandes inspirations et sors mon portable de ma poche pour vérifier ce que j’appréhende. J’ouvre le profil d’Alex sur LM, tout concorde. Alex. Elle s’appelle Alexandra, même si tout le monde l’appelle Lexa. J’ouvre la photo en question, son tatouage. Une lune d’un trait fin sur l’omoplate gauche. Sueur froide. C’est pas possible, c’est juste… pas possible !!!! J’ai envie de hurler, pleurer, frapper quelque part. Au lieu de ça je fais les cent pas pour essayer de me calmer, mais ça semble impossible. Je vais la tuer.

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Ok... ça promet. Si on part sur cette lancée, il y a des chances que l'activité soit compliquée. D'ailleurs si je n'avais pas autant de fierté - sans doute mal placée - je crois que j'aurais déjà pris mes jambes à mon cou. Mais non, il est hors de question que je lui donne raison. Ça lui ferait bien trop plaisir. « J’te préviens, je suis pas la plus grande artiste qui soit, mais je vais quand même pas te dessiner des saucisses un peu partout… » En réalité, je suis sûre qu'elle en serait capable. Elle me déteste tellement, c'est un truc de malade. J'ai l'impression d'être le diable en personne à ses yeux. Alors ok, je suis loin d'être un ange mais quand même. Je ne suis plus celle que j'étais à l'époque du lycée, et si elle creusait un peu, elle comprendrait qu'il ne faut pas se fier à l'image que je peux véhiculer sur les réseaux, ou à la télévision. Justement, cette fille à qui elle parle sur Lovemaker, ce n'est pas pour rien si elle semble l'apprécier. Cette fille, c'est moi. La meilleure version de moi-même. La vraie Alexandra. Elle récupère le matériel dont elle a besoin avant de se relever à mon niveau. A cet instant précis, c'est comme si le temps venait de s'arrêter. Nos regards se croisent une infime seconde et mon coeur s'emballe inconsciemment dans ma poitrine. « Je vais commencer par ton dos. » Elle préfère sans doute ne pas me voir, et après tout, c'est pas plus mal. J'avoue que j'ai un peu de mal à la regarder dans les yeux sans vaciller. « Ok, c'est toi l'artiste ! » Je m'exécute et me retourne, pour lui laisser libre accès à mon dos.  « Je… je dois aller… aux toilettes. En urgence. » Je n'ai pas le temps de me retourner et de réagir que Love s'est déjà envolée. Pour une envie pressante, c'est une envie pressante. J'ose espérer que ce n'est pas l'idée de peintre mon corps qui lui a donné une soudaine nausée. Ce serait dommage quand même... Je reste un peu conne, plantée là toute seule alors que tous les binômes ont déjà commencé à s'activer. Après quelques minutes, l'organisatrice se rapproche pour prendre des nouvelles. « Vous avez fait fuir votre partenaire ? » C'est vrai que pour une pause toilettes ça commence à faire long quand même... c'est bizarre. Je hausse les épaules en grimaçant un peu sans vraiment comprendre ce qu'il se passe réellement. « Je vais aller voir. » Peut être qu'elle a un problème ? Est-ce que je serais capable de m'inquiéter pour elle, si c'était le cas ? Je crois qu'en réalité je m'inquiète déjà. Mais non, je suis pas du tout piquée... Plutôt crever que d'avouer un truc pareil ! Je m'éclipse alors à mon tour pour la rejoindre aux toilettes, tombant nez à nez sur elle. Bon déjà, elle n'est pas enfermée dans une cabine, c'est une bonne chose. Mais à première vue, elle n'a pas l'air d'aller bien pour autant. « Est-ce que tout va bien ? » Lui demandais-je d'une voix plus préoccupée qu'elle ne le devrait. Mais le regard qu'elle m'adresse est encore plus foudroyant que celui qu'elle pouvait avoir tout à l'heure. C'est moi ou j'ai l'impression d'avoir raté un épisode ?

Je dis saucisse pour éviter de dire autre chose. Pour le côté orientation sexuelle, je sais qu’on est pareilles toutes les deux, dans aucune case, on s’attarde surtout à l’âme avant de prendre en considération le genre de la personne pour qui on est attirées. J’aurai pu proposer de lui peindre des petits clitos un peu partout, c’est mignon un clito, non ? Ok calme-toi Love, c’est pas le moment de faire un esclandre. Je suis remontée contre elle, ce n’est pas une nouveauté, mais ça nous regarde, ou en tout cas ça me regarde, et ici, nous avons un public. Alors on va essayer de faire au mieux.
Mais lorsque je remarque son tatouage, je perds tout discernement. Il faut que je m’en aille. Maintenant, avant de hurler ou de fondre en larmes. Ou les deux. Ma respiration est plus courte, et c’est pire au moment où je me rends compte de la supercherie. Je mettais beaucoup d’espoir dans cette nouvelle rencontre, je me sentais bien avec elle, j’avais eu un bon feeling. Mais elle s’est bien foutu de ma gueule, cette garce. Comme quoi, il y a des gens qui ne changent pas, qui sont des connards et le restent. Elle en fait partie.
Je suis appuyée contre le lavabo, la tête penchée au dessus, je crois que j’ai la nausée. Ma respiration ne s’est pas calmée, et je crois que j’hyperventile. Quelqu’un entre, et ce n’est que lorsque j’entends sa voix que je prends conscience qu’elle a le culot de me suivre jusque là. « Est-ce que tout va bien ? » Je tourne la tête dans sa direction et la foudroie du regard. Ce n’est pas dans mes habitudes, mais qui aime se faire prendre pour une conne, hein ? « T’es qu’une pourriture. ». J’ignore comment c’est possible, mais je me sentais horriblement faible il y a quelques secondes, et j’ai l’impression d’avoir un regain d’énergie. Comme si toute la colère qui grandit en moi était en train de me rendre invincible. She Hulk it is. « C’est quoi ton problème exactement ? T’es une putain de psychopathe. Ça te fait kiffer de prendre les gens pour des cons ? De jouer avec leurs sentiments ? Est-ce que t’as conscience que tu pourrais flinguer des vies ? Genre, littéralement. » Si j’étais plus fragile, j’aurai pu avoir envie de sauter du bateau, tiens. Je ne lui ferai pas ce cadeau, quoi que, ça lui servirait peut-être de leçon d’avoir la mort de quelqu’un sur la conscience. Quoi qu’à bien y réfléchir, je ne suis pas sûre que ça lui fasse quelque chose. Elle n’a pas de coeur. « Comment j’ai pu craquer sur la personne que je déteste le plus au monde ? » Ça, c’était plus une réflexion pour ma pomme, mais dite à voix haute. « Dégage. » J’ai plus envie de la voir. Ni maintenant ni jamais. Je veux oublier tout ça, et surtout ne pas écouter ce qu’elle aurait envie de dire…

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Que je sois en train de m'inquiéter pour elle est un nouveau signe que toute cette histoire ne me laisse pas indifférente. Des signes, il y en a finalement beaucoup depuis que la supercherie a commencé. Ce n'est pas pour rien que je suis toujours à l'affût d'une notification sur l'application. J'aime nos échanges, et le petit jeu de séduction qui s'est inconsciemment immiscé entre nous. J'ai toujours aimé flirter avec les gens, jouant de mon charme et de mon pouvoir comme arme de manipulation. Mais avec elle, c'est encore différent. J'ai mis un certain temps à le comprendre... mais je crois que je ne peux malheureusement plus le nier. La preuve aujourd'hui encore, quand mon coeur ne cesse de s'affoler, malgré moi. Non mais quelle connerie ! Et pourtant, je suis là, à lui courir après, à venir la chercher directement dans les toilettes pour m'assurer que tout aille bien. Mais en la voyant, je ne peux que me rendre à l'évidence : non, elle n'a pas l'air d'aller bien. Et je suis  à dix mille lieux d'imaginer que je puisse être à l'origine de son mal être. « T’es qu’une pourriture. » Hein ? Quoi ? La rage qui se lit dans son regard est encore plus foudroyante que tout ce que j'ai connu avec elle jusqu'à maintenant. Je sais qu'elle me déteste, elle m'a toujours détesté, mais là, c'est encore un autre niveau. Je ne comprends absolument pas ce qui a pu se passer... « C’est quoi ton problème exactement ? T’es une putain de psychopathe. Ça te fait kiffer de prendre les gens pour des cons ? De jouer avec leurs sentiments ? Est-ce que t’as conscience que tu pourrais flinguer des vies ? Genre, littéralement. » Attends, de quoi elle est en train de parler au juste ? Ne me dites pas que... je crois que si. Elle a dû comprendre la supercherie. Je ne sais pas comment elle a fait, si elle a finit par reconnaitre ma voix ou autre chose, mais il n'y a plus aucun doute possible maintenant : elle sait tout. « Comment j’ai pu craquer sur la personne que je déteste le plus au monde ? » Je ne fais même pas attention à ce qu'elle vient d'avouer à demi-mot, trop bouleversée par la tornade qui vient de s'abattre dans la pièce. « Dégage. » Qu'est-ce que je suis censée faire à présent ? « Morgan... je... je suis désolée. » Ou aurais-je dû l'appeler Love ? A force, je ne sais pas, je ne sais plus. Au pied du mur, je n'arrive même pas à trouver les mots pour me justifier. Oui, c'est moi. Cette fille qu'elle a toujours détesté. La Lexa méprisante, arrogante, et tout ce qui s'en suit. Et pourtant, j'ai réussi à lui montrer un tout autre visage derrière cet écran. Cette autre partie de moi. L'authentique, celle que je ne laisse quasiment jamais entrevoir. « Ce n'est pas ce que tu crois... » Je n'ose même plus la regarder dans les yeux, c'est dingue. « Laisse-moi t'expliquer. » Et lui expliquer quoi au juste ? Que je suis venue lui parler sur cette application pour simplement faire sa connaissance ? Ouais, c'est pas totalement la vérité ça. Ok, à la base, j'avais envie de rigoler un peu, c'était plus un délire qu'autre chose. Pour le fun, parce que je suis qu'une pauvre conne. Mais... ouais ça s'est pas vraiment passé comme prévu.

Je lui balance tout à la gueule, sans aucun ménagement. En même temps, est-ce qu’elle a eu ne serait-ce qu’une once de ménagement pour moi ? Un peu d’humanité ? Aucune. C’est juste qu’une putain de poupée de chiffon avec un coeur de pierre. C’est tout ce qu’elle est. Je continue de cracher tout mon venin, tout ce que je ressens de négatif sur elle, et ça brûle là, dans ma gorge, dans mon estomac, dans mon coeur. Mon âme est à nouveau secouée comme un prunier. Je sais même pas pourquoi je prends le temps et l’énergie pour lui parler, même si c’est pour lui gueuler dessus. Même ça elle ne le mérite pas. Je devrais simplement me barrer dans plus jamais la regarder ni lui adresser la parole. Tant pis si c’est ma voisine, tant pis si j’ai des sentiments pour elle, tant pis. Je dois me protéger parce que en réalité, c’est une putain de perverse narcissique. « Morgan... je... je suis désolée. » « Ta gueule ! » que je lui réponds du tac au tac. Désolée mon cul ! Je deviens vulgaire, je n’aime pas être ce genre de personne, mais la colère me fait monter en pression. Je me connais, ça ne va pas durer, et d’ailleurs je pourrai bien fondre en larme d’une minute à l’autre. Mais pour le moment, je tiens le coup. J’ai du mal à croire qu’on dirait un lapin pris dans les phares d’une bagnole. Elle semble si chétive d’un coup, alors que la Lexa que je connais est plutôt du genre grande gueule, à prendre les gens de haut et sourire quand elle écrase quelqu’un. Connasse. « Ce n'est pas ce que tu crois… Laisse-moi t'expliquer. » Je ris. Jaune. J’ai la gorge qui brûle tellement les larmes menacent de quitter mes yeux brillants. Je me renferme, croise mes bras sur ma poitrine et me promets intérieurement de ne plus jamais la laisser toucher mon coeur. « M’expliquer quoi ? Tu crois que je vais te laisser te foutre de ma gueule encore ? Jouer la carte de la pauvre petite fille perdue et enfermée dans son rôle de princesse connasse ? J’ai pas envie d’écouter quoi que ce soit d’autre qui sortira de ta bouche, Lexa. » Je crois qu’elle en a assez fait, elle a assez joué avec moi. « C’était quoi ? Un pari ? Un jeu ? T’avais juste décidé de me détruire comme ça pour le plaisir ou t’as au moins gagné quelque chose ? » Que je sache, si c’est juste une princesse connasse ou si c’est carrément la reine…

hj :  désolée c'est court, c'est la reprise, mais ça a le mérite d'être là

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Je tombe de mille étages quand je comprends ce qui est réellement en train de se passer. Ce que je redoutais depuis déjà un moment a eu lieu... Love a compris. Elle a compris qui était la fille qui se cachait derrière ce pseudo sur l'application. Il n'y a plus aucun retour en arrière possible maintenant, et toute cette histoire me revient en pleine figure tel un boomerang à grande vitesse. Fais chier. Mais je m'attendais à quoi au juste ? Que tout se passe bien dans le meilleur des mondes ? Non, la vie n'est pas un long fleuve tranquille, et je suis bien placée pour le savoir. Merde alors. Me voilà au pied du mur, complètement déboussolée. Et le pire, c'est que je ne peux m'en prendre qu'à moi-même. Inconsciemment, je savais bien que ce moment allait arriver d'un instant à l'autre... le mensonge ne pouvait pas durer éternellement. Le problème, c'est que j'aurais préféré avoir le courage de lui dire la vérité en face, au lieu qu'elle comprenne d'elle-même comme elle l'a fait. Je ne sais pas exactement ce qui m'a trahit, et en réalité, ça ne changera rien de le savoir. Le mal est fait. Et il va falloir que j'en assume les conséquences maintenant. « M’expliquer quoi ? Tu crois que je vais te laisser te foutre de ma gueule encore ? Jouer la carte de la pauvre petite fille perdue et enfermée dans son rôle de princesse connasse ? J’ai pas envie d’écouter quoi que ce soit d’autre qui sortira de ta bouche, Lexa. » Au delà de sa colère, qui est légitime, je peux entrevoir de la déception, et ça, c'est encore pire. L'idée d'avoir pu lui faire du mal me foudroie littéralement le cœur. « C’était quoi ? Un pari ? Un jeu ? T’avais juste décidé de me détruire comme ça pour le plaisir ou t’as au moins gagné quelque chose ? » Je secoue la tête, un peu malgré moi, consciente que tout ce qui sortira de ma bouche dans les secondes à venir ne pourront rien changer. La dernière carte qui me reste à cet instant est de lui dire la vérité, au risque de m'enfoncer encore un peu plus dans la merde. Mais est-ce que j'ai encore quelque chose à perdre dans toute cette histoire ? Malheureusement, je crois que ça ne peut pas être pire. « Ok, tu veux savoir la vérité ? » Je plante mon regard dans le sien, alors que mon coeur s'affole de nouveau dans ma poitrine. Je suis à deux doigts de signer mon arrêt de mort, mais j'ose espérer qu'elle me coupera pas dans mon élan. « Ouais c'était un délire. J'ai appris par hasard que c'était toi derrière ce profil, et je sais pas pourquoi mais j'ai eu envie de venir te parler. » Je soupire avant d'ajouter. « C'est débile, je sais, mais tu me connais... je suis douée pour faire de la merde. » Je baisse un peu les yeux, honteuse. « Mais au fil de nos messages, il s'est passé un truc. Le feeling était là, et j'ai réellement eu l'occasion d'apprendre à te connaitre. » A ce moment-là, les choses ont basculé et il n'était plus du tout question de délire ou quoi que ce soit d'autre du genre. « Je sais très bien que tout ce que je suis en train de te dire doit te faire une belle jambe... » Je soupire à nouveau. « Mais j'étais sincère avec toi Morgan, je te le promets. Tout ce que j'ai pu dire était vrai, sur moi, ou sur ce que je ressentais. » Je ne me serais pas confiée à elle à ce point-là si ça n'avait pas été le cas... je lui ai parlé de mon frère jumeau, de mes troubles alimentaires aussi. Très peu de personnes connaissent ce qui se cache sous l'iceberg. « Bref, on s'en fout maintenant. »

Je suis hors de moi, et ça ne me ressemble pas. Une colère de cet acabit, je crois ne jamais en avoir ressentie d’aussi forte. Je me sens blessée, humiliée, et ça fait un mal de chien. Chaque déception amoureuse est difficile à accepter, mais j’en ai connu beaucoup jusque là. La pire a été sans aucun doute la mort de ma meilleure amie, mais ça n’a rien de comparable cette fois. Lexa m’a arraché le coeur pour le piétiner ensuite sans aucun ménagement. Juste pour le plaisir, avec un sourire machiavélique. C’est exactement comme ça que je ressens les choses. C’est un monstre, et je ne vois pas pourquoi j’accepterai sa trahison sans rien dire. Pourtant, au fond de moi, j’ai ce besoin viscéral de comprendre. Pourquoi elle s’acharne sur moi ? D’abord avec mon petit ami au lycée et maintenant via Love Maker ? Qu’est-ce que je lui ai fait pour qu’elle veuille me détruire à ce point ? « Ok, tu veux savoir la vérité ? » Non. Maintenant je ne suis plus vraiment sûre de vouloir connaître la vérité. Parce que dans ce genre de moment, ça fait peur, purement et simplement. Je préfère encore me dire que c’est juste un monstre, et j’ai peur que ce soit pire après ça. Je reste immobile face à elle, mon regard accroché au sien, à tel point que la douleur que ce lien crée est insoutenable. « Ouais c'était un délire. J'ai appris par hasard que c'était toi derrière ce profil, et je sais pas pourquoi mais j'ai eu envie de venir te parler. » Mon estomac se noue davantage. Je ne sais plus ce que je dois prendre des mots qui sortent de sa bouche. Elle m’a raconté tellement de mensonges que je ne peux rien croire. Plus jamais. « C'est débile, je sais, mais tu me connais... je suis douée pour faire de la merde. » Je lâche un ricanement aussi cynique qu’acerbe. « A qui l’dis-tu… ». Ses épaules sont abaissées comme un animal perdu, je ne l’ai jamais vue dans une telle posture. On dirait qu’elle a envie de disparaître, ça ne lui ressemble pas. Elle joue avec moi… « Mais au fil de nos messages, il s'est passé un truc. Le feeling était là, et j'ai réellement eu l'occasion d'apprendre à te connaitre. Je sais très bien que tout ce que je suis en train de te dire doit te faire une belle jambe… Mais j'étais sincère avec toi Morgan, je te le promets. Tout ce que j'ai pu dire était vrai, sur moi, ou sur ce que je ressentais. » La boule dans ma gorge est différente de tout à l’heure. Au départ c’était une colère immense, et maintenant c’est juste de la déception, de la peine. Je me sens perdue, parce que ça semble si réel, et mon esprit refuse de croire que tout ça est vrai, qu’elle est sincère, qu’elle a été sincère au milieu de cette mascarade. Les larmes roulent sur mes joues et je reste droite comme un i, le regard vide d’émotions, les mâchoires serrées. « Bref, on s'en fout maintenant. » finit-elle par avouer d’une petite voix un peu tremblante. « Ouais. On s’en fout maintenant. » Peut être qu’il y a encore quelques années, j’aurai accepté de croire, de la croire. Mais aujourd’hui, je ne suis plus la même personne, parce que la vie m’a changée, brisée en un sens, et je refuse de me laisser avoir une nouvelle fois. Sans un mot de plus, je fais quelques pas pour quitter les toilettes en passant à côté d’elle sans même la regarder. Une fois à l’extérieur, je récupère mes lunettes de soleil dans ma poche et les glisse devant mes yeux pour que personne ne remarque que ces derniers sont rougis par les larmes et la colère. Je ne veux plus jamais la croiser. Plus. Jamais.