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| Sujet: underwater (jules x jane) (#) Sam 1 Avr - 1:45 | |
| Tu as passé le début de l’année, comme à ton habitude, à éviter de croiser la route de Jules. C’est idiot, tu le sais, mais tu ne peux pas t’en empêcher. Tu sais qu’elle met un point d’honneur à célébrer ton anniversaire d’une manière ou d’une autre, même par une petite pensée ou attention, et ces moments te sont toujours difficiles à avaler. Rationnellement, tu es aussi certaine que tu gaspilles beaucoup plus d’énergie à redoubler en esquives et subterfuge que ce que l’inconfort mineur que 5 minutes d’attentions te procurerait. Mais enfin, à 56 ans désormais, on ne te refera pas. Malgré tout, elle t’a manqué la petite et c’est avec un enthousiasme non dissimulé que tu sautes dans ta voiture en fin d’après midi en direction du café où vous avez vos habitudes. Ou plutôt le café où tu as tes habitudes et où tu traines Jules depuis quelques années maintenant. L’inverse aurait été plus compliqué, tu doutes supporter l’ambiance moite des night-clubs que tu regardais déjà d’un mauvais oeil à vingt ans.
Partie avec un bon quart d’heure de retard pour t’épargner une attente trop longue, tu réussis quand même, malgré toi, à arriver avec quelques minutes d’avance. Vos horloges internes sont incompatibles depuis le premier jour, mais tu as arrêté de t’en agacer, préférant la compagnie constructive de quelques pages d’un mauvais roman. Le thé devant toi est fumant, l’ambiance du lieu détendue et chaleureuse comme à son habitude. Et toi, au milieu de tout ça, tu te sens à ta place. Il fut un temps où tu aurais probablement considéré que ta vie n’était pas complète. Qu’il y manquait des pièces cruciales, mais en réalité tu te dis que c’est en arrêtant de tout analyser qu’on parvient réellement à vivre pour de vrai. Tant pis pour le conditionnel, pour ce que tu devrais faire ou ressentir. Pour les plans sur la comète écrasés dans le jardin des voisins. Pour les ambitions avortées et des rêves échoués sur la rive. Une existence douce et sans vague, caressée par la brise marine des péripéties qui te sont rapportées ça et là et auxquelles tu assistes, tantôt spectatrice, tantôt secouriste à la bouée pneumatique. Tu ne doutes pas que la tornade qui s’apprête à passer la porte de l’établissement va s’installer à ta table avec une pile d’histoires rocambolesques qui te décrocheront une série de sourires d’incrédulité et ne manqueront pas, quoi que tu en dises, de titiller la part d’inquiétude que tu refuses d’admettre tout haut. Tu as beau avoir choisi ta famille, tu n’en subis pas moins les conséquences au quotidien.
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