nice to see you again (álvaro)

Planche de surf à la main, combinaison soigneusement enfilée, longs cheveux rebondissant allègrement dans son dos, Abby scrute l’horizon en plissant légèrement le nez. Les vagues ne sont pas exceptionnelles aujourd’hui, mais il faut dire qu’elles le sont rarement dans la région de Wellington. C’est pour ça que quand elle en a l’occasion, la jeune femme n’hésite pas à aller se promener vers d’autres horizons. Raglan fait notamment partie de ses destinations préférées, mais dans le quotidien il faut bien faire avec ce qu’on a. Prévisions météorologiques scrutées de près depuis la veille, Abby finit par s’approcher de l’eau pour y tremper un pied. Évidemment, la température n’est pas idéale. Le printemps a pointé le bout de son nez, mais la saison estivale n’est pas pour tout de suite. Néanmoins, l’eau n’est pas glacée et avec un équipement adapté, la néo-zélandaise s’y fait assez bien. Elle entre petit à petit dans l’eau, après avoir vérifié l’heure sur son Apple Watch : ce n’est pas encore l’heure de son rendez-vous, il y a le temps. Alors elle se met dans son élément, faisant automatiquement abstraction du reste. Elle nage pour s’éloigner de la plage et se retourne. Environ une minute plus tard, elle prend sa première vague. Et le temps s’écoule, sans doute plus rapidement qu’elle l’aurait cru. C’est en levant les yeux vers la plage qu’Abby cherche un visage familier, finissant par le repérer un peu plus loin. Son visage s’éclairant d’un sourire, elle lui fait un signe de la main. Elle prend une autre vague pour se rapprocher de la plage et se redresse prestement, planche déjà à la main. « Bonjour ! » claironne-t-elle avec bonne humeur. « Tu viens d’arriver ? » Elle pose sa planche à côté de lui. « Je suis venue tâter un peu le terrain » sourit-elle, secouant un peu ses boucles brunes pour se débarrasser de l’excédent d’eau salée. « Tu vas bien ? » Leur rencontre ne s’est pas du tout déroulée dans de bonnes conditions. Les circonstances sont un très mauvais souvenir pour l’étudiante, mais surtout ça aurait pu être bien pire sans la personne désormais présente à ses côtés. Abby est contente de le revoir et, en son for intérieur, tente de se convaincre que ça n’a rien à voir avec le fait qu’elle le trouve particulièrement mignon. « C’est cool que tu sois venu ! » Partager une de ses passions, rien ne pourrait lui faire plus plaisir. La brune ne se souvient plus comment ils en sont arrivés là, mais c’était en tout cas suite à un échange de textos plutôt agréable. Au moins, quelque chose de bien est ressorti après avoir frôlé la catastrophe et c’est sur ça qu’Abby a envie de se concentrer.

Après avoir passé la soirée à mixer dans la boîte jusque tard dans la nuit, Álvaro était rentré se reposer et s'était endormi comme une masse. Récemment, il avait fait installer des volets à la fenêtre de sa chambre pour empêcher les rayons de soleil de s'infiltrer dans la pièce. Sensible à la lumière, il se réveillait trop vite et ne récupérait plus suffisamment. Il faut dire que son mode de vie et ses horaires décalés ne collaient pas avec ceux de l'astre solaire. Depuis ce changement, son sommeil était devenu de meilleure qualité et il dormait plus longtemps. Davantage reposé, il profitait mieux du reste de la journée. C'est ainsi qu'à son réveil, début d'après-midi, il était frais et en forme pour une session sportive au grand air. La veille, Álvaro avait bien avancé sur de nouvelles compositions, de sorte qu'il avait plusieurs heures de libre aujourd'hui pour décompresser. A la suite d'échanges par texto, il était convenu qu'il rejoigne Abby sur la plage. Il l'avait rencontrée dans des circonstances peu enviables et s'était par la suite préoccupé de son état, mais le plus important était que tout s'était bien terminé et que ce mauvais moment était derrière elle.

Cet après-midi, l'appartement était calme. Charly était occupé et Milo faisait profil bas – enfermé dans sa bulle - depuis l'histoire avec Jude. Tout comme Dahlia, le compositeur espérait que les tensions retomberaient rapidement. Après avoir bu un café et avalé une barre de céréales, Álvaro enfila un t-shirt, un sweat et un short de plage, puis se rendit près de l'océan. Il se promena sur le sable jusqu'à remarquer une silhouette brune qui surfait entre les vagues. La température n'était pas des meilleures mais Abby était équipée avec sa combinaison. Le DJ avait déjà surfé au cours de ses voyages mais ne pratiquant pas au quotidien, il n'avait pas acheté le matériel adéquat pour en faire ici. Intrigué, il la regarda s'amuser sans mot dire pendant un moment, ne voulant pas casser l'euphorie de la jeune femme. Finalement, Abby le remarqua et il lui adressa un signe de la main, tandis qu'un sourire s'esquissait sur ses lèvres. « Salut ! » Répondit Álva, lorsque la brune sortit de l'eau et s'approcha. « Oui, depuis peu. » Abby déposa sa planche et expliqua qu'elle était venue tester le terrain. « J'ai vu, tu te débrouilles bien. Ça fait longtemps que tu surfes ? » L'étudiante prit ensuite de ses nouvelles. « Bien et toi ? » Le soleil revenait et du coup une ambiance plus festive s'installait en ville aussi. Il l'avait ressenti hier en animant la soirée. Donc tout roulait... à part les tensions entre ses potes. « Et c'est cool de l'avoir proposé. Ça fait longtemps que je n'en ai pas fait. Juste pendant des vacances. » Et il avait passé le plus clair de son temps à jouer les équilibristes qu'à profiter des vagues.


Peu de compliments pourraient autant faire plaisir à Abby qu’au sujet de sa pratique du surf - ou encore de ses vêtements cousus à la main, bref tout ce qui la passionne réellement. Alors quand Álvaro lui demande si elle surfe depuis longtemps, la jeune femme ne met pas bien longtemps à répondre. « Depuis que je suis petite. J’avais à peu près six ans quand j’ai appris à nager. Je crois que la première fois que je suis montée sur une planche, j’avais sept ans… C’était en intérieur, ma mère a encore la photo de ce jour-là. » Un sourire se dessine sur les lèvres d’Abby quand elle en parle. « Après ça, ils m’ont inscris à un stage. J’en ai fait chaque été avec des moniteurs. Adolescente, j’ai participé à des compétitions à mon niveau… Ici et en Australie. Je suis allée deux ou trois fois à Tahiti, mais pas pour participer. Les vagues sont démentielles là-bas ! »

Comme d’habitude, la néo-zélandaise a tendance à s’enthousiasmer. « Mes parents ont toujours veillé à ce que je puisse pratiquer les activités qui me plaisaient. Ils m’ont adoptée à l’âge de cinq ans, alors peut-être… Que c’était une de leurs façons à eux d’essayer de compenser pour les années d’avant. » Abby parle toujours très librement de son adoption. De toute façon, dès qu’elle est vue en compagnie de ses frères et soeurs, ou justement de ses parents, il y a de quoi se poser des questions. « Oh, mais je parle tout le temps trop ! Et toi alors, tu as appris sur le tas ? » C’est le cas de beaucoup de leurs compatriotes. En tout cas, le jeune homme évoque le fait que pour lui, c’était surtout pendant les vacances. Elle a bien compris que ce n’était pas un passe-temps régulier pour lui, mais ça lui fait plaisir de partager l’une de ses passions. « Tu as animé hier soir ? » demande-t-elle ensuite tout naturellement - on est samedi, alors il est probable qu’un vendredi soir, il ait effectivement travaillé. Forcément, l’étudiante s’intéresse aussi à ce que le DJ fait.

Grâce à leur échange de textos, elle a déjà appris pas mal de choses à son sujet. « Pas de randonnée prévue dans les jours à venir ? » sourit-elle, se rappelant qu’il lui avait dit que ça faisait partie des choses qu’il aimait bien. Comme la plupart de leurs compatriotes, Abby aussi apprécie ce genre d’activité. Il faut dire que dans chacune des régions de la Nouvelle-Zélande, il n’y a pas franchement de quoi s’ennuyer. Les paysages tous dignes d’être admirés et, rien que pour ça, elle sait qu’ils ont beaucoup de chance. « Ça va mieux, sinon » glisse-t-elle finalement pour répondre à sa question précédente. Autant ne pas éviter d’en parler, ça risquerait d’être plus inquiétant qu’autre chose. « J’ai bien suivi les prescriptions du médecin. Et puis… Je sors toujours accompagnée. Je suis plus vigilante, sans forcément le vouloir j’imagine. » C’est un peu automatique, il faut bien l’avouer. La Hallenstein a toujours du mal à penser au fait qu’il aurait pu se passer le pire, si le génie des platines n’avait pas été aussi observateur et aussi réactif. « Est-ce que c’est la première fois que tu débusques ce genre d’ordure ou… Ou dans ton travail, tu as l’habitude ? » Évidemment, Abby espère que ce n’est pas le cas, sinon ce serait encore plus horrible. Mais il est inutile se voiler la face - heureusement, il y a aussi des personnes qui rattrapent tout le reste, des personnes qui donnent de l’espoir.