you have the right to remain silent (andrea #1)

J’aurai dû quitter mon poste il y a deux heures déjà mais l’envie de rester plus longtemps a finalement eu raison de mes horaires. Ce soir, Mael et Calliope dorment chez ma sœur puisqu’Andrea n’était pas disponible pour les garder, malheureusement. Lorsqu’elle me l’a annoncé, j’ai un peu paniqué puisque Phil m’a déclaré au même instant qu’il avait un déplacement de dernière minute. J’ai finalement demandé à ma sœur en dernier recours, qui a accepté. Ma sœur était ravie de les avoir à la maison et Mael heureux de pouvoir passer du temps avec sa tante. Bref, personne ne m’attend à la maison. Phil est donc en déplacement… encore, et Eden n’était pas disponible pour que l’on passe la soirée ensemble. Dans ces moments, je préfère rester à bosser plus longtemps, surtout en ce moment. Ça m’évite de penser et de réfléchir et de toute façon, nous avons plusieurs enquêtes à gérer et boucler. La journée a été relativement productive en termes d’arrestation si bien que j’ai à peine pris le temps de manger. Le café est devenu mon carburant comme d’habitude mais mon ventre crie famine. Je me laisse tenter par un sandwich au distributeur de l’accueil du commissariat, rien d’extraordinaire, mais ça me permettra d’attendre d’être rentrée.

En plein milieu d’un croc de mon jambon-beurre, nous recevons un appel provenant d’un gala. Suspicion de trafic dans les verres, état d’ivresse sur la voie publique d’une jeune fille qui a pris le bus un peu plus loin. Je lève les yeux au ciel, une situation ordinaire pour une soirée finalement, mais nous devons y faire un tour pour arrêter ça. J’indique à mon équipe de se dépêcher, ça sera mon dernier déplacement de la soirée et ça ne sert à rien de prendre notre temps. Ni une ni deux, nous partons en direction du gala et lorsque nous arrivons sur place, nous commençons à récolter les témoignages. Rien ne laisse présager un quelconque trafic de drogue ou ce genre de chose, alors nous rencontrons la jeune fille et ses amis. Cette dernière semble habituée à boire à outrance et ce n’est pas la première fois que nous la retrouvons dans cet état. Malgré tout, je décide de faire un tour dans le gala pour m’assurer que nous ne passons pas à côté de quelque chose, et demande à une partie de l’équipe de repartir, ne gardant que les meilleurs. Ces derniers partent de leur côté, et je pars du mien, à la recherche d’indices ou d’événements suspects. Alors que je suis en train d’observer ce qu’il se passe du côté du bar, un visage familier apparaît un peu plus loin. Andrea est là, et un sourire s’affiche sur mon visage. L’excuse de l’interrogatoire est bonne pour m’approcher d’elle. “Hey, Andi ! Tu vas bien ?” Je lui souris légèrement. Je préfère m’assurer qu’elle va bien, même si je pense qu’elle n’est pas du genre à boire de l’alcool. Je ne l’imagine pas boire du tout à vrai dire, et je ne pense pas me tromper. Elle est responsable et c’est bien pour ça que je l’apprécie. C’est la première fois qu’elle me voit en uniforme et je ne peux m’empêcher de la charrier un peu. “Ne t’en fais pas, je ne suis pas là pour te passer les menottes. On est venu faire un tour après un appel.” Pas la peine d’en dire davantage.

Il n’est pas rare d’être appelée pendant des galas ou des fêtes étudiantes. La plupart du temps, les appels sont dûs à une alcoolisation trop forte ou à une suspicion de trafic de GHB ou de drogue dans les verres. Parfois, nous sommes appelés pour des crimes et des actes plus graves. Plutôt souvent à vrai dire. Heureusement, ce soir, nous comprenons vite qu’il s’agit d’un malentendu et une partie de l’équipe rentre au commissariat puisque nous n’avons plus besoin d’eux. Je décide de rester un peu avec deux autres collègues – mes meilleurs éléments, pour vérifier que nous ne passons à côté de rien. Très vite, nous nous aventurons dans la foule pour observer ce qu’il se passe. Au loin, j’aperçois un visage familier. C’est Andrea, ma babysitter. Un peu plus que ça en réalité… Une amie, maintenant. Après tout, je lui confie les deux personnes les plus importantes de ma vie et je l’apprécie vraiment beaucoup. Je m’approche d’elle pour la saluer, et en profite pour plaisanter un peu sur les menottes. “Je suis ici pour le travail. Mais non, il n’y a rien de grave. J’en profite juste pour faire un petit tour, je ne m’attendais pas à te croiser ici.” Pourquoi ? Andi peut très bien avoir envie d’aller à un gala. “Tu passes une bonne soirée ?” demandais-je. Loin de moi l’idée de vouloir lui faire un interrogatoire, je m’intéresse réellement à elle. J’apprécie Andrea et au fil des mois, elle a su devenir une vraie connaissance. J’aime être en sa compagnie et sa seule présence m’a souvent réconforté quand je rentrais le soir. Peut-être parfois un peu trop… La brune m’interroge sur les enfants et je ris un peu. Est-ce que je les ai laissé devant la télévision avec une pizza ? Je sais qu’elle plaisante, puisque les enfants ne mangent pas de pizzas – ou dans de très rares occasions, et surtout, ils n’ont pas le droit de regarder la télévision le soir. Je sais que de nombreux parents utilisent la télé – les écrans en général, comme une babysitter, mais j’ai la chance d’avoir Andrea comme réelle babysitter et je préfère cela. Les écrans ne sont pas très bons pour les jeunes enfants et les études le montrent de plus en plus. “C’est presque ça ! Ils sont chez ma sœur. Comme d’habitude, Phil ne pouvait pas les garder. Enfin tu commences à le connaître, un déplacement à la dernière minute…” Je soupire et baisse les yeux. Il ment, je le sais. Il n’est pas en déplacement, il doit encore être avec cette autre femme, je ne sais où… Mais à quoi bon vouloir savoir, je préfère rester dans le déni. Les enfants sont aussi bien avec ma sœur, Phil a parfois du mal à les gérer quand il est seul avec eux. “Mael m’a demandé pourquoi tu n’allais pas le chercher à l’école aujourd’hui. Il m’a dit que tu étais son amoureuse. Visiblement, il t’apprécie autant que moi.” Je ris un peu pour la taquiner. Mael aime beaucoup Andrea, il a presque grandi avec elle, il a l’habitude de passer des soirées en sa compagnie. Il n’aime pas changer ses habitudes et était un peu perturbé quand je lui ai expliqué ce matin. Mais maintenant, il doit être en train de vivre sa meilleure vie avec sa tante, j’en suis persuadée. “Es-tu venue accompagner ? Je ne veux pas te déranger trop longtemps. Mais n’hésite pas à me dire si tu as vu quelque chose de louche dans le coin, tu ne risques rien.” La bonne excuse pour lui demander si elle est seule et disponible pour discuter, ou non. Après tout, j’ai tout mon temps. J’ai fait suffisamment d’heures supplémentaires pour aujourd’hui alors, personne ne m’en voudra si je traîne au gala ; ou si je rentre directement chez moi après l’intervention.