l'histoire de ma vie
I want to feel your love like the weather.
Cher journal,
Je sais que je me confie à toi pas assez souvent, mais je vis un moment critique de ma vie, un gros problème, et j’ai besoin de me confier à quelqu’un.
Je dois blâmer cela sur le snobisme dont je faisais l’abus lorsque j’étais jeune qui a résulté à un manque éminent d’amis. Les seules personnes que j’avais dans ma vie étaient mes parents trop souvent absents et des gouvernantes qui m’épouvantaient tant elles étaient strictes. C’est tout de même grâce à l’une d’elle que je suis devenue la femme que je suis aujourd’hui. Elle m’a forcée à aller faire du bénévolat et depuis je n’ai cessé d’en faire. Ça m’a ouvert les yeux sur le monde, le vrai, celui de la joie, de la souffrance, de l’amour… J’ai vite réalisé que, dans le fond, je n’étais pas riche du tout. Il me manquait ce qu’il y a de plus fondamental, de l’amour. Avec mes parents toujours absents, je cachais en moi une grande tristesse qui s’est vite traduit en acharnement dans mes études. Je suis devenue l’une des plus brillantes de ma classe, mais cela a également valu de me faire mal aimée des autres étudiants. Encore une fois, je me retrouvais seule. Je me suis alors acharnée de plus belle pour être la meilleure et prouver à tous, mes parents, mais surtout à moi-même que je n’étais pas que la fille de parents riches et célèbres, ma mère étant un grand mannequin et mon père un requin des affaires. J’ai, matériellement, tout ce que j’ai toujours voulu, mes parents se sont assurés de me combler de cadeaux en m’offrant n’importe quel caprice que je pouvais avoir. C’est ainsi, d’ailleurs, que j’en ai rempli ma bibliothèque, ayant comme ami que les personnages de mes romans favoris. Pathétique! C’est ainsi aussi que je me suis mise à envier les enfants des familles plus modestes et démunis, se chamaillant avec leurs frères et sœurs ou simplement en riant dans les bras de leurs parents qui les couvraient de baisers. Pourquoi n’avais-je pas ce droit là aussi? Je me suis liée d’affection pour les familles que j’aidais et c’est ainsi qu’est né mon désir d’étudier la médecine, de consacrer ma personne à la survie et au bonheur des autres.
Le problème dont je veux me confier, j’y viens, est survenu alors de mon séjour à Londres. Je me suis lancée à l’aventure en acceptant d’aller étudier sur le vieux continent à la même université où mes parents se sont rencontrés. C’était l’occasion pour moi d’être une personne nouvelle, d’être qui je suis vraiment. J’en avais assez d’être la Ashley Dawson, fille de la riche famille Dawson. Je voulais du changement et créer ma propre réputation.
Tout allait si bien jusqu’au soir où mon monde a balancé. Jamais je n’ai vécu autant d’émotions dans ma vie et tout cela grâce à un homme. Habituée de voir la vie seulement en blanc, cet homme me permettait de voir la vie dans une toute autre perspective, quelque chose de vrai. Voyant en lui, le nouveau départ, la nouvelle identité, la personnalité à risquer de tout tenter que j’avais tant désirée, je lui ai fait confiance. Je trouvais pour la première fois un ami, quelque chose qui m'était inconnu et qui trop souvent m’a mise dans de beaux draps, mais qui me faisait vivre des émotions et des aventures comme j’en avais seulement lu dans les livres. C’était un choc des mondes, le garçon de la rue, le délinquant de la nuit, celui qui n’obéit à aucune règle, véritable éclipse, soleil face à la lune contre le petit ange dépaysé. Il m’a fait découvrir un monde bien trop sombre que je ne connaissais pas, un monde noir dont je n’avais même pas idée. Il était comme ma drogue, avec une rageuse détermination de le guérir de la noirceur dans lequel il se cachait. À mes yeux, il n’était pas tout noir. Il était en fait, la lumière que je recherchais dans ma propre noirceur. Il m’a fait goûter au monde dans lequel je voulais vivre par ses aventures, par ses histoires, par les émotions qu’il m’a fait vivre, par le pétrin dans lequel j'ai trop souvent été complice malgré moi, par ses lèvres, … Des lèvres que j’ai embrassées qu’une fois, les miennes étaient alors vierges de tout baiser et jamais ne serai-je capable de les oubliées.
Jamais je n’oublierai la nuit où nous nous sommes rencontrés. C’était la soirée d'introduction du programme de médecine. Je ne connaissais personne, alors je me suis dit qu’il serait bien de sortir pour une fois et rencontrer tous mes camarades dans un bar hors campus dans le quartier de Camden. C’était plutôt sympa, mais vraiment pas ma scène surtout lorsqu’on ne connaît personne. Je retournais à pied jusqu’aux undergrounds pour prendre le
tube, mais, fidèle à moi-même, je me suis perdue. Le coin était assez louche et le froid de la nuit qui tombait n’aidait pas les sueurs froides que j’avais en croisant cette bande d’hommes vêtus de noir et empestant l’alcool et la fumée. Je ne m’y connaissais pas en drogue, mais j’étais sûre qu’il ne s’agissait pas de cigarettes. J’ai pressé le pas lorsqu’il était indéniable que ces hommes m’avaient repérée. Je paniquais à l’idée de me trouver un refuge, mais j’ai vite été encerclée et intimidée. Traumatisée par les propos indécents qu’ils me tenaient, je priais le ciel que quelqu’un vienne à mon secours. C’est là que je l’ai vu, sortant de l’ombre et se montrant sans pitié pour ceux qui osaient me toucher à nouveau. Il avait fait preuve de tant de courage de me défendre comme il l’a fait, se pendre des coups au visage et sur tout son corps pour quelqu’un qui lui était étranger. Je ne savais pas comment le remercier autre que la seule chose que je savais faire, le soigner. J’ai utilisé l’alcool dans la flasque qu’il avait sur lui et j’ai déchiré un bout de mon chandail pour le panser. Jamais quelqu’un ne s’était défendu pour moi, moi qui m’était tellement fait méprisée dans le passé. Je l’ai admiré le temps de le guérir, jusqu’à ce qu’il se montre en colère contre moi et me fasse fuir.
Jamais je n’ai pensé le revoir, mais il hantait mes pensées. J'espérais que l’occasion se reproduise et c’est arrivée. Il était un serpent brisé, un garçon bien trop sombre qui se noyait dans ses maux. Je voulais l’aider, je lui étais éternellement reconnaissante d’avoir été là pour moi quand j’en avais le plus de besoin et je voulais être là pour lui. Il appelait ça être têtue, mais ça ne démontrait que comment je me souciais de lui. Je m’étais habituée, lorsqu’il baissait sa garde, qu’il prenait peur et essayait de me faire fuir, mais il m’avait donné le plus beau et le plus terrible des cadeaux, de l’espoir. Il pouvait faire ce qu’il voulait de moi, il avait raison, j’étais têtue, car jamais je ne le laisserais tomber. J’avais espoir qu’il puisse un jour trouver la lumière et je crois que je m'étais aveuglée dans l'espoir d’être sa lumière, mais je me suis vite détrompée, un homme comme lui ne se plaît pas d’une jeune femme naïve et rêveuse comme moi.
Après trois ans d’études et de merveilleuses aventures, je devais le quitter. Ce n’était pas par choix. Si ce n’était que de moi, je serais restée que pour lui, car je ressentais quelque chose pour lui bien plus puissant que l’ambition qui m’a toujours habitée. Toutefois, j’avais un visa d’études qui me forçait à retourner dans mon pays, sinon j’aurais été condamnée criminellement. Je l’ai supplié de me suivre, qu’il connaisse le même nouveau départ qu’il m’avait permis de vivre, mais il a refusé, il a disjoncté comme jamais. Il n’a cessé de dire que j’étais aussi fuyarde que l’autre, la femme qui hantait ses esprits, celle que je jalousais et haïssais de l’avoir détruit de la sorte. Il disait que j’étais une traîtresse et qu’il ne voulait jamais me revoir. Après ce jour, je n’ai plus eu de nouvelles, comme si tout ce que j’avais vécu avec lui à Londres n’avait simplement jamais existé. Si seulement il avait su que jamais je ne le fuirais, que j’avais dû partir, car il était illégal pour moi de rester.
Mais tout cela ne vaut rien, car bien que je lui ai écrit toutes ces lettres, ces messages et tous les coups de fil que je lui ai lancés, je n’ai eu aucune nouvelle, jusqu’à ce que je le vois, devant moi, sur la page d’un journal dans la section nécrologie. Là, Journal, là est mon problème.
Depuis, ma vie s’est résumée à me lancer dans la quête de son souvenir. J’ai abandonné mes études, n’ayant qu’un baccalauréat en médecine, ne me donnant rien de suffisant pour pratiquer. J’étais vouée à une vie sans métier, sans mon meilleur ami. Tout ce qu’il me reste de lui est l’amour pour la basse, un talent qu’il m’a enseigné et dont je ne peux tout simplement plus me lasser.
Je voyage à Island Bay pour retrouver la famille qu’il n’a pas voulu suivre l’année dernière… Cherchant à trouver quelqu’un avec qui partager mon deuil et finalement panser les blessures des plaies qu’il a su ouvrir sans que je l’ai voulue. Il était la drogue dont j’avais les effets, mais jamais consommée. Maintenant, avec un nouveau départ, je veux goûter à cette drogue et Island Bay est le lieu où j’y arriverai. Je veux vivre sans gêne d’être qui je suis vraiment. Je recommence à nouveau, avec une nouvelle moi, une nouvelle destinée.
Établie depuis peu, j’ai rapidement fait de ce lieu mon nouveau chez moi. Je me suis trouvée un emploi de barmaid, car c’est le premier lieu où j’ai pensé postuler. Je sors complètement de ma zone de confort, mais ça me plaît. Un autre de mes projets est d’apprendre à surfer, mais je vais me contenter de faire partie de ce band pour l’instant. C’est peut-être une des aventures les plus excitantes de ma vie…