une petite soeur vous dîtes ? (joan)

Depuis le début de la semaine, ma vie semble reprendre un semblant de normalité. Après trois mois de congé maladie à la suite de mon accident de voiture, j’ai enfin pu recommencer à travailler dans mon service. Si les premiers jours ont été difficiles, le temps de reprendre à nouveau mes marques, et de montrer à mes collègues que je suis capable de prendre soin de moi, je suis désormais à nouveau dans mes habitudes. Mes horaires de travail n’ont rien à voir avec celles que je faisais depuis plusieurs mois avant mon accident. Non seulement je suis à mi-temps, mais en plus, je n’ai pour le moment pas le droit d’aller sur le terrain et de quitter au delà de dix-neuf heures. J’imagine que c’est pour mon bien, et pour être honnête, ça m’arrange. J’ai beau avoir eu le temps de me reposer, le rythme des premiers jours m’a montré à quel point je me suis épuisée au boulot. Je ne faisais plus rien, je ne voyais plus vraiment mes proches, c’était une véritable catastrophe. Il a fallu un accident grave à ce point pour m’en rendre compte, mais ça y est, c’est compris dans ma tête. Malgré tout, mes soirées ne sont pas réellement comme je le voudrais réellement. Tawny n’est plus là la semaine, elle est dans son camp de la base militaire, et ça me manque de l’avoir à la maison en rentrant. J’imagine que je vais mettre du temps à m’y habituer, mais c’est difficile. Aujourd’hui, c’est jeudi, et dans deux jours elle rentre à la maison. Ou demain soir. Je ne sais jamais avec elle. Pour être honnête, aujourd’hui, ce n’est pas à elle ou à Maggie que j’ai pensé le plus, mais à Joan. Ma véritable petite soeur, biologique j’entends. Elle est au courant de mon existence depuis quelques semaines, et nous avons enfin décidé de nous rencontrer. Nous avons rendez-vous dans un café de Wellington en début de soirée, à ma sortie du boulot. J’appréhende, beaucoup. Je n’en ai même pas parlé à Tawny, à quoi bon, elle n’est même pas au courant que j’ai retrouvé mon père. Ça fait dix ans que je lui cache, et je commence à penser qu’il faudrait que je lui en parle. Nous ne nous cachons normalement rien, et pourtant, je n’ai jamais réussi à lui en parler. La raison ? Je n’en ai aucune idée, le fait est que j’espère qu’elle ne le découvrira pas par elle même…

C’est sur les coups de dix-huit heures que je quitte le boulot. La journée a été longue, un peu barbante puisque je ne fais que m’occuper de dossier mais au moins la journée a passé vite. Si on veut. J’attrape mon sac, et prend la direction du café dans lequel je dois rejoindre Joan à pied, puisqu’il se trouve pas très loin du commissariat. J’arrive vers dix-huit heures trente, et je m’assois à une table à l’intérieur puisqu’il commence à faire vraiment frais. Je m’installe, et l’attend. Quand une blonde à lunette rentre, je la regarde un peu, fronce les sourcils, et je comprends finalement que c’est elle au bout de quelques minutes, grâce aux photos que notre père m’a envoyé. Je me lève, et lui fais un signe de la main. Elle s’approche de moi, et je lui souris. « Salut. Heu… Joan c'est ça ? » Ouais, je suis carrément gênée, je ne sais même pas quoi dire, quoi faire, comment réagir.

Depuis que mon père m’a parlé de ma demi-sœur, la fille illégitime qu’il a eu alors qu’il venait de rencontrer ma mère, je crois que j’ai fait une sorte de déni. J’ai encaissé cette nouvelle presque sans réaction tant elle me semblait irréelle et j’ai continué à faire ma vie comme si de rien était. J’ai une demi-sœur, plus âgée que je ne connais pas et dont l’existence est restée secrète jusque là, ça semble fou, non ? Ça l’est. Et s’il a décidé de m’en parler maintenant c’est probablement qu’il a une bonne raison, des regrets, c’est ce qu’il a exprimé et je ne peux pas faire semblant de comprendre parce que ce n’est pas le cas, tout ça me dépasse pour le moment. Après quelques semaines j’ai décidé de la rencontrer, je n’ai rien dit à Janis, elle en veut encore beaucoup trop à notre père pour ne pas en rajouter, ils doivent parler et faire le point tous les deux avant cela. Il espère sans doute que je joue l’intermédiaire, à vrai dire j’essaye mais ma sœur est têtue. Dire que je suis tendue à l’idée de rencontrer cette jeune femme est un euphémisme, j’ai peur qu’aucune discussion ne s’engage, qu’on ai rien à ce dire. Je n’ai parlé de ça à personne, et mon père lui-même ne sais pas qu’aujourd’hui je dois rencontrer ma demi-sœur. Le rendez-vous a été convenu après son boulot aux alentours de dix-huit heures trente dans un café. Je finis les cours à dix-huit heures ça me laisse peu de temps pour hésiter et c’est mieux ainsi.
Les mains moites et le cœur battant je me rapproche du café en question, pas question de faire demi-tour pourtant j’en ai presque envie. Je m’arrête devant la porte, souffle un bon coup et entre dans l’établissement. Je regarde autour de moi, je n’ai qu’une vague idée de ce à quoi la jeune femme ressemble, mon père m’a montré juste une photo, je sais qu’elle est brune c’est tout. C’est elle qui me reconnaît la première se levant pour me faire signe, je m’avance dans sa direction et lui souris hochant la tête pour confirmer mon identité « Oui, c’est moi. Et tu es Phoebe… » ma gêne doit se voir comme un néon en pleine nuit, je m’installe à la table m’asseyant face à elle. « C’est… carrément bizarre, hein ? » dis-je avec une petite moue trahissant mon embarras, j’ose à peine la regarder « Tu… T’es vraiment flic ? » je ne sais pas si c’est une bonne question pour entamer la discussion mais c’est tout ce que j’ai trouvé. Je fais l’effort de la regarder, honnêtement je n’aurais jamais deviner qu’elle soit flic. Je grimace légèrement « Désolée… c’est pas tous les jours qu’on rencontre sa demi-sœur. » j’esquisse un petit sourire et me passe la main dans les cheveux, mieux vaut que je me taise.

Je me souviendrais de ce jour toute ma vie, ce jour où j’ai appris que le père qui m’a élevé n’était biologiquement pas le mien. J’étais adolescente, et je rentrais de soirée avec ma meilleure amie, Tawny. Sans doute un peu trop bourrée pour savoir quoi faire, et pour garder mon calme. Ce soir là, tous s’est brisé. Mes certitudes, mes doutes. Je ne me suis jamais entendue avec l’homme qui m’a élevé, il y avait toujours cette barrière entre nous, et j’ai enfin compris que nous n’avions aucuns liens ensembles. Seulement celui de l’éducation, si on peut dire ça comme ça. Une cassure dans ma peau d’adolescente, dont je n’ai jamais parlé à personne. Si Tawny sait que mon père n’est pas le mien, elle n’est pas au courant de mes recherches d’origines, mais surtout de leur aboutissement. C’est à ma majorité que j’ai découvert l’existence de mon géniteur, mais aussi celles de deux soeurs, des jumelles, six ans plus jeune que moi. Aujourd’hui, je rencontre l’une d’elle, et autant dire que ça me fou la trouille. Elle sait que j’existe depuis quelques semaines seulement, et j’appréhende notre rencontre. Pour être honnête, je n’étais même pas sûre qu’elle viendrait. Quand elle rentre dans le café où nous nous sommes donné rendez vous, je ne la reconnais pas de suite. Quand enfin je me rend compte que c’est elle, je me lève pour lui faire signe, et elle s’approche vers moi. « Oui, c’est moi. Et tu es Phoebe… » Je souris, et hoche à mon tour la tête. Je ne sais même pas de quoi on va parler, et j’ai l’impression qu’elle est autant gênée que moi. « C’est… carrément bizarre, hein ? » Je me mord la lèvre inférieure, avant de glisser ma main dans mes cheveux. « Ouais, je pensais que tu n’allais pas venir. » Je rougis légèrement, et elle ne tarde pas à reprendre la parole, sans doute pour que le silence ne s’installe pas. « Tu… T’es vraiment flic ? » Je penche un peu la tête pour comprendre exactement le sous-entendu de sa question. Elle a des problèmes et elle a peur que je lui passe des menottes ? Ou je ressemble pas à une flic ? J’imagine que c’est plutôt la deuxième solution, cette fille n’a pas du tout l’air d’une délinquante. « Désolée… c’est pas tous les jours qu’on rencontre sa demi-sœur. » Je secoue la tête et lui souris. « T’inquiète pas, c’est la première fois que ça m’arrive aussi. » Je me racle la gorge, avant de répondre à sa précédente question. Si elle veut engager la conversation sur ce sujet, ma foi, ça ne me dérange pas. « Et oui je suis flic. On dirait pas hein ? » Je ris un peu, et le barman arrive pour nous demander si on veut boire quelque chose. Je commande un café, et me tourne vers la blonde. « Tu veux quoi ? C’est moi qui offre, va y. » Je lui souris un peu, et le barman s’éloigne pour préparer notre commande. Je me mord à nouveau la lèvre inférieure, à cause de la gêne sans doute, et reprend la parole. « T’as grandi depuis la dernière fois. Sur la photo je veux dire, ton père m’avait envoyé une photo de toi et ta soeur pour vous présenter à l’époque. » Je grimace un peu. « Enfin notre père. » Je ne sais pas trop si elle est au courant que je sais ce secret depuis un moment déjà, j’espère que je n’ai pas fait de gaffe. « Et tu fais quoi toi ? T’es toujours dans les études j’imagine ? » Je souris un peu, pour la mettre à l'aise.

Je ne suis pas vexée que la jeune femme ai pensé que je n’allais peut-être pas venir, la vérité étant que j’ai beaucoup hésité. Apprendre que j’ai une demi-sœur c’est une chose mais la rencontrer c’est donner à cette révélation un caractère totalement concret et il n’y aura plus moyen de reculer ensuite. Même si ça ne nous engage aucunement à avoir un lien quelconque, en la rencontrant je reconnais son existence et ce n’est pas rien. J’appréhende un peu d’avoir à gérer cela seule, j’ai toujours eu l’habitude qu’on se soutienne Janis et moi dans ce genre de situation. Mais bon je crois qu’il va falloir que je m’y fasse, à cette séparation. En revanche je me demande comment elle prendra la nouvelle et accueillera l’existence de notre demi-sœur. Mais pour l’instant il n’est pas question de cela, je dois gérer ma gêne et cette situation plutôt étrange. Pour entamer la discussion je l’interroge sur son boulot, je me sens maladroite de lui demander cela, surtout comme première approche. Son sourire appelle le mien, mes lèvres s’étirent légèrement bien que je sois assez tendue. Je secoue la tête pour confirmer que non on ne dirait pas qu’elle est flic « Pas vraiment. » je hausse les épaules, autant être honnête en plus elle n’a pas l’air de mal le prendre parce que ça la fait rire. Un serveur s’approche de la table, Phoebe commande un café et m’invite à choisir ce que je veux « Un thé vert, merci. ». L’ambiance est toujours un peu étrange, il va falloir plus que cinq minutes pour que nous nous détendions je pense. La brune entame la discussion affirmant que j’ai grandit depuis la dernière fois, j’affiche un air surpris qui ne tarde pas à se dissiper quand elle évoque une photo que mon père lui a envoyé. Pendant un instant j’ai cru qu’elle m’avait déjà vu petite. Le but de cette rencontre c’est de faire connaissance, normal que la jeune femme me questionne sur ce que je fais de ma vie. Elle a l’air d’avoir un peu plus de facilité que moi à se détendre et je ne suis pas mécontente que ça soit elle qui mène la discussion. Je hoche positivement la tête pour confirmer son hypothèse « Oui, je fais des études en histoire de l’art. » je lui souris à mon tour « Et je ne sais pas encore ce que je ferai avec ça, mais ça me plait. ». Nos boissons nous sont servies « Merci pour l’invitation. » dis-je en approchant mes mains de la tasse chaude « Ça fait longtemps que tu sais ? » demandé-je véritablement curieuse de savoir comment elle vit cela de son côté. « Qu’on est demi-sœur je veux dire. » précisé-je en me rendant compte que ma question pouvait appeler plusieurs réponses.

Avec la plus belle des évidences, le malaise ne tarde pas à s’installer entre moi et Joan. Nous ne connaissons rien l’une de l’autre, nous nous rencontrons pour la première fois, et j’imagine qu’on y est jamais préparé, surtout dans une situation pareille. Nous avons pas mal d’années de différences, nous aurions pu grandir ensembles, mais notre père en a décidé autrement et m’a ordonné de ne rien dire à ses filles quand je l’ai appris. Elles étaient jeunes, elles avaient douze ans, et j’imagine qu’il redoutait une rébellion avec l’adolescence qui arrivait. Je ne sais pas si c’est une bonne chose d’attendre aussi longtemps, mais je me suis toujours interdite d’aller à l’encontre de sa décision, et de prévenir ses filles ou au moins prendre contact avec elles. J’aurais pu les garder de temps en temps, les voir pour installer une relation, puis leur annoncer quelques années plus tard mais visiblement, le père Oakley n’était pas de cette envie. Enfin peu-importe, le temps des regrets ne sert à rien. C’est Joan qui commence la première à engager la conversation, et je comprends rapidement que j’ai pas l’air d’une flic. « Pas vraiment. » Je ris un peu, je sais qu’elle n’a pas tord, j’en ai jamais eu l’air, ça a toujours étonné les personnes. Je vois ça plutôt de manière positive, ça me permet de m’infiltrer plus facilement, les enfants me font plus confiances. Le serveur arrive, et je propose à Joan de choisir ce qu’elle veut boire, c’est moi qui offre. « Un thé vert, merci. » Je souris, et je me tourne vers elle une fois que le serveur est parti pour lui dire qu’elle a changé depuis la dernière fois. Depuis la photo que notre père m’a envoyé, mais j’ai l’impression d’avoir fait une gaffe alors je me dépêche de lui demander ce qu’elle fait dans la vie. « Oui, je fais des études en histoire de l’art. » Je souris, une artiste. Elle doit tenir ça de sa mère, car vu l’allure du père et mes qualités en art plastique, c’est pas de notre côté je crois. « Et je ne sais pas encore ce que je ferai avec ça, mais ça me plait. » J’hausse les épaules. « Tu sais les études ne définissent pas l’avenir, tu feras ce que tu veux, du moment que ça te plait. Et puis t’as le temps ! » Je lui souris un peu. « Si ça peut te rassurer, ma meilleure amie a 27 ans et elle ne sait toujours pas. Ça arrivera quand ça arrivera ! » Je soupire en pensant, et le serveur revient avec nos boissons. Je souris. « Merci pour l’invitation. » Je lui lance un petit clin d’oeil, et bois une petite gorgée de café, manquant presque de me bruler. « Ça fait longtemps que tu sais ? » Je relève la tête vers elle. « Qu’on est demi-sœur je veux dire. » Je me mord la lèvre inférieure. Je ne sais pas si je dois lui dire la vérité, changer de sujet, j’ai pas envie qu’elle soit en rogne. Je grimace un peu, et pose ma tasse de café en me raclant la gorge. « Oui, ça fait un moment… » Je baisse un peu les yeux. « 10 ans, en fait. » Avant qu’elle ne reprenne la parole, j’utilise les arguments de son père pour me défendre. C’est pas de ma faute. « Mais c’était pour ton bien, c’est ce qu’il disait. Vous étiez jeunes toi et ta soeur et Oakley a eu peur. » J’hausse les épaules. « Ça peut foutre en l’air une adolescence une nouvelle pareille, j’imagine. J’en sais rien. » Je soupire un peu et bois une nouvelle gorgée, moins chaude cette fois-ci.

Discrètement j’observe les mimiques de mon interlocutrice, j’essaye de lui trouver des points communs avec mon père, ma sœur ou moi et c’est difficile d’imaginer que cette inconnue il y a encore dix minutes ai en partie le même sang que le mien qui coule dans ses veines. Je sais que mon père n’a pas trompé ma mère, que cette jeune femme n’est pas le fruit d’un amour adultère mais d’une relation précédant la leur. Mais inévitablement je me questionne sur cette histoire, sur son histoire à elle. Malgré une gêne palpable la conversation s’engage, c’est formelle, emprunt d’une certaine timidité même si nous essayons de faire chacun des efforts. Je lui parle de mes études, mais du flou quant à mon futur après celles-ci et sa réponse me fait sourire. Elle se veut rassurante, me donnant même l’exemple de sa meilleure amie qui à 27 ans ne sait toujours pas quoi faire de sa vie, elle a raison ça me laisse un peu de marge. « J’espère que j’en saurai plus d’ici là. » dis-je avec un léger haussement d’épaules. Je la remercie pour l’invitation, et une question me brûle les lèvres autant que mon thé le ferait si je tentais de le boire maintenant. Je demande à Phoebe depuis combien de temps elle sait qu’elle a des demi-sœurs. La question semble l’embarrasser, elle avoue que ça fait un certain temps mais quand elle précise j’écarquille les yeux. Dix ans ? Je m’apprête à l’assaillir de questions, ne comprenant pas comment tant d’années ont pu s’écouler sans qu’elle prenne contact avant aujourd’hui, attendant même que la démarche vienne de moi il y a quelques semaines. Elle s’explique, je comprends alors que le frein venait de mon père, il voulait nous préserver Janis et moi. Je hoche la tête, analysant ses propos, la situation et ce que je ressens. J’ai dû mal à savoir ce que ça me fait, je ne suis pas en colère, pas déçue, juste étonnée et curieuse de savoir ce qu’aurait été notre vie si nous avions su.
« Donc ça fait dix ans que tu parles à m… notre père ? » dis-je plus pour moi que comme une véritable question. « Je sais qu’il ferait tout pour nous protéger. » je la regarde attentivement « Tu as toujours su qu’il était ton père ? Est-ce que… il a été présent pour toi ? » j’ai des tas de questions qui fusent dans ma tête, et inévitablement ça me fait bizarre d’imaginer mon père ayant une autre fille bien qu’elle soit là devant moi en chair et en os. « Janis ne sais pas encore… » avoué-je avant de boire une gorgée de thé « Elle s’est disputée avec notre père, elle est partie de la maison et ne veut plus lui parler. Il voudrait que je fasse l’intermédiaire. » je fais une moue « Mais je ne sais pas comment lui annoncer ça, c’est pour ça que je suis toute seule aujourd’hui pour te rencontrer. ». C’est d’autant plus étrange d’être là face à ma demi-sœur que je rencontre pour la première fois alors que j’ai l’impression d’avoir été abandonné par ma sœur jumelle « On ne s’est pas trop parlé non plus. Elle m’en veut de bien m’entendre avec lui. » je ne sais pas pourquoi je lui parle de tout ça, peut-être pour qu’elle se rende compte que nous ne sommes pas la famille idéale, surtout pas en ce moment.

J’essaie de rassurer ma soeur, même si c’est encore étrange de la considérer comme tel sur ses études. Tawny a vingt-sept ans, elle ne sait toujours pas ce qu’elle veut faire. Enfin l’armée c’est nouveau, mais je sais qu’elle ne fera pas ça de sa vie… c’est pas elle. J’évite de lui dire, le plus possible, mais c’est une rockeuse et non une militaire. Enfin j’imagine qu’elle en a besoin, alors si ça lui fait du bien pendant un petit moment… « J’espère que j’en saurai plus d’ici là. » Je lui souris, j’espère aussi. Je ne sais pas si ma soeur de coeur le saura un jour elle, j’ai un doute, mais c’est une facette de sa personnalité, le changement. Notre commande ne tarde pas à arriver, et Joan revient sur le sujet de notre lien biologique, en me demandant si ça fait un moment que je suis au courant. Je me mord un peu la lèvre, essaie d’être vague, mais finalement je décide d’être honnête. Dix ans, c’est long, elle en avait douze et j’imagine qu’elle serait capable de m’en vouloir. Je lui explique les raisons de cette attente, son père qui voulait les protéger, essayant de me déculpabiliser le plus possible. Ce n’est pas de ma faute, si ça avait été que moi, ça ferait longtemps qu’elle serait au courant. Elle, et sa soeur d’ailleurs. « Donc ça fait dix ans que tu parles à m… notre père ? » Je me contente d’hocher la tête, elle a bien compris. « Je sais qu’il ferait tout pour nous protéger. » Je souris. Il a l’air d’être un bon père malgré tout, il a accepté de me reconnaître il y a quelques années déjà, c’est quelque chose que j’ai apprécié de sa part. « Tu as toujours su qu’il était ton père ? Est-ce que… il a été présent pour toi ? » Je secoue la tête, c’est compliqué. « J’ai appris à seize ans que le père qui m’a élevé n’était pas le mien. » Je soupire, c’est un souvenir douloureux, surtout les circonstances. « A ma majorité, j’ai trouvé l’identité de ton père, et je l’ai contacté. Et voilà… on ne peut pas dire qu’il a été vraiment présent, enfin, il m’a reconnu à ma demande mais rien de plus. » Je baisse un peu les yeux. « Ça a été une nouvelle difficile à encaisser, j’ai mal vécu la fin de mon adolescence pour plusieurs raisons, et voilà. » Je soupire à nouveau. Il faut dire qu’entre le départ de Maggie, et cette nouvelle, ça n’a jamais été facile, surtout à cette période. « Janis ne sais pas encore… » J’hausse un sourcil pour essayer de mieux comprendre, et bois une gorgée de café. « Elle s’est disputée avec notre père, elle est partie de la maison et ne veut plus lui parler. Il voudrait que je fasse l’intermédiaire. » Je grimace un peu, ça, je n’étais pas vraiment au courant. « Mais je ne sais pas comment lui annoncer ça, c’est pour ça que je suis toute seule aujourd’hui pour te rencontrer. » J’hausse un peu les épaules. A sa place, je ne saurais pas comment faire non plus… enfin ça n’a déjà pas été simple pour moi de venir aujourd’hui, de tout expliquer, alors le faire une deuxième fois ne va pas être simple. Et une troisième pour expliquer à Tawny qui n’est même pas au courant de tout ça… « On ne s’est pas trop parlé non plus. Elle m’en veut de bien m’entendre avec lui. » Je relève un peu la tête vers elle. « Je pense qu’on doit… enfin y aller en douceur avec elle. J’ai pas envie qu’elle me prenne pour une connasse, ou toi. Je pourrais peut-être la rencontrer avant de lui annoncer ? Enfin je sais pas, moi aussi je me suis toujours mal entendue avec mon père, enfin c’était pas… » Je soupire. « T’as compris. » Je bois une nouvelle gorgée de café, en fermant les yeux. C’est compliqué tout ça, plus que je ne pouvais l’imaginer. « Je pensais pas que ça allait être autant… compliqué. Enfin tu vois j’ai imaginé ce moment depuis le début, et je me rend compte que ça ne se passe pas trop comme prévu. Enfin bref. » La déception, c’est clair. Mais je ne me voile pas la face, ça n’aurait jamais pu être simple comme nouvelle pour les deux jumelles. Savoir que l’autre n’est même pas encore au courant ne me rassure pas vraiment. « Vous êtes différente ta soeur et toi si j’ai bien compris ? Dans le caractère, dans les goûts ? C’est étrange, ton… notre père ne m’a même pas parlé de tout ça. » Je me mord un peu la lèvre.

J’essaye de comprendre ce qu’il en est exactement de la situation de ma demi-sœur, depuis combien de temps elle sait que ma sœur et moi nous existons, la place de notre père dans sa vie. Finalement les seules choses qui me relie à elle pour le moment puisque Phoebe est encore une inconnue à mes yeux. La jeune femme me raconte comment elle a su que celui qu’elle pensait être son père ne l’était pas vraiment, que ça a été difficile et je ne peu que l’imaginer. Je m’estime chanceuse d’avoir grandit dans un foyer stable, de l’attention bienveillante de mes parents. Et bien que nous ayons reçu la même, Janis est rentrée en conflit avec notre père depuis quelques années déjà. Ça n’a fait qu’empirer et désormais ils ne se parlent plus. La brune l’ignorait, ça semble la contrarié au moins on a la même réaction face à cette situation. Je préfère que ma demi-sœur sache où elle met les pieds, que tout n’est pas si facile et j’avoue sans détour être un peu dépassée par tout cela. Je hausse les épaules quand Phoebe essaye de trouver une manière d’agir qui pourrait être la meilleure possible. J’ai l’impression qu’elle déchante un peu, elle a l’air déçue mais je ne sais pas pourquoi. Qu’espérait-elle ? Une belle rencontre pleine de sourires et de larmes de joie ? Rejoindre une sorte de clan lié par une loyauté sans faille ? Je lui adresse un petit sourire « Tu l’avais imaginé comment ? » je bois une gorgée de thé puis hausse les épaules à sa question sur ma Janis et moi. « Oui on est très différentes. » elle a l’air contrarié que notre père ne lui ai pas raconté tout ça, elle se sent mise à l’écart et je peux le comprendre. Le fait est que c’est une réalité. « Janis est tout feu tout flamme. Excentrique, impulsive et elle semble toujours envahie par une énergie débordante. Mais elle a fini par être… révoltée. » je fais une moue contrariée « Mon père est militaire, il tient à une certaine rigueur et c’est comme si elle avait voulu faire tout le contraire. » je secoue la tête « Enfin bref. Janis est la rebelle et je suis… » je ne sais même pas comment me définir « Plus réfléchie et plus positive. ». Je fais tourner un peu ma tasse entre mes mains puis relève le regard en direction de ma demi-sœur « J’aurais bien aimé que notre père me parle de toi un peu plus tôt. » je souris « Il devait croire qu’on était pas prête à ça. » mais les choses sont ce qu’elles sont, nous nous rencontrons seulement maintenant. Le temps perdu ne se rattrape pas, mais rien n’empêche d’apprendre à nous connaître à partir de maintenant. En tout cas moi je ne suis pas contre cette idée « Pour Janis, je pense que ça finira par s’arranger. Et si tu veux la rencontrer, je lui parlerai, elle m’écoutera. » du moins je l’espère, vu son silence radio de ces quelques temps. Je me sens un peu plus détendue, peut-être parce que les questions les plus délicates sont passées « Tu as toujours voulu entrer dans le police ? » demandé-je afin de faire d’avantage connaissance avec la jeune femme.

« Tu l’avais imaginé comment ? » Il est évident que je ne m’attendais pas à que notre rencontre se passe comme ça. Je veux dire, j’imaginais que sa soeur serait là également, mais de ce que je peux comprendre, c’est tendu avec sa famille. J’imagine que ce qu’elle va apprendre à mon propos ne va pas arranger les choses, et je soupire en y pensant. « Avec ta soeur. Mais c’est très bien comme ça, je peux apprendre à mieux te connaître comme ça. » Je lui souris tendrement, avant de lui demander si elle et sa soeur sont différentes. Elles sont jumelles, mais de ce que je peux en comprendre, c’est uniquement leur lien de ressemblance. « Oui on est très différentes. » Je penche un peu la tête pour l’écouter et chercher à comprendre. « Janis est tout feu tout flamme. Excentrique, impulsive et elle semble toujours envahie par une énergie débordante. Mais elle a fini par être… révoltée. » Je grimace. Je connais ce caractère là, enfin, Tawny a tendance à être comme ça aussi. C’est sans doute pour ça que je l’apprécie autant. Elle est le feu, et je suis l’eau qui l’empêche d’incendier le monde. « Mon père est militaire, il tient à une certaine rigueur et c’est comme si elle avait voulu faire tout le contraire. » Militaire ? Je fronce un peu les sourcils, j’avais oublié ce détail là. A croire que j’avais déjà l’ordre dans la peau. « Enfin bref. Janis est la rebelle et je suis… » Je la regarde attentivement, c’est toujours intéressant de voir comment les personnes se définissent. « Plus réfléchie et plus positive. » Je souris, et bois un peu de mon café. « Je comprends. Ma colocataire est dans le style électrique aussi, c’est pas toujours simple. Enfin les contraires c’est bien aussi, tu verras ça plus tard. J’espère que ça ira. » Je baisse un peu les yeux. « J’aurais bien aimé que notre père me parle de toi un peu plus tôt. » J’hausse les épaules, nous sommes deux. C’est pas faute d’avoir essayé, mais il n’a jamais voulu. « Il devait croire qu’on était pas prête à ça. » Je lui souris doucement et hoche la tête. « Ça doit être ça… il voulait certainement attendre la fin de votre adolescence. Enfin, ça ne sert à rien d’avoir des regrets, j’imagine. » Et j’en suis sûre. A quoi bon regretter, c’est fait, on ne peut plus rien changer maintenant. « Pour Janis, je pense que ça finira par s’arranger. Et si tu veux la rencontrer, je lui parlerai, elle m’écoutera. » Je grimace un peu, elle n’a pas trop l’air de cet avis. « On va peut-être y aller doucement, je n’ai pas envie qu’elle soit encore plus en conflit avec toi ou ton père… » Je lui souris. « Tu as toujours voulu entrer dans le police ? » Enfin un sujet qui me connait ! Je me racle la gorge, bois une nouvelle gorgée, et regarde la jeune blonde. « Oui, depuis toujours ou presque. J’ai un rapport à l’ordre assez… enfin. J’ai toujours été passionnée par la justice, tout ça. » Je souris. « J’étais pas assez douée pour des études de droit, alors je suis rentrée dans la police. Et ça me plait, vraiment, c’est une passion. J’y consacrais ma vie avant. Je me calme, j’essaie. » Je baisse un peu les yeux en pensant à mon accident, et soupire. « Je suis dans la brigade des mineurs, c’est une passion ça aussi. C’est pas facile tous les jours, c’est même souvent très difficile, on voit des cas parfois… Enfin voilà. On peut dire que c’est une vocation, je n’ai jamais douté. » Je lui souris un peu. « Et toi ? Enfin je veux dire, tu étudies l’histoire de l’art mais c’est quoi tes talents ? La peinture ? Le dessin ? » Je penche la tête.

Je verrai ça plus tard. Ça me fait sourire que Phoebe me dise ça, comme si elle prenait son rôle de grande sœur déjà au sérieux en voulant me faire bénéficier de son expérience. Pas que je doute qu’elle soit de bon conseil, mais ça m’amuse. Et du coup je lui avoue que j’aurais bien aimé connaître son existence plus tôt, sans avoir l’assurance que les choses auraient été mieux ou pires, ça personne ne peut le savoir et elle a raison il n’y a pas de regrets à avoir. Notre père a jugé qu’il était bon d’attendre, alors ma demi-sœur a accepté son choix. Il est plutôt du genre de ceux que l’on écoute, enfin sauf en ce qui concerne Janis. D’ailleurs en parlant d’elle je propose d’essayer de lui parler, la convaincre de rencontrer Phoebe même si actuellement elle a l’air plutôt décidée à s’éloigner de la famille pour le moment. Je sais que ça lui passera, qu’on retrouvera notre complicité, mais pour l’instant l’histoire avec notre père est trop récente et elle a dû mal à passer outre. La brune me tempère, préférant prendre le temps qu’il faudra pour ne pas envenimer la situation je hoche la tête « T’as sans doute raison. », avec le tempérament de ma jumelle mieux vaut ne pas risquer que ça s’aggrave. Je délaisse le sujet famille, m’intéressant à ma demi-sœur et notamment son métier. Etait-ce une vocation ? Apparemment oui. Je souris à l’entendre parler avec enthousiasme de son métier, et pourtant il est souvent difficile. Elle travaille auprès des mineurs et je fais une légère grimace en comprenant ce que cela sous-entend. C’est une jeune femme courageuse et déterminée, je note cependant qu’elle met un petit bémol quant à son investissement dans son boulot. « Avant ? Qu’est-ce qui t’as convaincu de lever le pied ? » je hausse les épaules « Pardon… c’est indiscret. » elle a peut-être fait une dépression ou subit un choc important, le genre de truc que l’on rencontre parfois quand on est flic. Nous essayons tour à tour d’en apprendre plus sur chacune, et si nous étions un peu gênées au début je trouve que pour une première prise de contact ça se passe plutôt bien. Elle m’interroge sur mes talents et je souris « Du talent j’en sais rien, mais mon truc à moi c’est le dessin. » et parce que j’ai toujours un carnet avec moi je le sors de mon sac et le pose sur la table, le faisant glisser dans sa direction « Si tu veux voir ce que je dessine. » c’est très varié, dépendant de ce que j’ai sous les yeux ou dans la tête. « C’est moins concret que ce que tu fais… » je bois une gorgée de thé, il a refroidit un peu « Enfin c’est concret aussi, mais c’est pas forcément ancrée dans la réalité. Pour ça que ça me plait, je peux me projeter dans un autre monde si j’ai envie. ». Je suis une rêveuse, je ne m’en suis jamais cachée parce que c’est qui je suis, et tant pis si parfois on me trouve trop optimiste j’en ai bien rien à foutre.

Je ne tarde pas à comprendre que mes deux petites soeurs sont assez différentes l’une de l’autre. Quand Joan est calme, Janis a l’air énergique, quand Joan est douce, Janis a l’air brute. Deux contraires, assez étonnant quand on y pense, vu qu’elles sont jumelles. La seconde est en conflit avec sa famille, et j’explique à Joan que je préfère attendre un peu avant de la rencontrer, pour ne pas la perturber ou engendrer un autre conflit. « T’as sans doute raison. » Je lui souris,  et nous passons rapidement à un autre sujet, moins compliqué pour nous. Elle me demande si mon boulot est une vocation. J’essaie de lui expliquer du mieux que je peux qu’avant, mon boulot était toute ma vie. Travailler dans le domaine de la justice et du droit a toujours été un objectif pour moi, mais je n’étais pas assez douée à l’école pour faire des études de droit et devenir avocate ou une profession de ce genre là. Alors je me suis tournée vers l’école de police, et la brigade des mineurs m’a rapidement accueilli. « Avant ? Qu’est-ce qui t’as convaincu de lever le pied ? » Je bois une gorgée de café, et m’apprête à lui répondre quand elle reprend la parole. « Pardon… c’est indiscret. » Je lui souris et secoue vivement la tête. J’imagine que vu notre lien, elle peut être au courant et ça lui montrera bien que ça ne sert à rien de trop se consacrer à son travail, plus tard, ou à ses études, maintenant. « Non ce n’est pas indiscret du tout. » Je souris. « Je travaillais trop, j’y passais mes journées, mes nuits, je ne dormais plus beaucoup. » Je soupire. « J’ai eu un accident de voiture assez grave au mois d’avril, j’ai eu beaucoup de chance. » Je me mord la lèvre inférieure. De la chance, j’en ai eu. J’omettrais le détail Tawny puisque là pour le coup, ça ne la regarde pas mais je ne peux m’empêcher d’y penser encore. Et quand on voit le résultat de sa relation avec Loïs, autant dire que j’ai une bonne intuition. Je change de sujet à mon tour pour m’intéresser à la jeune femme, à son talent. « Du talent j’en sais rien, mais mon truc à moi c’est le dessin. » Je la regarde avec attention, et elle sort un carnet de son sac, puis la glisse jusqu’à moi. « Oh. » J’attrape le petit carnet, et l’ouvre, l’écoutant toujours. « Si tu veux voir ce que je dessine. » Je lui souris une nouvelle fois avant de concentrer mon regard sur ses croquis, ses esquisses qui sont magnifiques, pleines de vie, de talent. Ses dessins sont assez variés, c’est vraiment intéressant à voir. « C’est moins concret que ce que tu fais… » Je lève un peu la tête vers elle. C’est peut-être moins concret, mais c’est quand même utile. L’art a fait l’homme, et l’homme a fait l’art. Je trouve ça très important. « Enfin c’est concret aussi, mais c’est pas forcément ancrée dans la réalité. Pour ça que ça me plait, je peux me projeter dans un autre monde si j’ai envie. » Je souris et hoche la tête, une rêveuse donc. Je termine de feuilleter son carnet, et le referme avant de lui tendre. « C’est superbe là dedans. Et c’est important de s’évader dans un autre monde tu sais. » Je bois une dernière gorgée de café, il n’y en a plus. « Tu n’as jamais pensé à tenter une école d’art ? Tu as du potentiel, et tu sais, il faut l’utiliser. Vraiment, on voit l’âme dans tes dessins et c’est un très bon point. » Je lui souris tendrement. « Tu as d’autres passions que le dessin ? Je ne sais pas, tu es musicienne ? Ou même le cinéma, n’importe quoi. » J’ai envie d’apprendre à la connaître, c’est important je pense.

Une légère grimace déforme mes traits alors que Phoebe me raconte pourquoi elle a fini par lever le pied dans son boulot. Elle bossait trop, au point de puiser dans une énergie qu’elle n’avait plus et jusqu’à avoir un accident à cause de cela. C’était il y a quelques mois à peine et je ne peux m’empêcher de penser qu’elle aurait pu perdre la vie dans cette accident sans que je n’ai eu vent de son existence. Ma gorge se serre légèrement face à ce constat que je trouve réellement triste. Fort heureusement ma demi-sœur est là devant moi et alors qu’elle s’intéresse à ma passion pour le dessin je lui ouvre les portes de mon univers en lui tendait mon carnet. Elle regarde avec attention, s’attarde sur certaines pages plus que d’autres puis me le rend, m’affirmant que cet imaginaire est important. Je hoche la tête, je ne pourrais pas être plus d’accord avec elle puisque j’y passe la majeure partie de mon temps. Phoebe n’est pas la première à me demander pourquoi je n’ai pas tenté une école d’art, je hausse les épaules. Selon elle j’ai du potentiel, la encore elle n’est pas la seule à le dire et à force de l’entendre j’ai fini par me dire qu’ils ont peut-être raison. « J’ai pas essayé d’y entrer. Je me suis inscrite en histoire de l’art et voilà... » je fais une légère moue « En école d’art des gens qui dessinent bien y’en a des tas. » et à l’époque j’étais convaincue de ne pas être prise, j’ai voulu m’assurer un diplôme en optant pour l’Université. Je sais qu’il ne serait pas trop tard pour essayer et je crois que je l’envisage de plus en plus. « Je suis en troisième année, je pourrais toujours tenter d’entrer dans une autre école une fois diplômée. » je sais que mes parents m’encouragent, et puis me voir rester encore un peu sous leur toit ne les dérange pas, surtout pas après le départ précipité de Janis.
Ma demi-sœur m’interroge sur d’autres passions que je pourrais avoir, la musique notamment et je me mets à rire « Non pas musicienne du tout. Ça c’est l’autre J. Mais j’aime la musique, juste que je n’en joue pas et ça vaut mieux. » je termine mon thé « J’aime le cinéma oui. » je lui souris, elle a un truc dans le regard qui inspire la confiance un côté assez doux, apaisant et c’est agréable maintenant que la gêne entre nous s’est dissipée. « Et toi tu as des passions dans ce genre là ? » je suis curieuse de savoir si elle est plutôt musique ou dessin, plus proche de moi ou de Janis dans ses centres d’intérêts. Je plisse un peu les yeux en l’observant et lâche, amusée « Je sais pas pourquoi mais je pense que t’es douée en cuisine. » ça me vient comme ça, une intuition et peut-être que je me plante sur toute la ligne. « Est-ce que tu es mariée ? » demandé-je ensuite, voulant dresser un portrait un peu plus précis de cette jeune femme avec qui je partage une partie de mon sang. J’ai dépassé l’aspect bizarre de cette découverte et à vrai dire maintenant j’ai envie d’apprendre à la connaître vraiment.

Plus je regarde les croquis de ma petite soeur, et plus je comprends qu’elle a véritablement un don dans ce domaine. Je souris à chacune de ses esquisses, plus incroyables les une que les autres, et je lui demande si elle a pensé à tenter une école d’art. « J’ai pas essayé d’y entrer. Je me suis inscrite en histoire de l’art et voilà... » Je relève la tête vers elle pour essayer de comprendre. « En école d’art des gens qui dessinent bien y’en a des tas. » Je souris. Un manque de confiance ? Probablement, et c’est normal à son âge. « C’est vrai, et il en faut. Mais certains réussissent à se démarquer, et si c’est ce que tu aimes, fonces. » Je lui souris pour la mettre en confiance. Je ne sais pas si c’est uniquement à cause d’une mauvaise confiance en elle qu’elle n’a pas voulu tenter une école d’art, ou si c’est parce qu’elle n’en avait pas envie, pas le courage mais ce serait dommage. Qui ne tente rien n’a rien après tout, c’est une devine qui se montre juste dans de nombreux cas. « Je suis en troisième année, je pourrais toujours tenter d’entrer dans une autre école une fois diplômée. » J’hoche la tête, elle a complètement raison, autant avoir la sureté d’un diplôme, et c’est peut-être ça qui l’a freiné. « Oui, c’est sûr. J’espère que tu réussiras à te trouver une voix là dedans, ça se voit, c’est ton domaine. » Je souris, et n’hésite pas à changer de sujet pour m’intéresser encore plus à elle, et si elle aime d’autres domaines. La musique, le cinéma, la littérature… Quand elle se met à rire, je comprends que j’ai faux sur toute la ligne, et je me prend à rire avec elle. Intuition, zéro. « Non pas musicienne du tout. Ça c’est l’autre J. Mais j’aime la musique, juste que je n’en joue pas et ça vaut mieux. » Je penche un peu la tête, sa soeur est musicienne donc, voilà qui est intéressant. J’imagine qu’elle doit être plutôt rockeuse que violoncelliste, quoi que, on peut être surpris parfois. « J’aime le cinéma oui. » Je souris, et penche la tête. « Ta soeur est musicienne ? Elle joue quoi ? » Je suis curieuse, peut-être un peu trop, j’imagine que c’est à Janis que je dois poser ces questions, mais j’ai envie de la connaître aussi un minimum alors c’est l’occasion. « Et toi tu as des passions dans ce genre là ? » Je penche un peu la tête pour réfléchir. Dans ce genre là ? Artistique elle veut dire ? Je jouais de la guitare à une époque, à cause de Tawny, puis la pauvre elle m’a obligé à arrêter, je n’étais pas assez douée d’après ce que j’ai compris. « Je sais pas pourquoi mais je pense que t’es douée en cuisine. » Je ris et hoche la tête. « Oui ! Enfin, je me débrouille bien, mon truc c’est les pancakes. J’ai des commandes de mes voisins, véridique ! » Je ris. « Je suis, enfin j’étais assez sportive avant et j’adore voyager, partir à l’aventure. La musique j’ai arrêté, le dessin… je n’ai pas de don là dedans. Je suis plutôt physique qu’intellectuelle tu vois ? » Je souris. « Est-ce que tu es mariée ? » Maggie. J’aimerais lui dire oui, mais notre couple est encore récent -bien que nous nous aimons depuis plus d’onze ans-. J’espère un jour, on verra bien. « Non, mais je suis en couple. » Je me mord la lèvre. Dois-je lui dire que je suis avec une femme ? Elle finira bien par l’apprendre de toute façon. « Je suis en couple avec une femme. Elle s’appelle Maggie. » Je souris, et ne tarde pas à lui retourner la question. « Et toi, un ou une petite amie ? Sauf si tu es déjà mariée, enfin, vu ton jeune âge je ne crois pas. » Je ris légèrement.

Ma demi-sœur a raison, le dessin c’est mon truc et je ne m’imagine pas faire autre chose qu’un métier qui implique que je puisse dessiner. Vivre de ma passion serait l’idéal, mais dans ce domaine les places sont chères, j’en ai bien conscience. Je souris quant aux encouragements de mon interlocutrice, moi aussi j’espère que ça va marcher et je suis prête à m’en donner les moyens. Et comme ma vie ne se résume pas qu’au dessin, même si ça en occupe une grande partie, Phoebe m’interroge sur d’autres centre d’intérêts que je pourrais avoir. Je laisse entendre que c’est Janis qui a hérité du talent pour la musique et je vois que ça titille la curiosité de la brune, elle a envie d’en savoir plus sur ma jumelle, son autre demi-sœur et je le comprends parfaitement. « Ouais elle joue de la guitare principalement. Et pour le style, un peu de tout même si je crois que le rock reste ce qu’elle préfère. » je hausse les épaules « Ça va avec le côté rebelle je crois. » je ris un peu et retourne la question à ma sœur, elle doit bien avoir des trucs qui l’intéressent en dehors de son boulot. Je lui fais part de mon intuition à propos de ses talents culinaires, elle admet s’en sortir assez bien et j’arque un sourcil en l’entendant me dire que ça spécialité c’est les pancakes. Je m’attendais peut-être à quelque chose de plus élaboré, mais je ne doute pas qu’elle ai une recette spéciale, et bien entendue secrète, pour les rendre uniques. Sinon son truc à elle c’est plutôt le sport, du moins jusqu’à ce qu’elle ai son accident, je suppose. Pas de talent pour la musique ni pour le dessin selon elle. Ce qu’elle aime c’est bouger, je le conçois très bien « Je vois. Et tu avais un sport de prédilection ? ».
Je suis de nature curieuse et maintenant que je suis lancée, je n’hésite plus à interroger Phoebe. Je lui demande si elle est mariée, ce n’est pas le cas en revanche elle est en couple, je souris à cette nouvelle. Après un court silence elle précise être avec une femme, Maggie et lorsqu’elle dit cela je comprends tout de suite que c’est de là que lui vient cet air épanoui « Ça fait longtemps ? En tout cas vu ton sourire tu es heureuse. » ou très forte pour les faux semblants, mais sur ce coup là je ne pense pas. Forcément ma demi-sœur me retourne la question, la nuançant sur le sujet du mariage. Je hausse les épaules « Si depuis deux ans, d’ailleurs c’est pas toujours facile pour les cours depuis la naissance des triplés l’année dernière. » je me mets à rire franchement à mon histoire absolument pas crédible. Je fais tourner ma tasse vide entre mes mains en reprenant mon sérieux « Non je ne suis avec personne en ce moment. » et depuis quelques temps maintenant, mais la situation me convient comme ça. De toute façon je me concentre sur les études… c’est ce que je dis à tous le monde. « J’ai le temps de me caser. » dis-je sur un ton léger « Je suis jeune. » et on me dit bien souvent que je devrais en profiter pour m’amuser. Mais je me demande quand même si s’amuser doit forcément impliquer de s’envoyer en l’air avec différentes personnes. Je ne crois pas que ce soit la seule façon de vivre sa jeunesse, non ?

J’ai senti rapidement que Joan était une artiste, mais je suis curieuse et je comprend rapidement qu’elle ne fait que du dessin. Sa soeur a l’air d’être musicienne, et j’en profite pour en savoir plus sur elle. « Ouais elle joue de la guitare principalement. Et pour le style, un peu de tout même si je crois que le rock reste ce qu’elle préfère. » Je souris. « Ça va avec le côté rebelle je crois. » Je ris un peu avec elle, et elle ne tarde pas à me poser la même question, mes loisirs, mes talents. Je réfléchis quelques minutes, et quand elle me parle d’éventuels talents dans la cuisine, je ris un peu et lui avoue que je suis la reine des pancakes. Tawny me le fait souvent remarqué, d’ailleurs, depuis qu’elle est à l’armée, elle y a le droit les matins le week-end. Je poursuis en expliquant à ma demi-soeur que je suis quelqu’un de plutôt physique, le sport c’est mon truc, les voyages également. « Je vois. Et tu avais un sport de prédilection ? » J’hoche la tête en souriant. J’ai toujours aimé les sports de combat, je faisais du judo quand j’étais enfant, et de la boxe jusqu’à mon accident. « Les sports de combat. J’ai fait du judo enfant, et je faisais de la boxe. » Je souris, et nous partons dans une autre discussion, plus intime que la précédente. Ma soeur me demande si je suis mariée, et je souris un peu niaisement en pensant à la femme que j’aime. Peut-être qu’un jour une alliance ornera mon doigt, mais pour le moment, nous prenons notre temps. Mais j’en rêve. « Ça fait longtemps ? En tout cas vu ton sourire tu es heureuse. » Je me mord la lèvre. « C’est compliqué. Nous étions ensemble il y a onze ans, et on a été obligé de se séparer. Nous sommes à nouveau ensemble depuis un peu plus de deux mois. Et tu as raison, je suis heureuse. » Je lui offre un léger sourire, et lui retourne la question. A son âge, elle ne doit pas être mariée, c’est plutôt rare. Enfin pourquoi pas remarque. « Si depuis deux ans, d’ailleurs c’est pas toujours facile pour les cours depuis la naissance des triplés l’année dernière. » J’hausse un sourcil, et quand elle se met à rire, je suis rassurée et je ris avec elle. Elle n’était pas du tout crédible, et je ne la vois pas mère du tout. Enfin forcément, je la vois certainement plus petite qu’elle n’est, mais c’est plus fort que moi. « Non je ne suis avec personne en ce moment. » Je souris. « J’ai le temps de me caser. Je suis jeune. » J’hoche vivement la tête, elle a raison. Je ne peux m’empêcher de penser qu’avec un père militaire, ça ne doit pas être facile non plus. « Oui tu as le temps, crois-moi, l’amour c’est pas facile des fois. Profite de ta jeunesse. » Je ris un peu, je n’ai pas assez profité de la mienne, je pensais trop à Maggie. Je regrette des fois, mais le résultat en vaut la peine. « Je peux te poser une question ? » Je la regarde en me mordant la lèvre, et je n’attends pas sa permission avant de continuer. « Est-ce que tu es contente de savoir que j’existe ? » Ok, je vais gâcher l’ambiance, mais j’ai besoin de le savoir. Je sais qu’en ce qui me concerne, j’étais heureuse de savoir que j’avais deux soeurs, mais me croyant fille unique, je n’ai pas vu la chose comme elle peut la voir. Et j’ai été la première au courant, contrairement à elle. « Enfin, je veux dire, ça ne te dérange pas ? » Je soupire. « Je n’ai pas envie de trop m’inviter dans ta vie si tu n’en fait pas le souhait, tu vois… » Je penche la tête. « Tu peux tout me dire. » Je souris.