Soirée d'horreurs entre frère et soeur ft. Blake

Aujourd’hui, c’est samedi soir. Et comme quasiment tout les samedis depuis que j’ai douze ans, Blake est venu me trouver dans ma chambre pour me demander si j’étais d’accord de regarder un film d’horreurs avec lui. Immanquablement, je lui ai adressé un regard blasé alors que, assise sur mon lit, j’étais au téléphone avec mon meilleur ami… Je n’aime déjà pas qu’on me dérange quand je suis sur mon portable avec lui, mais si c’est en plus pour regarder un film d’horreurs… Il sait que j’ai horreur de ce genre de films d’ailleurs, et pourtant, chaque semaine, j’y ai droit. Il n’y a pas de doute, mon grand frère veut me traumatiser ou alors me rendre dingue, ça c’est possible aussi. D’ailleurs, il y arrive très bien en général. Je crois qu’il est né pour cela car c’est un pro en la matière. Néanmoins, alors qu’il se doute que je vais refuser comme à chaque fois, il me sort sa petite tête de chien battu et s’avance vers moi…. Et là, je sais ce qui va suivre. « Non… Blake, t’as pas le droit… Arrête… » Je n’ai pas écarté mon portable de mon oreille et je peux entendre mon meilleur ami commencer à rire en me demandant ce qui se passe… Et là, j’ai droit à la torture préférée de Blake : les chatouilles. Il sait bien que je n’y résiste pas, depuis que je suis toute petite, je suis très chatouilleuse et cela n’a pas changé avec les années. D’instinct, alors qu’il commence à me chatouiller, mon portable s’échappe de ma main alors que je me débats contre lui sans pouvoir me retenir de rire… Il sait que les chatouilles, c’est mon point faible et il en profite. Et j’ai beau essayer de me débattre, je sais que je ne fais pas le poids face à lui : de un, c’est un garçon, de deux, il est plus grand que moi et de trois, je n’ai pas beaucoup de force… Même quand j’essaye de le frapper avec mes petits poings pour me défendre, je lui fais pas mal, au contraire, il est plus mort de rire qu’autre chose. Si j’ai appris une chose, c’est qu’il s’arrête uniquement lorsque je cède à ce qu’il souhaite, et dès lors, alors que je pleure de rire à en avoir mal au ventre à cause de lui, je fini par craquer. « D’accord, d’accord. On va le regarder ton film d’horreur. » Et comme prévu, il s’arrête et j’en profite pour me redresser et reprendre mon portable. Mon meilleur ami est toujours au bout du fil et je le préviens dès lors. « Je dois te laisser, mon frère veut que je fasse des cauchemars cette nuit, du coup c’est film d’horreur ce soir. On se voit toujours demain ? » Il était prévu que je passe mon dimanche chez lui et je voulais être certaine que cela soit toujours d’actualité. Rassurée, je lui souhaite une bonne soirée et une bonne nuit, alors que mon grand frère m’extirpe hors de sur mon lit en me tirant par la main. Il en va même à m’arracher mon portable de la main et à raccrocher. Non mais, je vous jure… Obligée de le suivre contre ma volonté, on se retrouve tout les deux au salon, devant l’armoire à dvd et essoufflée d’avoir autant couru, je reprends mon souffle alors qu’il me lâche et reprends la parole avec un petit air frustré. « T’exagère. J’ai même pas eu le temps de prendre Lotso pour me cacher les yeux… » Oui, j’adore me cacher derrière mon ours rose qui sent la fraise et issu des aventure de l’un de mes Disney favoris : la trilogie des Toys-Story lorsqu’il m’oblige à regarder un film d’horreurs. Et dès lors, je ne peux m’empêcher de lui adresser une petite mine boudeuse. En plus il m’a pressée alors que j’étais tranquille à discuter avec mon meilleur ami. Je devrais faire pareil avec lui tien, lorsqu’il est au téléphone avec le sien. Sauf que moi, je lui piquerais son portable pour lui parler et je pense que je courrai dans toute la maison pour lui échapper et papoter avec lui. En imaginant le tableau, je ne peux m’empêcher de sourire et l’interroge doucement, résignée .  « Alors, qu’est ce que tu veux me faire regarder ? » Des films d’horreurs, je sais qu’il en a pleins et qu’il en emprunte aussi parfois à ses amis. Je me demande vraiment ce qu’il trouve à ce genre de films, mais bon, c’est mon grand frère, et avec le temps, j’ai compris que je ne devais même plus essayer de le comprendre.

Tous les Blackson savent ce que le samedi soir signifie pour moi. Depuis quelques mois maintenant, c’est devenu comme un rendez-vous hebdomadaire pour moi, que je prépare très souvent à l’avance. Qu’est-ce que je fais le samedi soir ? C’est simple. Chaque semaine, je demande à mon père d’acheter des popcorns et quelques confiseries, puis soit on achète des DVD, soit on en regarde que j’ai déjà ou que j’ai décidé d’emprunter à des amis de classe. Mais c’est pas n’importe quels DVD. Des films d’horreurs, le genre de trucs qui te fait sursauter et qui te glace le sang jusqu’à t’empêcher de dormir toute la nuit. Moi, ça me fait pas spécialement peur. Il m’arrive de sursauter mais c’est pas un film qui va m’empêcher de dormir… En revanche, je sais que ce n’est pas le cas de Jenny, ma petite sœur. Elle a trois ans de moins que moi, mais j’ai déjà décidé de l’éduquer en films d’horreur. Je les collectionne et dans ma chambre, j’ai une grosse étagère sur lesquels des centaines de DVD sont exposés. Ça part d’anciens classiques comme L’Exorciste, Psychose, Shining à de nouveaux films comme Annabelle, Lights Out… Je les dévore. Je sais pas, au fur-et-à-mesure des années, j’ai développé une sorte d’addiction aux films d’horreurs et chaque semaine, j’invite Jenny à se joindre à moi, qu’elle le veuille ou non…

21 heures, j’ai débarqué dans la chambre de ma sœur sans toquer. Je venais de prendre mon bain et j’avais déjà mis mon pyjama pour ne pas avoir à le faire après notre film et être tranquille… « Hey, t’es prête à regarder un film ? » Je lui demandais gentiment, m’asseyant à ses côtés alors qu’elle était au téléphone. Sûrement avec son meilleur-ami ou avec une copine de classe. Mademoiselle n’a pas daigné me répondre, trop occupée avec la personne qu’elle avait au bout du fil, alors j’ai sorti mon arme favorite, celle qui la faisait très souvent faiblir : les guilis. Puis je me suis élancé sur elle en riant, convaincu que j’arriverais à la faire accepter mon invitation en la chatouillant un peu partout. Elle a toujours été chatouilleuse ma petite sœur, et c’est pas maintenant qu’elle va arrêter de l’être. « Allez… dis oui… » Je lui murmurais à l’oreille alors que mes petites mains chaudes continuaient de la chatouiller autour de sa taille et qu’elle se débattait en dessous de moi.

Quand je l’ai entendu assumer sa défaite, j’ai lentement arrêté de la chatouiller puis je me suis redressé, la laissant dire au revoir à cette personne à qui elle parlait… Je lui ai pris son téléphone pour raccrocher cet appel qui prenait des plombes à se terminer, puis je l’ai tirée par la main pour lui faire descendre les escaliers et l’emmener dans le salon où j’avais posé pas mal de mes DVD. Il y en avait une bonne dizaine que j’ai hésité à lui montrer ce soir-là, et il me fallait faire un choix. « On s’en fiche de ton doudou, t’as plus cinq ans… T’es plus un bébé. » Je lui faisais une petite grimace, convaincu qu’elle faisait parfois de la comédie avec cette peluche… À douze ans, j’avais pas besoin de doudou moi.

« Mhm… Pour ce soir, ça va être Les Griffes de la nuit. » Je répondais à sa question avec un petit sourire en coin, convaincu que ça allait la traumatiser pour au moins quelques nuits. Mais elle le savait, j’étais là pour la sauver si elle se sentait en danger ! Comme très souvent, elle finirait très souvent dans mes bras, ou à se glisser dans mon lit en pleine nuit parce que mademoiselle n’arrive pas à fermer l’œil. Ah, les filles… « Allez, dans le canap toi ! » Je l’ai faiblement poussée pour qu’elle puisse s’asseoir dans le canapé pendant que je mettais le DVD dans le lecteur.

Le générique du film faisait son apparition puis je venais m’installer près d’elle, lui volant un peu de couverture pour me couvrir moi aussi. Il faisait froid ces derniers temps, alors une couverture ne se refusait pas. « Tu vas voir, c’est trop bien. C’est un homme qui s’amuse à se glisser dans les rêves des gens en pleine nuit pour les poursuivre et les tuer. Tu vas a-do-rer ! C’est un classique. Et peut-être même qu'il va te rendre visite cette nuit si t'es pas sage... » Il lui disait d’un son sarcastique, riant aux éclats avant de venir délicatement embrasser la joue de sa sœur, bien installé dans le canapé… La soirée ne faisait que commencer et ça s’annonçait plutôt bien…

Bien que l’on me donne parfois des allures de garçon manqué, je suis bel et bien une fille et en conséquence, j’aime tout ce qui est mignon, je raffole des Disney, je collectionne les peluches et je m’extasie devant les bébés animaux. En contrepartie, il m’arrive de regarder d’autres styles de films comme Pirates des Caraïbes que j’aime beaucoup ou encore les Harry Potter et parfois même le Seigneur des anneaux que j’ai découvers grâce à Blake. En revanche, je  n‘ai jamais accroché avec les films d’horreurs pour la simple et bonne raison que je me laisse facilement impressionner, que je sursaute pour un rien et que j’appréhende toujours ce que je vais voir. J’ai l’habitude d’ailleurs de me cacher les yeux quand ça devient trop effrayant à mon goût, mais à côté de cela, ça ne m’empêche pas de risquer un petit coup d’œil de temps en temps, pour regarder quand même si ça vaut le coup de se cacher ou pas.  Regarder un film d’horreurs avec moi, c’est s’assurer de passer une soirée où l’on ne s’ennuie pas : y’a toujours de quoi rire de moi et de mes réactions. Car oui, je suis de celles qui parlent en regardant un film, principalement pour dire à l’un des personnages de ne pas aller dans telle ou telle direction, comme s’il allait m’écouter, avec un coussin devant le visage prête à me cacher derrière à tout moment. Et quand j’ai pas de coussin, c’est contre mon frère que je me cache ou derrière mes mains. Avec tout ça, si mon frère veut se foutre de moi, je lui donne sans le vouloir, vraiment de quoi faire. J’espère seulement qu’il ne raconte pas nos soirées films d’horreurs à son meilleur ami… Et qu'il lui dise encore moins que j’aime me cacher derrière une peluche. Alors qu’il en parle d'ailleurs, je le regarde en faisant mine d'être vexée. « C’est pas mon doudou. C’est… C’est… Tu peux pas comprendre. » Je suis pas sûre d’avoir été très convaincante sur ce coup là, mais tant pis pour moi. Pour fuir son regard, je reporte le mien sur les dvd qu’il a choisi portant le nom de Ça, Le cercle, ou encore Conjuring, Annabelle, Chucky, L’exorciste et quelques autres dont un sur lequel je n’ai pas eu le temps de poser mon attention : Blake s’en est emparé, ayant de toute évidence choisi le programme de la soirée. Les Griffes de la nuit ? Je le regarde alors intriguée. « C’est avec des loups garous, non ? » C’est beau l’innocence, je sais. En tout cas, c’est ce à quoi le titre du film me fait penser, et si j’ai visé juste, ça devrait aller. Au moins, j’aurais pas droit à un tueur cinglé qui tue tout ce qui bouge sur son chemin… Et j’en suis soulagée, l’espace d’un instant. Un très court instant. Blake m’a fait gentiment reculer vers le canapé en me poussant par les épaules et en prenant place, j’ai de suite pris la couverture pour la mettre sur moi, comme je le fais habituellement lors de nos soirées cinéma, alors que lui s’occupe de mettre le film en marche. C’est parti pour une nouvelle soirée d’horreur dont il m’énonce le programme. Et là, mes angoisses reviennent alors que le film n’a même pas encore commencé. Lui a l’air complètement emballé par le film. Pour ma part, je le regarde avec une expression complètement sceptique. Je suis pas sûre qu’il ait raison sur le fait que je vais adorer. Je sais que lorsqu’il m’annonce ce genre de choses, c’est le contraire qui se passe. Dès lors, j’en profite pour remonter un peu la couverture vers moi car je sens bien que je vais pas tarder à me cacher les yeux en dessous. Alors que je fais ça, Il en profite pour blaguer et machinalement, je me recule un peu de lui, méfiante. « Blake,  arrête… Si tu cherches à me faire peur, c’est raté, je sais qu’il viendra pas… » Mais ça sonnait bien dans le ton de ma voix que je n’en étais pas vraiment convaincue. Me connaissant, il y avait de fortes chances qu’il vienne à un moment ou à un autre me hanter dans mes rêves de cette nuit, comme cela se passait à chaque fois que je regardais un film de mon grand frère. A ma plus grande surprise, Blake me fit alors un bisou, visiblement tout content de lui pour le coup. Je sais pas ce qui était le plus bizarre… Le film, ou son bisou. C'est vrai que je n'avais pas l'habitude qu'il m'en fasse pendant un film d'horreur...Je suis sûre qu'il voulait se faire pardonner pour quelque chose, mais pour quoi? Pour le fait que je ne dormirais certainement pas cette nuit? Possible.  Hésitante, je reportais mon attention sur la télévision pour voir les premières images qui annonçait tout de suite la couleur et immanquablement, je resserrais un peu la couverture dans mes mains alors que je l’avais déjà hissée au niveau de mes yeux. « J’aime pas ça… Non, j’aime pas ça du tout… » Entre les lames qu’il était en train d’aiguiser et sa respiration limite d’astronaute qui était assez angoissante, je ne savais plus trop où me mettre sur ce coup là. Et alors que les lames s’enfonçait dans une espèce de vieux rideau, je n’avais pu m’empêcher de sursauter. Ca commençait décidément très mal pour moi. J’espérais cependant que mon frère n’avait rien remarqué et m’autorisais à l’interroger, l’air de rien. « Blake, tu es sûr que tu veux continuer à regarder ça ? Ca a pas l’air de faire très peur... » C’était comme on dit l’hôpital qui se fout de la charité, mais qui ne tente rien n’a rien après tout…