Improvised rescue - ft. Bobby

C ’est une raison tout ce qu’il y a de plus banale qui avait menée Bobby jusqu’au centre ville d’Island Bay : un détour par la poste. De la paperasse, encore et toujours. Des papiers qui nécessitaient un accusé de réception et qui, bien évidemment, étaient arrivés chez elle alors qu’elle ne s’y trouvait pas. C’était toujours comme ça de toute façon, n’est-ce pas ? Enfin, pas que la demoiselle ne sache grand-chose. Ces dernières années, il aurait été difficile de dire où se trouvait son chez elle. Bobby prenait son job chez Vétérinaires sans Frontières très au sérieux – trop, selon certains – et passait plus de temps en vadrouille aux quatre coins du monde que posée où que ce soit. Au final, elle apprenait à être chez elle un peu partout et nulle part à la fois, sans véritables attaches où que ce soit, si ce n’est l’Afrique où elle avait grandit et qu’elle aimait tant. Pretoria, la ville qui l’avait vue grandir. La Tanzanie et la réserve de son grand père qu’elle aimait tant… C’était là-bas qu’elle se sentait chez elle. Mais elle aimait voyager. Elle aimait sa vie de nomade, d’aventurière. Elle avait ça dans le sang. Le simple fait qu’elle ait signé le bail d’une maison dans cette petite ville qu’était Island Bay relevait donc de l’exploit. Mais elle avait des affaires à régler, une supercherie à poursuivre si son pseudo-mari décidait de se prêter au jeu. La vie à l’hôtel, ça devenait vite lassant, et il avait été grand temps qu’elle se trouve un endroit à elle.

Après son passage par les services postaux, elle avait donc poursuivit sa journée. Une journée de congés, qui plus est. Ce genre de journées où elle a souvent bien du mal à trouver que faire de sa peau, elle qui était habituée à toujours rester active. Si, sur le papier, elle était mariée à un certain Max Odair, en réalité le seul mariage dans lequel elle s’était engagée était entre elle et son boulot. Triste vie selon certains, mais pas pour elle. Parce que ce job, il la passionnait. Elle s’était battue pour y arriver après tout. Loin d’elle l’idée d’utiliser l’argent et les relations de ses parents – formellement opposés à son choix de carrière – pour réussir.

Son courrier récupéré et soigneusement rangé dans son sac, Bobby arpentait donc les rues de la ville, songeant aller faire un tour à la librairie au coin de la rue. Peut être pourrait-elle y trouver un livre intéressant avec lequel se distraire. Lire sur la plage, ça rentrait dans la catégorie détente, n’est-ce pas ? Un peu perdue dans ses pensées, elle avait cependant loupé la rue où elle aurait du bifurqué il y a quelques centaines de mètres. Elle en était à chercher son chemin lorsqu’une détonation, suivie de rires et de bruits de pas qui détalent, attirèrent son attention. Bobby fronça les sourcils et n’eut pas de mal à identifier les responsables de ce vacarme, qui se faisaient sèchement réprimander par un commerçant. Bobby leva les yeux au ciel et recommença à chercher un panneau lui indiquant la rue dans laquelle elle se trouvait, rebroussant chemin d’un pas lent. Une dizaine de mètres plus loin, elle tourna machinalement ses yeux azur une ruelle adjacente. C’est là qu’elle vit une jeune femme scruter les poubelles. Seulement, elle n’avait pas l’air d’une SDF. Si elle semblait chercher quelque chose, Bobby doutait fortement qu’il s’agisse d’un quelconque détritus. Intriguée, elle s’avança donc vers l’inconnue. Elle s’apprêtait à l’interpeller et lui demander ce qu’elle cherchait lorsqu’elle entendit un miaulement étouffé. Y a un chat là dedans ? demanda-t-elle, aussi intriguée qu’inquiète à l’idée qu’un animal ait pu se trouver là quand ces jeunes idiots avaient fait exploser leurs pétards. Se hissant sur la pointe des pieds, prenant appui sur les rebords de la poubelle sans même y réfléchir, Bobby regarda à l’intérieur, cherchant le moindre signe de fourrure, d’une queue, bref, d’une présence animale au milieu des ordures. L’odeur était immonde mais il en fallait plus que ça pour la faire reculer. Je le vois… Attendez, non, ils sont plusieurs… Bobby commença à réfléchir, cherchant un moyen de se hisser à l’intérieur. Rien à portée de main hormis… Vous pouvez m’aider ? Je vais aller les chercher. Bobby avait beau être grande et athlétique, il lui était impossible de grimper à l’intérieur sans un minimum d’aide.

L e job de Bobby, c’était de parcourir le globe pour voler au secours de toutes sortes d’animaux en danger. Des conditions difficiles, elle en avait donc affronté plus d’une. Elle avait toujours été comme ça, de toute façon. Déjà enfant, à Pretoria, elle ramenait tout ce qu’elle trouvait chez elle, les cachant dans sa chambre avec l’aide du personnel de maison. La plupart du temps, ses parents n’en voyaient rien, trop obnubilés par sa jumelle pour prêter attention à ses allées et venues. Rien d’étonnant donc, à ce qu’elle ait choisi d’en faire son métier. Elle avait ça dans le sang depuis toujours. Son amour des animaux couplé à son âme d’aventurière, elle avait fini chez Vétérinaire sans Frontière, et jamais elle n’avait regretté ce choix. Aller crapahuter dans une poubelle, ce n’était pas dans ses habitudes… Mais elle en avait vu d’autres, n’est-ce pas ?

Bon, n’exagérons pas, l’idée d’aller patauger dans les détritus laissés derrière eux par d’autres personnes ne l’enchantait pas non plus mais quand faut y aller, faut y aller ! Aussi grande soit-elle, elle avait eu besoin d’un petit coup de main pour se hisser dans la poubelle. Une fois à bonne hauteur, avec l’aide de l’autre jeun femme, elle avait réussi à se hisser à la force des bras pour glisser une jambe par-dessus le rebord. Pour les acrobaties, le plus dur était fait. Pour l’hygiène, le pire était encore à venir. Mais elle ne perdit pas son temps à réfléchir. Malgré tout elle resta prudente, ne souhaitant pas écraser l’un des occupants de la benne. Alors ? Qu’est-ce que vous voyez ? lui demanda l’inconnue alors que Bobby était occupée à faire de la place, dégageant sacs poubelle et autres ordures plus ou moins ragoutantes de son passage. Faut que je dégage le passage pour pouvoir les atteindre, attendez… expliqua-t-elle. J’y suis presque… Eurk, mais les gens sont vraiment crades c’est pas possible ! Ah, voilà ! Voilà ce que la brune pouvait entendre, depuis l’extérieur du conteneur. Une Bobby qui parle, qui ronchonne, mais qui avance dans ses recherches.

Hey, salut petits bonshommes… Ca va aller, je vais vous sortir de là, dit-elle à l’attention des petites boules de poils, d’une voix douce qu’elle réservait exclusivement à ses patients à quatre pattes. J’en vois deux… Ah non, y en a un troisième ! Un mois à peine, je dirais… annonça-t-elle, vérifiant soigneusement que personne ne manquait à l’appel. Bobby rassembla ensuite avec douceur les petites boules de poils dans ses bras et se redressa. Tenez, attrapez-les que je puisse sortir de là, demanda-t-elle à la jeune femme, lui tendant un à un les trois rescapés. Une fois les bras libres, elle escalada quelques sacs poubelles qui tenaient dans un équilibre précaire au fond de la benne et se hissa à nouveau sur le rebord afin de retrouver la terre ferme. Elle était dans un état pitoyable. Elle puait, ses vêtements étaient sales et des détritus en tous genres étaient collés à ses vêtements, dans ses cheveux. Elle songea un instant combien sa mère serait horrifiée de la voir dans un tel état. Ca vaudrait presque le coup de lui envoyer une photo… Mais elle avait autre chose à faire. Ils n’ont pas l’air d’aller trop mal. Ils ne doivent pas être tout seuls depuis bien longtemps, ils n’auraient pas survécu seuls, à cet âge là expliqua-t-elle, se débarrassant avec une grimace de dégoût d’une feuille de salade, posée sur son épaule. Bobby. Je suis véto. Même si bon, les chats c’est pas vraiment mon domaine d’expertise… se présenta-t-elle rapidement, comme pour justifier son attitude de madame je sais tout. Elle savait, parce que c’était son boulot… Même si généralement, les chats dont elle s’occupait étaient légèrement plus gros.