if it's the psychic network why do they need a phone number ? → joy

Vesper écoute attentivement les anecdotes de Joy, se remémorant les siennes au passage. Sa mère avait toujours été un peu stricte sur les bords ; c’est qu’il le fallait bien, il fallait une poigne de fer pour s’occuper d’un ranch ainsi que de deux fillettes. Quoi qu’il en soit, après qu’elle ait fait tomber son lecteur CD portable du toit de la grange, il n’avait plus été question d’en racheter un. Et pourtant, il lui fallait bien de la musique pour avoir l’impression d’être vraiment dans un film quand elle sautait du toit directement dans une botte de foin – ce qu’il ne faut jamais faire, soit dit en passant. Alors elle s’était résignée et emmenait sa chaîne hifi portable qui vidait les piles en une heure partout avec elle. Ah, quelle époque fantastique. Enfin, c’est surtout la nostalgie qui lui fait dire ça parce qu’elle a quand même tout fait pour mettre les voiles le plus rapidement possible. Bref.

« Ah, je compatis. Ma mère n’était pas non plus du genre à nous racheter ce genre de trucs sans arrêt, si on n’y prenait pas garde, tant pis pour nous. »

Et c’était pareil pour presque tous les enfants d’Abernathy, en ce temps-là. La texane hoche la tête en entendant que le fils de son amie fait attention à ses affaires, en ce qui le concerne. Elle a bien de la chance car il n’en va clairement pas de même en ce qui concerne les nièces de Vesper. Elles leur temps à casser ou perdre un tas de choses et Angie se précipite toujours au Walmart du coin pour remplacer le tout. Pas sûr que ça soit vraiment plus solide, donc, il y a juste des enfants qui sont moins sauvages ou plus soigneux que d’autres et c’est tant mieux.
Puis, la blonde fait part de son envie de faire les chœurs sur Bring me to Life et Joy lui demande si c’est parce qu’elle a peur de se faire huer. Oui et non, elle sait pertinemment que ce n’est pas le rendez-vous des futures stars de la chanson non plus et qu’il y a bien plus d’amateurs que de pros dans ce bar mais elle n’a pas non plus envie de faire saigner les oreilles de tout le monde.

« Non mais bon, il pleut pas encore, ça serait dommage que je sois la cause d’une grosse averse, tu crois pas ? »

Dans tous les cas, la simple idée de ce type au micro se mettant à chanter Let it Go l’amuse énormément. Car oui, Vesper n’a certes pas d’enfants mais ses nièces sont toutes les deux en âge de regarder La Reine des Neiges et elles ne s’en privent pas, bien au contraire. Malheureusement, d’ailleurs. Mais bon, elle ne va tout de même pas s’en plaindre vu le peu de temps qu’elle passe à leurs côtés.

« J’suis d’accord, c’est pas humain de connaître une chanson par cœur alors qu’elle nous plaît même pas tellement on l’a entendue. »

Joy la rassure ensuite en lui faisant savoir que, puisqu’elles sont des femmes et qu’en plus de ça, elles ne sont pas moches, ce sont des acclamations qu’elles auront et non pas des tomates qu’on leur balancerait pour leur faire lâcher le micro.

« Oui, t’as raison. On va leur montrer de quoi les blondes sont capables et qu’elles s’amusent vraiment plus que les autres. »

Spoiler:

C’est le problème avec la technologie d’aujourd’hui : ça coûte cher. Tout coûte bien plus cher qu’avant. A l’exception des PCs qui se sont peut-être un peu démocratisé mais tout le reste… et ne parlons même pas des téléphones portables qui sont programmés pour tomber en panne une fois la date de fin de garantie passée. Ça fait partie des raisons pour lesquelles Vesper est contre. Pas contre la technologie en soi mais contre l’obsolescence programmée, contre la surconsommation et ainsi de suite, c’est aussi mauvais d’un point de vue économique qu’écologique donc bon. Alors oui, elle a bien un smartphone mais pas du dernier cri et pas très cher non plus. D’ailleurs, elle ne s’en sert qu’en déplacement, sinon elle a toujours une ligne fixe à la maison. Bref.

« Oui, la technologie aujourd’hui est plus pratique mais demande à être renouvelée presqu’aussi souvent mais pour d’autres raisons et sûrement pas à moindre coût. C’est dommage, y a pas tellement d’autres solutions, en plus. »

Cela dit, on ne peut pas refaire le monde, c’est ça qui est triste.
Le discours que Joy tient ensuite la fait sourire. Elle est mignonne à lui assurer que si jamais elle fait pleuvoir tellement elle chante, ce n’est pas si grave. Effectivement, une petite pluie n’a jamais tué personne. Et la texane ne se sent tout de même pas capable de provoquer une mousson alors tout va bien.

« Hum t’as raison, on survivra bien à quelques gouttes de pluie et les autres aussi. »

Elle chanterait donc sans se poser de plus que questions que ça et tant pis pour les autres.
Les deux blondes se mettent ensuite à critiquer allégrement la Reine des Neiges et Joy va même jusqu’à lui apprendre qu’elle a une sorte de réaction épidermique à propos des chansons de ce Disney. Ce que Vesper peut tout à fait comprendre, soit dit en passant : ce ne sont clairement pas les meilleures. Sans doute pas les pires non plus mais le fait d’en avoir fait une vraie rengaine contribue nettement à leur « désappréciation ».

« Au pire, tu peux toujours faire comme si ce Disney n’existait pas, non ? D’ici à ce que Romy soit en âge, la hype sera probablement retombée alors ça pourrait marcher. »

C’est ce qu’elle a pensé faire si jamais un jour elle a des enfants, en tout cas. Et il faudrait également qu’elle passe un pacte avec ses nièces pour qu’elles ne leur en touche surtout pas un mot.

Ah, il n’y a pas à dire, cette maxime comme quoi ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort la fera toujours rire. Ce sont sans doute les mots que l’on entend le plus dans son métier et il faut bien admettre que c’est surtout là qu’ils prennent tout leur sens car tous les cascadeurs vous le diront, c’est quand on frôle la mort de près qu’on se sent invincible. En revanche, se sentir invincible c’est une chose, croire qu’on l’est réellement en est une autre. Et c’est là que ça devient un peu dangereux. Mais depuis le temps, Vesper avait appris à faire la part des choses. Bref, là n’est pas la question, la question c’est plutôt que si le ridicule ne tue pas, il rend plus fort lui aussi et c’est un point de vue des plus intéressants. Ce n’est sans doute pas pour rien si elles s’entendent bien avec Joy, c’est parce qu’elle porte bien son nom et que tout le monde aurait bien besoin d’un peu de Joy dans sa vie, si vous voulez mon avis. La texane sourit donc en hochant la tête, plus de craintes quant au fait qu’elle fasse pleuvoir, dans ce cas. Et puis c’est vrai, ça, elles pourraient toujours chanter la fameuse chanson de Gene Kelly, si jamais, ça s’y prêterait tout à fait.

Et de la pluie, nous passons à la neige avec le célèbre film – un peu catastrophe, il est grand de l’admettre – de Disney. A cause d’un type qui a cru bon de se l’approprier ce soir. C’est qu’il existe des gens franchement louches, tout de même. Mais il paraît que les goûts et les couleurs ne se discutent pas.

« On espère que non, surtout sachant que c’est pas trop leur tasse de thé. »

En soi, rien de plus logique : plus on tire sur la corde pour faire de l’argent et moins les suites sont bonnes. A moins bien sûr d’avoir été programmée d’avance mais c’est assez rarement le cas quand on y regarde de plus près. Mais si Joy savait mener sa barque, alors peut-être que Romy pourrait se la péter plus tard dans la cour de récré parce qu’elle était la seule demoiselle un peu originale à n’avoir pas vu La Reine des Neiges, non ?
Toujours est-il que Joy lui annonce être ravie de la tournure que prend cette soirée. Il est vrai que Vesper avait un peu l’impression de la forcer à partir en quête d’un médium digne de ce nom mais elle s’était dit que ça pourrait être marrant. Et au final c’est le cas.

« J’suis contente de passer du temps avec toi aussi ! J’me sens un peu moins seule à aimer faire la fête de temps en temps. Même si c’est raisonnablement. Et c’est promis, je ne te traînerai plus dans les boutiques des médiums en carton de l’île. »

Ce qui ne signifie pas qu’elle renonce pour autant. Non, mais si elle doit trouver le seul bon médium de toute la Nouvelle Zélande, alors ça se fera naturellement, comme le reste.

Il n’y a pas à dire, c’est toujours très intéressant de découvrir les parcours de chacun. Ainsi, Joy lui apprend que, quand elle était plus jeune, elle était une petite fêtarde. Puis il y avait eu Roy, son fils. Et maintenant qu’il est en âge de s’occuper de lui, il y a Romy. Vesper arrive quand même à comprendre parce qu’elle a vu sa sœur aînée faire les mêmes sacrifices lorsqu’elle était tombée enceinte. Tandis que de son côté, elle n’a jamais eu à se soucier de ça. Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’elle en avait profité. D’ailleurs, maintenant qu’elle y pense, la texane a connu trois de types de fêtes très différentes les unes des autres : les petites fêtes d’étudiants autour de l’étang des McKenzie, typique d’Abernathy, la petite ville au fin fond du Texas d’où elle était originaire, les fêtes d’Hollywood où tout n’était que poudre aux yeux au bord d’une piscine éblouissante et finalement les fêtes de hippies, à côté du feu de camp où l’on préférait nettement s’allonger dans l’herbe pour regarder les étoiles, un petit joint à la main plutôt que de danser. Les trois ont leur charme, si ce n’est que, fatalement, plus le temps passe et plus on a de mal à s’en remettre mais c’est le lot de chacun alors la blonde ne s’en plaint pas.

« Ça tombe très bien, j’essaye encore de déterminer quel genre de fêtes on trouve par ici ! »

Et comme dit précédemment, ça ne la dérange pas du tout qu’on parle de fêtes plus raisonnables que celles qu’elle a connu jusqu’ici. C’est qu’elle n’a plus vingt ans, et que, bien qu’elle soit en parfaite condition physique, ça se ressent.

Bref, après s’être excusée d’avoir traîné Joy chez un médium parce que très visiblement, ce n’était pas son truc et que ça devait du coup être d’un ennui pour elle, la jeune femme lui fait savoir que ça ne la dérange en aucune façon de l’y accompagner, c’est juste qu’elle n’a apparemment aucune envie de connaître son avenir. Chose que Vesper comprend et accepte totalement.

« C’est gentil, ça. Je te remercie. »

Vient alors le moment de monter sur scène. Si les gens autour ne sont pas encore tous éméchés, la plupart d’entre eux commence à être pompette, ça semble donc tout de même être le bon moment.

« Allez go ! Allons prouver que nous ne sommes pas des lopettes ! »

Vesper se lève, se dirige vers l’estrade, y monte et prend le micro des mains du mec qui se prend pour la reine avant de tendre le deuxième micro à son ami.

« Mesdames et messieurs, un tonnerre d’applaudissement pour Joy Wilson ! »

C’est que les gens se mettent à faire ce qu’elle dit en plus de ça.