ra-ra-rasputin lover of the russian queen → rafa

Tout le monde serait d’accord, cette année est vraiment nulle et on en est qu’à la moitié. D’où le besoin de prendre des vacances dès qu’on en a l’occasion. Ce qui explique donc pourquoi Rafa et Vesper ont pris l’avion direction Aruba, histoire de mettre un peu de paillettes dans leur vie. Ce qu’ils n’avaient pas prévu en revanche, c’est que leur avion fasse une escale un peu forcée à Koursk. En Russie et donc pas du tout à Aruba. Une chance qu’à peu près partout ailleurs qu’en Nouvelle Zélande ça soit l’été parce que la blonde n’était pas sûre de pouvoir supporter des températures inférieures à moins dix degrés. Déjà qu’elle avait un peu de mal avec le climat hivernal néo-zélandais alors imaginez un peu avec le climat russe. Croyez-le ou non mais c’est la première qu’elle va au pays de la Vodka – et même pas de son plein gré, en plus de ça – et il lui faut cet incident pour se rendre compte qu’elle n’y aurait jamais mis les pieds sans ça. Certains s’émerveillent de la beauté de la Place Rouge alors qu’elle trouve que ça ressemble à une construction de Kinder surprise, en ce qui la concerne mais c’est une question de goût, évidemment.

Voilà donc qu’ils marchent dans les rues de Koursk, en pleine nuit à la recherche de l’hôtel que le personnel de l’aéroport leur a indiqué. C’est fou, même en plein été ça ne lui fait pas plus envie que ça. De plus, presque tout est écrit en cyrillique, ce qui est loin d’être pratique. C’est donc ainsi qu’on finit par se perdre. Ça doit bien faire une demi-heure qu’ils tournent en rond, tout en évitant soigneusement les ruelles trop polies pour être honnêtes et surtout très mal éclairées parce que Vesper a vu Hostel. Et ce n’est certes pas le bon pays mais on n’est pas à l’abri de croiser une bande de gosses rabatteurs pour des riches qui ont soif de torture pour autant. D’ailleurs, la blonde est très attentive à ce sujet. Aucun enfant ne passera dans son champ de vision sans être observé à la loupe.

« On n’est pas déjà passé devant ce resto ? »

Peut-être même à plusieurs reprises. A moins que ça soit juste que tous les kebabs se ressemblent. Attention, racisme anti-kebab de la part de miss Vane.

« Ça serait cool qu’on croise quelqu’un pour lui demander notre chemin. Même en langue des signes. »

Mais jusqu’à présent, il n’y avait pas vraiment foule dehors.

Rafael était heureux de partir à Aruba, il était vêtu pour l'occasion, petite chemise style hawaïenne, lunette de soleil et tout l'équipement adéquat dans sa valise, prêt à prendre des vacances avec Vesper et à être heureux. Le sourire qu'il avait au départ, a disparu, une fois sur le territoire des communistes, je veux dire, sur le territoire glacial des Russes. Le paysage n'est pas le même, ni chaleureux, ni agréable à regarder. Il n'a rien contre le pays en soi, quoi que, en tant que militaire, il ait peut-être un avis différent des autres, même s'il n'a pas participé à la Seconde Guerre mondiale, -parce qu'il n'était pas né hein-, quand on connaît l'histoire, on sait que les Russes ne sont pas innocents comme ils veulent le faire croire en célébrant la victoire sur l'Allemagne Nazie et avec Poutine à la tête du pays, il y a peu de différences selon lui, ils doivent même agir dans l'ombre, comme la Corée du Nord, mais encore là, il ne va pas s'avancer, il n'est pas en guerre contre eux et juger, c'est rarement son cas. Quoi qu'il en soit, ce ne sont pas des vacances de rêve et même avec un peu d'effort, il ne voit pas trop ce qu'ils vont bien pouvoir faire dans ce pays, des bains dans l'eau glacée ? Boire de la vodka et danser la kozachok sous la pleine lune ? Rafael ne connaît pas vraiment le russe et apparemment Vesper non plus, de plus, la traduction de google laisse à désirer hein et puis, écrire en russe sur son clavier anglais, c'est pas chose facile à faire. « Euh.. j'ai l'impression que ça se ressemble pas mal. » Ou alors, c'est peut-être un peu la fatigue qui commence à embarquer.

Il est du même avis que la blonde, du coup, il décide d'interpeller une femme, qui a l'air à peu près normal. Il prend l'idée de Ves en faisant des signes. « Nous. Cherchons. Notre. Hôtel. Vous. Connaître ? » La femme n'a même pas peur, ailleurs, la fille aurait sûrement pris la fuite ou l'aurait peut-être même giflé. Quoi qu'il en soit, il lui montre le bout de papier avec le nom et tout ce qu'elle fait, c'est pointer du doigt vers là-bas, l'endroit mal éclairé, avec quelques hommes bourrés qui parlent beaucoup trop fort devant un commerce. Il voit une bâtisse, un peu plus grande que les autres, mais bon, difficile à dire si c'est le bon endroit. « Tu crois qu'elle a compris ? J'ai eu l'impression de parler comme un robot. » Ou quelqu'un qui est en retard dans son apprentissage, enfin bref, il attrape la main de Vesper et ils se dirigent vers le lieu. « À mon avis, c'est un bar. » Un bar qui loue des chambres ? Pas de chance pour eux, d'ailleurs, en parlant de malheur, un jeune russe dans la mi-vingtaine, avec bouteille à la main, leur fait signe de s'approcher, peut-être que la vodka rend les Russes plus joyeux ? Rafael, il hésite, mais il s'approche, car c'est peut-être là qu'ils vont devoir dormir. Ce dernier, passe son bras autour du Colombien et évidemment, Rafa comprend toujours rien de la langue. « Ok, une autre fois, peut-être ? » Nope, il faut croire que non, le couple est entraîné à l'intérieur de l'établissement.

Il paraît que les hommes préfèreraient vendre pères et mères plutôt que de demander leur chemin. C’est ce que Vesper a entendu dire en tout cas car elle ne se rappelle pas être restée avec quelqu’un suffisamment longtemps pour en faire l’expérience par elle-même. Enfin si, c’est arrivé deux fois par le passé mais ces deux fois-là, ils n’avaient pas vraiment eu l’occasion de voyager. Enfin bref, tout ça pour dire que son Rafa ne fait visiblement pas partie de ces hommes-là. Et c’est une très bonne chose étant donné que ça reste souvent une des meilleures solutions existantes pour trouver son chemin. Choisissant minutieusement leur cible – une femme a l’air parfaitement normal -, ils l’accostent en tâchant de ne pas avoir l’air du couple qui cherche de la compagnie pour une nuit. Elle ne sait pas ce qu’il en est en Russie mais elle sait pertinemment que dans d’autres pays, ça serait plutôt bien vu et le marché serait accepté en moins de deux. Tandis que Rafa prend la parole façon homme de Cro-Magnon, Vesper accompagne la question de ses propres gestes : mains jointes uniquement du bout des doigts formant une espèce de toit, puis elle les joint tout à fait et pose sa joue dessus, mimant l’action de dormir. Bon okay, ça peut porter à confusion et elle espère que la femme aura bien compris qu’ils cherchent un hôtel et pas un squat ou encore à dormir chez l’habitant. C’est pour ça qu’ils ont papier avec tout ce qu’il faut écrit dessus, en toute logique. Celle-ci pointe alors une direction du doigt et quand la texane regarde de ce côté-là, c’est pour voir un bâtiment qui ne ressemble pas le moins du monde à un hôtel. Mais qui sait ? Après quelques secondes de réflexion, elle finit par hausser les épaules.

« On dirait pas comme ça, mais c’est difficile à dire dans ce pays, rien ne ressemble à rien… »

La meilleure des choses à faire est encore d’aller vérifier. Ce qu’ils font main dans la main, faisant rouler leurs valises derrière eux. Puis ils s’approchent et plus les éclats de voix des gens qui se trouvent devant se font entendre. Ce qu’ils peuvent être bruyants. Et alcoolisés, probablement. Comme cet énergumène qui sort dudit bâtiment et leur fait signe d’approcher. Pour être tout à fait honnête, ça ne lui dit absolument rien qui vaille mais Vesper en vient très vite à la conclusion qu’à eux deux, ils peuvent tout à fait gérer un pauvre type complètement à l’ouest. Raison pour laquelle elle résiste à l’envie de récupérer Rafa qui se fait embarquer et suit le mouvement. Ils entrent donc à l’intérieur de ce truc et se retrouvent dans un couloir uniquement éclairé par une petite loupiote rouge. Le bon goût. Elle l’entend plus qu’elle ne voit un rat courir sur le sol. Encore des éclats, plus forts que ceux du dehors puisqu’ils se répercutent contre les murs. La blonde presse la main de son amoureux.

« Si c’est vraiment notre hôtel, j’pense que j’préfère encore passer la nuit dans la rue. Pas toi ? »

Et ses craintes ne font que se confirmer puisque le type les conduit dans une pièce où des gens sont rassemblés autour d’une table. Au moins une dizaine de bouteilles de vodka posées sur cette table. Accompagnées de quelques kalachnikovs. Et bizarrement, elle ne croit pas du tout que ce soit des jouets ou encore des accessoires. Malgré ça, ces gens ont tous l'air super heureux de les voir.

En fait, en se rendant compte du bout de papier, c'est peut-être ce qu'ils auraient dû montrer dès le départ à la pauvre femme qui ne semble pas du tout avoir d'émotion, ni aucune expression sur le visage, ça fait presque froid dans le dos, mais bon, ils font avec les moyens de bord hein, ils doivent bien dormir, même s'ils ne semblent pas être dans un quartier très favorable, comme chaque pays, il y a toujours un endroit qu'il vaut mieux éviter et il faut croire qu'ils ont atterri pile-poil à cet endroit, sinon ça ne serait pas drôle, si tout cela était facile. Quoi qu'il en soit, il n'est pas rassuré, il est facile de se perdre, de se faire avoir et se retrouver attaché dans un sous-sol, non, il n'a jamais fait l'expérience, encore heureux, mais il a tout de même l'impression qu'ils ne vont pas non plus finir la nuit dans un hôtel cinq étoiles, même pas une étoile, mais pas le choix d'avancer. Il soupire légèrement, il est d'accord, tout se ressemble, mais rien ne donne envie d'entrer à l'intérieur et de demander son chemin, ni même d'y penser la nuit. Ils s'approchent du bâtiment, des voix qui s'élèvent, l'odeur de la vodka qui se fait plus forte, une fois à la hauteur des hommes bourrés, c'est un brin dégoûtant, surtout quand tu ne connais pas la personne, c'est pire, puis sérieusement, il n'a pas envie d'entrer, mais qui sait, c'est peut-être là qu'ils vont devoir dormir, enfin, c'est ce qu'il croyait avant de pénétrer à l'intérieur, même pas de bar, pas de lit, rien de chaleureux et d'accueillant. Les paroles de Rafael ne donnent rien, car sûrement qu'il ne comprend ni l'anglais, ni l'espagnol. « Oui, moi aussi, allons-y.. »

Encore plus, lorsqu'ils rejoignent une pièce où se trouvent des fusils automatiques, il sait qu'un rien peut vite tourner en accident, il a déjà bossé avec les Russes, lorsqu'il était à l'armée, parce qu'il faut bien collaborer avec les autres pays, mais il n'a jamais réussi à parler le russe, de toute façon, c'était un court séjour en Syrie. Bref, il se racle la gorge, serrant doucement la main de Vesper, par simple réflexe de vouloir la protéger et peut-être qu'aussi, ils pourraient se mettre à courir, mais la première image qu'il a, c'est qu'ils auraient l'air de deux lapins dans un couloir étroit en train de s'échapper, avec des mecs armés tout juste derrière eux, belle image. Quelques hommes jouent aux cartes et en regardant de plus près, ils semblent parier assez fort et ne parlons pas de la vodka, ils tiennent vraiment bien l'alcool à ce qu'il voit. « C'était chouette, mais nous, on doit y aller. » Un homme présente une bouteille d'alcool déjà entamé vers Vesper, oh, bien sûr, il sait bien que ce n'est pas une demoiselle en détresse, mais il attrape la bouteille à sa place pour en boire une gorgée, soyons honnête, c'est quand même une bonne situation pour cela, pour oublier où ils sont. Les Russes lâches des cris, comme des animaux, contents, il suppose, mais il a aussitôt envie de recracher, pourvu qu'il n'attrape pas une maladie quelconque. « Est-ce que j'ai connu pire ? Oui. Est-ce que j'ai envie de renouer l'expérience ? Non. »

Dire qu’elle était en train de passer une partie de ses vacances en Russie. Si on lui avait dit un jour que ça serait le cas, elle n’y aurait probablement jamais cru. Et si l’avion ne les y avait pas contraints et forcés, ça ne serait effectivement pas le cas. Mais que voulez-vous, la vie vous réserve des petites surprises comme ça, parfois. Pour l’instant, Vesper essaye très fort de se convaincre que ça ne peut être qu’une bonne expérience parce qu’elle est avec Rafa mais plus le temps passe, plus ça lui semble compliqué. Enfin, évidemment qu’elle est ravie de passer du temps en compagnie de Rafa, c’est toujours le cas, que ça soit en Russie ou ailleurs, soit dit en passant mais quand même, c’est Aruba qu’ils voient leur passer sous le nez. Enfin bref, le moins que l’on puisse dire c’est que leur « hôtel », si tant est qu’on puisse réellement appeler ça ainsi, fait très couleurs locales, avec tous ces flingues – et donc des vrais, pas des accessoires de cinéma, j’insiste bien là-dessus -, cette vodka et ces types en marcel en train de jouer aux cartes. Le tout en criant très fort, certainement à cause de tout cet alcool.

De la même façon que Rafa serre sa main dans la sienne, elle resserre son emprise sur la sienne histoire de lui prouver qu’elle aussi assure ses arrières, au cas où. Pendant ce temps-là, Rafa essaye de se comprendre ou même seulement entendre au vu du nombre de décibels qui ne cesse de grimper mais ce n’est pas des plus concluants étant donné qu’on les invite à se joindre à cette joyeuse bande en lui tendant une bouteille de vodka déjà bien entamée. La texane s’apprête à la prendre, bien résolue à ne pas en boire mais à seulement faire semblant comme on lui apprit dans un film sur des barmaids qui dansent sur comptoir, mais Rafa la devance et se sacrifie à sa place. Quel homme ! Un peu inquiète, elle le regarde avaler ce tord-boyaux en lui tapotant le bras.

« Ça va ? C’était bien de la vodka et pas de l’essence ou un truc comme ça ? »

Cela dit, il a plutôt l’air de bien se porter. Si ce n’est que l’idée de renouveler l’expérience ne le tente pas. Tu m’étonnes… Toujours est-il que ça a l’air de plaire aux russes qui poussent aussitôt des espèces de cris de joie à en faire trembler les murs.

« Haha za vache zdorovie ! »

Puis elle recommence son cirque et essayant, par divers gestes qui devraient compris universellement qu’ils veulent dormir s’il s’agit bien d’un hôtel et c’est alors qu’un énorme mec sentant la sueur à trois kilomètres éclate de rire avant de les précéder dans le couloir et de leur faire signe de le suivre. Il monte une volée de marches d’un escalier grinçant et leur ouvre une porte donnant sur un cagibi. Ah non pardon, c’est bien une chambre puisqu’il y a un matelas posé à même le sol. Et une salle d’eau commune, quelques portes plus loin. Un grand sourire factice aux lèvres, la blonde hoche la tête comme s’il venait de leur donner une des chambres du Ritz et attend qu’il s’éloigne un peu.

« Okay, alors loin de moi l’idée de faire ma difficile mais si on dort là, y a de grandes chances qu’on récupère des puces ou un truc dans le genre. Mais vaut mieux pas qu’on se frotte trop à leurs kalach non plus. Je te propose qu’on trouve une fenêtre et qu’on passe par-là, ni vu ni connu. »

Une sort d’hôtel-basket qui leur éviterait d’avoir à payer une nuit dans ce taudis.

En soi, la vodka, ça va, le whisky a tout de même meilleur goût, mais ici, le problème n'est pas l'alcool, enfin, si, parce qu'au fond de la bouteille, il y a une tonne de germes qui se baladent dans le liquide transparent et cela ne lui donne pas du tout envie, encore moins de tremper ses lèvres sur le bord de la bouteille et pourtant, il le fait et il avale, bien malgré lui hein, la gorgée qui vient vivement lui piquer la gorge. Il ignore comment ils peuvent boire cette merde comme de l'eau, mais ce n'est pas agréable sans préparation, sans cocktail ou une connerie dans ce style-là, bref, oui, ça tape assez fort, mais ça va, il s'en sort. « A priori, oui, c'est de la vodka. » Le goût est bizarre, mais ça, c'est parce qu'il n'est pas le seul à avoir bu là-dedans, d'où l'arrière-goût étrange et d'où l'envie de recracher. Rafael secoue doucement la tête, la fatigue est là et il espère qu'ils trouveront un endroit où dormir, mais certainement pas parmi cette bande de singes alcoolisés et armées. Il attrape les valises, montant les escaliers qui pourraient sûrement s'effondre à tout moment sous le poids de n'importe qui et ils arrivent enfin dans une pièce, là où ils vont apparemment devoir passer la nuit. L'homme repart aussitôt après avoir balancé quelques mots en russe. « Je suis d'accord aussi, j'ai l'impression que là, on va servir de repas à quelqu'un ou qu'on va être forcé de participer à un trafic de je ne sais quoi. » Et il doute que cela soit de la contrebande, mais plutôt un trafic d'esclavagistes. Il va regarder dans la salle de bain, une petite fenêtre s'y trouve, mais à savoir si Rafael peut passer par-là aussi, c'est une autre histoire. « On va devoir utiliser les tuyaux, il n'y a pas de toit. On balance donc nos valises ? » Sinon ça aurait été trop facile de se glisser sur le toit et descendre, non ? La rue est mal éclairée et elle semble déserte pour le moment, donc, c'est peut-être le moment. « Je ne sais pas du tout si je passe, ça me semble petit comme espace.. sinon tu as trouvé une autre fenêtre ou une sortie ? »

Quel foutoir. Evidemment, ça ne serait pas marrant s’ils avaient des vacances normales pour une fois. Quelqu’un d’autre – quelqu’un de bizarre, assurément – pourrait en arriver à la conclusion que l’univers entier, que dis-je, le cosmos, ne veut pas qu’ils soient ensemble et leur envoie des tonnes de messages pour le biais de plans foireux quoi qu’ils fassent mais la vérité c’est que Vesper s’amuse bien. Et qu’elle ne se voit pas partager ces moments avec quelqu’un d’autre. Aussi foireux soient-ils. Comme là : ils sont sur le point de s’enfuir tels des voleurs parce que dormir dans un placard ou servir comme monnaie d’échange dans un trafic d’organes merci mais non merci et malgré ça, la blonde s’amuse comme une petite folle. Il faut dire qu’elle a de l’expérience dans le domaine de la fuite. Peut-être même que ça lui a un manqué, au fond.

« Si on commence par les balancer, elles vont faire un bruit dingue à l’atterrissage. Pas sûre qu’ils nous courent après en entendant ce raffut et en voyant qu’on se fait la malle mais je suis d’avis qu’il vaut mieux pas prendre ce risque. Le mieux c’est encore que l’un de nous descende, réceptionne les bagages que l’autre lui lance et on sera bon. »

On reconnaît l’experte qui parle. Le problème maintenant, c’est de trouver une fenêtre. Une porte serait idéale mais Vesper se doute qu’elle est en train de rêver. Et puis c’est mieux de toujours prévoir le pire dans ces moments-là. De son côté, Rafa trouve une lucarne. Mouais… Non seulement elle n’est pas sûre qu’il passe mais elle non plus ; c’est qu’elle n’est malheureusement pas si plate que ça, ça coincerait probablement à un certain niveau. Et c’est bien la première fois qu’elle regrette un peu d’avoir des formes. Mais juste un peu. Il leur faut donc trouver une autre option. La blonde ouvre doucement les portes qu’elle trouve non-verrouillées. Des chambres pour la plupart. Dans lesquelles elle n’a vraiment aucune envie de dormir, est-ce une blatte qu’elle vient de voir courir sur le mur ? Ugh. D’ailleurs, qu’est-ce que c’est que toutes ces chambres sans fenêtres ? Il y a sincèrement de quoi se poser des questions. Quand tout à coup :

« Ici ! »

Une fenêtre à la bonne taille. Minuscule problème : pas moyen de descendre le long de la gouttière.

« Viens voir. Je peux sauter sur ce petit toit en face. Tu m’envoies les valises et puis tu sautes et je te rattrape, ça marche ? »

Encore faut-il qu’il ait suffisamment confiance en elle pour ça mais Vesper n’en est pas à son coup d’essai et elle est positivement sûre d’y parvenir.

Vesper semblait avoir déjà tout planifié, alors que lui, pour la fuite, cela n'a jamais été son cas, disons qu'il a toujours préféré faire face aux problèmes ou à la situation embarrassante et avec l'armée, pas le choix. Il ne pouvait pas filer à l'anglaise en plein désert et tenter de trouver une porte de sortie, dans le pire des cas, il aurait été déshydraté au point d'avoir des hallucinations et vraiment dans le pire des pires cas, tout simplement mort. Quoi qu'il en soit, ici, ils ne peuvent pas courir dans le sable, ni même s'échapper apparemment, du moins, pas par une porte, ni même par une fenêtre visiblement, c'est vraiment bizarre de construire un immeuble sans fenêtre. Enfin, c'est peut-être une technique pour l'hiver ? Cette idée de garder la chaleur à l'intérieur ? Bien qu'en regardant de plus près, le bâtiment est plutôt délabré et dans un piteux état, puisqu'il a bien cru que les escaliers allaient s'effondrer sous leurs pieds. « D'accord, faisons ça ! » Dans sa tête, le mieux serait qu'il saute en premier, ne sachant pas si elle va pouvoir le rattraper, pas qu'il soit gros, mais il est moins léger que Vesper, cela dit, s'ils venaient à se faire prendre, elle va pouvoir au moins s'enfuir, c'est donc un avantage qu'elle passe en premier, toujours avec les valises. D'ailleurs, elle trouve une fenêtre à la bonne taille, du moins, ils peuvent passer tous les deux, mais il n'y a pas de toit, ni de gouttière, bref, rien pour arranger la fuite qu'ils tentent de planifier à l'aveuglette.

« Ça marche ! » Rafael embrasse la blonde, pourvu que cela ne lui porte pas malheur durant le saut, qu'elle semble avoir réussi, sûrement l'habitude avec son boulot, alors que lui, en forme, mais loin d'être un pro de la gymnastique. « Alors, les valises.. » Il attend qu'elle soit prête puis il lui balance une première valise, à la seconde, un objet volant non identifié s'envole avec la seconde valise, on peut entendre un objet se casser en bas, en regardant de plus près, on aperçoit un homme effondré sur le sol. « Le vase a tué a quelqu'un ! » Plus discret, tu meurs. Maintenant qu'il regarde mieux la pièce, il y avait bien un vase vintage sur une petite table en bois. « Ou c'est peut-être la vodka ? » En fait, pas vraiment le moment d'y réfléchir, mais en entendant à nouveau le bruit dans sa tête, ça le fait marrer tel un gamin après avoir regardé les Simpsons, sûrement la nervosité dans son cas. « À mon tour ! » Il se jette à l'eau ou plutôt sur le toit. « Je glisseeee.. » Enfin, pas tant que cela finalement.. il était simplement sur le bord.

La différence avec les autres fuites de Vesper, et elle n’est pas des moindres, c’est que pour une fois, elle ne fuit pas seule. Voilà qui donne carrément une nouvelle dimension à la chose, un côté exaltant. Et un peu effrayant aussi. Quand on prend la fuite, bien évidemment, on croise les doigts pour que ça fonctionne, pour que tout se passe bien mais on vit quelques instants avec la peur que ça échoue, aussi, et Vesper se moquait bien d’échouer seule mais à deux, en revanche… Le moins qu’on puisse dire, c’est que c’est donc une chance qu’il n’y ait pas vraiment de risque à courir. Tout ce qu’ils risquent présentement, c’est de froisser quelque peu une bande de russes. Pour le moins alcoolisés et armés de kalach, oui, m’enfin, il n’y avait tout de même pas de raisons qu’ils s’énervent au point de vouloir s’en servir, si ? Evidemment que non. Par habitude, le cerveau de la blonde fonctionne donc à plein régime pour trouver le plan qui le sortira de là. Et Rafa à manifestement une confiance aveugle en elle. Un nouveau poids pèse sur ses épaules mais elle ne se laisse pas démonter ; l’expérience lui a appris qu’il ne faut surtout pas laisser au doute le temps de s’installer et foncer dans ces moments-là. Ce qu’elle fait juste après avoir répondu au baiser de son amoureux avec ferveur, un peu comme s’ils étaient en plein film d’action et que c’était le seul moyen pour qu’ils survivent à une explosion quelconque. Puis elle saute. Avec l’agilité qu’on lui connaît. Ça provoque un peu de bruit mais les rires tonitruants des russes le couvrent aisément. Sans perdre un instant, la blonde s’apprête à réceptionner les valises. Aucun souci pour la première, aucun souci pour la seconde, aucun souci pour le v… Attendez une seconde, un intrus s’est glissé dans la liste. Et dire que ça ne pose aucun problème serait un éhonté mensonge étant donné qu’il atterrit lourdement sur la tête d’un type qui passe par-là. Merde… Et pourtant, la remarque de Rafa manque la faire éclater de rire. Vesper se retient en se mordant l’intérieur des joues.

« Merde, tu crois vraiment qu’il est mort ? »

Décidément, c’est sans doute la moins discrète de toutes les fuites puisqu’ils sont en train de discuter d’un bâtiment à l’autre mais la situation est trop improbable pour qu’il en soit autrement. Quoi qu’il en soit, nos deux tourtereaux de l’extrême ont actuellement d’autres chats à fouetter et elle se hâte de rattraper Rafa de sa poigne de fer avant qu’il ne bascule vraiment dans le vide, ça ne serait pas vraiment le moment de se casser un truc. Et puis le mec mort se réveille en se plaignant – suppose-t-elle et elle lui fait signe de s’abaisser avant de placer son index sur ses lèvres pour lui faire comprendre qu’il ne faut pas faire de bruit. A moitié morte de rire parce que ce bien le moment de s’en soucier, après tout le raffut qu’ils viennent de faire. L’ancien mort titube dans l’allée en grognant et en se massant le crâne en direction de l’entrée.

« C’est bon, la voie est libre ! »

Vesper glisse alors le long de la gouttière et aide Rafa à faire de même après avoir récupéré leurs bagages. Les voilà libres ! D’errer dans les rues de Kursk. A moins qu’ils ne parviennent à trouver un hôtel digne de ce nom.

L'avantage avec l'armée, c'est qu'on a toujours un plan et qu'on doit s'en tenir, mais le désavantage de cela, c'est qu'on ne peut pas prévoir quand une bombe nous tombera sur la tête pour nous exterminer, dans ce cas-ci, c'est le vase et le russe ne l'a clairement pas vu venir celle-là, pourtant, ce qui aurait pu le tuer, fait marrer Rafael, mais surtout parce qu'il est pris d'une certaine nervosité, non, pas parce qu'il l'avait mérité, après tout, ils ne sont pas tous criminels, si ? Mais dans les prochaines minutes, il va constater que le pauvre habitant n'est pas mort et c'est un soulagement, ce n'est pas le moment de finir en prison, d'ailleurs, ça ne l'est jamais et cela ferait tache sur son dossier militaire. - Accusé d'avoir tué accidentellement un russe bourré avec un vase. - Bref, il va se passer de cela. Il hausse les épaules, ils ne peuvent pas se permettre de vérifier, mais bon, pourvu qu'il se soit seulement évanoui à cause de la vodka et pas du vase, mais étant donné le bruit de fracassement, il a quelques doutes. Quoi qu'il en soit, il saute de façon gracieuse de l'autre côté, bon, peut-être pas, mais cela l'était dans sa tête. Il se fait rattraper par Vesper et puis, pratiquement au même moment, l'homme tué par le vase, ou pensait que c'était le cas, se réveille comme si rien n'était, sans prendre conscience qu'un objet venait de tomber sur sa tête, si ce n'est que la douleur lui semble présente.

« Eh ben, ils ont la tête solide ici. » Qu'il dit, une fois que l'inconnu s'est éloigné de la petite ruelle. Il ne peut s'empêcher de rire, une histoire à raconter à leurs futurs enfants, ou pas. Une fois dans les rues, il tente de trouver un endroit digne de ce nom, mais c'est difficile, cela ressemble plutôt à un quartier malfamé. Un parlement. Leur chance tourne peut-être enfin ? Quoi que le seul hic, c'est qu'il est fermé. « Tu crois que Pudding est là ? Poutine, je voulais dire. » On va mettre cette erreur sur le compte de la fatigue. « N'empêche que c'est le premier endroit acceptable que je vois, mais on ne peut même pas y dormir. » Déjà, parce que ce n'est ni un motel, ni même un gîte. À vrai dire, il n'est pas certain qu'ils puissent trouver un endroit convenable avec la sécurité incluse. Il ne connaît même pas la ville, c'est très loin du voyage qu'il voulait faire avec la blonde, ce n'est pas un endroit paradisiaque et en plus, ils vont pratiquement devoir se résoudre de dormir dans une ruelle ou bien, dans un bâtiment miteux avec des fous furieux. « Peut-être que si on trouvait un commissariat, ça serait déjà un bon début ? »

C’est un fait que personne ou presque nier : les russes sont solides. Quant à savoir si c’est une bonne ou mauvaise chose, après… Vesper ne voulait pas en être juge. Et puis l’histoire les juge très bien à leur place, n’est-ce pas ? Elle se contente donc d’hocher la tête à continuant de pouffer parce que, quelle histoire, quand même, la fois où Rafa a manqué tuer un russe avec un vase volant. Enfin bref, ledit russe a tête de fer manifestement dégage la voie en titubant, sinon que, même s’il n’est pas mort, il n’en est pas sorti tout à fait indemne non plus, le contraire eût été étonnant. Et ils peuvent dès lors se remettre en route. Les rues suivantes qu’ils empruntent ont toutes l’air aussi mal famées que celles qu’ils ont parcourues jusqu’ici, ce qui ne donne pas beaucoup d’espoir, force est de le constater. Jusqu’à ce qu’ils passent devant un parlement, un consulat, peut-être même une ambassade, elle ne serait dire mais quelque chose de très officiel en tout cas, à en juger par le portail dont le bâtiment est entouré. Rafa demande alors si elle pense que « Pudding » - un surnom qui lui va très bien, à ceci près que ce n’est pas un flan, sinon les flans feraient flipper – dort là-dedans. Elle a un doute, il pourrait tout aussi bien être à Moscou, voire même en déplacement ailleurs dans le monde. Ce qui ferait qu’il aurait de la chance de ne pas se trouver dans son pays, lui, contrairement à eux. La texane hausse donc vaguement les épaules en regardant l’immeuble a l’air endormi étant donné qu’il est fermé et qu’on ne voit aucune lumière aux fenêtres.

« Peut-être bien mais dans ce cas, il doit dormir. Et je prendrai pas le risque de sonner à l’interphone parce que si ça se trouve, eux aussi ils sont armés de kalash et sûrement plus aptes à s’en servir que les ivrognes de notre « hôtel ». »

Moui, elle aussi, elle était déçue de ne pas pouvoir dormir là-dedans, dans une vraie chambre qui ne soit pas un cagibi et sous bonne garde mais bon, le risque est un peu trop grand, cette fois-ci. En revanche, Rafa a alors une excellente idée : trouver un commissariat. Qui serait ouvert de jour comme de nuit et où on s’efforcerait de les aider, n’est-ce pas ? Quitte à jouer du grade de son petit ami dans l’armée si ça peut être utile. Ou peut-être que se bourrer la gueule pour se faire embarquer et passer la nuit en cellule de dégrisement était devenue une option ? Parce qu’ils ont bien des cellules de dégrisement ici aussi, non ? C’est pas directement le goulag ?

« Je pense qu’on est sur la bonne voie. Un bâtiment aussi important, il doit bien y avoir un commissariat dans les parages… »

C’est alors que, comme si la force qui régit l’univers les avait entendus, voilà que des lumières de gyrophares bleus et rouges éclairent la nuit. Vesper se dirige tout naturellement vers elles en traînant son petit ami par le bras et bingo ! Des flics en train d’arrêter quelqu’un.

« Excusez-moi, est-ce que l’un de vous parle anglais ? »

Questionne-t-elle en déboulant sur la scène du crime. Un flic tout jeune lève alors timidement la main. Enfin, ils ont un peu de chance.

Il est évident qu'ils sont loin du paradis promis, être en Russie, ce n'est pas des vacances, qui veut vraiment se payer un billet d'avion pour ce pays ? Où le soleil ? Les plages ? Et l'ambiance festive ? Tout n'est que froideur et il ajoutera même, que tout est vodka et kalach. Ils ne sont même pas en voie de trouver un endroit où se reposer, ils sont tout de même passés d'un groupe d'hommes armés à sauter sur un toit pour s'enfuir le plus loin possible. Il y a peut-être un peu d'espoir face à ce bâtiment qui ressemble à un parlement ou tout simplement à un lieu administratif. Rafael se questionne sur le fait que Pudding est peut-être à l'intérieur, ce qui, oui, l'étonnerait, mais qui sait, il ne connaît pas du tout le président des Russes et il n'a clairement pas envie de partager un verre avec celui-ci, surtout quand on voit ce qu'il fait à ses adversaires, bref, tout cela pour dire qu'ils sont peut-être sur le bon chemin.Il se met à rire, sûrement même gardé par des chiens qui attaquent à vue d'œil sans crier gare. Donc, oui, si le président s'y trouve, il vaut peut-être mieux le laisser dormir et ne pas l'énerver. N'empêche que cela ne règle pas leur problème de trouver un endroit où dormir. « Effectivement, cherchons, on trouvera bien. » Ce n'est pas comme s'ils avaient vraiment le choix, de plus, il est difficile de chercher sur son portable, aucun wi-fi et étrangement, il a appris à garder sa position secrète, pour éviter les mauvaises surprises, ça va de soi et ce n'est peut-être pas un hasard s'ils soient là, il va peut-être finir par croire à la théorie du complot, mais il vaut mieux qu'il s'éloigne de ce genre de pensées, sinon cela aura tendance à le paniquer et comme il n'est pas armé, ni chez lui, il préfère se dire qu'ils trouveront bien une personne pour les aider.

Quoi qu'il en soit, c'est la chance qui commence à tourner pour eux, une patrouille, un gamin qui connaît l'anglais, tout va bien, n'est-ce pas ? « Nous cherchons la porte de sortie ! » L'homme qui se fait arrêter hurle, évidemment, impossible de déchiffrer le charabia qu'il balance aux policiers, mais il tente de ne pas s'en préoccuper, même si cela semble un peu brutal. « Plus précisément, un hôtel où nous pourrions passer la nuit. » Donc, le jeune policier nomme l'hôtel « Love Hotel. » Ça commence bien. Il poursuit avec les instructions. « Parfait ! À gauche, puis à droite, on continue tout droit, on tourne encore à gauche et on devrait reconnaître l'endroit par son enseigne. » Rafael hoche la tête, ils s'éloignent un peu, l'homme qui venait de se faire arrêter donne pas mal fil à retordre aux policiers. « Hum, allons-y. »

Difficile de se faire entendre au cours de cette intervention musclée parce que manifestement, les policiers un peu plus mâtures semblent aux prises avec quelqu’un qui ne souhaite pas trop coopérer et pour le coup, Vesper le comprend, quand on connaît un peu la réputation des prisons russes, on n’a clairement pas envie d’y séjourner mais dans ce cas, il vaut peut-être mieux éviter de faire des choses répréhensibles par la loi, non ? Même si elle sait que ce n’est pas bien de juger et que les lois sont différentes d’un pays – voire même d’un état – à l’autre et donc qu’il se peut que la loi soit beaucoup trop sévère par ici mais bon, soit. Les voilà donc qui tombent comme un cheveu sur la soupe pour demander leur chemin mais le jeunot de cette escouade, aussi blanc que la mort, semble soulagé de leur prêter main forte au lieu de devoir participer à tout ça. Dans un anglais approximatif mais qu’on arrive tout de même à comprendre, il leur indique la route pour un hôtel. Sauf qu’il dit très clairement « love hôtel » et ça, ça n’augure rien de bon. Mais c’est toujours mieux que de dormir dans la rue entre une barraque chelou remplie de mecs armés et complètement torchés et des arrestations. Bref, ils remercient tout deux chaudement l’aimable petit flic et partent donc dans la direction indiquée. La blonde se serre un peu contre Rafa, comme s’il pouvait toujours les entendre et lui demande :

« Est-ce que t’as bien compris ce que j’ai compris et tu crois aussi que c’est ce que je pense ? »

Après tout, elle peut s’être trompée, ça se voyait bien que l’anglais n’était pas sa langue natale. Enfin, ils le sauraient très vite étant donné que le chemin n’est apparemment pas très long. En tournant au coin de la bonne rue, ils ne purent effectivement pas rater l’enseigne. Une enseigne rose dégueu qui annonce la couleur, c’est le cas de le dire. Il s’agit bien d’un hôtel de passe. Vesper soupire, à croire qu’il n’y a rien de normal dans ce pays.

« Ça te branche ? En espérant qu’ils louent à la nuit et pas juste à l’heure ? »

Cela dit, ça doit quand même pas être bien cher, ce genre d’établissement. Et comme ils ne sont pas bien loin de l’aéroport, il y a fort à parier qu’ils acceptent tout type de monnaie. Elle ça ne la dérange pas, même le bruit des occupants des chambres voisines ne la dérangeraient pas étant donné que le décalage horaire commence à se faire sentir mais elle ne peut pas dire pour Rafa. D’autant qu’à en juger par leur premier rencard, ça n’a pas l’air d’être sa tasse de thé, tout ça.

Peut-être que l'homme avait quelques notions de la langue anglaise, par contre, cela ne voulait pas dire qu'ils étaient en sécurité pour autant, que l'adresse de l'hôtel -ou plutôt le nom- était un endroit où ils allaient pouvoir se sentir bien et sans se soucier de se faire réveiller par des coups de feu, voire par un débile en train de crier dans le couloir du Love Hotel. Déjà le nom ne lui indique rien de bon, on dirait un endroit où les prostituées se réunissent pour faire des choses assez salaces. Il paraît que les Russes sont assez sauvages et qu'ils ont des goûts bien particuliers, bref, il ne veut pas en savoir davantage, mais tout ce qu'il souhaite, c'est pouvoir rentrer à la maison, pour l'heure, ils vont devoir se reposer. « Un bordel ? » En tout cas, c'est la première chose à laquelle il pense et ce n'est pas parce qu'il a les idées mal passées, c'est parce que cela y ressemble franchement et peut-être qu'au final, ce n'est pas un hasard si le policier connaît l'endroit, c'est peut-être un habitué, comme sûrement la plupart de ce quartier ou même de la ville. L'enseigne tout dégueulasse ne lui donne pas envie, mais comparé à l'autre endroit, ils ne peuvent pas faire pire, si ? Il a quelque doute. « Allons-y, je commence vraiment à fatiguer, pas toi ? » Entre le long voyage qu'ils venaient d'entreprendre, plus les multiples déplacements et il a hâte de retrouver son lit, sauf qu'il va devoir se contenter de ça, du Love Hotel.

Quoi qu'il en soit, ils entrent à l'intérieur et il demande une chambre, la femme au maquillage douteux, parle anglais, avec un fort accent, donc il comprend qu'à moitié finalement. Elle leur remet une clé, avec un sourire aux lèvres, en leur souhaitant de bien s'amuser, pas de bonne nuit, non, de bien s'amuser. On peut y sentir une forte odeur de cigarette qui se répand dans tout le couloir, même s'il lui arrive fumer de temps en temps, plus rarement ces temps-ci, il ne s'y habitue jamais. Ils arrivent dans leur chambre, étonnement, ce n'est pas si mal, ce n'est pas une chambre présidentielle, mais on va dire que c'est convenable. « On aurait dû demander d'autres draps, je n'ai pas confiance en ceux-là. » Qu'il dit avant même d'avoir pu voir l'état des couvertures du lit. Il dépose sa valise et il se rend directement à la salle de bain, une fois la lumière allumée, il sursaute en découvrant ce qui se cache. « Un chat, il y a un chat ! Et il a pris possession de la salle de bain.. » Est-ce que cela pourrait être pire ? Oui, effectivement, mais que fait ce pauvre chat dans cette pièce ?

Ah, un bordel. Voilà quelque chose que Vesper n’avait pas envisagé parce qu’au fond, elle n’y connaît rien. Si ça se trouve, on peut également y louer des chambres sans pour autant louer une fille. Ou un homme, ne soyons pas sexistes après tout. Les bordels et les coins à prostitué(e)s sont légion à Los Angeles mais elle n’a jamais fait que passer devant sans vraiment y prêter attention. Peut-être aurait-elle dû. Elle saurait maintenant à quoi s’attendre. Enfin bref, bordel ou hôtel de passe, qui de sensé voudrait y loger si ce n’est pas pour s’envoyer en l’air avec une coureuse de remparts, hein ? C’est donc plus ou moins pareil, au final. Ce qui fait qu’elle hoche sobrement la tête. Ce qui surprend davantage la texane, en revanche, c’est qu’elle a toujours entendu qu’en ce qui concerne le sexe tarifé, les russes ont des goûts de luxe, or c’est loin d’être le cas de ce fameux love hotel. Loin d’elle l’idée de juger, cependant, d’autant que ça lui semble difficile d’associer luxe et prostitution mais encore une fois parce qu’elle ne s’y connaît pas, sinon elle serait très surprise, c’est certain. Nouveau hochement.

« Ouais, je tombe de fatigue moi aussi. »

Puis elle aussi est d’avis que ça ne peut pas être pire que le précédent endroit. En avant toutes, donc.

A l’intérieur, ils se font accoster par une femme, assise derrière le bureau de la réception qui parle un peu anglais. Suffisamment pour comprendre qu’ils veulent une chambre et assurer la transaction en tout cas. Au pire, on ne pourrait pas dire qu’ils ont payé leur hôtel trop cher, c’est déjà ça. Là-dessus, elle leur souhaite de bien s’amuser et la blonde se demande si elle a une tête à faire le trottoir. C’est pas la première fois qu’elle se prend ce genre de réflexions en pleine face mais elle en vient rapidement à la conclusion que c’est sans doute ce que les gens de qui ça vient aimeraient. Mieux vaut voir ça ainsi. Les lampes au néon donnent à l’entrée une atmosphère quelque peu écœurante mais la chambre est plutôt convenable. Pas de lit en forme de cœur, de miroir au plafond ou encore… non laissez tomber, le lit peut se mettre à vibrer à condition d’insérer une pièce dans la petite boîte qui se trouve tout à côté. Oh bon, pas pire que n’importe quel motel de bord de route dans son pays. Elle se demande si elle trouvera une mini-bible dans le tiroir de la table de nuit, également. Limite un peu décevant.

« On a qu’à étaler nos fringues sur le lit et dormir dessus ? »

Recouverts d’autres fringues en guise de couverture s’ils ont vraiment froid. Ça sera un peu chiant d’avoir à refaire les valises mais elle aussi préfère ne pas avoir à dormir là-dedans. Si les Experts passaient par-là, il y aurait fort à parier que cette chambre brillerait littéralement sous leurs lampes à UV. Mieux vaut ne pas trop y penser. C’est alors que Rafa passe à l’inspection de la salle de bains et trouve… un chat. Ça, c’est surprenant.

« Ah bon ? »

Vesper déboule à son tour pour voir le minou qui feule à son approche. Un minou dans un love hotel… merveilleux.

« Ça alors, je me demande ce qu’il fait là. Tu crois qu’on devrait le signaler à la réception ? »

En théorie oui mais la blonde hésite tout de même : est-ce que la Russie fait partie de ces pays où on bouffe les chiens et chats errants ? Elle n’en sait rien mais est-ce que ça l’étonnerait ? Pas tant que ça.