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'Cause you're a natural A beating heart of stone You gotta be so cold To make it in this world.

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Comme dans toutes les disputes, la mauvaise foi était de mise, ici. Des deux côtés. Matthew qui dramatisait en s’obstinant à imaginer seulement le pire alors que ça faisait des années que Robin conduisait sa Coccinelle et qu’il ne lui était jamais rien arrivé de grave. Pourtant, sa voiture n’avait pas attendu qu’elle rencontre l’amour de sa vie pour commencer à tomber en panne, ça non. Et bien sûr, elle qui refusait d’admettre que c’était une possibilité qu’elle finisse par l’envoyer dans le décor un jour ou l’autre. Son air désespéré la toucha en plein cœur : il devait réellement avoir peur pour elle. S’en apercevoir aurait pu l’attendrir suffisamment pour les mettre tous les deux d’accord mais Robin pouvait parfois se montrer très têtue. Alors aussi émue par cette expression qu’elle puisse être à cet instant, ça ne l’empêcha pas de commenter :
« T’exagères un peu quand même. »
Ce qui n’était en rien une interrogation ou une supposition mais bel et bien une affirmation. Mais il fallait comprendre que, selon elle en tout cas, tant que ses freins n’étaient pas usés jusqu’à la corde ou carrément sabotés – ce qui n’avait aucune chance d’arriver étant donné qu’à priori, personne ne voulait sa mort -, elle ne risquait rien de plus que ça : des arrêts fréquents sur le bord de la route.

Le point fort de Robin dans les querelles, c’était souvent de répondre aux questions qu’on lui posait par d’autres questions. Oui, de quoi rendre fou par moment. Et souvent – comme là, en l’occurrence -, elle trouvait ses questions plus légitimes que celles de son interlocuteur, quel qu’il soit. Mais bordel, quelle mouche le piquait ? Voilà la question à un million de dollars. Matt, contrairement à elle, prit la peine de répondre, de lui expliquer qu’il avait passé une sale journée et que c’était donc, en quelque sorte, la goutte d’eau qui faisait déborder le vase.
« J’en suis sincèrement désolée. Mais on dirait que tu crois que j’ai fait exprès de tomber en panne pour en rajouter une couche. »
S’il pensait que devoir à tout prix dépendre de quelqu’un l’amusait alors il se fourrait le doigt dans l’œil jusqu’au coude. D’ailleurs, la jeune femme en venait même à regretter de l’avoir appelé à l’aide. Elle aurait mieux fait d’appeler quelqu’un d’autre, tout compte fait. Ou mieux encore, se démerder toute seule. Comme ça au moins, personne ne serait en train de lui faire des reproches au sujet de quelque chose qu’elle ne pouvait contrôler. Ou de ne pas avoir tout de suite deviné qu’il n’avait pas passé une bonne journée. Ce point précis commençait à l’exaspérer. Si elle ne pouvait même pas compter sur lui dans ce genre de moments alors à quoi bon, hm ? Non, bien sûr qu’elle non plus n’était pas objective sur l’instant, c’était encore la mauvaise foi qui lui faisait voir les choses sous cet angle.

Là où elle fut piquée au vif, en revanche, ce fut lorsqu’il lui fit remarquer qu’elle aurait dû penser qu’il s’inquiéterait de ne pas la voir rentrer. Ça lui fit l’effet d’une claque alors que, si elle éprouvait un petit sentiment de culpabilité jusque-là, elle se disait également qu’il n’y avait quand même pas mort d’homme. Et la réaction fut immédiate.
« Puisque je t’ai dit que je m’excusais ! »
Généralement, hausser le ton en disant ça laissait plutôt supposer qu’on n’en pensait pas un traître mot. Ce qui n’était pas le cas de Robin, elle s’était sincèrement excusée. Non mais c’est vrai ; qu’attendait-il de plus, au juste ? Elle faillit lui rétorquer que ça ne l’avait quand même pas empêché de fermer l’œil mais elle savait que ça serait mesquin de sa part après la journée qu’il avait eue, aussi n’en fit-elle rien.

En temps normal, elle n’aurait pas hésité un seul instant à lui dire où elle était, ce qu’elle avait fait, comment elle avait pu oublier et ainsi de suite mais là, Robin n’aimait pas ce que cette question avait l’air d’insinuer ; à savoir qu’elle n’était pas digne de confiance. S’il y avait quelqu’un qui l’était encore de nos jours, c’était bien elle alors elle était à deux doigts de le prendre comme une insulte. Ce qui la poussa une fois de plus à ne pas répondre tout à fait à la question et à prendre un ton condescendant au lieu de désamorcer la situation.
« Ça commence à ressembler à un interrogatoire, là. Tu veux pas savoir avec qui j’étais, aussi ? Ou que je te donne leur numéro pour que tu puisses vérifier auprès d’eux ? »
Ce qui serait tout de même le comble étant donné qu’il voyait défiler des mannequins à peine majeures et surtout souvent presque à poil à longueur de journée. Si l’un des deux devait être tenté dans cette histoire, c’était lui, pas elle avec ses collègues quasiment tous mariés. Sans compter que elle avait voulu s’en envoyer un, elle l’aurait fait plus tôt. Mais comment aurait-il pu savoir, puisqu’elle ne daignait pas répondre ?@Matthew Braithwaite

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Inutile d’être médium pour se rendre compte que, si elle a gagné cette bataille en ce qui concernait sa vieille Cox à laquelle on ne pouvait décidément pas se fier, elle n’avait pas gagné la guerre, comme on dit. Matthew n’ajouta rien de plus à ce sujet mais on pouvait clairement lire sur son beau visage qu’il n’en pensait pas moins. Peut-être reviendraient-ils là-dessus un jour ou l’autre. A froid. Et peut-être que Robin pourrait entendre raison mais pour l’heure, elle continuait de voir en la Coccinelle une alliée plutôt qu’une ennemie. Une alliée assez peu fiable, certes, mais une alliée tout de même qui continuait à l’aider à se déplacer d’un point A à un point B – ou plus souvent A2 ou 3 sans arriver jusqu’au B – malgré tout. Quoi qu’il en soit, maintenant qu’il avait pris la peine de lui expliquer qu’il n’avait pas passé une bonne journée, elle comprenait un peu mieux sa mauvaise humeur. Pour ne pas dire qu’elle la comprenait tout à fait. Ce qu’elle avait un peu plus de mal à comprendre en revanche, c’est que ce soit elle qui en fasse les frais. Elle aurait aimé le consoler ; le prendre dans ses bras, lui assurer que tout irait mieux demain, l’écouter vider son sac et tout ce qui s’ensuit mais pour l’instant, elle trouvait ça trop injuste pour agir de la sorte. D’autant qu’elle n’était même pas sûre que ça soit la chose à faire. C’est que mine de rien, la jeune femme était toujours un peu perdue.

En tout cas jusqu’à cette histoire de vouloir savoir où elle était. Ça n’aurait pas dû l’énerver à ce point ; il s’inquiétait juste et il était tout naturel qu’il se pose la question. Même qu’en un sens, ça lui faisait plaisir car ça prouvait également qu’il tenait à elle. Fait rarissime chez quelqu’un ne portant pas le nom des Wade. Mais pour une obscure raison, elle préféra y voir un manque de confiance. Et ça, en revanche, ça ne lui plaisait pas. Jamais de la vie Robin ne renoncerait à ce qu’il y avait entre eux pour aller voir si elle ne pouvait pas trouver mieux ailleurs et il fallait sérieusement qu’il n’ait pas la moindre idée de ce qu’avait pu être sa vie avant qu’elle ne le rencontre pour y croire ne serait-ce qu’un instant. Pas un enfer, non, ça aussi ça serait une exagération mais personne, pas même ses proches ne l’avaient jamais crue. Ou pire, s’ils la croyaient alors ça faisait forcément d’elle quelqu’un de bizarre et donc, par la force des choses, mieux valait éviter le sujet. Il lui avait en quelque sorte fallu renier sa nature profonde pour qu’on l’acceptent. Puis elle avait rencontré Matt qui ne mettait jamais sa parole en doute et qui l’aimait enfin pour ce qu’elle était. Alors vous pensez bien qu’il n’était pas question pour elle d’aller voir ailleurs ni même de lâcher sa perle rare. Peut-être était-ce ça au fond, le message qu’elle essayait de lui faire passer. Mais de manière beaucoup trop virulente, manifestement. Tant et si bien et qu’ils étaient là, plantés au bord de la route en pleine nuit et sous la pluie, à s’engueuler comme deux couillons, à s’envoyer des piques qui faisaient mal sans même le vouloir.

C’était même la dernière chose qu’elle voulait et elle était certaine que la réciproque était vraie. D’ailleurs, son fiancé préféra couper court en proclamant que finalement, il n’en avait rien à foutre. Rien à foutre. Oh. Oh, il s’en foutait, c’est ça ? Bien loin d’apaiser les tensions qu’il y avait entre eux, cette phrase eut le don de la mettre carrément hors d’elle. Oui bien sûr qu’elle estimait pouvoir faire ce qui lui chantait sans avoir de compte à rendre mais elle ne voulait quand même pas qu’il n’en ait rien à foutre. Elle voulait… le juste milieu. Sans bouger d’un millimètre, elle l’observa lui tourner le dos et pousser sa voiture un peu plus loin. Elle serait bien allée lui donner un coup de main mais pour l’instant, elle fulminait, ruminait – bref, tout ce qui se termine en « minait » -, alors au lieu de ça, elle préféra le regarder faire. Tout comme elle le regarda passer dans l’autre sens en l’ignorant et s’attendait à ce qu’il redémarre à tout instant une fois qu’il se fut rassis au volant de l’Aston. Mais il n’en fit rien. Il semblait attendre son bon vouloir. Cela dit puisqu’il s’en foutait… Robin récupéra son sac, s’assura que sa voiture était bien verrouillée – et que sa portière n’était pas démontée, au passage – mais au lieu de rejoindre l’Aston et Matt par la même occasion, elle marcha d’un pas décidé en direction d’Island Bay. Il s’en foutrait également qu’elle rentre sans lui dans ce cas, pas vrai ? D’un geste rageur, la jeune femme enfonça sa main libre dans la poche de sa veste et accéléra l’allure. Peut-être n’avait-elle pas l’intention de faire dix kilomètres à pied, sous la pluie. Peut-être qu’elle s’arrêterait à la station-service sur le chemin pour mieux se mettre à l’abri et appeler un taxi. Elle verrait bien d’ici-là.@Matthew Braithwaite

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La vérité vraie c’est que Robin s’attendait à voir l’Aston lui passer sous le nez. Parce qu’elle se montrait pénible, voire carrément chiante. Certes, elle n’était pas la seule à l’être dans l’histoire mais l’idée que ça puisse remettre en question son mariage lui glaça le sang tout à coup. Bien qu’elle ait tout à fait le droit de l’être elle aussi, par moment. Quoi qu’il en soit, les idées les plus loufoques étaient en train de lui passer par la tête tandis qu’elle longeait le bord de route. Ce n’était évidemment pas sa première dispute, venant d’une famille nombreuse il n’y avait pratiquement que ça entrecoupées de moments complices de temps à autres quand même. Mais c’était sa première dispute avec Matt alors ça changeait inévitablement la donne. Fallait-il qu’elle se laisse marcher sur les pieds en croisant très fort les doigts pour qu’il ne la quitte pas ? Évidemment que non et Robin aurait très certainement eu pitié des gens qui pensaient de cette façon. Fut un temps. Sa vision des choses n’avait pas tellement changé, l’énorme différence c’est que maintenant, elle avait quelqu’un à perdre. Et que cette simple perspective l’emplissait d’effroi. Dans tous les cas, il était un peu tard pour revenir en arrière alors autant assumer.

Et elle ne vit pas l’Aston filer à toute allure sans elle dans la nuit. Ni même rouler à sa hauteur. Par contre, ce fut son fiancé qui la rattrapa soudain. Sans sa voiture qu’il avait laissée là, quelle surprise. D’abord il lui demanda ce qu’elle fabriquait et Robin estima que c’était si clair que ça se passait bien de commentaires, aussi n’en fit-elle pas, traçant son chemin en regardant droit devant elle. Jusqu’à ce qu’il la retienne par le bras. Bien que ça soit parfaitement inutile, elle perçut sa colère mais pas que, un peu de désespoir et de lassitude également. Et une fois de plus elle songea que si elle avait su que ça les mènerait là, elle ne l’aurait jamais appelé. Mais soit, ce qui est fait est fait. Et puisqu’elle ne pouvait pas jouer les muettes ad vitam æternam, elle répondit en haussant les épaules :
« Qu’est-ce que ça peut bien faire puisque t’en as rien à foutre ? »
Puis elle reprit sa marche parce qu’il n’était pas question de rester sous la pluie sans rien faire.
« Rentre, tu vas finir par attraper froid. »
D’autant plus s’il était déjà crevé à la base… Hé oui, même très remontée, Robin en avait toujours quelque chose à faire, elle. Elle ne voulait pas qu’il tombe malade par sa faute, ça ne ferait qu’en rajouter à sa culpabilité. Elle ne voulait pas qu’il tombe malade tout court parce qu’elle se souciait de son bien-être, d’ailleurs.

Des phares leur éclairèrent alors le dos. Rien d’étonnant à ça bien que rare à cette heure. Elle ne se serait même pas retournée si la voiture en question ne s’était pas arrêtée à leur hauteur également. La vitre côté conducteur se baissa et la tête d’une blonde maquillée comme un camion volé, revenant très certainement de soirée, leur sourit.
« Hello ! J’ai vu vos voitures plus loin. Vous voulez que je vous dépose quelque part ? »
Robin aurait été tentée de dire oui si elle n’avait pas capté ce regard pervers s’attarder un peu plus longtemps que nécessaire sur le t-shirt de son fiancé. Non mais je vous jure, on aura tout vu. Elle se retint tout juste de lui agiter son annulaire sous le nez à la poupée Barbie bien qu’elle soit convaincue que ça n’aurait très probablement pas changé grand-chose. Et c’est avec beaucoup de difficulté qu’elle lui servit un sourire des plus crispés.
« Non, c’est gentil. »
C’est gentil, tu parles, Robin n’en pensait pas un mot, elle pensait surtout que c’était très intéressé. Mais puisque la fille avait eu la délicatesse de s’arrêter pour les aider – ou sûrement pour ramasser un beau gosse à mettre dans son lit histoire de terminer la soirée en beauté, vraiment pathétique -, elle s’efforça de ne pas l’envoyer directement bouler. La blondasse fit comme si elle ne l’avait pas entendue, dardant son regard de velours sur Matt. Aucun doute là-dessus, si lui voulait qu’elle s’éternise, alors ses désirs seraient des ordres. Cette fois-ci ce fut elle qui poussa un très, très long soupir et leva ostensiblement les yeux au ciel. Avant de reprendre la route.@Matthew Braithwaite

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Au bout d’un moment, à force d’entendre sa fiancée divaguer un peu beaucoup, Matthew crut bon de la recadrer en lui rappelant que ce dont il se foutait, c’était des personnes avec qui elle avait pu passer la soirée et non pas d’elle. Le pire dans tout ça, c’est qu’il faisait bien de le préciser parce que Robin avait tendance à ne pas faire la différence. Tant et si bien qu’il lui fallut quelques secondes pour que son cerveau intègre et traite cette information. Bien qu’extrêmement curieux et nouveau, elle ne pourrait le nier ; s’il se foutait d’elle autant que du reste alors ils ne seraient pas là, en train d’avoir cette discussion quelque peu houleuse. Non, il serait déjà rentré. Il ne serait même peut-être pas venu du tout. Voilà qui la laissait coite. Pas de repartie un peu cinglante, non, rien à rétorquer. Ce qui ne l’empêcha pourtant pas de continuer à tracer. Peut-être que dans ce cas particulier, admettre ses torts la mettait dans une position de faiblesse. Elle n’en savait rien au fond et elle n’allait sûrement pas chercher à psychanalyser chacun de ses faits et gestes puisqu’elle agissait de manière impulsive. Bref, d’ici quelques pas, elle ferait sans doute demi-tour, s’excuserait et accepterait de rentrer avec Matt.

Mais ça, c’était avant de croiser la route de la pin-up de service qui s’amusait à faire de l’œil à l’homme dont elle était éperdument amoureuse sous son nez. Une fois de plus, Robin préféra s’éloigner après l’avoir rabrouée pas si vertement que ça. Qu’ils s’arrangent entre eux. Le soupir qui quitta ses lèvres en voyant cette voiture-là la dépasser en était un de soulagement. Matt avait dû l’envoyer bouler lui aussi à sa façon et le moins qu’on puisse dire, c’est que ça la rassurait plus qu’elle ne voudrait bien l’admettre. Si elle s’attendait à ce qu’il continue de la suivre car il était au moins aussi borné qu’elle pouvait l’être, elle ne s’attendait pas le moins du monde à ce qu’il la rattrape une fois de plus, la soulève de terre en lui laissant uniquement le temps d’un début d’interrogation formulé par un « qu’est-ce que... » qu’elle n’eut pas l’occasion de terminer avant de la hisser sur son épaule comme un sac. Ah, c’était plus proche du kidnapping que ce qu’elle avait subi tout à l’heure ! Ça la surprit tellement qu’elle en lâcha son parapluie.
« Pose-moi par terre, Matthew ! »
Pas question de lui mettre des coups car Robin était tout de même capable de se rendre compte qu’il agissait – ou en tout cas pensait agir – dans son intérêt mais elle se débattait bien, se tortillait dans tous les sens pour parvenir à se libérer, en revanche. Sauf qu’il avait l’air d’anticiper la moindre de ses actions et d’ajuster son emprise en conséquence. Puis il n’avait pas l’air de vouloir la lâcher même si elle se mettait à hurler – de toute manière, qui pourrait bien l’entendre ici ? C’était comme dans l’espace, personne pour l’entendre crier – selon ses dires, alors elle se résigna.
« Je peux marcher quand même ! Je m’enfuirai plus. »
Robin s’était toujours demandé pourquoi cette phrase ressortait toujours dans les films où la même chose se produisait. « Je peux marcher », évidemment qu’elle pouvait et Matt n’avait pas besoin qu’elle le dise pour le savoir, de plus. C’était justement là le problème : pouvoir marcher signifiait également pouvoir fuir. Cependant, maintenant qu’elle se retrouvait dans cette situation ridicule, elle comprenait ; c’est parce que ça sortait tout seul.

Toujours est-il qu’elle eut beau lui promettre de ne pas plus s’enfuir, il ne la lâcha pas pour autant ; il allait vraiment falloir qu’ils règlent cette histoire de manque de confiance. Il était bien la seule personne à qui elle refusait de mentir. La preuve, elle préférait encore ne pas lui parler du tout que de lui raconter un bobard. Plus qu’à attendre qu’il daigne la relâcher. Fort heureusement, ils ne s’étaient pas tellement éloigné des voitures. Matt finit par la poser sans ménagement contre la carrosserie de son Aston, de sorte qu’elle ne puisse plus lui échapper. Là-dessus, il lui demanda si c’était bon, un peu comme s’il lui demandait si elle en avait terminé avec sa crise et lui proposa de continuer à râler dans la voiture. Bien que ça tienne pas du tout de la proposition mais plutôt de l’ordre, là aussi. Si elle comprenait bien, la seule réponse possible était oui. Il l’avait dit qu’il ne lui laisserait plus le choix. Tapant du pied pour la forme, le dévisageant une seconde – incroyable à quel point elle avait du mal à lui en vouloir bien longtemps -, Robin finit par concéder.
« Okay, on peut rentrer. »
De toute façon, entre l’espace de ses bras, elle ne pouvait que capituler. Un peu timidement et en guise de drapeau blanc, elle pressa ses lèvres contre les siennes. Non, elle ne pouvait pas lui en vouloir, encore moins maintenant. Puis elle s’assit, enfin au sec à l’intérieur de l’habitacle. Mais pas au chaud, en revanche. Comme pour le prouver, ce fut à ce moment précis qu’elle éternua. S’ils ne voulaient pas attraper la crève tous les deux, il valait mieux mettre le chauffage. Ce qu’elle fit. Avant de s’observer dans le miroir du pare-soleil. Trempée de la tête au pied mais ça, elle le savait déjà rien qu’à sentir l’humidité s’insinuer jusqu’au plus profond de ses os mais surtout, son maquillage était en train de se faire la malle. Elle rectifia le tir comme elle put avant de se tourner vers son fiancé qui l’avait rejointe entre-temps.
« J’aime pas qu’on se dispute alors je le redis : je m’excuse. Pour tout ça. »
Pas juste pour avoir oublié de le prévenir ni pour l’avoir réveillé au beau milieu de la nuit mais aussi pour la façon dont ça avait dégénéré.
« Tu… veux toujours qu’on se marie, pas vrai ? »
Ce qui était une vraie question, Robin était parvenue à se ficher la frousse toute seule.@Matthew Braithwaite

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Plus simple d’avoir les idées claires une fois au sec ; ils pouvaient enfin discuter, s’excuser, mettre les choses à plat. Chose qu’elle n’aurait probablement pas faite avec d’autres. Non, Robin n’était pas du genre à croire qu’elle avait toujours raison, il lui arrivait même plus souvent de bien vouloir reconnaître ses erreurs, mais certaines relations ne valent tout simplement pas la peine qu’on fasse un effort. Pour ne pas dire la plupart d’entre elles. Disons qu’il y en avait trois auxquelles elle tenait tout particulièrement : sa mère, Celeste et Nick. Avec Matt ça en faisait quatre. Et c’était probablement celle qui lui était le plus cher à ses yeux parce qu’à ses côtés, elle était enfin capable d’envisager son avenir. Avant ça, la jeune femme s’était uniquement contentée de se laisser porter par la vie. Voilà qui changeait tout. D’un mouvement de tête, elle accepta ses excuses. Oui, il s’était emporté, oui, il s’était montré irritable, mais il avait des circonstances atténuantes ; Robin n’aurait peut-être pas non plus été très jouasse si on l’avait sortie de son sommeil alors qu’elle essayait d’oublier une journée de merde. L’important c’est qu’aucun des deux n’aimaient se disputer, encore moins se faire du mal. Alors ça ne serait probablement pas la dernière de leurs altercations, elle le savait, mais ils avaient tout de même la chance d’être assez d’accord sur plein de chose, même longueur d’ondes. Ou encore de pouvoir en parler, ce qui aidait généralement à désamorcer certaines situations tendues.
« Et je promets de penser à te prévenir la prochaine fois. »
Elle aussi aurait été morte d’inquiétude si les rôles avaient été inversés. Ça lui paraissait pourtant évident et elle ne savait pas ce qui l’avait amenée à penser le contraire.

Dans tous les cas, elle lui posa la question fatidique. Il aurait pu revenir sur son souhait, voyant qu’elle pouvait se montrer de mauvaise foi. Pas tout le temps mais ça pouvait arriver. Et dans ces cas-là, elle ne faisait pas les choses à moitié comme vous l’aurez remarqué. Petite hésitation de la part de Matt qui lui fit serrer les fesses ; il aurait très bien pu décider que finalement non, trop contraignant, ça n’en valait pas la peine, elle n’en valait pas la peine. Mais le sourire qui suivit eut tôt fait de la décontracter. Elle avait beau savoir qu’il l’aimait, les déceptions avaient été si nombreuses au cours de sa vie qu’elle ne pouvait s’empêcher d’envisager le pire. Et ce malgré le fait qu’elle se trouve actuellement entre ses bras, suffisamment proche de lui pour voir cette petite étincelle briller dans son regard, comme à chaque fois qu’il posait les yeux sur elle. Plus que jamais. Trois petits mots qui l’emplirent d’une indicible joie. Comme souvent, Robin éprouva un élan d’amour implacable envers son fiancé et si ça n’avait tenu qu’à elle, le baiser qui suivit n’aurait jamais connu de fin. Seulement il leur fallait rentrer, retrouver le confort et surtout la chaleur de leur appartement ainsi que de leurs draps, aussi autorisa-t-elle – non sans beaucoup de regrets – Matt à se détacher d’elle. Toutefois, il se pencha davantage pour lui glisser d’autres mots à l’oreille. Un sourire mutin étira ses lèvres.
« J’aime autant pas trop y songer. Si c’était le cas, je serais contrainte et forcée de me trouver quelqu’un d’autre. »
Sinon ils auraient du mal à procréer. Déjà qu’il les fallait bien toutes étant donné qu’elle approchait dangereusement de la quarantaine… Plus le temps passait, moins les chances de concevoir se faisaient nombreuses. A tel point qu’avant l’arrivée de son fiancé sur le continent océanien, Robin avait commencé à réfléchir à d’autres possibilités. Le mariage c’était quelque chose d’important pour elle, mais les enfants encore plus. Ce qui expliquait que ça la minait énormément de voir sa sœur enceinte pour la deuxième fois, alors qu’elle… Bien plus qu’elle ne voulait l’admettre même si elle ne s’en cachait pas avec Matt.

Son fiancé mit la gomme et entama le chemin du retour, tandis qu’elle observait sa Cox, un peu coupable de la laisser là. Jusqu’à ce que l’Aston commence à décélérer à son tour. Oh non, c’était un gag. Voilà ce que pensa Robin alors que la perspective de leur lit douillet s’éloignait une fois de plus. Cependant, elle refusait d’être défaitiste, ça reviendrait un peu à leur jeter un sort aussi espérait-elle que ça ne soit rien de conséquent. Il faut croire que Matt y a pensé trop fort, lui, puisqu’ils finissent même par s’embourber en tentant de redémarrer. Puis il rendit les armes, le pauvre avait vraiment l’air éreinté. Elle lui caressa le dos en guise de soutien. Ça n’était décidément pas une bonne journée pour lui mais elle était là pour la partager avec lui à présent.
« Tu veux qu’on appelle ton assurance ? Je suis quasi sûre qu’ils enverront une dépanneuse, quelle que soit l’heure. »
C’était l’avantage d’avoir une voiture toute neuve, ça. Robin n’évoqua même pas la possibilité de laisser l’Aston sur le bord de la route car la voiture était un peu comme son bébé, elle se doutait que l’abandonner là serait la dernière des options. Nouvelle lueur de phares.
« Si c’est la blonde qui revient pour voir si tu n’as pas changé d’avis entre-temps, je te jure que je lui colle mon poing dans la figure. »
Ce qui serait une grande première pour elle, mais c’était tout ce que cette greluche lui inspirait.@Matthew Braithwaite