with a little help from my friends (casey)

Après plus de cinq heures et demie de route, Josh est bien content de se garer enfin devant chez lui. Bien sûr, le trajet a été ponctué de pauses, certaines plus belles encore que fonctionnelles. Mais il n’empêche qu’il est soulagé de pouvoir laisser le volant de la voiture qu’il chérit pourtant presque comme la prunelle de ses yeux, et content d’être à la maison pour retrouver la véritable prunelle de ses yeux. Ouvrant le coffre, le jeune homme sort sa valise, verrouille les portières et se dirige vers sa porte d’entrée. Presque immédiatement, il est accueilli par deux boules de poils surexcitées. Sautant autour de lui, remuant la queue, aboyant joyeusement, Cookie et Bounty lui font définitivement la fête. Riant, il les caresse, n’ayant pas le cœur de leur demander de se calmer. Il est trop content de les retrouver, même s’il ne s’est absenté que quelques jours. « Salut ! » lance-t-il joyeusement à la silhouette qui se profile derrière les deux joyeuses chiennes. Il s’agit de Casey, son collègue de travail, son plus proche collaborateur. C’est aussi et surtout son ami, celui dont il s’est rapproché à force de passer du temps ensemble pendant de longues gardes à la caserne. Ils travaillent ensemble depuis des années et Josh se dit que c’est vraiment une bonne chose qu’ils s’entendent aussi bien. Dans l’urgence, ils se comprennent souvent sans avoir besoin de parler, ce qui est assurément un atout. Et dans la vie de tous les jours, ils se rendent régulièrement des services, comme à l’instant précis. « Comment tu vas ? Elles n’ont pas fait trop de bêtises ? » Pendant que Josh prenait quelques jours de congés à Rotorua avec Savannah, c’est Casey qui a gardé les deux petits monstres. Le Wilson lui en est très reconnaissant. Grâce à Casey, il peut partir l’esprit tranquille, sachant que ses deux bébés sont entre de bonnes mains, sûres et fiables. « En tout cas, je suis content d’être là ! Même pour moi qui aime les voyages, ce trajet en voiture commençait à devenir long. » Josh se débarrasse de son manteau et laisse sa valise dans l’entrée pour l’instant. Puis il s’approche de Casey pour lui donner une grande tape dans le dos, accompagnée d’un large sourire. « Heureusement que t’es là. Je sais pas ce que je ferais sans toi. » Tout en parlant, le plus vieux des ambulanciers se dirige vers la cuisine. « J’ai envie d’un café, on partage ? » propose-t-il, joignant le geste à la parole pour en préparer. Mais avant toute chose, il donne des friandises aux boules de poils. Il sait qu’avec ça, elles seront plus calmes, car occupées. « Quoi de neuf au boulot ? Je suis pas pressé de reprendre, mais c’est déjà pour demain. »

« Salut », lâchas-tu doucement, une esquisse fine aux lèvres alors que tes pupilles suivaient les mouvements des deux chiennes. Tu trouvais toujours l'accueil des chiens chaleureux et adorable. Ca te rappelait à quel point ton propre appartement était vide de vie quand tu y entrais. Était-ce mal ? T'en savais trop rien. A une époque l'ambiance était trop enflammée pour que tu apprécies passer la porte. T'en avais même peur, de rentrer chez toi. Aujourd'hui tu rentrais plus serein, la boule au ventre ayant disparu – mais les souvenirs restaient, les images gravées. T'avais changé d'appartement depuis, heureusement. Déjà que t'arrivais à rien oublier, ça te boufferait d'arpenter le couloir de votre ancien appartement. Déjà que t'étais toujours troublé par ses mots, ses gestes, t'aurais pas réussi à te relever si tu dormais encore dans le même lit. T'avais mis du temps avant de bouger, de peur qu'on te voit comme le diable en personne. Ses parents avaient dit que t'avais bien fait – t'avais jamais osé leur dire que t'étais content de ne plus être aux côtés de leur fille. « Ca va bien merci et toi ? », demandas-tu, redressant tes yeux vers Josh, un faible rire dans la gorge alors que tu secouas le visage. « Non elles ont été adorables », tu souris un peu plus franchement, le nez finement plissé comme un gamin satisfait et qui cachait sans doute une grosse bêtise. Mais non, vraiment, t'avais rien à cacher. Elles avaient été sages – et toi aussi. « J'imagine oui. Tu peux te reposer maintenant », dis-tu lentement, sursautant faiblement à son geste, clignant des paupières dans un air penaud, trop perdu dans tes pensées. « La même chose mais sans moi ? », proposas-tu en haussant les épaules, un autre rire au fond de la gorge. Si t'avais pas été là, il aurait trouvé quelqu'un d'autre. « On partage », acceptas-tu, l'observant faire, te sentant soudainement un peu bête de ne pas en avoir préparé un en avance. Ou de ne pas le faire à sa place, il devait être épuisé.

« Et demain viendra vite », t'étais super réconfortant comme mec on te l'avait dit ? Tu plissas le nez, amusé, le taquinant juste. « Toujours la même chose mais jamais les mêmes interventions », dans ta tête ça faisait sens mais t'étais plus trop sûr en le disant à voix haute. « Je me suis rendu compte qu'à force de toujours être avec toi dans l'ambulance, j'ai pas l'habitude d'être avec quelqu'un d'autre », commentas-tu, récupérant ce qu'il fallait encore préparer pour le café, lui faisant signe de s'asseoir. Il devait se reposer. Les habitudes avaient la dent dure, pas vrai ? Tu haussas quelque peu les épaules dans une esquisse, soulagé de savoir que Josh allait revenir avec toi dans l'ambulance demain. « C'était bien sinon ces quelques jours loin d'ici ? Tu as pu te reposer, et profiter ? Raconte-moi », que tu le questionnas, préférant te concentrer sur lui, ses pensées, son ressenti, déposant la tasse de café devant lui. « Tu dois une bonne heure de câlins à tes amours. Je leur ai promis que tu le ferai », tu passais des pactes avec des chiens maintenant ?? Tu ris quelque peu, le son discret, à peine audible dans ta gorge alors que tu attrapais ta tasse.


« Ça va nickel ! Les vacances font toujours du bien, de toute façon. » Josh a beau aimer son travail, c’est fatigant car les gardes sont longues et parfois stressant selon les interventions. Il n’en changerait probablement pour rien au monde, pas pour gagner mieux sa vie en tout cas. Mais comme la plupart des gens, il apprécie un break de temps à autre. Sauf que comme il a deux chiennes, il faut soit qu’il s’organise pour les amener (selon l’endroit où il va et la longueur du trajet), soit qu’il s’arrange pour les faire garder. Ce n’est pas la première fois que Casey le fait, mais Josh s’inquiète toujours un peu de savoir comment ça s’est passé. Même si elles sont chez elles, ça peut être déstabilisant pour Cookie et Bounty de ne plus voir leur maître et de se retrouver avec une autre personne à la maison, y compris si c’est quelqu’un qu’elles apprécient. Il demande donc tout naturellement si ça s’est bien passé et si elles ne lui ont pas posé de difficultés. Casey affirme qu’elles ont été adorables. « Comme leur maître, tu veux dire ? » plaisante-t-il. Josh pose les yeux sur elles, les deux gourmandes en train de dévorer leurs friandises. « Bon, tant mieux alors. » Il ne doute pas de la gentillesse des boules de poils. Elles ont toujours été comme ça depuis qu’il les a adoptées et au refuge, on lui a affirmé que c’était leur personnalité. C’est une des choses qui lui ont donné envie de sauter le pas. « Sérieusement, elles t’aiment beaucoup. Et ça me rend un grand service. C’est toujours un peu compliqué quand on a des animaux, ce sont des responsabilités. Grâce à toi, je peux partir l’esprit tranquille. » Mais à ses yeux, les avantages surpassent de très loin les inconvénients : elles lui apportent beaucoup de bonheur au quotidien.

Si le Wilson est fatigué, il n’est néanmoins pas près de se coucher. Il veut ranger un peu ses affaires, profiter de ses chiennes et discuter avec Casey. Il prépare donc un peu de café, comme ils en ont l’habitude à la caserne pendant leurs longues gardes. Pendant ce temps, il échange avec son ami. Néanmoins, il ne peut s’empêcher de remarquer que celui-ci a l’air distrait. C’est comme s’il avait la tête ailleurs et, à force de le côtoyer, Josh se dit que ce n’est pas bon signe. Il l’observe à la dérobée pendant qu’il lui tend une tasse de café. « C’est vrai qu’on a nos habitudes ensemble. Ça me fait drôle aussi quand tu pars en congé. » Ils ne peuvent pas le faire en même temps, forcément. « T’étais avec qui, cette fois ? » Josh s’installe à table avec sa tasse de café, caressant les têtes des deux chiennes qui reviennent lui faire la fête. « Alors je vais honorer ta promesse canine » assure-t-il en riant. « C’était bien, oui. C’était pas la première fois que j’allais là-bas, mais c’était le cas pour Savannah. J’aime déjà voyager, alors quand je suis avec elle c’est encore mieux. On s’est pas trop reposés, on a voulu faire le maximum de choses pendant qu’on était là-bas. » Posé avec sa tasse, Josh remarque que le brun n’a vraiment pas l’air dans son assiette. « T’es sûr que tu vas bien ? On dirait que t’es préoccupé. »

Hochant doucement le visage, tu souris quelque peu, approuvant. Il était vrai que les vacances faisaient toujours du bien. Depuis quand n'étais-tu pas parti, toi ? La dernière fois que t'avais voulu cette envie d'évasion était il y a deux ans. Tu n'étais plus vraiment parti depuis. Tes vacances tu les passais chez tes parents. T'allais jamais bien loin, tu te ressourçais là-bas, y trouvant le calme et l'apaisement dont tu avais cruellement besoin, mais tu ne partais pas. Dans une autre ville ou un autre pays, tu restais là. Peut-être que sans le savoir l'accident t'empêchait d'aller te détendre ailleurs, comme si partir signifiait que quelque chose de grave allait arriver. Comme si t'avais peur que cet accident se renouvelle mais que cette fois-ci, tu n'en sortes pas entier. Tu clignas des paupières, penaud, avant de rire légèrement à la remarque de ton ami. « Comme leur maître, exactement », tu plissas le nez, amusé, tes pupilles pétillant en observant les canidés. Tu songeais à prendre un chien ou un chat parfois. Histoire d'avoir de la vie dans ton appartement. Mais t'avais peur que l'animal se sente seul, qu'il se sente oublié et délaissé. Tu ne voulais pas qu'un animal soit malheureux par ta faute, tu t'en voudrais trop. Redressant le regard vers Josh, une moue tendre prit place sur ton visage alors que tes pommettes rougissaient légèrement. « Je les aime beaucoup aussi », avouas-tu. « Oui j'imagine que ça doit être compliqué de tout gérer... », tu te pinças les lèvres. Ces mots rejoignaient tes pensées. « Ca me fait plaisir de pouvoir t'aider et j'adore m'occuper d'elles »

Tu bougeas le visage, un son amusé dans la gorge. Vous deviez ressembler à un « vieux couple » avec vos habitudes dans l'ambulance. Tu voyais là votre force : vous vous comprenez sans parler, juste avec des regards et des gestes. Vous étiez synchronisés. Tu ris quelque peu à sa remarque. Tu tentais de repousser tes vacances au plus tard. Parce que ton travail était ta vie mais aussi parce que t'avais peur de pas tenir sans ça – sauf qu'on te forçait parfois à poser tes congés. Incroyable. « Un type d'une autre caserne. Il était gentil cela dit mais... », tu haussas les épaules. C'était pas Josh. T'avais oublié le prénom de son remplaçant, d'ailleurs. T'étais tout bonnement ingrat. Tu souris grandement alors qu'il promettait d'honorer ta promesse. « C'est une bonne manière de se reposer aussi. Vous avez vu d'autres choses et vous avez profité à votre façon », se reposer ne voulait pas forcément dire être couché et ne rien faire. C'était aussi profiter du paysage, changer d'air, voir d'autres choses, d'autres personnes et passer du temps de qualité avec une personne précise – Savannah pour Josh. Du temps de qualité que t'aurais jamais réellement pu passer avec Maddie. Ce week-end aurait été spécial, tu le savais. Rien n'aurait changé de ce qu'il se passait à la maison et t'aurais pas trouvé le repos ni l'apaisement. Elle, peut-être. Toi, non. Tu sursautas faiblement en entendant la voix de ton collègue, clignant des paupières pour te sortir de tes pensées et tu secouas le visage. « Non », tu fronças quelque peu les sourcils. « Je veux dire.. oui, ça va. J'étais juste... Je pensais à un truc », tu tentas un fin sourire, tes doigts tapotant distraitement ta tasse alors que ton regard se baissait vers le liquide, ton sourire disparaissant progressivement. T'imaginais pas ce que ta vie serait si Maddie était toujours là. Tu serais pas là, en train de discuter avec Josh. T'aurais même pas pu lui proposer de le dépanner et de garder ses chiennes, Maddie aurait refusé. Tu ne savais pas depuis combien de temps tu observais ta tasse mais quand tu redressas le regard, tu eus une moue gênée, les pommettes rosies. « Désolé », dis-tu dans un rire bref. T'avais toujours été comme ça, du genre à te perdre dans tes pensées, et à finir par ignorer tout ce qui t'entourait. « Tu as reçu les photos que je t'avais envoyées ? », de ses chiennes bien évidemment. Ou peut-être que t'avais oublié de le faire ? « Vous avez déjà prévu un autre week-end ? Tes chiennes me manquent déjà », tu ris doucement, le nez plissé – est-ce que t'essayais pas un peu de noyer le poisson en changeant de sujet ?

Si Casey rend un grand service à Josh en gardant ses deux boules de poils préférés, ça n’a pas l’air de beaucoup le déranger non plus. Elles ont de l’affection pour lui et, visiblement, il le leur rend bien. En même temps, Josh ne comprend pas bien comment on pourrait ne pas aimer ses chiennes. Certaines personnes ont du mal avec ces animaux en général - comme sa collègue Mara -, mais elles sont plutôt rares. Et il faut dire que Bounty et Cookie ont un caractère agréable. Même si elles les préviennent quand un inconnu s’approche de la maison, elles sont accueillantes et joyeuses. Et c’est exactement ce qu’il voulait : une compagnie affectueuse plutôt que des gardiennes effrayantes. S’il en avait voulu qui fassent peur, ce n’est d’ailleurs pas ces deux-là qu’il aurait adoptées au refuge du coin. Elles sont surtout gentilles et il est content qu’elles s’entendent bien avec tout le monde, particulièrement avec Casey. Comme il assure que ce n’est pas une corvée pour lui, ça permet à Josh de ne pas culpabiliser. Il sait que son collègue et ami fait partie des personnes qui aiment beaucoup les animaux, mais qui n’en prennent pas parce qu’ils craignent de ne pas bien pouvoir s’en occuper au quotidien.

« Il était gentil, mais pas autant que moi » poursuit Josh quand Casey évoque l’ambulancier avec qui il a fait équipe en son absence. Ça le fait rire de s’envoyer des fleurs en compagnie du brun, parce qu’il sait que ce dernier le prendra comme c’est, à savoir de l’humour. Il n’a jamais prétendu avoir la personnalité la plus agréable au monde ; mais ce qui est sûr, c’est que le courant est bien passé entre eux, dès le début. Certaines personnes affirment que le coup de foudre amical existe, c’est peut-être ce qui leur est arrivé, à eux ? Et surtout, leur entente dure dans le temps. C’est une bonne nouvelle, vu toutes les heures qu’ils sont amenés à passer ensemble. « On est d’accord. Pour moi, profiter d’un voyage c’est pas rester affalé devant le canapé et la télé. Ça, c’est pour la maison… » précise-t-il en souriant. Après tout, Casey connaît bien sa passion pour les jeux vidéos et les marathons de ses films préférés. Ils en font parfois ensemble d’ailleurs, même si leurs goûts peuvent différer. « J’ai bien reçu les photos, oui ! Ça me fait plaisir à chaque fois. Et puis elles ont l’air tellement épanouies. » Elles lui manquent quand il s’en va, mais il n’est visiblement pas le seul. « Tu veux me chasser, c’est ça, tu préfères être avec elles qu’avec moi ? » continue-t-il à plaisanter, faisant mine d’être offensé. « On n’a pas encore de date, parce que j’ai pas autant de congés à poser que toi et qu’elle a pas mal de boulot à la fac. Mais on sait où on veut aller, par contre. » Le Wilson boit une gorgée de sa boisson chaude. « T’es toujours le bienvenue ici, de toute façon. Tu passes quand tu veux, pour leur dire bonjour… Tu en feras les plus heureuses du monde. » Se passant une main dans les cheveux, il se dit qu’il ferait peut-être mieux d’aller se débarbouiller un peu. Mais il a aussi une autre idée. « Tu veux manger ici, ce soir ? On peut se commander… Ce que tu veux, en fait. »

T'étais reconnaissant d'avoir Paige et Noah chez toi plus souvent que tu ne pouvais le compter. Ils apportaient de la vie dans ton appartement. Il le rendait plus convivial, plus chaleureux. T'avais qu'une hâte : y retourner le plus vite possible quand tu savais que tu allais t'occuper d'eux, qu'ils allaient venir chez toi et qu'ils t'attendaient peut-être déjà avec ton frère. C'était toujours avec le sourire que tu voyais le petit se jeter dans tes bras et Paige qui venait plus doucement pour t'enlacer. C'était plutôt amusant, cette façon qu'ils avaient de faire en total décalage avec leurs caractères. On pourrait croire que Noah était le plus vivace alors qu'il était le plus calme et le plus timide des deux. A l'inverse on pourrait croire que Paige était la plus discrète alors qu'elle était la plus bavarde et la plus énergique des deux. T'étais content de les avoir, content de pouvoir t'en occuper. Tu savais pas ce que tu ferais s'ils n'étaient pas là. Qui viendrait apporter de la légèreté dans ton appartement ? Qui viendrait adoucir tes pensées, éloigner celles qui étaient trop sombres, s'ils n'étaient pas là ?

C'était pour cette raison que tu te jetais corps et âme dans ton boulot. Pour oublier. Pour t'oublier. « Mais pas autant que toi », répétas-tu, amusé, le rire discret dans le fond de la gorge. Tu savais qu'il plaisantait, Josh. Toi tu plaisantais à moitié. Tu supposais que personne n'arriverait à la cheville de ton coéquipier et ami, aussi gentille et abordable que la personne puisse être. Josh c'était Josh. Et il était pour toi irremplaçable. Dans l'ambulance comme dans la vie de tous les jours. Tu hochas le visage, totalement d'accord. Tu ne voyais pas l'intérêt de partir à l'autre bout du monde si c'était pour rester allongé dans un lit. C'était quelque chose de faisable chez soi alors pourquoi partir aussi loin ? « Elles ont l'air oui », tu souris tendrement, le regard vers les chiennes. Tu espérais qu'elles le soient. Elles ne pouvaient être aussi heureuse avec toi qu'elles ne l'étaient avec leur maître mais tu espérais pouvoir les apaiser suffisamment. « Tu as tout compris », avouas-tu, ton regard pétillant doucement alors que tu plissais le nez, amusé. Tu fis un vague mouvement avec les mains comme pour le chasser de chez lui tout en riant. Tu émis un léger son, bougeant quelque peu le visage. « Tu crois que je peux te faire un don de congés ? », rien qu'en posant la question ça te semblait pas possible mais tu pouvais essayer. Ca t'arrangerait de passer tes jours au boulot. « Vous voulez aller où ? », demandas-tu, un peu hésitant de peur d'être curieux mais avec l'envie de savoir. S'il voulait bien te le dire. Une esquisse douce vint habiller tes lèvres à ses paroles. « Merci », soufflas-tu, touché. « Je compte bien revenir et leur offrir les beaux jouets dont je leur ai parlé », tu hochas doucement le visage. Toi ? Gâteux ? Peut-être bien – il n'y avait qu'à voir comment tu comblais ta nièce et ton neveu. Tu clignas des paupières à la demande avant de sourire. « Oh je veux bien », dis-tu directement, soulagé de ne pas devoir te retrouver seul tout de suite. « Une pizza ? », proposas-tu, les pommettes finement brillantes. Maddie avait rarement été fan, ne commandant que rarement. Ou peut-être était-ce parce que tu allais directement en cuisine sans chercher à savoir. « Je peux préparer quelque chose aussi, ça me dérange pas », tu te pinças un peu les lèvres, semblant te rappeler de quelque chose. « Tu veux peut-être te reposer...  », chuchotas-tu dans une petite esquisse, désolé de ne pas y avoir songé avant. T'avais accepté bien trop rapidement son invitation à rester, soulagé de ne pas être seul. Mais t'avais pas pensé à lui. « On pourra se faire ça une autre fois au pire ? … Non ? », tu haussas quelque peu les épaules dans une petite grimace incertaine. Tu voulais rester, honnêtement, mais tu voulais pas avoir l'impression de t'imposer – même si c'était pas le cas, il t'invitait. Mais... tu pensais trop, en fait.

Si Josh est content de savoir qu’il occupe une place importante dans la vie - au moins professionnelle - de Casey, il espère que ce dernier sait que la réciproque est vraie. Mais il pense que c’est le cas. Ils ne sont peut-être pas du genre à être affectueux et à mettre des mots là-dessus (clairement, ce n’est pas trop le truc de Josh entre mecs), mais en pratique ça doit se voir assez bien. Par exemple, ils passent du temps ensemble même en-dehors de la caserne, alors que quand ils bossent ils vivent déjà les uns avec les autres. Pourtant, ils sont assez différents. Mais c’est peut-être ce qui fait la complémentarité de leur amitié. « J’adorerais que tu puisses me faire don de congés. Mais j’ai bien peur que la hiérarchie ne soit pas d’accord… Ou même la loi, en fait. » Dommage. Ce n’est pas que Josh n’aime travailler. Il exerce le métier qu’il a choisi et il se plaît en tant qu’ambulancier. L’ambiance de la caserne est conviviale, si on met de côté l’animosité de Roman envers lui. Les gars sont cool, la paye est plus que correcte, et le sentiment d’utilité et de satisfaction lorsqu’une mission de sauvetage se déroule comme prévu n’a pas de prix. Ce n’est pas la nature du travail, le problème, ni l’environnement. Mais il aime bien partir en vacances, tout simplement, ce qui n’est pas vraiment le cas de Casey. Ce dernier accumule tellement de congés qu’il est obligé, par la force des choses, d’en prendre au final. Et il reste généralement dans les parages, ce qui n’est pas le cas de Josh. Savannah aussi est toujours enthousiaste à l’idée de partir avec lui. « On aimerait bien visiter un peu la côte nord-ouest de l’île du sud. Les glaciers, Hokitika, les piscines bleues naturelles… Mais c’est un voyage plus long et nécessitant un peu plus d’organisation, alors ce ne sera pas pour tout de suite. »

Pour prolonger un peu le moment passé ensemble et la discussion, Josh propose à Casey de manger avec lui. Le met italien le plus populaire est évidemment suggéré et Josh hoche la tête en signe d’approbation. « Tu prends la même chose que d’habitude ? » Il connaît ses goûts, à force. « Faudrait que j’arrête de manger de la pizza trois fois par semaine, je me dis qu’il y a forcément un moment où mon corps me le fera payer. Mais ça fait longtemps que je pense ça, alors… » Il hausse légèrement les épaules, avant de passer le coup de fil pour commander. « Je vais pas t’exploiter pour que tu prépares quelque chose… J’ai déjà suffisamment demandé ton aide, il me semble. » Et puis Josh n’est pas du genre à se prendre la tête en cuisine. Il est clairement moins débrouillard que Casey dans ce domaine. « Non, ça ira. Je me reposerai après. C’est pas comme si on n’avait pas l’habitude d’enchaîner des gardes plus longues et plus fatigantes que ça… Et je fais facilement le tour du cadran après. » Casey ne le dérange jamais. Il serait même capable de faire une sieste s’il restait dans les parages, alors… « Paige et Noah sont venus aussi ici ? Ça fait un moment que je les ai pas vus, comment vont les petites fripouilles ? »

Tu plissas le nez, faisant la moue en entendant parler de la hiérarchie comme Paige faisait la tête quand on lui parlait des mathématiques. Tu suivis la loi donc c'était pas à elle que tu allais faire la tête mais... sur le principe, ça pourrait être possible. « Dommage », dis-tu dans un petit souffle. Tu aurais pu lui donner quelques jours. Voire carrément tout – ou peut-être que tu en aurais juste gardé deux ou trois pour pouvoir les passer avec les enfants. Peut-être que t'aimais un peu trop travailler. Ou peut-être que t'étais tellement borné dans sa façon de faire que tu pensais que ça allait te sauver, soigner tes blessures, les guérir. Peut-être que tu pensais même que ça allait te pardonner tes fautes, tes erreurs, tes mauvaises pensées, tes non-dits. Ca te vidait la tête, au moins, et aider les autres te faisait du bien. Tu ouvris doucement la bouche en l'écoutant, un discret « Oh » admiratif s'en échappant, ton regard pétillant. « Effectivement. Et c'est là que ça aurait été utile de pouvoir te donner mes jours de congé », que tu insistas dans un rire léger. « En tout cas hésite pas si tu as besoin de moi pour les chiennes, je serai là », tu te doutais qu'il le savait mais tu préférais le dire, au cas où.

« Oh euh oui », déclaras-tu timidement bien que contenté. Tu savais qu'il savait mais ça te faisait plaisir à chaque fois. Tu te pinças un peu les lèvres avant de rire dans un mouvement du visage. « T'en fais pas ça se voit pas pour le moment », tu le rassurais ou tu le taquinais ? Un peu des deux. « Puis c'est bon la pizza. Il y a des … légumes », tu clignas des paupières, penaud et haussas les épaules dans un son amusé. « Ca me dérange pas », dis-tu immédiatement, un geste vague de la main. Au contraire, t'aimais te sentir utile. T'aimais cuisiner aussi. « C'est pas comme si tu me forçais », tu souris légèrement. Il savait que ça te faisait plaisir d'aider. Tu te mordis discrètement la lèvre, un peu inquiet de le priver d'un repos bien mérité. « Certes », lâchas-tu, à défaut de pouvoir rétorquer un meilleur argument. « C'est pas une raison pour ne pas te reposer cela dit », maugréas-tu, un peu comme ta mère le faisait quand tu ne voulais pas te reposer. Tu le fixas un instant, un peu bougon, avant que ton visage ne s'illumine soudainement à la mention des deux enfants.  « Paige a adoré jouer avec elles... mais je crois qu'elles les a épuisées », tu ris quelque peu, revoyant la gamine courir partout, lancer les jouets et s'amuser avec les chiennes. « Noah a préféré dormir avec les chiennes et leur faire des câlins », tu souris, sortant ton téléphone pour montrer une vidéo de chaque enfant, jouant et dormant. « Ils vont bien », dis-tu, le ton doux, tendre. « Paige me demande souvent comment tu vas. Elle était déçue de ne pas t'avoir vu quand elle est venue jouer avec les chiennes », tu lui avais expliqué qu'il ne serait pas là mais... elle avait quand même été déçue. « Ils viennent à la maison ce week-end. Si tu veux, tu peux passer, ils seront contents de te revoir », proposas-tu, le visage quelque peu penché, le sourire fin. Tu restas silencieux ensuite, contemplant le vide, tes pensées, le passé, rien. « Je sais pas ce que je vais devenir quand ils vont grandir et qu'ils n'auront plus besoin de moi », confias-tu soudainement, les prunelles dans le vide, l'air dramatique. Tu relevas le regard vers lui dans un rire fin mais tu te posais souvent la question : t'allais devenir quoi quand ils comprendront que tu ne leur étais pas nécessaire ? Quand ils comprendront tous et toutes qui tu étais vraiment ?

« Oui, ç’aurait été tentant. » Josh sourit à la moue déçue de Casey parce que sa proposition n’est pas réalisable. Ça lui ressemble tellement, à la fois la gentillesse et le désir de travailler. « Merci encore. Quand je vois à quel point vous vous entendez bien, ça m’encourager à ne pas hésiter. » Ça a l’air de faire plaisir à Casey et lui, ça l’arrange franchement. Il aurait eu des scrupules à demander à quelqu’un que ça dérange, ou encore à quelqu’un qui n’aime pas vraiment les chiens, ou même à les confier à une personne spécialisée. Oui, Casey a beaucoup de qualités qui font de lui un précieux ami. « Comme tu dis… Pour le moment. » Josh appuie sur cette précision -  parce qu’elle est importante -, tout en baissant les yeux vers son ventre. Il n’est pas à plaindre, c’est sûr, surtout qu’ils font pas mal de sport pour rester au niveau, leur travail nécessitant de la réactivité et de la rapidité. Mais il sait qu’un jour, son métabolisme ne sera plus aussi performant. Un jour, s’il ne prend pas de meilleures habitudes alimentaires, ses mauvais choix le rattraperont. Mais quand on a vingt-sept ans, on oublie facilement ce genre de choses, on repousse aisément à plus tard ce type de préoccupation. « Comme légume, ou comme fruit peu importe, il y a surtout de la tomate » plaisante-t-il, tout en dégainant quand même son téléphone pour passer la commande.

« C’est Chance qui est content quand tu l’aides à la caserne. » Josh dit ça en souriant, parce qu’il sait que leur collègue et ami n’est pas toujours fan de la cuisine. C’est souvent la dernière recrue qui s’y colle et de son côté, pour ne rien faire brûler - même si tout serait à portée de main pour éteindre le début d’incendie -, Josh préfère ne pas trop mettre la main à la pâte. Si c’est du frais et qu’il faut juste assembler et mélanger, ça passe encore. « Si tu veux m’aider, partage-moi ta salade un peu plus souvent » demande-t-il, plaisantant seulement à moitié. « Tu t’inquiètes pour moi, même si on a l’habitude des heures de sommeil décalées… C’est mignon » le taquine-t-il. Le Wilson s’installe confortablement en attendant les pizzas, demandant des nouvelles de la prunelle des yeux du brun. « C’est vrai, Paige a réussi à les épuiser ? Tu devrais l’emmener plus souvent, alors. » Depuis qu’il a des nièces, il s’en sort bien mieux avec les enfants. Ce n’est pas forcément le cas de toutes les petites têtes, mais eux deux, il les aime beaucoup. « Noah devait être trop mignon ! T’as pas pris des photos ? » Un sourire attendri éclaire son visage quand il apprend que Paige demande souvent de ses nouvelles. « Je passerai avec plaisir ce week-end. Et j’apporterai leurs gâteaux préférés. » Il connaît aussi les goûts des bouts de chou, maintenant. « Tu sais, je crois qu’ils auront toujours besoin de toi… Moins, c’est sûr. Mais c’est ta famille. Aujourd’hui, mon neveu est adulte, mais il passe parfois à l’improviste ou m’appelle quand il est bourré et qu’il a besoin d’un chauffeur. »

Ca aurait été tentant, en effet. Bien dommage que ce ne soit pas possible. Tu lâchas un sourire à ses mots suivants, le regard attendri quand tu le posas sur les chiennes. « On s'adore », commentas-tu simplement dans un rire discret, le nez plissé. Ca ne te dérangeait jamais, t'aimais bien trop t'occuper d'elles. Tu te pinças les lèvres, retenant ton rire, son regard suivant le sien alors que tu bougeais quelque peu le visage. « Je suis sûr que ça ira », commentas-tu après quelques secondes dans un son amusé avant de hausser les épaules dans un sourire. Le boulot vous permettait de garder la forme. T'osais pas vraiment dire que t'avais du mal à soulever les poids à la salle. Tu t'en sortais mieux sur le tapis de course : t'avais un bon rythme, une bonne endurance. Tu courais plutôt vite d'ailleurs, tu savais pas si un jour ça allait pouvoir te servir mais... « Il y a surtout de la tomate », tu hochas le visage dans un air solennel, le coin des lèvres finement haussé.

« J'espère », dis-tu dans un sourire pour répondre au sien. Ca ne te dérangeait pas d'aider en soit, au contraire. Si tu pouvais donner un coup de main, t'étais le plus heureux. Que ce soit en cuisine ou même pour nettoyer quelque chose. Tu montais les manches et tu aidais. Même si t'étais fatigué. « Ma salade ? », tu ris doucement. « Je te donnerai la moitié la prochaine fois », était-ce une promesse ? Te connaissant t'allais certainement lui donner toute ta salade si ça pouvait lui faire plaisir. T'étais le genre de mec à donner ta dernière chemise sans réfléchir. Juste parce que ça te semblait être la bonne chose à faire. Juste parce que t'étais comme ça, aussi. « Bien sûr que je m'inquiète. Je fais quoi si t'arrives pas à suivre demain dans l'ambulance ? », que tu le taquinas doucement, le sourire léger. « Elle a réussi », et tu ris une nouvelle fois. Tu devrais l'emmener plus souvent. Tu savais qu'elle en serait ravie, tout comme Noah serait content de pouvoir l'accompagner pour dormir avec les chiennes. « Un tas de photos », tu fis défiler la galerie de ton téléphone, plein de photos de ton neveu ou de ta nièce, le sourire doux, l'air attendri. Tu les aimais beaucoup trop. « Oh ça leur ferait plaisir », et tu souris, toi-même ravi à l'idée comme si c'était toi qu'on venait voir. « Tu peux emmener les chiennes aussi si tu veux », proposas-tu, sachant que les enfants en seraient doublement ravis. Tu eus un petit air sceptique à ses mots, l'air un peu bougon, avant de cligner des paupières dans un air penaud. « Je vais passer de tonton préféré à Sam ? », t'inquiétas-tu, les sourcils finement froncés. « J'espère en tout cas », tu haussas les épaules, jetant un regard vers ton téléphone. « Ils grandissent trop vite » commentas-tu, un peu boudeur mais aussi ému. T'aimerais qu'ils ne grandissent pas, qu'ils restent enfants. Qu'ils gardent leur insouciance, leur joie de vivre. T'aimerais leur éviter la vie d'adultes, les problèmes, les questions. « J'ai l'impression que je pourrais jamais réellement rattraper tout ça », songeas-tu doucement en observant ton fond d'écran : une photo d'eux en train de sourire vers la caméra. « Tout le temps que j'ai perdu avant », à cause de Maddie. Tu perdis un peu le sourire, ton visage devenant un peu plus sombre, comme tes pensées. Tu redressas le visage dans un souffle court. « Je vais en profiter avant de devenir Sam », dis-tu, pour rebondir sur une note plus amusée, tentant un rire léger. « Elles arrivent quand les pizzas ? », toujours tout pour changer de sujet, pour te changer les idées. « J'ai faim »


« C’est noté, pour la salade. Ma mère t’aimerait vraiment. » Josh continue de plaisanter, mais à moitié. Déjà, il sait que Casey partage volontiers tout ce qu’il a. Ensuite, sa mère a déjà pas mal d’estime pour son collègue de travail. D’ailleurs, les membres de sa famille aiment dire en riant que, pour le supporter ainsi pendant des heures, il faut avoir bien du courage. Et en plus, ils n’ont peut-être pas tout à fait tort. « Tu sais bien que j’arrive toujours à suivre » fait-il mine de protester. « Tu vas me vexer, je suis toujours très responsable quand il s’agit du travail. » La susceptibilité ne fait pas partie de sa personnalité, non. En revanche, le reste n’est pas faux. Même quand il était plus jeune et qu’il aimait faire la fête en abusant franchement sur l’alcool, Josh le faisait seulement à au moins deux jours d’intervalle de ses gardes à la caserne. C’est le seul domaine où il s’est toujours montré raisonnable, trop conscient de l’importance d’être en forme en cas de nécessité urgente. D’ailleurs, c’est peut-être aussi ce qui les a rapprochés, avec Casey. En plus des heures passées ensemble, il y a aussi les difficultés du métier, sans compter les joies et les peines partagées. Ce qu’ils voient, ce qu’ils vivent ensemble leur permet de se comprendre mutuellement. Et le fait que ça se soit élargi au-delà du travail n’en est que plus appréciable.

Se penchant, Josh regarde les photos que Casey a prises. « Une tonne, c’est clair ! » Et dans le lot, il y en a qui sont franchement réussies. Josh a un sourire, tandis qu’ils se mettent à discuter du week-end à venir. « J’amènerai les boules de poils avec plaisir. Comme ça, tout le monde sera content ! » Il en est certain. Ce sera beaucoup mieux que de passer plusieurs heures vissé devant Fortnite. L’idée de voir les petites bouilles le réjouit d’avance. « Oui, les enfants grandissent toujours trop vite… J’essaye de voir mes nièces une fois par semaine, une fois tous les quinze jours maximum, et à chaque fois j’ai l’impression qu’elles ont poussé. Bientôt, je vais devoir tout faire pour leur éviter les mecs qui… Eh bien, comme j’étais avant. » Avant de se poser avec Savannah, il courait les jupons. Il connaît les hommes et il se fait du souci d’avance pour ses petites Boucles d’or. « Il en faut en profiter un maximum, quand ils sont encore enfants. » Il est en train de parler que la sonnette de la porte d’entrée retentit. Josh se lève pour aller payer les pizzas pour les rapporter dans la cuisine. Il promet aux chiennes de leur donner les croûtes, avant de s’asseoir à nouveau à table. « Tu as vu ? Ils t’ont entendu ! Bon appétit, mec. »

Un son amusé au fond de la gorge, tu secouas le visage, le nez plissé, avant de finalement laisser un rire t'échapper. « A ce point ? », demandas-tu, le sourcil arqué, le rire résonnant encore dans les syllabes. « C'est vrai, c'est vrai », tu levas les mains en guide d'innocence, riant encore, lui tapotant l'épaule comme pour te faire pardonner. Ou l'encourager. Ou peut-être les deux. Vous aviez le même âge pourtant t'avais parfois l'impression d'être le plus jeune. Parfois le plus vieux. Dans ta façon de faire ou de penser, t'étais souvent un extrême ou un autre, jamais un entre-deux plutôt bien équilibré. Tu parlais comme un vieux mais t'agissais comme un jeune. Tu parlais comme un jeune mais tu te comportais comme un vieux. T'avais cependant remarqué que tout le monde était un peu comme ça, que personne ne faisait jamais vraiment son âge. Que le caractère trompait les autres, aussi. La façon de s'habiller, de se tenir. Vous faisiez votre âge sans vraiment le faire – et tu te demandais parfois si ton corps allait toujours réussi à suivre pour faire ce métier. Parce que t'aimais trop ton boulot et rien que de penser au fait qu'un jour t'allais devoir t'arrêter t'angoissait. « Moh », commentas-tu simplement dans un petit rire. « C'est vrai encore une fois, excuse-moi », la main sur le cœur tu fis de demander pardon, l'air amusé, enfantin.

Tu rougis quelque peu, la mine coupable, avant de hausser les épaules. Ce n'était pas ta faute si Paige et Noah étaient adorables. Tu hochas le visage, souriant. « Très content. Paige va tout tenter pour réussir à les épuiser dans mon appartement », tu l'imaginais déjà courir partout avec les chiennes tandis que Noah attendrait sagement qu'elles soient fatiguées pour aller se poser avec elles. Tu lui offris un petit air compatissant, bougeant faiblement la tête de haut en bas. Les enfants grandissaient trop vite et tu supposais que tous les parents se faisaient cette réflexion.... même si ta mère te traitait encore comme un bébé parfois. « Ils poussent en un rien de temps », à croire que les parents les arrosent chaque soir. « Tu te mettras en mode super tonton », sans la cape mais prêt à chasser quiconque voudrait blesser ses princesses. « Mon frère me dit la même chose », tu ris quelque peu. T'avais parfois l'impression de lui piquer ses enfants cela dit, de passer trop de temps avec eux. « Les miracles existent. Bon appétit, et merci », tu mastiquas longuement, en silence, passant peut-être un peu trop de temps sur ton morceau de pizza, les sourcils quelque peu froncés. « Tu crois qu'on pourra les protéger de tout ? Les enfants », tu lui lanças un regard, un peu perplexe par ta propre question, un peu paumé aussi. Tu voulais pas uniquement protéger Paige des hommes lourds mais aussi Noah. Le mal n'était pas uniquement masculin, après tout. « Je voudrais pas qu'il leur arrive la même chose », mais comment les protéger efficacement ? Impossible n'est-ce pas ? Tu avalas un autre morceau de nourriture, fixant les chiennes, le silence à nouveau contre les lèvres. « Mon frère m'a dit que Noah voulait devenir comme moi », tu disais ça comme si ça expliquait tes mots précédents. Mais pour toi oui : tu ne voulais pas qu'il suive le même chemin que toi, qu'il fasse les mêmes erreurs, qu'il subisse les mêmes maux.

« On pourrait croire qu’une formation dans le domaine médical pousserait forcément à la consommation d’aliments sains, mais la preuve que c’est pas toujours le cas. » Peut-être que c’est la réaction de la plupart des personnes et qu’il fait en réalité partie d’une minorité qui a plus de mal à mettre ça en application. Pourtant, il fait des efforts, mais pas toujours couronnés de succès, c’est clair. « J’essaye quand même de faire un minimum attention, vu qu’on doit rester en forme et tout. Ce serait bête de se louper aux tests physiques… Ou pire, d’être dépassés sur le terrain. » Josh a conscience que c’est un métier particulier, comme chacun d’entre eux probablement. Et si en tant qu’ambulanciers, ils ne prennent pas forcément autant de risques que les autres pompiers, la nécessité d’être opérationnel en cas d’urgence reste tout aussi importante. Le reste, ce sont uniquement des plaisanteries. « J’accepte tes excuses » souffle-t-il, une main sur le coeur, faisant mine d’être touché alors qu’il adresse un clin d’oeil à l’homme avec qui il passe décidément beaucoup de temps. 

Les deux ambulanciers commencent à manger, rassemblés autour d’un des mets italiens les plus populaires - si ce n’est le plus. Et ils commencent à évoquer les enfants, plus précisément les neveux et nièces de chacun des deux, puisque eux-mêmes n’en ont pas. « C’est ça, mode super tonton. Dit comme ça, j’ai surtout l’impression que ça sonnera comme super grincheux, vieux aigri, un truc dans le genre. » Josh laisse échapper un rire. « Quant à mon neveu, il va bientôt atteindre la même taille que moi, je crois. » Il est nettement plus âgé que les princesses, ce qui fait aussi qu’ils sont plus complices. Ce n’est pas la même relation, c’est sûr. Quoi qu’il en soit, la conversation devient vite plus sérieuse lorsque Casey exprime ses propres inquiétudes. « Non… Non, malheureusement, je pense pas qu’on puisse les protéger de tout. On entend trop de mauvaises nouvelles pour croire ça. En-dehors des responsabilités que je suis clairement pas prêt à assumer, rien que pour ça j’aurais peur d’en avoir. » Tout en mangeant, Josh est songeur. « Si ton neveu devient comme toi, alors ce sera un homme généreux, loyal et fiable. J’approuve, forcément. » C’est à la fois délicat et important pour le brun, le Wilson le sent, même sans en saisir la raison précise. « Qu’est-ce que tu as peur qu’il leur arrive comme toi ? T’es un être humain génial, tu as un travail stable que tu aimes et tu es bien entouré. C’est clair qu’il y a bien pire. »

Penchant quelque peu le visage sur le côté à ses mots, tu mimas un petit air incertain avant de rire légèrement. « Les deux ne sont pas forcément liés ? Je crois », toutes les personnes travaillant dans le domaine médical n'avaient pas obligatoirement une manière de vivre saine. Certain.e.s fumaient, buvaient ou se gavaient de produits trop gras tout en disant bien à ses patient.e.s de ne pas faire de même. « Ce serait bête de se louper pour ça », confirmas-tu dans un mouvement du visage. Faisais-tu attention à ce que tu mangeais ? Un peu. Sans le vouloir. Tu cuisinais toi-même le plus souvent, tu supposais que c'était déjà un pas vers la nourriture saine. Mais t'étais pas du genre à évaluer les calories ou tout ce qui suivait. « Le temps qu'on n'abuse pas, je pense que c'est pas trop grave ? », vous ne mangiez pas des pizza tous les jours ou ingurgitaient d'autres produits peu recommandés. C'était plutôt rare. Non ? Posant la main sur ton cœur à ton tour, tu te penchas faiblement comme pour le remercier de te pardonner, un rire aux lèvres en secouant quelque peu le visage. Tu n'aurais pas pu rêver meilleur collègue et ami, vraiment.

Tu plissas un peu le nez à ses mots dans un petit air bougon. « Super tonton ça sonne super-héros non ? Avec une cape dans le dos et un masque pour pas qu'on te reconnaisse », peut-être que tu regardais trop la télé avec Paige et Noah. « Ca sonnera comme un vieux aigri super grincheux seulement si tu deviens un vieux aigri et super grincheux », tu hochas quelques fois le visage dans un petit rire. Tu clignas des paupières, lâchant un « Sérieux ? » ébahi. T'imaginais Noah aussi grand que toi maintenant. Paige aussi. Elle était déjà grande pour son âge en plus. Sachant que ton frère et ta belle-sœur étaient eux aussi plutôt grands... T'étais pas prêt à les voir aussi grands. Ils resteraient des bébés à tes yeux de toute façon. Mais t'oubliais ça. Tu ne pouvais pas les protéger des changements sur leurs propres corps. Tu voulais les protéger du reste. Des autres. Tu mastiquas lentement une bouchée, bougeant le visage aux paroles de ton ami pour approuver. « Malheureusement », soufflas-tu, les épaules basses. Tu levas le regard vers lui, un sourire attendri et amusé sur les lèvres, les pommettes rosies. « C'est gentil de ne citer que mes bons côtés », admis-tu dans un rire. T'avais tellement de défauts, tu supposais que la liste était plus rapide du côté de tes qualités. Tu déglutis doucement à sa question, observant la pizza. « Je veux dire... », tu baissas encore un peu le regard. T'étais pas sûr d'être comme il le disait. Tu aimerais pourtant mais cet homme génial qu'il dessinait, c'était pas toi. « Comme... Comme les mauvaises rencontres ? », tentas-tu dans une petite grimace incertaine. « Je voudrais pas que...  », tes lèvres bougèrent mais aucun son n'en sortit – tu ne voulais pas qu'ils tombent sur quelqu'un comme Maddie. Qu'une personne bousille ce qu'ils étaient, bousille leurs rêves, les espoirs et renforcent leurs craintes. Peut-être que Josh comprendrait simplement que tu ne voulais pas qu'ils perdent leur « moitié » dans un accident ou quelque chose dans le même style ? Pourtant il y avait bien plus que « perdre » Maddie. Ce n'était pas ça qui te perturbait ou qui te faisait peur pour eux. « Enfin o-oui... il y a bien pire... », murmuras-tu dans un léger raclement de gorge, tes lèvres se levant dans une sorte d'esquisse perturbée. « Peut-être que je me fais trop de soucis et qu'ils ne feront pas les mêmes erreurs », pensas-tu à voix haute, te mordant nerveusement la lèvre avant d'offrir une esquisse désolée à ton ami en remarquant que tu te perdais dans tes pensées. « C'est triste à dire mais c'est pour ça que je suis soulagé de ne pas avoir d'enfants », tu te ferais trop de soucis pour eux. Puis tu avais Paige et Noah, ça suffisait. « Et je pense pas que je ferais un bon père », t'étais un bon tonton mais un père ? C'était plus délicat. Maddie t'avait toujours dit que tu ne pourrais pas, en tout cas, et t'avais fini par la croire.

« Ah, j’aime beaucoup les choses telles que tu les présentes » approuve Josh, quittant en même temps son air bougon. « Tu m’aideras à choisir mon costume alors ? On peut pas porter le même, mais il faut qu’on ressemble aux Avengers » plaisante-t-il, parce qu’il est fan de l’univers Marvel. Mais bien sûr, il sait qu’il aura surtout l’air ridicule s’il s’amuse à enfiler un costume de Captain America. C’est absolument non-envisageable, mais ça le fait rire d’en plaisanter. « T’as raison, je suis pas prêt à devenir aigri et grincheux » approuve-t-il. Pourtant, en-dehors de ces échanges légers, la conversation peut aussi tout à fait devenir sérieuse. Le Wilson sent que Casey a quelque chose sur le coeur, mais peut-être qu’il n’ose pas vraiment se confier. Et ce n’est certainement pas lui qui va lui forcer la main, même s’il reste évidemment disponible pour être une oreille attentive. Alors il écoute ce que son ami est disposé à lui dire, puis cherche les bons mots. « C’est parce que tes bons côtés sont plus nombreux et plus importants. Et ça vient de quelqu’un qui te côtoie souvent et de près, alors ça veut forcément dire quelque chose. » Maintenant qu’il a terminé de manger, Josh s’essuie soigneusement les doigts. Puis pendant qu’ils discutent, il se lève pour sortir de la crème glacée du réfrigérateur, avec des coupes et des cuillères. Il pose le tout sur la table, presque sans quitter le brun des yeux. Un dessert ne peut pas faire de mal au moral, surtout lorsque la conversation semble importante. « C’est vrai. Tout le monde peut faire des mauvaises rencontres. Et si on peut leur donner les meilleurs conseils, on peut malheureusement pas empêcher ça. » Lentement, Josh sert la crème glacée. « C’est sûr, peut-être qu’on se fait trop de souci pour eux. C’est normal et en même temps, il y a tellement de choses sur lesquelles on n’a pas d’emprise. » Attrapant sa coupe, Josh se cale contre le dossier de sa chaise. « Et je suis pareil que toi, c’est un soulagement de ne pas être responsable d’un petit être humain. Je m’en sens tellement incapable. Par contre, tonton, ça me va tout à fait. Je peux accomplir mon rôle, qui n’est pas si important. » Il commence à manger son dessert. « Et en parlant d’enfants, j’ai trop hâte de voir ceux de Laya » confie-t-il, seule touche légère de leur conversation. « Si tu as besoin de te confier à propos de… Mauvaises rencontres ou d’erreurs passées, je suis là, quand tu veux. Mais si tu préfères pas, on peut aussi aller s’installer devant Fifa, Fortnite ou n’importe quel autre jeu, les deux me vont. »