another rough patch to rain on ⚝ willow

Il paraît qu’on me prend pour une influenceuse. Je n’ai pas bien compris comment, ni pourquoi, mais il semblerait que les conneries que je poste sur Instagram aient touché suffisamment de personnes pour qu’on commence à vouloir me contacter pour tester des marques, ou parler de certaines expériences. La dernière en date, c’est qu’on m’a prise pour une experte en gastronomie, et on m’a invitée à un événement publicitaire. Je ne sais pas d’où ça sort, mais qui suis-je pour refuser un repas gratuit ? Me voilà donc, à l’accueil de ce restaurant apparemment réputé, notamment pour l’école de cuisine d’où il tire son personnel. Ce n’est pas vraiment mon genre d’arriver toute seule dans un restaurant, mais j’essaie de me détendre tout en donnant mon nom à l’accueil. Inconnue au bataillon. Je tente mon pseudo Instagram, et cette fois, bingo, on me trouve, et on me donne un petit badge avec mon nom marqué dessus. Enfin, mon pseudo. Ambiance. Je ne m’attendais pas à ce qu’on passe la soirée à m’appeler comme ça, mais j’attrape un stylo pour en rayer une partie. Tee, ce sera très bien.
Je m’aventure dans la salle réservée spécialement pour l’événement, et on me fourre un sac de goodies entre les mains, avec des instructions de photos à prendre, de stories à faire, et d’autres trucs que j’arrête très vite de lire. Moi qui pensais que j’étais juste là pour manger... Je dépose le sac sur une table, puis je m’éclipse très vite derrière une porte - a priori - réservée aux employés. Après plusieurs détours, j’atterris dans un couloir plutôt tranquille. L’avantage, c’est qu’avec mon costume tout noir, on pourrait presque me prendre pour une employée... Ou peut-être pas, vu que j’ai toujours mon badge accroché sur la poitrine. Mais lui, je l’ai oublié.
Adossée à une table, je me relève soudainement en entendant, avant de la voir, une femme qui vient dans ma direction. Elle a un plateau entre les mains, mais semble avoir le regard un peu dans le vide. Et plus elle s’approche, plus je la sens de moins en moins sereine sur ses jambes, jusqu’à ce que j’attrape le plateau d’assiettes de justesse avant qu’elle ne s’effondre à mes pieds. « Wow, ça va ? » De toute évidence, non, Tee. Ça ne va pas. Et je pose le plateau sur la table pour m’accroupir près de la jeune femme, sans trop oser la toucher - on ne sait jamais. « Vous voulez que j’appelle quelqu’un ? Que je vous prenne un verre d’eau ? Un massage cardiaque ? » Je ne suis pas médecin, et clairement pas équipée pour gérer ce genre de situations qui me stressent plus que tout. D’ailleurs, je ne sais pas où je trouverais un verre d’eau si elle m’en demandait un. Peut-être aux toilettes, tiens. Puisque la porte menant vers les toilettes de service n’est qu’à quelques mètres de nous.

L'Institut Héloise Beaumont bénéficie d'une renommée dans toute la Nouvelle-Zélande mais aussi en France le pays d'origine de la Directrice... La réputation de l'établissement n'est donc plus à faire mais il arrive fréquemment que l'administration lance des soirées à thème dans le but d'accroitre la popularité de l'école pour recruter de nouveaux élèves voir de grands chefs qui pourront par la suite animer des masters classes ou de bref cursus sur la cuisine moléculaire ou encore végétarienne.... De mon coté, je dois dire que je suis un peu loin de tout ça... Je ne suis pas la pour me faire connaître par la ''profession''. Travailler ici me permet de vivre de ma passion et de transmettre mes connaissances aux futurs grands chefs de demain..... Bien évidemment que je suis fière de travailler pour une école de ce rang mais encore une fois je ne pas à la recherche de popularité...

Tout ça pour dire que ce soir nous recevons de nombreux influenceurs et journalistes web, les réseaux sociaux font partis des meilleurs moyens de communications du 21ème siècle et la Directrice semble vouloir donner une image un peu plus moderne à son école.... Il aurait sans doute été judicieux de programmer ça à un autre moment que le week-end avant la Saint-Valentin mais malheureusement nous n'avons que très rarement notre mot à dire.....

Ouai, je crois que cette soirée ne m'emballe pas plus que ça sans doute à cause de cette fatigue que j'ai accumulé depuis toute ces semaines... Le fait de ne pas savoir quoi faire de cette petite chose qui pousse dans mon ventre m’empêche de passer des bonnes nuits et d’apprécier mes journées.... Et puis franchement qui a envie de servir des plats gastronomiques à FitBoy89, Shana-insta-so-beauty ou encore Henry_Quiritquipete.... Sans vouloir passer pour la vieille mégère du coin, je trouve que les influenceurs se font de l'argent un peu trop facilement ... Attention, je ne mets pas tout le monde dans le même paquet... Mais tout de même..

Jupe plissée, chemiser boutonnée, petit badge à mon nom, chignon parfait, je dois dire que j'adore ce petit moment qui ne dure pourtant quelques secondes, ce petit moment qui se joue en coulisse, qui ne dure que quelques secondes et qui n'appartient qu'à moi.... Tirée à 4 épingles, je ne tarde pas à récupérer un plateau pour ensuite me diriger vers la grande salle de récéption... Bien que mon métier premier soit professeure de pâtisserie, il m'arrive aussi de jouer les maitres d'hôtel... Je me diriger donc vers une demoiselle afin de prendre sa commande et de l'installer mais malheureusement pour moi plus j'avance vers elle et plus je sens mon regard se troubler, mes jambes commencent elles aussi à chanceler... « Wow, ça va ? » Je n'ai pas le temps de répondre que je tombe sur le sol « Vous voulez que j’appelle quelqu’un ? Que je vous prenne un verre d’eau ? Un massage cardiaque ? » Mes yeux se rouvrent très rapidement. ''Pas de massage ! Je suis pas à l'article de la mort...'' Je déteste quand je suis comme ça mais je crois que la peur parle à ma place. ''Mais je veux bien un verre d'eau..'' Heureusement que cet incident n'a pas eu lieu dans la grande salle. Je tente tant bien que mal de me relever mais j'ai déjà la tête qui tourne. ''Désolée de m’être comportée comme une connasse, je ne sais pas ce qui m'arrive enfin si je sais mais je pensais pas que ça arriverait maintenant...'' Elle risque clairement de me prendre pour une folle mais tant pis.

Un massage cardiaque, c’est peut-être un peu trop tôt pour ça. D’ailleurs, la jeune serveuse m’envoie bouler plutôt sèchement, et je me contente d’écarter les mains pour essayer de la calmer un peu, et si possible, faire redescendre la pression. « Okay, pas de massage. » Je me sens bête, à ne pas savoir comment réagir dans une situation pareille. Mais pour ma défense, elle ne m’aide pas trop... Ah, si. Elle accepte le verre d’eau, et cette fois j’acquiesce vivement, même si je ne sais toujours pas où je vais en trouver un. « Pas de problème ! Je vous ramène ça. » Je pourrais lui demander de l’aide, elle doit connaître ces couloirs mille fois mieux que moi, mais il faut croire que je suis un peu trop fière pour ça. Un peu perdue, je me relève en observant les alentours, jusqu’à tomber sur un plateau soutenant un pichet et quelques verres. Du jus de fruits, a priori, et je décide d’aller chercher un verre pour le ramener à la blondinette.
« Désolée de m’être comportée comme une connasse, je ne sais pas ce qui m'arrive enfin si je sais mais je pensais pas que ça arriverait maintenant... » Occupée à verser le liquide, j’écoute ses excuses d’une oreille. Puis deux, en essayant de me repasser ses propos pour mieux les comprendre. Mais rien à faire, j’ai du mal à y voir clair. « Pas de souci, ça arrive à tout le monde. » D’être une connasse ? Pas vraiment. Mais ce n’est pas non plus comme ça que je la qualifierais, si elle me demandait. « Tenez... Ce n’est pas de l’eau, mais je me suis dit que ça vous ferait des vitamines en plus. » De retour à son chevet, je lui tends son verre de jus, tout en l’observant avec inquiétude. A tout moment, j’ai l’impression qu’elle pourrait refaire une chute ; il faudrait que je me tienne prête, au cas où.
« Je m’appelle Tegan, au fait... Ou Tee, si tu préfères. » Je jette un œil furtif au pseudo sur mon badge. Ce serait compliqué de rester anonyme dans un endroit comme celui-là, de toute façon. Et puis, ce n’est pas comme si j’avais l’intention de mentir sur mon identité... n’est-ce pas ? « Et pour ce que ça vaut, je ne pense pas que tu sois une connasse. Un cas sévère de narcolepsie, à la limite, mais ça se défend encore. » Avec légèreté, je hausse les épaules, dans l’espoir de détendre un peu l’atmosphère. C’est qu’elle a l’air vraiment tendue, même si j’ai du mal à comprendre pourquoi.

Je suis consciente d'être parfois un peu trop excessive mais j'ai prévu de me soigner dans les mois à venir ! Il parait qu'être stressée n'est pas très bon lorsque l'on attend un enfant ! J'ai donc pour objectif de m'inscrire à un club de sophrologie ou de prendre rendez-vous chez un praticien pour qu'il me file des trucs à base de plantes... Parait-il que ça fait des miracles ! Nous verrons bien ce qu'il en résultera... Mais c'est vrai que pour le moment je n'ai pas vraiment trouvé la paix intérieur. « Pas de souci, ça arrive à tout le monde. » J'ai vraiment de la chance ! Elle semble ne pas tenir rigueur de mon comportement ! Comme quoi ce monde n'est pas aussi pourri qu'on pourrait le penser. . « Tenez... Ce n’est pas de l’eau, mais je me suis dit que ça vous ferait des vitamines en plus. » ''Merci beaucoup'' Tant pis pour l'eau mais je dois bien avouer que le jus de fruit est une bien meilleur idée. Cette inconnue est décidément pleine de bonnes idées en plus d'être bienveillante.  Je me redresse péniblement, je me sens un petit peu mieux tout du moins je n'ai plus la tête qui tourne même je me sens encore un peu faible... « Je m’appelle Tegan, au fait... Ou Tee, si tu préfères. » L'inconnue qui n'en est finalement plus une aurait très bien pu prendre la poudre d'escampette mais non elle semble vouloir rester à mon chevet histoire de vérifier si tout va bien pour moi. ''Minerva McGonagall....'' Référence à la sorcière d'Harry Potter histoire mettre un peu d'humour dans nos échanges et de lui montrer que mine de rien je sais quand même rigoler. ''Je m'appelle Willow... Willow Middleton.'' J'arrive finalement à me relever avant de prendre appuis auprès du comptoire. Nous sommes toujours que toutes les deux. « Et pour ce que ça vaut, je ne pense pas que tu sois une connasse. Un cas sévère de narcolepsie, à la limite, mais ça se défend encore. » Un sourire apparaît sur mon visage, je suis quand même gênée de m'être comportée ainsi.''Je suis dans une mauvaise passe en fait...'' Je sais que je ne lui dois rien mais je m'en veux encore de l'avoir plus ou moins envoyé chier alors autant qu'elle soir au courant de ce qui se passe dans ma vie et puis j'ai comme l'impression que ça va me faire du bien. ''Je viens d’apprendre que je suis enceinte.... Mais non désirée... Mon mec m'a prise pour conne dans l'espoir qu'on reste ensemble... Mais à part ça tout va bien ! Je suis mentalement équilibrée..'' Je finis par exploser de rire... Un rire nerveux bien évidemment. ''VDM''

« Minerva McGonagall.... » Je lui lance un regard curieux, juste après m’être moi-même présentée. Est-ce que c’est un trait d’humour ? Il semblerait que oui. J’apprécie l’effort, tout comme j’apprécie la référence. Il ne m’en faut pas plus pour commencer à éprouver de la sympathie pour cette inconnue. « Je m'appelle Willow... Willow Middleton. » Inconnue qui se présente, et je fronce légèrement les sourcils en entendant son nom de famille. Mais ce n’est pas le moment de l’interroger sur celui-ci, alors je me le note dans un coin de la tête - en sachant parfaitement que j’aurais oublié dans trente secondes. Pour l’instant, il s’agit surtout de me rassurer sur son état de santé, qui a l’air de s’améliorer puisqu’elle finit par se remettre sur pieds.
Elle se tient encore à la table, mais je ne suis pas spécialement attendue de toute façon, alors je peux bien me permettre de rester encore un peu. Surtout qu’à l’entendre, je commence à me dire qu’elle avait surtout besoin de quelqu’un à qui parler. Parce qu’elle est... enceinte. Wow. Le reste de son histoire semble encore plus surréaliste, et je reste sans voix face à ses révélations. « VDM » Son rire est un poil glaçant, mais avec ce qu’elle vient de me raconter, je ne m’en formalise pas. Au contraire, mon regard se perd un peu dans le vide. « Wow. Je savais que les mecs étaient des connards finis, mais on atteint un autre niveau, là. » Ce n’est peut-être pas la meilleure des réactions, à chaud ; mais il n’y a rien de tel pour réveiller ma misandrie latente. « T’es encore avec lui ? Enfin, ça me regarde pas. » Clairement, non, ça me regarde pas. D’ailleurs, elle n’a même pas besoin de répondre à ma question. Quoique si, j’espère qu’elle l’a quitté, ce parasite de première.
« Mais... ça va ? Je veux dire, t’as vu un médecin ? » Je suis loin d’être une professionnelle, mais il ne me semble pas que les chutes de tension soient des symptômes normaux dans une grossesse, désirée ou pas. Enfin la seule expérience que j’ai à ce sujet, c’est ma meilleure amie qui a mené la sienne à terme à dix-sept ans. On n’est clairement pas sur un cas très ‘normal’, là non plus. « Tiens, tu devrais peut-être t’asseoir un peu. Et n’hésite pas, s’il y a quoi que ce soit que je puisse faire, ou quelqu’un à appeler. » En parlant, je lui rapproche une chaise. Je ne sais pas de quoi elle peut avoir besoin de plus, ni de qui, surtout. Ce qui est sûr, c’est que je n’ai pas l’intention de partir tant que je n’aurais pas la certitude qu’elle va mieux ; sur le plan physique, mais aussi psychologique.

J'espère que les neufs prochains mois ne seront pas comme ça sinon je pourrai bien finir par me détester moi même.... Je suis consciente qu'au quotidien il me manque parfois une ou deux cases mais clairement cette folie douce semble s'être décuplée depuis quelques jours... Heureusement pour moi mon public ne semble pas m'en tenir compte ! Qu'elle brave petite ! Et voilà je recommence.... « Wow. Je savais que les mecs étaient des connards finis, mais on atteint un autre niveau, là. » Un sourire se dessine sur mon visage. ''A qui le dites vous ma pauvre dame ?!'' Ce n'est pas très intelligent de mettre tous les hommes dans le même sac mais je dois bien avouer que ça fait du bien.... En ce qui me concerne, je suis juste tombée sur un gros manipulateur et je ne peux m'en prendre qu'à moi même.... D'autant plus que je ne l'ai jamais vraiment aimé alors pourquoi ne suis-je pas parti plus tôt ? Tout ça ne serait jamais arrivé si ça avait été le cas... Il est de toute façon trop tard pour revenir en arrière alors autant ne pas se prendre la tête avec ce qui aurait pu ou dû être fait....

« T’es encore avec lui ? Enfin, ça me regarde pas. » C'est vrai que ça ne le regarde pas spécialement mais je n'ai rien à cacher et puis il parait que parler à une inconnue peut nous faire du bien alors pourquoi ne pas tenter l'expérience... ''Non... Bien évidemment que non.... Dès que j'ai compris qu'il avait trafiqué mes pilules, je me suis barée...'' C'est une histoire de fou qu'on ne voit généralement que dans les films et il a bien fallu que ça tombe sur moi... « Mais... ça va ? Je veux dire, t’as vu un médecin ? » C'est un peu la question qui tue ! ''Non enfin oui.. J'ai fais une téléconsultation avant hier... Je ne suis pas très motivée pour retourner à l'hôpital mais je sais que c'est une grosse connerie de ma part...'' Et oui entendre toutes ces personnes s'extasier autour de ma grossesse alors que c'est loin d'être un heureux événement ça ne me motive pas vraiment à prendre rendez-vous et je n'ai pas envie de raconter mon histoire à toute la terre entière.... Pour autant, je sais que je vais devoir y passer, je repousse juste l'échéance..« Tiens, tu devrais peut-être t’asseoir un peu. Et n’hésite pas, s’il y a quoi que ce soit que je puisse faire, ou quelqu’un à appeler. » Elle est vraiment aux petits soins, je dois avouer que c'est agréable. Jouant les bonnes élèves, je ne fais pas prier pour m'asseoir. ''J'ai un service à assurer vous savez....'' Et puis appeler ? Mes proches ne sont au courant de rien et je ne suis pas motivée pour leur en parler...Et je n'ai pas non plus envie de décevoir les gens de l'institut qui m'ont fait confiance... ''Ma sœur est hôtesse de l'air et n'est donc jamais là... Mes parents sont des cons et mon frère ne comprendrait pas... Ca va aller...''

Les hommes et moi, ça n’a jamais été une grande histoire d’amour. Et je ne parle pas que de mon orientation sexuelle qui me rend totalement insensible à leurs charmes, mais de ma relation à chacun des hommes qui a pu compter dans ma vie, jusque là. Et oui, je sais qu’il ne faut pas tous les mettre dans le même panier... Je pourrais même nommer quelques exceptions, s’il le fallait, mais il n’empêche que selon mon expérience, les faits sont là : la grande majorité des hommes sont des connards finis. Et clairement, ce n’est pas ce que me raconte cette pauvre femme qui me fera changer d’avis sur le sujet. Willow, donc.
« Non... Bien évidemment que non.... Dès que j'ai compris qu'il avait trafiqué mes pilules, je me suis barrée... » Au moins, elle a eu la présence d’esprit de le quitter, ce qui est plutôt une bonne chose. Ne pas repérer les redflags de quelqu’un en début de relation, c’est une chose ; mais souvent, les personnes qui les découvrent trop tard ont tendance à se retrouver piégées dans une relation de convenance. Un truc assez courant surtout chez les hétéros, de ce que j’ai pu remarquer, et qui demeure un vrai mystère pour moi. Un autre mystère, ce sont les gens qui ont, à l’évidence, une condition qui nécessite un suivi médical, mais décident de le prendre à la légère. « Non enfin oui.. J'ai fais une téléconsultation avant hier... Je ne suis pas très motivée pour retourner à l'hôpital mais je sais que c'est une grosse connerie de ma part... » Loin de moi l’idée de porter un quelconque jugement, hein, mais je doute qu’une téléconsultation soit suffisante, surtout en étant sujette à des chutes de tension. Mais bon, je ne suis pas médecin, pas vrai ? Et puis, elle a l’air de suffisamment s’en vouloir, je ne vais pas m’amuser à en rajouter une couche. « De toute façon, tu connais ton corps. Tant que tu l’écoutes, ça devrait bien se passer. » Est-ce que je suis sûre de moi avec cette affirmation ? Absolument pas. Mais si ça permet de rassurer un peu la jeune femme, ce sera déjà un bon début.
Pour la suite, je lui propose une chaise pour lui permettre de reprendre un peu de couleurs. Elle accepte, non sans une petite protestation. « J'ai un service à assurer vous savez.... » Ce niveau d’implication pour son boulot est louable, mais là, je ne suis pas sûre qu’elle ait vraiment le choix. « Je doute que tes patrons soient contents de voir une serveuse faire une chute de tension en milieu de salle... Mais bon, je te retiens pas, si tu veux y aller. » Après tout, c’est vrai ; personne ne la retient sur cette chaise. Mais j’ai la vague impression qu’elle ne va pas bouger de sitôt, alors je me permets de prendre une autre chaise pour moi, et me servir un vers de jus au passage - tant qu’à faire.
« Ma sœur est hôtesse de l'air et n'est donc jamais là... Mes parents sont des cons et mon frère ne comprendrait pas... Ca va aller... » De peu, je manque d’avaler de travers en écoutant ses confidences. Ses parents, okay. Son frère, admettons. Mais sa sœur... ? Son nom me revient en tête, d’un coup. Middleton. « C’est Elizabeth, ta sœur ? » Okay, sous le coup de la surprise, j’ai un peu oublié de prendre des pincettes. My bad. « Enfin... Freya ? T’es la sœur de Freya ? » Quelles étaient les chances que je tombe sur sa sœur, dans un couloir dérobé de restaurant ? J’en perds un peu mes mots, et la regarde avec des yeux ronds. D’un coup, tout le reste a un peu moins d’importance.

Depuis toute à l'heure, je suis clairement consciente de passer pour une foldingue et mon attitude et tout sauf professionnelle ! Heureusement qu'Héloise Beaumont, notre très chère directrice est occupée à faire autre sinon je ne donnerai pas chère de ma peau.... En réalité, je crois que toute cette colère et cette peur est en train d'exploser en moi si bien que je suis comme une cocote minutes qui laisse sortir le trop plein de vapeur.... L'image est ce qu'elle est mais pour quelqu'un comme moi qui aime la cuisine et bien on va dire que ça me parle plutôt bien..... « De toute façon, tu connais ton corps. Tant que tu l’écoutes, ça devrait bien se passer. » Je ne peux m’empêcher de grimacer ! Cette instagrameuse à tout a fait raison mais les médecins et moi ça fait deux ! Je ne suis pas du genre à m’arrêter pour un petit bobo de rien du tout ! Il faudrait vraiment qu'une fièvre de cheval s'empare de moi pour que je reste clouée au lit..... Sauf que mon statut de femme récemment enceinte ce n'est pas comparable et qu'il serait peut être grand temps que je vois un professionnel digne de ce nom et cette fois si en face à face et pas devant l'écran de mon mac-book ! Peut-être fallait-il seulement que l'idée se fasse un chemin dans ma petite tête.... « Je doute que tes patrons soient contents de voir une serveuse faire une chute de tension en milieu de salle... Mais bon, je te retiens pas, si tu veux y aller. » Il est peut etre préférable de limite les dégâts ! Imaginons un seul instant que je renverse la soupe d'écrevisse sur la robe de Shayna-sobeauty85 ! Internet ne s'en relèverait pas !!! ''Je vais envoyer un texto à une amie, c'est préférable...'' Sans rentrer dans les détails, je préviens l'une de mes élèves en qui j'ai une totale confiance et qui sera capable de me remplace au pied levée pour ce fameux service.

Nous décidons ensuite de faire un peu plus ample connaissance ! Posée sur cette chaise qui pour le coup s'avère très confortable, je retrouve peu à peu mon souffle et les battements de mon cœur commencent à ralentir. « C’est Elizabeth, ta sœur ? » Je fais les gros yeux ! Qui ose encore l’appeler comme ça ? « Enfin... Freya ? T’es la sœur de Freya ? » Elle est bien bonne celle là. Pour avoir utilisé le prénom qui figure sur la carte identité de ma sœur, ces deux-là doivent très bien se connaître... Comme quoi le hasard fait bien les choses... Tout du moins j'espère... ''C'est bien moi ! Mais comment est-ce que vous vous connaissez ?'' Bon en soit vu les liens que j'entretiens avec Freya, c'est un peu normal que je n'ai jamais entendu parler de cette Tegan car nous ne sommes pas spécialement proches toutes les deux... ''Tu aimes aussi t'envoyer en l'air ?? Enfin je veux dire ancienne hôtesse de l'air ? '' Je ne connais personne de l'entourage de ma grande sœur alors forcément je suis un petit peu curieuse...

Après avoir enfin retrouvé la raison, et décidé de ne pas continuer son service, il est temps de faire connaissance avec cette mystérieuse Willow. Pas que j’ai l’habitude de faire connaissance avec toutes les serveuses que je croise, mais seulement celles qui font des chutes de tension au milieu d’un couloir vide. Et le hasard fait plutôt bien les choses, puisqu’il se trouve que c’est la sœur d’Elizabeth ! Enfin, Freya. Je ne sais pas pourquoi j’ai utilisé ce prénom - ça fait bien longtemps que plus personne n’est censé l’utiliser. Mais pour ma défense, ça fait bien longtemps que je n’ai pas eu l’occasion de la croiser, cette chère Freya. « C'est bien moi ! Mais comment est-ce que vous vous connaissez ? » Très bonne question, ça, comment on se connaît. D’ailleurs, je réalise que je ne savais même pas qu’elle avait une sœur. « Tu aimes aussi t'envoyer en l'air ?? » Hein, quoi !? « Enfin je veux dire ancienne hôtesse de l'air ? » Ah... Ah oui. Habile, Bill. (ou Will, dans ce cas.) « Ah ! Euh... non, pas du tout. On s’est rencontrées au pensionnat, à Sydney. » Il y a bien longtemps, donc. Ça pourrait tout aussi bien être dans une autre vie. « Ça fait une éternité que je ne l’ai pas vue. Et je savais pas qu’elle avait une sœur ! » Remarque, ce n’est peut-être pas une très bonne nouvelle pour elle. Mais comme d’habitude, j’ai parlé avant de réfléchir. « Enfin je veux dire... Elle ne parlait pas trop de sa famille. Mais c’était assez courant. » Et pas seulement parce qu’elle était surveillante, et moi élève. Les jeunes femmes envoyées dans ce pensionnat l’étaient rarement de leurs plein gré, alors parler de ces familles qui nous avaient rejetées était souvent douloureux. Ceci étant dit, ça n’excuse pas le fait qu’elle n’en ait pas non plus parlé après. Même sur les photos qu’elle a pu partager sur les réseaux sociaux, sa famille est pratiquement inexistante. « Et donc, toi aussi t’as migré en Nouvelle-Zélande ? Ça fait du bien de croiser des congénères. Ça change un peu ! » Je suppose qu’elle est australienne, tout comme sa sœur. Même si pour le coup, je ne peux pas dire que j’ai reconnu son accent - mes sens sont peut-être moins affûtés avec le temps, qui sait. « Ça fait longtemps que t’es là ? »

Certaines rencontres sont parfois surprenantes et je crois que c'est le cas de celle d'aujourd'hui avec cette Instagrameuse qui est venue à mon secours et qui visiblement connait très bien ma grande sœur....  « Ah ! Euh... non, pas du tout. On s’est rencontrées au pensionnat, à Sydney. » Je hausse les sourcils ''Ah...''  C'est plutôt un ''ah'' qui voudrait dire « ben merde alors , désolée pour toi meuf» plutôt qu'un ''ah'' de surprise ! Oui je n'ai jamais trop compris pourquoi nos parents ont envoyé ma sœur chez les bonnes sœurs ! Franchement ça doit être horrible de vivre dans un tel établissement ! D'après ce que Freya m'a raconté, on était très loin d'un couvent dirigé par des bonnes sœurs qui se mettent à chanter du Gospel..... Je vais toutefois ne faire aucune remarque sachant que certaines personnes y vont clairement par choix et non part obligation.....« Ça fait une éternité que je ne l’ai pas vue. Et je savais pas qu’elle avait une sœur ! Enfin je veux dire... Elle ne parlait pas trop de sa famille. Mais c’était assez courant. » Je rigole légèrement ''C'est normal.... On était pas très proches toutes les deux à l'époque.... On a pas du tout grandit ensemble Freya et moi... Nos parents surement sans le vouloir ou pas d'ailleurs  nous ont un peu éloigné l'une de l'autre mais j'ai bon espoir que les choses s'arrangent un jour...''  Oui parce que mine de rien c'est ma grande sœur et que les liens du sang sont irremplaçables... En soit, il n'y a aucune brouille entre elle et moi c'est juste que nous sommes un peu comme deux étrangères...

« Et donc, toi aussi t’as migré en Nouvelle-Zélande ? Ça fait du bien de croiser des congénères. Ça change un peu ! »  La conversation semble s'installer et je dois dire que c'est fort appréciable. ''Oula oui... Les Kangourous et les bogoss australiens qui posent pour Abercrombie ont tendance à me manquer mais je suis bien mieux ici et puis bosser à l'institut Beaumont c'était un rêve de petite fille tu sais alors je n'ai pas hésité bien longtemps avant de rejoindre les rangs...''  J'ai toujours aimé bouger de toute façon mais ici je crois que je me plais bien. ''Quelques temps déjà oui... Tu sais que si tu veux revoir Freya ça peut se faire... Elle doit bientôt revenir d'un voyage.... Je peux toujours organiser un apéritif enfin sans alcool pour moi... J'y avais pas pensé mais pour ça aussi c'est la merde... Mon martini me manque déjà..'' .

La sœur de Freya. Qui aurait cru que je tomberais sur elle au détour d’un buffet à Wellington ? Certainement pas moi, et je ne sais pas trop comment le prendre. Et son « Ah... » aussi, je ne sais pas comment le prendre. Je ne sais pas ce que Freya lui a raconté, mais ça ne devait pas être joyeux. D’ailleurs, pourquoi elle n’y est pas allée, elle, au pensionnat ? « On était pas très proches toutes les deux à l'époque.... On a pas du tout grandit ensemble Freya et moi... » Ah oui, carrément. D’une certaine façon, ça me rappelle un peu ma relation - inexistante - avec ma sœur. A croire que c’est un truc d’australiens. « Ouais, je vois ce que tu veux dire... Je connais aussi. » Est-ce que j’espère que les choses s’arrangent un jour avec ma sœur ? Je n’y ai jamais vraiment réfléchi.
« Les Kangourous et les bogoss australiens qui posent pour Abercrombie ont tendance à me manquer mais je suis bien mieux ici et puis bosser à l'institut Beaumont c'était un rêve de petite fille tu sais alors je n'ai pas hésité bien longtemps avant de rejoindre les rangs... » Je souris en silence, sans trop de doute sur ce qui lui manque le plus de notre pays d’origine. Enfin, je me rends compte qu’elle est surtout ici pour réaliser un rêve de gamine, exactement comme moi. On a peut-être plus de points communs qu’il n’y paraît, finalement. « Tu m’étonnes ! Moi aussi je suis là pour l’école de mes rêves. Enfin j’ai commencé cette année, donc c’est tout frais, mais je comprends l’idée. » Pour rien au monde, je ne retournerais en arrière. D’une certaine façon, j’ai l’impression de revivre depuis que je suis ici. C’est un sentiment irremplaçable.
« Tu sais que si tu veux revoir Freya ça peut se faire... Elle doit bientôt revenir d'un voyage.... Je peux toujours organiser un apéritif enfin sans alcool pour moi... » Je reste interdite devant sa proposition. Est-ce que je veux la revoir, Freya ? Malgré les liens qu’on a gardés à travers les réseaux sociaux, ça fait une éternité qu’on ne s’est pas vues. Et en même temps, avec ce qu’il se passe avec Riley, je ne suis pas sûre que ce soit une très bonne idée que je me retrouve face à elle. « J'y avais pas pensé mais pour ça aussi c'est la merde... Mon martini me manque déjà.. » Je rigole légèrement, amusée par sa spontanéité. « J’avoue ! Je sais pas comment les gens font. Mais... Parce que tu penses le garder ? » J’ai parlé sans réfléchir, encore une fois. Et encore une fois, je m’en rends compte après coup. « Enfin, ça me regarde pas, pardon. » Avec ce qu’elle m’a raconté sur la façon dont elle est tombée enceinte, j’aurais plutôt cru qu’elle chercherait à s’en débarrasser au plus vite ; mais ça reste son choix, quoi qu’il en soit. « Pour Freya, c’est gentil de proposer ! Mais j’avoue que ça fait longtemps qu’on s’est pas vues, ce serait peut-être un peu bizarre... » Mon excuse aussi est bizarre, mais ça me laissera le temps de réfléchir à la question. « Sauf si tu cherches une excuse pour cuisiner un apéro et nous prendre en cobayes ? T’as peut-être des profs à impressionner ? » Je ne sais pas pourquoi je m’imagine qu’elle est étudiante. Peut-être parce que moi, je le suis, et qu’elle ne me paraît pas bien plus vieille ? Ça doit être ça.

Comme quoi le hasard fait bien les choses... Je n'ai jamais eu la chance de fréquenter les amis de Freya... C'est donc totalement inédit et je trouve ça plutôt rigolo... Et oui parfois il n'en faut pas beaucoup pour me faire sourire... Comme quoi je sais me contenter des choses simples... « Tu m’étonnes ! Moi aussi je suis là pour l’école de mes rêves. Enfin j’ai commencé cette année, donc c’est tout frais, mais je comprends l’idée. » Plus les secondes défilent et plus cette rencontre est surprenante mais dans le bon sens du terme je vous rassure... Nos vies sont plus ou moins similaires. ''Vraiment ?! Tu étudies dans quel domaine du coup ?'' Moi qui la pensait simple influenceuse à poster de la merde en se promenant sur les plages de Dubaï, je suis plutôt rassurée de voir qu'elle fait autre chose de sa vie et que son activité sur les réseaux sociaux n'est sans doute qu'un petit truc en plus histoire de mettre du beurre dans les épinards comme dirait ma chère grand-mère.

« J’avoue ! Je sais pas comment les gens font. Mais... Parce que tu penses le garder ? … Enfin, ça me regarde pas, pardon. » Clairement c'est la question qui tue ! Celle a laquelle je n'ai pas encore trouvé la bonne réponse. ''Si t'inquiètes.... Je ne sais pas... D'un coté je me dis que c'est stupide vu que je n'en voulais pas et que je n'ai jamais vraiment aimé le père... Mais d'un autre je ne me vois pas avoir droit de vie ou de mort sur cet enfant même si à ce stade c'est un grand mot..'' Il me reste de toute façon encore un peu de temps pour faire mon choix mais c'est vrai qu'il ne faudra pas trop tarder non plus... Je m'en veux d'être aussi hésitante mais ce n'est pas le moment de se tromper et de le regretter part la suite.

« Pour Freya, c’est gentil de proposer ! Mais j’avoue que ça fait longtemps qu’on s’est pas vues, ce serait peut-être un peu bizarre... » Mes sourcils se froncent légèrement... Pourquoi bizarre ? Peut-être qu'elles ne se sont pas quittées en bons termes... « Sauf si tu cherches une excuse pour cuisiner un apéro et nous prendre en cobayes ? T’as peut-être des profs à impressionner ? » Pour le coup, je suis obligée d'exploser de rire mais je ne lui en veux pas ! Ce ne serait pas la première fois qu'on se trompe sur ma fonction au sein de l'institut. ''De base c'est plus moi qui demande à être impressionnée si tu vois ce que je veux dire... Mais tu dois savoir que même quand on est chef et professeur on cherche toujours à se dépasser... D'ailleurs, j'aimerai bien qu'un de mes desserts soit proposé au restaurant d'application mais pour ça je dois me battre contre mes collègues'' Et oui c'est aussi ce qui me plait dans ce métier, on doit sans cesse redoubler d'effort.. C'est vraiment motivant. ''Pour l'apéro c'est comme tu le sens... Je ne veux pas te forcer la main.. Selon moi ça lui ferrait plaisir de retrouver une de ses anciennes copines mais après je n'oblige à rien... Tiens je te donne ma carte..'' Comme ça si elle change d'avis, elle pourra toujours me contacter...''Je me sens beaucoup mieux en tout cas. Merci d'être restée avec moi..''

Si je ne savais déjà pas que Freya avait une sœur, ça n’étonnera personne si je dis que je n’imaginais pas la croiser dans un lieu comme celui-ci. Un restaurant plutôt luxueux, de ce que je comprends... Enfin, quand on y pense, Freya est un peu une serveuse haut de gamme, dans des établissements d’hôtel-restauration qui volent à plusieurs kilomètres d’altitude. Presque la même chose, donc. « Vraiment ?! Tu étudies dans quel domaine du coup ? » « Je suis étudiante à la Toi Whakaari, c’est une école d’arts dramatiques et de la scène... Je suis actrice, quoi. Enfin, j’aimerais. » Il n’y a pas vraiment de règles pour déterminer qui est actrice ou non, de même que ce n’est pas un bout de papier qui détermine que quelqu’un est cuisinier ou non - enfin je suppose. La différence se situe peut-être au niveau de la toque, pour ce qui les concerne. Encore que Willow n’en porte pas ce soir. Bref, j’y connais vraiment rien à ce milieu.
Et en grossesses non plus, je n’y connais pas grand-chose. Mais je sais quand même qu’il vaut mieux vouloir d’un enfant pour décider de le mettre au monde ; ce qui ne semblait pas être son cas à première vue. Pourtant, elle a l’air d’avoir envie de le garder. Ou d’hésiter, en tout cas. « Je ne sais pas... D'un coté je me dis que c'est stupide vu que je n'en voulais pas et que je n'ai jamais vraiment aimé le père... Mais d'un autre je ne me vois pas avoir droit de vie ou de mort sur cet enfant même si à ce stade c'est un grand mot.. » C’est stupide, oui. Mais bon, je vais me retenir de lui dire ce genre de choses, ou elle serait capable de vouloir m’empoisonner la prochaine fois qu’on se croisera. « D’accord... » Je ne peux pas vraiment lui dire que je comprends, parce que ce n’est pas le cas. Tout ce que je peux faire, c’est acquiescer, bêtement, en espérant qu’elle finira par prendre la bonne décision - pour elle. Personnellement, j’ai du mal à comprendre qu’on puisse se mettre dans une telle situation pour un ‘truc’ qui n’a même pas encore de conscience. Je n’ai pas les chiffres, mais je me dis que beaucoup de bébés auraient préféré ne pas naître du tout, plutôt que de naître dans de telles conditions. Enfin... Bref.  C’est son histoire, et je suis sûre qu’elle trouvera une solution. Elle ne m’a pas l’air complètement désemparée de toute façons. Elle a... Freya ?
J’ignore quelles sont leurs relations, mais je n’ai pas spécialement envie de le découvrir non plus. Freya et moi sommes en plutôt bons termes, de ce que je sais, mais après ce que m’a raconté Riley, je ne sais pas si j’ai vraiment envie de la voir - et encore moins en présence de sa famille. Il suffirait qu’elle soit avec son fameux ‘fiancé’, ou que sais-je, et je... Non. Mieux vaut ne pas y penser. Mieux vaut ramener la conversation sur cette histoire d’apéro, quitte à faire une bourde en prenant la jeune cheffe pour une étudiante. « De base c'est plus moi qui demande à être impressionnée si tu vois ce que je veux dire... [...] » Non, je ne vois pas très bien ce qu’elle veut dire. Et je mets même quelques secondes à voir ce qu’elle veut dire, si bien que quand j’ai compris, je laisse simplement échapper un ‘Oh’, tout bas, en ignorant le reste de sa phrase. Qu’est-ce que je me sens con, là.
« Pour l'apéro c'est comme tu le sens... Je ne veux pas te forcer la main.. Selon moi ça lui ferrait plaisir de retrouver une de ses anciennes copines mais après je n'oblige à rien... Tiens je te donne ma carte.. » J’attrape le morceau de papier entre deux doigts, en prenant le temps d’en lire les inscriptions. « C’est adorable, merci ! Au pire, j’aurais le numéro d’un bon traiteur. » Je préfère plaisanter sur le sujet, tout en ne promettant toujours pas de l’utiliser. D’ailleurs, pour une fois que je récupère le numéro d’une nana avec qui il n’y a aucune ambiguïté, c’est assez important pour être célébré. Quoique, pour la question de l’ambiguïté, j’imagine qu’on aura l’occasion d’en reparler quand elle ne sera plus enceinte... -- Je déconne ! De toute façon, je suis pas sûre que Riley le prenne bien s’il se passait quoi que ce soit entre moi et la soeur de Freya. Enfin bref... je m’égare.
« Je me sens beaucoup mieux en tout cas. Merci d'être restée avec moi.. » On se lève toutes les deux de nos chaises, et j’avais presque oublié qu’on était dans un couloir et que la véritable fête avait lieu de l’autre côté de cette porte. « Pas de souci ! En vérité, c’était même plus agréable que le reste de la soirée... Enfin, heureusement que les petits fours sont délicieux. » Je me permets de la complimenter, parce que si j’ai compris, elle y a participé. « Je vais y retourner, du coup... Quoique, je risque surtout de filer à l’anglaise dès que j’aurais trouvé la sortie. Tu ne m’en voudras pas, hein ? » Encore un sourire, tout en vidant le contenu de mon verre. « A la prochaine ! Et prends soin de toi. » Mon regard glisse vaguement sur son ventre, puis je me retourne pour de bon, en direction du reste de la soirée. Cette ambiance est vraiment pesante, et - c’est assez rare pour le souligner - je ne me sens pas très à l’aise au milieu de tous ces gens. Alors je finis par me faufiler - par la bonne porte, cette fois - pour m’échapper et retourner à l’air libre. Direction : mon bar préféré.