smooth criminal ⚝ thea (team brindleton bay)

Il y a vraiment des jours où je déteste être aussi tête en l’air. La plupart du temps, j’arrive à m’en sortir malgré tout, mais cette fois, je me suis vraiment mise dans la merde. Enfin, la ‘merde’, c’est relatif, mais disons qu’en tant que bonne artiste qui se respecte, j’ai quelques superstitions qui peuvent sembler complètement débiles. Par exemple, je porte toujours le bracelet de ma grand-mère quand je passe une audition. Ça vaut aussi pour les examens, ou les entretiens quelconques, mais c’est particulièrement vrai pour les auditions. Et c’est précisément ce qui va m’arriver aujourd’hui, une audition. Alors certes, ce n’est pas grand-chose ; il s’agit juste du spectacle de mi-saison de l’école, et ce n’est probablement pas ce qui va m’assurer une carrière. Mais par acquis de conscience, et surtout pour m’éviter du stress supplémentaire, j’aimerais avoir mon bracelet porte-bonheur avec moi. Seulement voilà, comme vous l’aurez deviné, je ne l’ai pas retrouvé. Comme une furie, j’ai retourné toutes les affaires de ma chambre avant de me rappeler que je l’avais laissé chez Riley. Plus exactement, je lui ai donné pour qu’elle le range dans un endroit sûr, où je ne risquerais pas de le perdre. Sauf que je ne me souviens plus d’où elle l’a mis, et qu’elle ne répond pas au téléphone. Alors, paniquée, je suis passée au plan B.
Le plan B, c’est de m’introduire dans l’appartement, même si personne n’est censé être là à cette heure de la journée. Riley est censée être au musée, Levi à la salle de sport, et les autres en vadrouille on ne sait où. Si tout va bien, personne ne devrait se rendre compte de mon passage. Alors qu’est-ce que j’ai à perdre ? Pour avoir vécu ici, je sais qu’ils gardent une clé de secours dans le pot de fleurs, juste en face de la porte. Alors je n’ai plus qu’à entrer, faisant le moins de bruit possible - ce qui est con, puisqu’il n’y a personne -, pour traverser le salon et me glisser directement dans la chambre de ma meilleure amie. Et maintenant, je n’ai plus qu’à chercher.
Je passe quelques minutes à parcourir les tiroirs, et les différents emplacements où elle pourrait avoir rangé mon précieux. Et avec minutie, j’essaie de tout remettre à sa place pour éviter qu’elle ne pète un câble - contrairement à moi, elle a des tendances un peu maniaques, Riles. Mais ce que je ne remarque pas, c’est la boule de billard qui se met à rouler sur son étagère, avant de venir atterrir sur le sol, avec un ‘boum’ bien sonore. « Merde ! » Avec une grimace, je suis la boule des yeux, alors qu’elle poursuit sa route pour aller se loger sous le lit. C’est bien ma veine, tiens ! Avec un soupir, je me mets à quatre pattes pour essayer de récupérer la petite farceuse, dans l’espoir de pouvoir la remettre à sa place, bien sagement sur l’étagère.

En théorie, je ne suis pas encore en retard. Mais plus les minutes défilent, et plus je sens mon pouls accélérer, tout comme le stress qui commence à être de plus en plus pesant. C’est sûrement pour ça que je deviens plus maladroite, ou moins attentive, et que je laisse la boule de billard s’échapper. J’avoue, pendant une seconde, j’ai hésité à la laisser à son sort, sous le lit. Mais ce serait un coup à ce que Riley panique en voyant quelque chose qui n’est plus à sa place, dans sa chambre, et ce n’est certainement pas ce qu’on veut. Pas vrai ? Je m’attelle donc à la récupérer, cette boule, en tendant le bras sous le lit - évidemment, j’ai le bras trop petit, sinon ce n’est pas drôle.
Concentrée sur mon problème, je n’entends ni la porte d’entrée s’ouvrir, ni les pas qui se rapprochent de la chambre. Et quand la porte s’ouvre violemment, je sursaute en me cognant la tête contre la barre du lit. « Aïe ! Wow ! » Cet enchaînement d’onomatopées sauvages n’est pas un exercice d’impro bizarre. C’est ma réaction, en découvrant un manche à balai brandi dans ma direction. Par réflexe, je lève les mains au-dessus de ma tête, en guise de protection. « Sortez avant que…  » Avant que quoi... ? Ah, mais c’est la nouvelle coloc ! Thea, je crois. « Tegan ? Seigneur, j’ai cru qu’un voleur s’était introduit. » Avec un rire amer, je baisse enfin les bras, tout en allant me masser l’arrière de la tête, à l’endroit du choc. « Non non, c’est juste moi... Fais gaffe avec ça, tu pourrais blesser quelqu’un. » C’était précisément le but, non ? A moins que son objectif soit juste de menacer l’intrus. « Tu cherches quelque chose ? J’peux t’aider ? » A genoux à côté du lit, je m’apprête à lui expliquer l’histoire de la boule, avant de réaliser que l’objet qu’elle a dans les mains pourrait m’être utile. « Carrément ! Tu veux bien partager ton jouet ? » La main tendue vers le manche à balai, j’attends qu’elle me le donne, puis je m’en sers pour faire rouler la boule jusqu’à moi. Et une fois qu’elle est à portée, je l’attrape, et je la brandis sous le nez de Thea, comme un trophée. « Haha ! Je la tiens ! » Elle doit me prendre pour une folle. Ou si ce n’est pas encore le cas, ça ne devrait pas tarder. « Dire que c’est elle qui m’a trahie... Je m’en sortais bien dans mon opération commando, sinon. » Avec une petite moue, j’observe la boule noire. Et je la tourne dans tous les sens, comme si qu’elle pouvait me délivrer un message magique, si je la regarde suffisamment longtemps.

« Et bien, c'était le but. Imagine si j'avais frappé sans regarder... » C’est mignon de sa part de penser qu’elle pourrait me blesser. Enfin, c’est peut-être un excès de confiance qui me fait dire ce genre de choses, remarque. Je ne connais pas Thea plus que ça, peut-être qu’elle connaît des techniques de manipulation de bokken que je ne soupçonne pas, ou d’autres pratique d’aïkido qui pourraient me mettre à terre en une fraction de seconde... Mais bon, vu comme elle le tient, le balai, je ne parierais pas forcément dessus. Finalement, je finis par le récupérer, ce fameux balai, pour aller repêcher ma boule de billard, toujours sous le lit. « Tu essaies d'y lire ton avenir ? » Le regard perplexe, je quitte enfin la boule des yeux pour aller rencontrer ceux de l’autre brune. « C’est pas dans les boules noires qu’on lit l’avenir, normalement... Si ? » C’est plutôt les boules de cristal, en général. Quoique, il existe également les boules magiques, noires, qui peuvent répondre à des questions simples si on les secoue suffisamment fort. Mais là, il ne s’agit de ni l’un ni l’autre, juste d’une boule de billard toute simple. Et c’est la jeune femme qui finit par ramener mon attention sur... non, pas la boule, du coup, mais la raison initiale de ma venue. Le bracelet, donc ! « Tu trouves que c’est bizarre ? Si ça se trouve, j’ai une crise existentielle, et il n’y a que cette boule qui peut m’aider, t’en sais rien... » Non, vraiment Tee, il faut arrêter de raconter des conneries à longueur de journée. « Mais non, c’est pas pour ça. Par contre, je cherche un bracelet. Et lui, il est vraiment important ! J’ai une audition aujourd’hui, je peux pas y aller sans. » En lui expliquant la raison de ma venue, je me remets sur pieds, et je reprends mes recherches, toujours en essayant de déplacer le moins d’objets possibles. Mais tout ça ne m’empêche pas de faire preuve de compassion, surtout pour cette jeune femme qui ne me connaît pas encore très bien. « Désolée de t’avoir fait peur, c’était vraiment pas le but. Je pensais que personne ne serait à la maison à cette heure-là. »