I don't want to miss a thing [Anna & Brendon]

Palerme (Italie) – Jeudi 28 septembre 2017 – Jour 7.

Douze heures neuf. Je suis navrée d’apprendre que son couple d’amis n’est pas encore sur la bonne voie. Pire. Qu’ils s’ignorent. Ce n’est absolument pas la meilleure marche à suivre pour qu’ils résolvent leurs problèmes. Toutefois, je ne me vois pas élever le débat avec mon compagnon. Et pour cause. Il n’y a pas si longtemps, nous même nous étions dans ce cas de figure. Par conséquent, il serait malvenu dans la conversation qu’on s’inquiète de l’état d’un autre couple, alors que nous arrivons chaque jour à sauver d’avantage le notre. Que dis-je ? Nous y sommes parvenus, même. Désormais, nous savons tout les deux que nous nous aimons, que nous voulons faire notre vie ensemble, et que la communication est réellement ce qui nous aidera à autant conserver nos sentiments intacts qu’à réaliser ce souhait commun. Il y a aussi l’enfant que j’attends qui va faire des merveilles mais, pour le moment, je suis la seule à avoir connaissance de ce détail. C’est tellement frustrant, vous n’imaginez pas. J’ai tant de bonheur en moi à savoir que je porte le fruit de notre amour, que j’aimerais le partager avec l’homme de ma vie. Or, je n’en fais rien. Par choix. J’estime qu’il mérite de l’apprendre dans de meilleurs conditions qu’actuellement et, c’est dans cette optique que je prépare déjà tout mentalement. Je veux que ce moment soit parfait. Je ne laisserais rien au hasard. J’ai une bonne semaine pour y parvenir, ainsi qu’obtenir l’aide bienvenue de Lexie. Pourquoi pas Casey ? Parce que nous ne nous sommes plus parlés depuis mon dernier sms, et que la meilleure amie du futur papa est une personne de choix. Elle va autant pouvoir m’aider à le distraire pour qu’il ne rentre pas trop tôt, que pouvoir m’aider à faire le trajet entre l’aéroport et notre maison sans lui. J’ai tellement hâte. Cette impatience transperce dans ma voix, par le biais de l’euphorie, alors que je parle pourtant de l’état de santé de Silvia. C’est également une grande nouvelle qu’elle regagne sa maison, en pleine santé. Seulement, ça ne l’est pas non plus pour justifiée cette effervescence de ma part. Je crains que Brendon finisse par ce poser des questions, même si lui-même estime que la guérison de ma tante est quelque chose de formidable. « Cela devrait être l’affaire de quelques jours. » Je mentionne, souriante, alors que je sais déjà très exactement quand je vais repartir. Pourquoi je ne lui dis rien là-dessus ? Parce que je tiens à lui faire cette surprise. « Bien sûr que je suis d’accord, mon amour. » Ce voyage d’un mois qu’il propose tomberait pile un mois après mon accouchement, si tout ce passe bien. Il ne devrait donc y avoir aucun inconvénient à faire le déplacement, je pense. D’ailleurs, cela permettrait à tante Silvia de rencontrer le bébé par la même occasion. J’ai tellement hâte, encore une fois. Je trépignerais presque sur place si je ne redoutais pas d’éveiller de l’inquiétude sur mon état à mon homme. Euh… Oubliez ce que je viens de dire. Mon immense joie vient déjà de me griller et, comme nous la si bien appris le docteur Cooper, Brendon n’hésite pas à me faire part de la peur que je provoque chez lui en étant aussi exalté. C’est vrai que d’un certain côté, c’est assez flippant ce trop plein de bonheur que je n’arrive pas à contenir. Il me faut donc le rassurer sans en venir à lui dire la véritable raison. Je rie quelque peu, pour chasser son malaise, avant de lui répondre d’une voix charmante. « Oui mon cœur, tout va très bien. Je suis juste très contente que ma tante sorte de l’hôpital cette après-midi, tout simplement, et qu’on puisse se retrouver très prochainement. » Ce qui est vrai, aussi. Ma joie n’est pas exclusivement due au fœtus qui va grandir sous mon abdomen. Soudainement, le téléphone sonne. « Ah, excuse-moi mon ange, je vais voir rapidement qui m’appelle. » Je me lève immédiatement pour aller chercher le téléphone fixe. Je reconnais le numéro de l’hôpital. Le temps d’un instant, je crains qu’il y ait eu un problème entre ma dernière visite et l’instant présent. Heureusement, ce n’est pas le cas, comme en témoigne la voix pleine de vie de ma tante à l’autre bout du fil. Nous nous exprimons en italien. Impossible pour mon homme de comprendre ce qui se raconte. Je raccroche au bout de cinq minutes. Je reprends place face à la caméra pour lui annoncer, toujours pétillante de bonheur. « C’était tante Silvia. Elle veut que j’aille la chercher tout de suite pour pouvoir mangée de la vraie nourriture chez elle. » Je rie un peu. « Je vais être obligée de te laisser mais demain, je te le promets, je consacre toute mon heure du midi à discuter avec toi. Tu me manques tellement. Ti amo il mio angelo. » Je lui envoie plein de bisous avant de couper la communication. J’ai tellement hâte d’être de nouveau auprès de lui, seigneur.

Island Bay (NZ) – Jeudi le 28 septembre 2017 – Jour 7

Vingt-trois heures neuf. Encore quelques jours. Combien précisément ? Je n’ose pas lui demander. Elle m’avait mentionné une semaine hier mais c’est peut-être moins désormais si Silvia s’est remise aussi bien. Je pense que le mieux serait de ne pas savoir pour ne pas grandir une anxiété par rapport à son retour. Je suis excellent dans les scénarios catastrophes. Donc de simplement commencer à m’imaginer que son avion crash dans l’océan. Très bonne idée pour ne pas dormir durant des jours. Je préfère vraiment ne pas savoir, du coup. Mais en même temps, je veux savoir… j’en ai marre d’attendre. Quelle galère je peux être parfois ! Elle va arriver quand elle va arriver. Point. Pour me distraire, je lui parle de mon idée de voyage l’année prochaine. Elle approuve aussitôt et je suis heureux de l’entendre. Ce qui me préoccupe en cet instant c’est son euphorie presque qu’exagérée qui m’intimide grandement. On dirait qu’elle va m’annoncer qu’elle a trouvé le remède contre le cancer. Je me sens presque écrasé par sa joie, que je n’arrive absolument pas à égaler même si la voir me rend des plus heureux. Elle est vraiment à un autre niveau. Seule au sommet et moi à la regarder d’en bas. Qu’est-ce qui lui arrive de si heureux à la fin ? Elle rit et je l’observe en haussant un sourcil. Elle m’affirme que c’est le fait que sa tante soit libérée de l’hôpital et nos retrouvailles prochaines qui la poussent dans cette intensité joyeuse. Hum, d’accord. C’est la première fois que je la vois ainsi en deux ans, mais je ne vais pas la questionner davantage. J’ai malgré tout le sentiment qu’elle me cache quelque chose. Quelle idée stupide, nous avons promis de ne plus faire ce genre de chose. Alors, pourquoi j’ai ce pressentiment que les raisons évoquées pour se justifier ne sont pas les bonnes ? Si seulement j’avais la réponse à cette question. D’un coup, le téléphone sonne. Pas de mon côté, même si je vérifie instinctivement, mais bien du sien. Elle s’excuse et va voir qui appelle. Elle n’est pas chez elle, je ne sais pas si s’est justifié de répondre. Je n’ai jamais non plus remarqué si Silvia avait une boîte vocale. Peut-être que c’est sa tante qui a demandé à Anna de filtrer les appels pour elle, le temps de son retour. Je fixe le décor à travers la caméra de l’italienne. J’attends en posant ma mâchoire dans ma paume gauche. La conversation est en langue locale et du coup je ne comprends pas grand-chose. À peine cinq minutes plus tard, Anna revient d’un coup devant la caméra. Je lui souris. Un appel sans importance probablement. Je suis vraiment déçu qu’elle doive couper court à la conversation mais je comprends que Silvia soit impatiente de retrouver son domicile après autant de temps au loin. Je ne discute donc pas. Je me contente de reculer la tête de l’ordinateur et de me remettre un peu droit. « D’accord, pas de problème. À demain ! Tu me manques terriblement toi aussi. Je t’aime ! » Et elle coupe l’appel. Je fixe l’écran une bonne minute avant de soupirer et de me laisser retomber sur le dos dans le lit. Neuf minutes, je n’ai eu droit qu’à neuf misérables minutes. C’est trop peu. Je grogne en portant mes deux mains à mon visage pour frictionner mes yeux fatigués. Je vais devoir noter ce sentiment dans le calepin maintenant. Au moins, demain nous aurons une heure complète. J’ai déjà hâte d’y être.

FIN