Unexpected surprise ft. Kenzo Lane

Je contemple mon plafond depuis plus d'une heure, à la recherche du sommeil qui malheureusement ne viendra pas. De toute façon il ne vient pas depuis longtemps. Je n'ai aucune idée de ce que je vais faire de ma journée, probablement rien d'intéressant. Je ne travaille pas aujourd'hui à mon grand désespoir. Au moins quand je suis au travail je ne pense qu'à ça, mes pensées focalisées sur une seule chose. Combien de fois j'étais restée immobile, le téléphone en main incapable de composer le numéro de mon père. De Kenzo. Chaque jour, je repoussais l'échéance, chose que je compte encore faire aujourd'hui. Je déjeune en lisant, avant de prendre ma douche et de m'habiller. J'avais décidé de sortir. Pour faire quoi, je n'en sais rien. J'irais sûrement me poser à la terrasse d'un café, en feuilletant le journal sans grand intérêt avant de me plonger dans un livre que j'aurais fini ce soir. C'est déjà mieux que rien. Je prends mon vieux sac à dos en cuir qui me sert de sac à main et je ferme la porte de mon appartement. Le centre-ville c'est la première chose qui me vient à l'esprit. Je m'enfile donc dans le premier bus qui passe. Le trajet est un peu long mais ça ne me dérange pas. J'observe les gens. C'est un truc que j'ai toujours aimé faire. Ça peut sembler bizarre mais ça ne m'empêche pas de le faire. En face de moi se trouve une vieille dame. Elle regarde le sol silencieusement. Ça faisait quelques instants que je la fixais quand cette dernière leva la tête. Nos regards se croisent quelques secondes, je lui souris, puis chacune reprend sa contemplation du sol de l'autobus. À moitié éveillée, c'est la voix robotisée, qui annonce les arrêts, qui me sort de mes pensées. Heureusement pour moi un peu plus et je loupais ma station. Peu de monde aujourd'hui en centre-ville, assez rare comme occasion mais très  plaisante. Je marche de rue en rue sans trop savoir où je vais de toute façon j'ai que ça à faire. Mon regard passe de visage en visage de passants en passant. Je me trouvais maintenant dans une large rue bordée de deux grands trottoirs. Une rue commerçante apparemment. Je gardais mon regard haut, toujours à regarder les gens qui marchaient quand j'aperçu ce visage. Ce visage que je connais beaucoup trop. Je ne m'y attendais pas, chose qui doit être retranscrite parfaitement sur mon visage. Il marche dans ma direction mais ne semble pas m'avoir vu. Je suis plantée au milieu de la rue, je ne sais pas quoi faire. Je ne le quitte pas des yeux. Il n'a pas du tout changé. Une dizaine de mètres  nous sépare maintenant. "Kenzo?" Comme si je refusais d'y croire. Que ce n'était pas lui, que je me suis trompée sur la personne. Mais non c'est bien lui Kenzo Lane, devant moi. Et là des milliers de questions fusent dans la tête. Est-ce qu'il va vouloir me parler? M'a-il oublié? Et s'il ne voulait plus de moi dans sa vie de quelque façon que ce soit ? Est-ce qu'il pourra me pardonner? J'avais tellement repoussé cette conversation que maintenant elle s'imposait brutalement. Je ne crois pas au destin et autres conneries mais je dois avouer qu'aujourd'hui on dirait bien qu'il y est pour quelque chose.

Comme à chaque fois que j'allais en ville seul, je prenais le premier bus qui venait et allait au centre. Cela me permettait de réfléchir, d'observer les gens, de sourire aux enfants qui me faisaient des grimaces. Je ne regrettais pas de ne pas avoir le permis, pour la simple raison que je n'aimais pas les trajets en voiture. Des trajets à mon sens froids, impersonnels et dépourvus de tout intérêt. Il y avait tellement plus de choses à décrypter et observer dans les transports en commun! Ma mère et ma soeur ne partageait pas du tout cet avis, mais qu'importe, j'étais bien ainsi, personne ne me ferait changer d'avis. Le bus arriva doucement au centre-ville et je descendis une fois ma station atteinte. L'effervescence des beaux jours étaient au rendez-vous, même si une grande partie de la population préférait le bord de mer et ses plages magnifiques. Pour ma part, je devais passer à ma librairie préférée pour y récupérer mes derniers coups de coeur en matière de littérature jeunesse. Ainsi, je pourrais en faire profiter mes futurs élèves et leur apprendre un tas de choses à travers des mots et surtout des images splendides. Le coeur vaillant, je marchais dans la rue, bien trop dans la lune pour remarquer quoi que ce soit. Ou alors je préférais observer les vitrines des magasins, surtout quand il s'agissait des derniers jouets hi-tech pour adultes ou des jeux vidéos dernièrement sortis. Alors que j'étais à mi parcours de la libairie, une voix m'arrêta net dans la foule. "Kenzo?" Cette voix... C'était impossible. Je relevais la tête et à un mètre de moi, je la vis. Elle était là. Elle était vraiment là. Vickie... Je restais interdit, incapable de faire le moindre geste, incapable de prononcer ne serait-ce qu'un seul mot. Je me sentis vraiment, vraiment stupide. Bouche-bée, je n'arrivais pas y croire. C'était une blague? Je me retournais, fermant les yeux, avant de lui faire face à nouveau. Elle était toujours là, apparemment aussi surprise que moi. "Vickie... Tu... C'est vraiment toi?" Question stupide. Ma voix me semblait déformée, comme dans une mauvaise série B et je peinais à trouver les mots pour lui parler. Trop de sentiments contradictoires d'un seul coup. La peur, la joie, la rancoeur se mêlaient au profond sentiment d'affection que je ressentais pour elle. Et je ne pus m'en empêchais. Franchissant le mètre qui nous séparait, je la prenais dans mes bras, m'accrochant à elle comme à une bouée de sauvetage. "Tu m'as tellement manqué... Pourquoi tu es parti... Pourquoi...?" Ma voix se cassa sous le coup de l'émotion. Pour une fois, je me fichais bien de ce que pouvaient dire les passants. Seule comptait Vickie. Elle était revenue. Bien entendu, c'était un sacré choc pour moi et je me rendais compte d'à quel point elle avait compté et compterait toujours pour moi. Alors tandis que je la relâchais doucement, je plantais mes yeux bleus dans les siens. "Pourquoi tu m'as abandonné?" Parce que c'est ainsi que je l'ai ressenti. Parce qu'elle n'avait pas le droit... Et pourtant, je devais comprendre, je devais savoir pourquoi, pour qu'on se fasse confiance à nouveau...

Etre si loin de lui pendant cinq ans, ne plus le voir. J'avait presque oublié à quel point je tenais à lui. Le revoir devant moi, je m'étais pris une claque. Un retour à la réalité brutale et sans appel. "Vickie... Tu... C'est vraiment toi?" Cette voix, ce visage. C'est bien lui. On était perdu autant lui que moi. J'avais imaginé de mille façons ce moment. Mais jamais nous nous retrouvions par hasard en pleine rue. Je pensais que quand je le reverrai je tiendrai le coup, que mes émotions se tiendraient à carreau. C'est beau de rêver. Je ne savais pas quoi dire, pas quoi faire. J'acquieces doucement, portant ma main sur ma bouche pour réprimer un sanglot. Je ne bouge pas, c'est lui qui vient vers moi. Me prenant dans ses bras, je ne veux plus le lâcher. J'attendais à plus de recul de sa part, qu'il soit plus distant. Mais je sais qu'il va bien falloir tout lui expliquer. Je l'avais abandonné, laissé en plan. Je voulais lui dire à quel point je me sentais coupable, que je regrette énormément. Qu'il m'avait manqué. "Tu m'as tellement manqué... Pourquoi tu es parti... Pourquoi...?" Relâchant son étreinte, j'essayais de remettre mes pensées en ordre. J'essuis rapidement les quelques larmes que je n'ai su retenir. Son regard, comment l'oublier. Nos regard plonger l'un dans l'autre. "Moi aussi." dis-je doucement. La fille assurée et sûr d'elle que j'étais avait fait sa malle. Me laissant incapable d'aligner trois mots. "Pourquoi tu m'as abandonné?" Je l'avais laissé sans un mot. Si ça m'était arrivé je ne sais même pas comment j'aurais réagi. Je ne veux même pas le savoir. Plus jamais je ne serais aussi stupide. "Je... Enfin c'est assez long. Tu as quelques minutes?" Jusqu'à maintenant j'avais fait abstraction du monde extérieur oubliant que nous étions en pleine rue au milieu de la foule. Je désigne d'un signe de la tête un café de l'autre côté de la rue. Je reste silencieuse le temps qu'on rentre dans le café. La serveuse du café nous propose immédiatement une table. Je pose mon sac à dos par terre. Nous voilà assit face à face. " Il y a cinq avant que je déménage, j'ai... j'ai appris que ma mère n'étais pas morte." Je m'efforce de le regarder dans les yeux, d'assumer mes erreurs jusqu'au bout. Je fais une pause il t'a tellement de chose à dire. Au moins c'était clair. Ressasser toute cette histoire faisait remonter cette colère, contre mon père, ma mère. Mais je me reprends, pas avec lui. Je ne peux pas lui faire subir me sauts d'humeurs. Je l'ai déjà assez blessé. "C'est pour ça que je suis partie Kenzo. J'étais en colère. À cause mon père. Il ne m'avait rien dit avant. J'ai été stupide. Ma seule réaction ça a été de partir, de t'abandonner. Je suis désolé si tu savais comme je m'en veux." Mes doigts se renferme sur sa main posée sur la table, pensive.

Rien au monde n'aurait pu me faire croire que j'allais la revoir un jour... Hormis mon formidable optimisme, et encore il s'était attenué avec le temps. Alors la voir là, devant moi, relevait autant du miracle que d'une incroybable coincidence. Et forcément, je n'en revenais toujours pas. La prendre dans mes bras fut la seule chose qui me sembla sensé de faire, j'étais de toute manière incapable d'aligner trois mots. Ou plutôt, je ne savais pas quoi lui dire... Parce que je voulais comprendre ce qui s'était passé pour qu'elle m'abandonne ainsi et me laisse à mes doutes, à mon désespoir. Mon tempérament sensible ne m'avait pas aidé à encaisser le coup, et seule ma famille et mes amis m'avaient permis de garder la tête hors de l'eau. Pendant longtemps, j'avais été persuadé d'être la cause de cet abandon, d'avoir fait quelque chose qui ne lui avait pas plu. Puis, à force de paroles douces et réconfortantes, ma mère et ma soeur m'avaient enfin convaincu que je n'avais rien à faire dans l'histoire. Que la vie était parfois injuste et qu'il ne fallait pas trouver de responsables. La sentir tout contre moi me réchauffait le coeur et je ne pouvais pas nier que mon coeur résonnait d'un rythme nouveau et enthousiaste. Lorsqu'enfin nos corps se séparèrent, nos regards se croisèrent à nouveau. Comme elle m'avait manqué! Et ses yeux humides tendaient à me faire croire qu'elle ressentait la même chose pour moi. "Je... Enfin c'est assez long. Tu as quelques minutes?" J'hochais doucement la tête, avant de la suivre, ne la quittant pas une minute du regard. Je ne voulais pas qu'elle disparaisse une nouvelle fois. Une fois dans un café de l'autre côté de la rue, je m'asseyais en face d'elle, un regard plein d'espoir. Elle était toujours aussi charmante, pas de doutes. Elle semblait juste plus triste, plus distante peut-être. " Il y a cinq avant que je déménage, j'ai... j'ai appris que ma mère n'étais pas morte." Je lui tendis un sourire compatissant. Alors voilà pourquoi sa vie avait pris un tournant à ce moment-là... Cela devait être extrêmement perturbant d'apprendre que l'un de ses parents n'était pas décédé comme on lui avait toujours dit. Pour ma part, je savais que mon père était vivant, quelque part, ma mère ne nous l'avait jamais caché. J'ignorais juste complètement qui il était. En bon empathe que j'étais, je pouvais sentir qu'elle était encore chamboulée par cette nouvelle. "C'est pour ça que je suis partie Kenzo. J'étais en colère. À cause mon père. Il ne m'avait rien dit avant. J'ai été stupide. Ma seule réaction ça a été de partir, de t'abandonner. Je suis désolé si tu savais comme je m'en veux." Ma main, qui était négligemment posée sur la table, rencontra alors ses doigts et ce contact mit du baume au coeur. A mon tour, je serrais sa main dans la mienne. "Je... C'est vrai, j'ai cru que mon monde s'effondrait lorsque tu es partie. J'ai même pensé pendant longtemps que c'était ma faute, que j'avais fait quelque chose de mal... Mais en réalité, je n'ai jamais été en colère contre toi. J'étais juste... inquiet pour toi. Parce qu'un peu naïvement, je me suis demandé si tu trouverai quelqu'un pour veiller sur toi, où que tu sois allée." Mû par mon affection certaine pour elle, je passais une main doucement sur sa joue avant de reprendre sa main dans la mienne. Le café était calme, peu de clients étaient présents, comme si tout le monde s'affairait au dehors. Pourtant mon attention toute entière était fixée sur Vickie. Ma jolie Vickie. Noa m'avait toujours trouvé très niais lorsque j'étais amoureux, et c'était tout à fait vrai. Un parfait idiot de romantique, beaucoup trop sensible pour son propre bien. "Et... tu étais où? Tu es partie retrouver ta mère?" Dans mon esprit, j'avais occulté le fait qu'elle ait pu refaire sa vie ailleurs, qu'elle ait pu rencontré quelqu'un. Après tout, qui étais-je pour penser avoir un droit sur son coeur?

Je n'avais pas eu le courage d'aller le voir. C'était lâche de l'avoir abandonné comme ça. Chaque jour je me disais "Mais qu'est ce que tu as fait?". Cinq ans pour se rendre compte de sa propre connerie. C'est long, beaucoup trop. Mais une fois partie je ne voulais plus revenir en arrière. On m'aurait dit il y a un an que je reviendrai à Island Bay je n'y aurai pas cru. Je n'avais pas envisagé de me réinstaller ici. Cinq années que je veux oublier, effacer de ma mémoire, me dire que tout ça n'était qu'un mauvais rêve. Ça prendra du temps, j'en suis consciente. Mais je n'étais pas la seule qui avaitsouffert. Mon père je n'ai pas eu de nouvelles de lui depuis que je suis partie. Kenzo encore moins. Mon frère me téléphonait souvent mais on parlait d'autres choses, je ne voulais rien savoir de mon père. Il avait tenté de me raisonner, en vain. Je suis têtue, ce qui pendant ces années s'est avéré être mon plus gros défaut.
Il me prend dans ses bras et c'est là que tout devient réel. C'est bien lui. Le chemin, pourtant court en distance, semble durer une éternité. Je n'ose rien dire tant que je ne suis pas assise. J'ai peur de ne pas tenir le coup. Je me sent tout à coup fragile, sans défence, perdue. Enfin assise dans un café dont j'ignore le nom, je me sens enfin en état de tout lui raconter. Ma mère, finalement bien vivante je ne sais où avait foutu ma vie en l'air. Ça me fait mal de tout lui raconter, de ressasser tout ça mais je continue de lui expliquer. Je lui dois bien ça. Depuis que mon père m'avait annoncé tout ça, j'avais réfléchi. J'avais fait le tri dans mes pensées. La personne contre qui j'étais et je suis toujours en colère c'est ma mère. Mon père comme il me l'avait répété ce fameux jour: il avait fait ça pour notre bien. Pour que mon frère et moi n'ayons pas l'image d'une mère qui abandonne ses enfants. Une discussion avec lui n'allait sûrement pas tarder mais pour l'instant j'étais avec Kenzo. Et seul lui compte à ce moment là. Mes doigts se referment sur sa main et mes yeux ne quittent plus les siens. "Je... C'est vrai, j'ai cru que mon monde s'effondrait lorsque tu es partie. J'ai même pensé pendant longtemps que c'était ma faute, que j'avais fait quelque chose de mal... Mais en réalité, je n'ai jamais été en colère contre toi. J'étais juste... inquiet pour toi. Parce qu'un peu naïvement, je me suis demandé si tu trouverai quelqu'un pour veiller sur toi, où que tu sois allée. Sa main sur ma joue, je me peut pas m'empecher de refermer la mienne par dessus la sienne. Un instant plus tard, toutes les deux reprennent leur place sur la table toujours entralacées l'une à l'autre. " Sa faute? J'étais la seule et unique fautive dans cette histoire. La fille impulsive qui avait pris de mauvaises décisions: c'était moi. "J'étais tellement en colère que je n'ai pensé qu'à moi, et je t'ai laissé. Abandonné, sans un mot. J'ai fais la pire erreur de ma vie. Si tu savais comme je me suis sentie seule là-bas. Sans toi." Non je n'avais eu personne pour me confier à Lower Hutt. Personne à qui parler. C'est peut être pour ça que j'ai mis tant de temps à revenir ici. "Et... tu étais où? Tu es partie retrouver ta mère?" Ma mère je ne voulais pas la connaître, comment peut on abandonner sa famille. Ironie du sort. J'étais devenue comme elle ce qui m'attristait encore plus. "A Lower Hutt dans un petit appartement. Je me suis débrouillée comme je pouvais. J'étais serveuse dans un bar pas loin, ça me suiffisait. J'étais seule, je voyais vraiment pas beaucoup de monde. J'avais pas la tête à ça. Ma mère.. Non je n'ai pas chercher à la retrouver. C'est peut être con mais je ne vois pas ce que je pourrais gagner à connaitre une personne qui n'a pas voulu de ses propres enfants." Un ton sec que je ne peux pas réprimer accompagne mes dernières phrases mais cette colère ne dure pas longtemps. "Et toi qu'est ce que tu es devenu pendant ces années?" Je ne peut pas m'empêcher de sourire, un sourire teinté de tristesse, oui, mais tout de même un sourire.

Assis l'un en face de l'autre, nous étions uniquement concentrés sur nous-mêmes. En réalité, le temps s'était comme figé. D'ailleurs, même le serveur n'avait pas encore osé venir nous voir, comme s'il n'avait pas envie de briser ce moment si fort en émotions et en intensité. Moi, j'en avais totalement oublié pourquoi j'étais venu en ville, et je n'étais même pas certain de me rendre compte du temps qui passait. "J'étais tellement en colère que je n'ai pensé qu'à moi, et je t'ai laissé. Abandonné, sans un mot. J'ai fais la pire erreur de ma vie. Si tu savais comme je me suis sentie seule là-bas. Sans toi." La fin de sa phrase me transperça le coeur. Parce qu'apprendre qu'elle avait souffert autant que moi m'attristait, me rendait nostalgique. Si seulement j'avais su où elle habitait, si seulement elle m'avait laissé l'aider. Malheureusement, avec des si, on allait jamais très loin... Bien sûr, elle avait fait une erreur, et je ne pouvais pas nier que j'avais eu bien du mal à m'en remettre. Mais j'étais incapable de lui en vouloir vraiment. Voilà d'où venait mon problème, je n'arrivais pas à me blinder suffisamment pour réussir à me montrer méfiant ou simplement pour être rancunier. La plupart du temps, je m'en sortais bien, toutefois, il arrivait que je m'en morde les doigts. En parlant de doigt, je serrais sa main d'autant plus fort dans la mienne, comme si je souhaitais lui montrer que moi, je m'étais senti seul sans elle. Depuis tout petit, je pensais que la simple présence de mes proches me suffisait, puis je l'avais rencontré elle, et lorsqu'elle avait disparu, son absence s'était faite atroce. Tentant de comprendre où elle était passée, je suggérais alors qu'elle ait retrouvé sa mère... Et vu la tête qu'elle afficha, je sus que je venais de toucher un point sensible. J'aurais peut-être du me taire vraiment pour une fois... "A Lower Hutt dans un petit appartement. Je me suis débrouillée comme je pouvais. J'étais serveuse dans un bar pas loin, ça me suiffisait. J'étais seule, je voyais vraiment pas beaucoup de monde. J'avais pas la tête à ça. Ma mère.. Non je n'ai pas chercher à la retrouver. C'est peut être con mais je ne vois pas ce que je pourrais gagner à connaitre une personne qui n'a pas voulu de ses propres enfants." Sa voix était soudainement plus sèche, on pouvait d'ailleurs y ressentir toute sa rancoeur et sa colère. Elle en voulait à sa mère... Et c'était légitime, même si ce genre de sentiments m'étaient complètement étrangers, surtout quand il s'agissait de ma mère. "Je comprends que tu sois en colère contre elle... Elle n'a jamais été là pour vous, c'est comme si vous ne comptiez pas pour elle..." Je soupirais doucement, avant de la regarder avec intensité de nouveau. J'aimerais lui faire comprendre que désormais, elle pouvait m'en parler. Qu'elle ne serait plus seule face à ses doutes, ses colères, ses coups de gueule. "Tu sais, je n'ai jamais connu mon père, je serai même incapable de dire s'il connaît mon existence ou s'il a simplement décidé qu'il ne voulait pas assumer son rôle de père. La plupart du temps, je n'y pense même pas, mais parfois je me dis que j'aimerais bien le rencontrer, juste pour lui dire ce que je sais sur le coeur.... Peut-être que ça te ferait du bien de la retrouver. Rien que pour lui balancer tout ce que tu as sur le coeur!" Après tout, il était parfois salvateur de se soulager de ses colères, peut-être en serait-il de même avec elle. Et une fois qu'elle n'aura plus ce poids sur son coeur, elle pourra certainement aller de l'avant. Dans tous les cas, je serai là pour elle, si elle le souhaitait. Ma Vickie. "Sinon, tu habites loin du coup? Je pourrais peut-être... venir te voir de temps en temps... Si tu le bien, hein!" Je mourrais d'envie de lui demander de tout recommencer, de retrouver notre complicité, nos sentiments. Quelque part, mon coeur avait gardé la place qui lui était dûe, mais je ne pouvais pas la forcer, et de toute manière, elle n'avait peut-être plus envie...