Bain de midi ~ Joman#5

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Mes nerfs sont à vif. Dans le vestiaire du centre de rééducation, je referme mon casier avec grand bruit. Comment ai-je pu en arriver là ? Mes études, ce stage, mon futur métier, tout ça a toujours été plus important que tout le reste. Depuis que Roman est entré dans l’équation, je ne me reconnais plus. Je vis dans mes rêves et j’oublie tout ce pourquoi je me suis battue si durement. L’auto-flagellation dans mon esprit dure encore quelques instants avant que je respire à fond. Mais c’est plus fort que tout, les paroles dures du Directeur du centre monsieur Patterson résonnent encore. Je n’aurai plus ma place ici une fois mon diplôme en poche. J’essaie de voir le bon côté des choses, de toute façon j’avais pour projet d’ouvrir mon propre cabinet en janvier, j’ai déjà un local et j’ai commencé à me renseigner pour les démarches. Mais je suis vexée dans mon amour propre de cet incident, ce n’est jamais agréable d’être prise sur le fait. Si je trouve celui ou celle d’où vient la fuite… je l’étrangle. J’ai été convoquée dans le bureau du Directeur dès mon arrivée ce matin. Roman a publié une photo de moi sur son compte Instagram après notre soirée. Avec celle du bouquet de fleurs sur mon compte à moi les commères s’en sont données à cœur joie. Je voyais le centre comme un petit monde protégé, j’ai largement préféré l’ambiance ici, le soin aux patients beaucoup moins impersonnels, comparé à l’hôpital où j’avais fait mes autres stages. Je m’étais trompée. Ici ou ailleurs, c’est pareil, le monde médical est impitoyable. Je sais que j’ai franchi une limite avec Roman, mais nous seuls étions au courant de ce qui s'est réellement passé, visiblement le seul fait que j’ai entreprit d'être son amie avec mon patient en dehors de nos séances est également source de conflits. Le Directeur a été clair. Il ne m’empêchera pas d’avoir mon diplôme et me donnera une note convenable, probablement pas mirobolante m’empêchant sûrement d’avoir une mention comme je l’aurai rêvé, mais par contre je peux oublier la promesse d’un poste ici. Je n’ai même pas pu m’expliquer. Mes relations avec le pompier sont tolérées, parce qu’ « il a été jeune lui aussi » selon ses mots, mais je ne dois plus sous aucun prétexte les étaler, ça m’a couté ma place au centre et la confiance de celui qui m’a tout appris du métier que j’aime.

Il est presque midi et ces pensées incohérentes ont traversé ma tête de toutes part toute la matinée. J’appréhende ce moment depuis le pseudo "scandale" a éclaté. C’est l’heure du rendez-vous avec Roman, je me suis changée pour mettre mon maillot de bain en dessous de ma blouse. C’est le jour de notre séance en piscine, comme si le sort ne s'acharnait pas assez aujourd'hui. Je me dirige vers l’accueil en refermant la porte de la salle de pause du personnel derrière moi pour aller accueillir le pompier. Assis là sur les bancs de la salle d’attente, plonger à nouveau mon regard dans le sien me met dans un état second. Le gout de ses lèvres, ses baisers, je l’observe et je ne pense qu’à ça. Pour tenter de garder les apparences devant la demi-douzaine de commères du centre qui nous observent sûrement, je lui tends ma main pour la lui serrer en guise de bonjour.
— Monsieur Wellington bonjour, suivez-moi…
Ma phrase est plus un ordre abrupt que les mots que je prononce avec douceur pour lui d’habitude. J’ai peur qu’il se méprenne sur mon attitude vu ce qu’ils s’est passé entre nous. Je ne regrette rien, pourvu qu’il ne croît pas le contraire, mais pour le moment je n’ai pas d’être choix que de rester à distance. Je le conduis vers les vestiaires affectés aux patients et lui montre la porte en lui adressant enfin un sourire alors que nous sommes à peu près à l’abri des regards maintenant.
— Je vous laisse vous mettre maillot et je vous attends à côté du bassin comme d’habitude.
Devoir me tenir tout près de lui dans l’eau à peine vêtus de maillots l’un et l’autre va être un enfer. Mais comment faire autrement ? Nous n’avons même pas parlé de ce qui s’est passé samedi soir, pas même par texto, j’ai été occupée en famille tout le dimanche et je n’ai pas osé le déranger dimanche soir tard quand je suis rentrée. J’appréhende ce moment où nous devrons mettre des mots sur notre relation et pourtant ce ne sera pas pour tout de suite.

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bain de midi
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C'est le troisième jours depuis que Roman a décidé de franchir le pas avec Jody et depuis, il n'y a pas vraiment eu de discussions. Il ignore où ils en sont aujourd'hui, ce que ces baisers auront comme impact sur leur amitié. Il aurait pu lui demander par message, un millier de fois, mais il avait trop peur. C'est la première fois depuis longtemps qu'il se sent aussi bien avec une femme. Ce n'est pas la meilleure situation, ils ne devraient même pas se voir en dehors du centre, mais c'est plus fort que lui. Plus les jours passent et moins il peut se passer d'elle. Comme toujours, ou presque quand il arrive au centre, il attend, assis dans l'une des salles d'attente du centre de rééducation. Quand il y a du monde, c'est ici qu'il faut être, en attendant que le soignant arrive. Quand c'est plus calme, il arrive à Roman de se rendre directement dans la salle des kinésithérapeutes, là où ils reçoivent leurs patients. Aujourd'hui, c'est le premier cas de figure qui s'applique. Lorsque la blonde arrive dans la pièce, un sourire se dessine sur le visage du pompier, sans qu'il ne puisse vraiment le contrôler. « Monsieur Wellington bonjour, suivez-moi… » Oh. Il s'attendait à quelque chose de plus.. cordiale ? « Mademoiselle Jenkins. » Répond-il simplement. Elle est à son travail, c'est peut-être ça, c'est sûrement ça. Elle prend les devants et Roman essaye de son mieux de la suivre. « Je vous laisse vous mettre maillot et je vous attends à côté du bassin comme d'habitude. » Naturellement, il hoche la tête et se dirige à l'intérieur des vestiaires. N'ayant toujours pas de travail est un avantage, dans le sens où il a eu l'occasion d'enfiler son maillot de bain déjà. Il a juste à ce déshabiller. Ce qui n'est pas plus mal, car sur ce sol, une sorte de carrelage, légèrement humide à cause des précédents passages, Roman aurait bien pu tomber et se faire mal en essayant d'enfiler le morceau de tissu. Il reporte ce problème à après la séance. Il retire sa veste, son T-Shirt et enfin, son pantalon. Il plie ses affaires, histoire de ne pas les retrouver complètement froissées à sa sortie et il les glisse dans un casier. Fin prêt, il prend la direction du bassin de rééducation. Ce n'est pas la première fois qu'il s'y rend, il connaît très bien la route. « Je suis enfin prêt. J'espère que je ne me suis pas fait trop attendre. » Dit-il, tout en arquant un sourcil. Pour l'instant, ils sont seuls dans cette pièce. C'est l'occasion de briser un peu la glace et de parler de choses un peu plus intimes, pourquoi pas. Il s'est passé quelque chose entre eux et malheureusement, ils n'ont pas encore eu l'occasion d'en parler. « Roméo n'a pas arrêté de parler de toi. » C'est risqué de lui dire cela. Mais tant pis, il prend le risque. Alors que ces mots s'échappent de ses lèvres, le pompier s'avance doucement vers l'eau. Ce n'est pas parce qu'ils ont été proches qu'il doit en profiter et passer à côté de sa séance. S'il est ici, c'est parce qu'il a un but bien précis : retrouver la forme et pouvoir reprendre le boulot, pouvoir retourner dans un bâtiment en feu un jour. N'étant pas du genre frileux, Roman n'a pas de difficulté à rentrer à l'intérieur du bassin. Il s'avance un peu, jusqu'à ce que l'eau lui arrive au niveau des hanches. C'est là qu'il se retourne vers la blonde. « Tout va bien ? J'ai l'impression qu'il y a quelque chose qui cloche. » Il n'y a plus qu'à espérer que cela n'est pas lié à lui, à cette soirée qu'ils ont passé ensemble et à ces baisers échangés. Il ne regrette pas du tout ce qu'il s'est passé, ça serait dommage et gênant que ce soit le cas de la kinésithérapeute.

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Bain de midi ~ Joman#5

Préoccupée, mes pensées continuent de me torturer alors que je prépare tout ce qu'il me faut au bord du bassin pour la séance de Roman. Habituellement c’est mon moment préféré avant une séance, me remémorer les séances précédentes, les blocages, planifier dans ma tête les premiers exercices, concentrer mon énergie pour accueillir mon patient avec une énergie nouvelle pour chacun. Des bêtises me viennent d’ailleurs souvent dans ce moment-là et aujourd’hui malgré mes préoccupations, je ne peux m’empêcher de jouer avec une des frites au bord du bassin comme si c’était une baquette magique de sorcier.
— "Wingardium leviosa" ! Bain de midi ~ Joman#5 78-785228_jack-o-lantern-clip-art-transparent-background-jack

Vaine tentative pour me faire de l'humour à moi-même et me détendre... Je sursaute en entendant la porte du fond s'ouvrir en priant pour qu'il n'ait pas assisté à cette scène sinon il ne manquera pas de me chambrer longtemps sur le fait que je me prends pour Hermione Granger entre deux patients. Mais pour le moment c'est le moindre de mes soucis, il est là, devant moi, torse nu et bordel.... comment je vais arriver à me concentrer dans l'heure à venir ?
— Je suis enfin prêt. J'espère que je ne me suis pas fait trop attendre.
Mes yeux sont sans arrêt en train de balayer de haut en bas la ligne de poils qui souligne les détails parfaits de son torse et m'empêchent d'avoir une pensée cohérente. Ce n’est évidemment pas la première fois que nous nous retrouvons ici, nous avons fait des dizaines de séances en piscines comme celle-là, mais ça c’était avant… que nous ayons échangé ce baiser.
— Non ! Enfin euh... j'ai eu le temps de tout préparer comme ça.
Ton abrupt encore. Je lui désigne les frites et les planches sur le bord du bassin en essayant de me reconcentrer comme je peux. Mon raisonnement a beau ne pas être très clair, mes pensées balayent les différentes possibilités pour tenter de trouver une solution. Est-ce que j’ai envie que quelqu’un d’autre soit en charge des soins de Roman ? Certainement pas. Est-ce que j’ai envie pour autant que ce qui s’est passé samedi s’arrête ? Certainement pas non plus.
— Roméo n'a pas arrêté de parler de toi.
Mon sourire s’élargi et la pensée du petit Roméo me réchauffe le cœur. J’ai adoré passer un petit moment avec lui samedi soir et j’espère que ce ne sera pas la dernière fois.
— Tu lui feras plein de bisous de ma part alors. Ton fils est vraiment un petit bonhomme extraordinaire.
Et son papa aussi. Mais ça je ne peux pas lui dire ici. Je regrette à présent de ne pas avoir pris la peine d’appeler Roman hier soir pour savoir où nous en sommes. Ca nous aurait peut-être évités ce moment gênant. L’avoir en face à face sans pouvoir lui parler franchement comme nous le faisons d’habitude est un supplice. Ma blouse blanche glisse sur mes épaules pour me retrouver un maillot de bain et je me glisse dans le bassin à ses côtés. L’eau et l’air sont chauffés et pourtant je ressens une sorte de frisson en m’approchant de lui.
— Tout va bien ? J'ai l'impression qu'il y a quelque chose qui cloche.
Evidement le pompier a senti au ton de ma voix et à mon attitude que quelque chose clochait. Il commence décidément à trop bien me connaitre. La frustration monte, même si nous sommes seuls dans cette pièce, une partie de mur est vitrée laissant voir de l’extérieur tout ce qui se passe même si on ne peut pas nous entendre.
— Oui… euh… enfin non…
Je roule des yeux en montrant la vitre et en donnant un coup de tête dans la direction où quelques regards indiscrets sont tournés vers nous. Le ton de ma voix se baisse et je me rapproche de lui pour lui murmurer mes paroles.
— Je suis désolée, je ne peux pas t’expliquer ici. Après peut-être ? Si tu veux aller déjeuner avec moi ?
Pourvu qu’il ne pense pas à un problème entre nous… Même si je ne sais pas vraiment ce qu’il y a entre nous…
— On commence ? On attaque la partie de ta rééducation dite « musculaire ». Les tissus de ta jambes sont réparés, l’inflammation de l’opération est quasiment résorbée, maintenant, il faut que tu retrouves la force et l’équilibre dans tes muscles pour que ta jambe supporte correctement le poids de ton corps. Je ne te dis pas d’aller courir un marathon tout de suite, mais à partir de maintenant tu as mon feu vert pour pratiquer toutes les activités que tu veux. Plus tu feras d’exercices, plus vite tu pourras oublier ta béquille.
Reprendre mon rôle de médecin m’aide beaucoup à me ressaisir. C’est moi qui mène la danse, je connais les gestes et mes programmes par cœur, je suis dans mon élément et mon sourire revient comme s’il n’était jamais parti. Armée des deux frites que j’avais préparées, je lui en lance une et lui explique le premier exercice en joignant le geste à la parole.
— Je suis venue dans le bassin avec toi pour te montrer les exercices, ensuite tu pourras venir ici seul autant que tu veux avant chacune de nos séances. La frite sous la voute plantaire, en tenant le dos bien droit et on pousse vers le sol. Dix séries de cinq. Tu es prêt ?
Non décidément, j’aime trop ces séances et notre complicité silencieuse avec Roman pour confier le reste de son traitement à quelqu’un d’autre. Comment concilier tout ça ? Je n’en ai aucune idée, mais de toute façon rien n’est simple avec lui, peut-être est-ce d’ailleurs ce qui m’attire le plus, alors autant laisser faire le temps…

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bain de midi
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« Non ! Enfin euh... j'ai eu le temps de tout préparer comme ça. » Jody et son professionnalisme. À force de la côtoyer, Roman a compris que son boulot signifiait beaucoup pour elle, un point qu'ils ont en commun. Alors il n'y a rien d'étonnant à ce que les exercices soient prêts avant même qu'il n'arrive vraiment. « Tu lui feras plein de bisous de ma part alors. Ton fils est vraiment un petit bonhomme extraordinaire. » Un sourire se dessine sur les lèvres du jeune homme à la simple évocation de Roméo. Il ignore ce que la blonde a fait à son fils, mais le petit garçon est tellement dingue d'elle. Tel père, tel fils. Il faut dire aussi que la jeune femme ne doit pas laisser tout le monde indifférent. Inquiet de la voir agir de la sorte, à l'accueil et maintenant ici, le pompier se renseigne sur ce qui se passe. « Oui… euh… enfin non… » Il fronce légèrement les sourcils, pas vraiment convaincu par sa réponse. Qui le serait ? Un oui suivi d'un non, le tout accompagné d'une hésitation. Au fond de lui, Roman sait que c'est à cause de ce qu'il s'est passé entre eux. Qu'est-ce que cela pourrait être d'autres ? Rien. Ils ne se sont pas revus depuis ce soir-là et avant, tout allait bien. « Je suis désolée, je ne peux pas t'expliquer ici. Après peut-être ? Si tu veux aller déjeuner avec moi ? » Son intuition est confirmée et au ton de voix de la jeune femme, cela ne laisse rien présager de bon. « Je.. d'accord. Avec plaisir. » « On commence ? On attaque la partie de ta rééducation dite « musculaire ». Les tissus de ta jambe sont réparés, l'inflammation de l'opération est quasiment résorbée, maintenant, il faut que tu retrouves la force et l'équilibre dans tes muscles pour que ta jambe supporte correctement le poids de ton corps. Je ne te dis pas d'aller courir un marathon tout de suite, mais à partir de maintenant tu as mon feu vert pour pratiquer toutes les activités que tu veux. Plus tu feras d'exercices, plus vite tu pourras oublier ta béquille. » Roman hoche simplement la tête suite aux paroles de la blonde. En ce qui concerne sa rééducation, le jeune homme est un élève assidu et à l'écoute, ce qui change du lycéen qu'il était à l'époque. Il sait très bien que c'est en passant par là qu'il pourra revenir au meilleur de sa forme et qu'il pourra reprendre son boulot. « Je suis venue dans le bassin avec toi pour te montrer les exercices, ensuite tu pourras venir ici seul autant que tu veux avant chacune de nos séances. La frite sous la voute plantaire, en tenant le dos bien droit et on pousse vers le sol. Dix séries de cinq. Tu es prêt ? » Alors qu'il avait laissé flotter la frite sur l'eau, le temps que Jody fasse ses explications, Roman la prend maintenant entre ses mains pour s'exécuter. « Tu veux que j'arrive à me passer de toi, c'est ça ? » Dit-il en référence au fait qu'il pourra maintenant venir seul ici. Un sourire sur les lèvres, il ne dit rien de plus et se concentre sur ce qu'il doit faire. Il y a un temps pour rire et un temps pour travailler. Il réalise les séries qu'elle lui a imposées et après ça, celles d'un autre exercice. La séance se passe sans encombre, tous les deux mettant de côté ce qu'il a pu se passer entre eux. « J'ai beau être ton patient préféré, je vois que tu ne me ménages pas. » Lâche le pompier alors qu'il commence doucement à prendre la direction pour sortir de la piscine. Cette histoire de patient préféré n'a rien à voir avec la soirée de vendredi dernier. C'était déjà le cas avant, c'est une petite plaisanterie entre eux et Roman aime bien lui ressortir. « Je vais me changer. On se retrouve devant le centre après ? » Néanmoins, la plaisanterie n'est que de courte durée. Durant toute la séance, le pompier a eu cette discussion en tête. Elle ne l'a pas quitté. Il s'est bien trop demandé ce que cela pouvait être. « Pour aller manger ensemble. Sauf si tu as changé d'avis depuis. » Il attrape sa serviette qu'il avait laissée sur le bord et commence à s'essuyer. Le haut du corps, puis les jambes, ce sont elles les plus importantes, ce sont elles qui vont définir une possible chute. Un simple regard à la jeune femme et il comprend que le repas est maintenu. Ne voulant pas la mettre mal à l'aise ou quoique ce soit du genre sur son lieu de travail, il n'insiste pas, il n'a pas besoin d'un oui clair et net, sorti de sa bouche. « Très bien, je me dépêche alors. » Il lui sourit et retourne dans les vestiaires. À l'inverse de tout à l'heure, il doit se changer. Il retire ce qu'il a sur le corps et enfile sa tenue de rechange présente dans son sac. Comme s'il était à la salle de sport. C'est un peu le cas dans le fond. Il sort ensuite de la pièce et de la zone réservée à la rééducation. Il salue les personnes présentes à l'accueil du centre en traversant, puis se retrouve dehors, en attendant sa kinésithérapeute. Elle arrive un peu plus tard, sûrement le temps pour elle de ranger ses affaires et de boucler sa matinée. « Tu as une préférence sur l'endroit où tu veux manger ? » Le jeune homme n'est pas compliqué de son côté, avec elle, il pourrait aller n'importe où.

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Bain de midi ~ Joman#5

— Je.. d'accord. Avec plaisir.
Le troubler est loin de ce que je voudrais mais je dois mettre de côtés mes sentiments personnels pour me consacrer à notre séance. Et ce n’est pas parce que c’est Roman que je dois me relâcher, bien au contraire sa guérison me tient encore plus à cœur. Il écoute mes explications attentivement et je le vois même sourire alors qu’il prend une frite pour m’imiter.
— Tu veux que j'arrive à me passer de toi, c'est ça ?
C’est le lot de tous les patients, un jour… ils n’ont plus besoin de moi. Pour le pompier c’est particulier, sa présence régulière au centre pendant mes heures de travail ont toujours été une bouffée d’oxygène. Nos séances me manquerons c’est sûr, mais je serai aussi très fiere qu’il puisse enfin remarcher normalement et reprendre son métier à plein temps. Je sais que c’est vital pour lui.
— C’est un peu l’idée, je suis sûr que tu as bien mieux à faire que de barboter dans cette piscine avec moi !
Mais assez plaisanté. L’heure qui suit est presque militaire, peut-être parce que j’ai hâte de pouvoir sortir et me retrouver enfin seule avec lui. Les exercices s’enchainent, je vois qu’il peine un peu sur la fin sans vouloir le montrer et à toujours vouloir se dépasser, alors je mets fin à la séance en ramassant le matériel.
— J'ai beau être ton patient préféré, je vois que tu ne me ménages pas.
On sort tous les deux du bassin, malgré les exercices qui se sont enchainés, nos taquineries et notre complicité ont redoublé.
— C’est pas le Club Med ici. Aucun de traitement de faveur.
Je lui tire la langue en riant, non sans remarquer qu’il se sèche juste devant moi en frottant sa serviette partout sur lui. Je devrais avoir froid en sortant de l'eau mais la température de mon corps a dû monter parce que je me sens fiévreuse tout à coup.
— Je vais me changer. On se retrouve devant le centre après ? Pour aller manger ensemble. Sauf si tu as changé d'avis depuis.
Il semble avoir eu une petite hésitation. En a-t-il vraiment envie ? Soudain une vague de doutes m’envahit et me serre la poitrine. Je me contente de hocher la tête en priant pour qu’il n’ait pas changé d’avis en cours de route avec la séance de torture que je viens de lui faire vivre.
— Très bien, je me dépêche alors.
Le matériel rangé, je rejoins moi aussi les vestiaires, je sèche rapidement mes cheveux et repasse par l’accueil pour vérifier mon agenda. La secrétaire m’apprend qu’un de mes rendez-vous est annulé et que je ne reprends qu’en fin d’après-midi. C’est presque un soulagement de pouvoir consacrer un long moment à Roman loin de cet endroit et c’est avec le sourire que je le rejoins devant l’entrée du centre.
— Tu as une préférence sur l'endroit où tu veux manger ?
N’importe où. Pourvu qu’on soit tous les deux seuls et à l’abri des regards indiscrets.
— J’ai un peu plus de temps que prévu pour manger, un rendez-vous qui s’est annulé, ça te dit qu’on aille en bord de mer ? On trouvera surement des sandwichs ou quelque chose à grignoter là-bas… Ma voiture est garée là.
Je lui désigne ma vieille Prius garée sur le trottoir juste en face du centre de rééducation. C’est peut-être la première fois que je me maudis d’avoir trouvé un emplacement si près du centre pour me garer. A peine ma portière refermée, j’aurais voulu me rapprocher à nouveau de lui, sceller nos lèvres, dissiper ce malaise et ces doutes. La trop grande proximité du centre me fait renoncer, le bureau du directeur Patterson donne directement sur la rue et il doit probablement nous observer pour s’assurer que je respecte mes engagements. Je me sens comme un animal en cage, comme un oiseau privé de ces ailes. La clé sur le contact, la voiture démarre et la radio empli l’habitacle d’une chanson de Cindy Lauper qui nous est à tous les deux familière.
— Tu vas être condamné à m’entendre encore chanter…
Un regard complice dans sa direction et je m’engage sur la route pour nous éloigner le plus vite possible et pouvoir enfin parler.
— … comme samedi soir.
Mon sourire s’agrandit en repensant à ce moment précis où j’étais dans ses bras le cœur plein de certitudes et d’hésitations à la fois. Je ne voudrais pas qu’il pense que j’évite le sujet, parler dans une voiture n’est pas l’idéal mais je ne peux garder le silence plus longtemps.
— Merci pour cette surprise. J’ai passé une merveilleuse soirée. Je voulais t’appeler hier soir en rentrant de chez mes parents qui m’ont fêté mon anniversaire avec mes frères et ma sœur, mais il était tard et je n’ai pas osé de peur de réveiller Roméo et Louise. Tu as passé un bon dimanche ?
C’est une question tout ce qu’il a de plus banale, je sais que je dois aussi lui parler de ce qui me tracassais tout à l’heure, mais nous avons probablement tout le temps de parler plus sérieusement. Et puis j’ai réellement envie de savoir comment il s’est senti hier après notre soirée ensemble.

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« C’est un peu l’idée, je suis sûr que tu as bien mieux à faire que de barboter dans cette piscine avec moi ! » Il grimace légèrement, cherchant au fond de lui si la jeune femme a raison ou non. C’est vrai qu’il a certainement mieux à faire, mais être ici avec elle n’est pas tant désagréable. Il faut dire que sa simple présence embellit forcément les choses. Comme bien souvent, la séance suit son cours et se déroule sans encombre. Entre Jody et Roman, ça roule plutôt bien. Il ne cherche pas à la contredire, c’est son métier, elle sait ce qu’elle fait. À la fin, pour rigoler, le jeune homme ne manque pas de lui faire une réflexion sur ce qu’elle lui fait faire. « C’est pas le Club Med ici. Aucun de traitement de faveur. » Elle marque un point. Si c’était le cas, ça ferait sûrement longtemps que Roman ne serait plus venu, il aurait fait sa rééducation ailleurs. Le rire de la kinésithérapeute entraîne celui du jeune homme. Après cela, lorsqu’il est un minimum sec, il s’échappe dans les vestiaires et se change pour pouvoir retrouver Jody juste après. « J’ai un peu plus de temps que prévu pour manger, un rendez-vous qui s’est annulé, ça te dit qu’on aille en bord de mer ? On trouvera surement des sandwichs ou quelque chose à grignoter là-bas… Ma voiture est garée là. » Un sourire se dessine naturellement sur les lèvres de Roman. Ce petit imprévu n’est pas pour lui déplaire, sauf si bien évidemment, ce qu’elle voulait lui dire n’est pas une chose agréable pour lui. Alors que la blonde se lance en direction de sa voiture, le pompier la suit. Lorsqu’elle met le contact de sa voiture, une chanson se lance et si ce n’est pas un coup du destin, le jeune homme ne sait pas ce que c’est. « Tu vas être condamné à m’entendre encore chanter… » Décidément, cette chanson va désormais les suivre. Elle va finir par devenir leur chanson. « … comme samedi soir. » Il sourit de plus belle en repensant à cette soirée. Il a perdu le contrôle sur plusieurs choses, mais finalement, il ne regrette rien et c'est bien ça le plus important. Il irait même jusqu'à dire que si cela devait se refaire, il referait les choses exactement pareil. « Merci pour cette surprise. J'ai passé une merveilleuse soirée. Je voulais t'appeler hier soir en rentrant de chez mes parents qui m'ont fêté mon anniversaire avec mes frères et ma sœur, mais il était tard et je n'ai pas osé de peur de réveiller Roméo et Louise. Tu as passé un bon dimanche ? » « Tu étais la star du week-end, c'est normal. » Elle n'a pas à se reprocher de ne pas avoir appelé. Roman aurait pu le faire aussi, mais avec son anniversaire, il savait que ce n'était pas forcément le moment idéal. Et puis, c'est toujours mieux de se parler de choses comme ça face à face, non ? « Nous sommes sortis, cela a fait du bien à Roméo de se dégourdir les jambes. » La météo n'était pas encore parfaite, mais cela le démangeait. Heureusement, le beau temps devrait bientôt arriver et avec un papa en arrêt maladie, le petit garçon aura de nombreuses occasions d'aller au parc. « J'ai aussi passé une merveilleuse soirée samedi. Si jamais l'envie te prend un jour de recommencer, tu sais où me trouver. » Une façon, un peu détournée de lui dire que lui-même pourrait en avoir envie. Ce n'est pas direct, mais il trouve que ce n'est pas vraiment l'endroit de faire cela. À la plage, ce sera mieux et il pourra aussi se renseigner une nouvelle fois sur ce qui ne va pas pour Jody. La voiture de la jeune femme prend la direction du Sud et en moins de quinze minutes, ils se retrouvent dans la zone d’Island Bay sud. Elle trouve une place non loin de la place, pour le plus grand bonheur de Roman. Ils vont sûrement se balader le long de l’eau, alors si le trajet pour s’y rendre est court, ça fait de la fatigue en moins et des mètres en plus pour après. Avant de rentrer sur le sable, le pompier remarque qu’il y a un food-truck : c’est parfait. Ce n’est pas tout, mais une séance de rééducation juste avant midi, ça donne l’appétit. « Qu’est-ce que tu veux ? C’est moi qui invite. » Dit-il en souriant, alors qu’il jette lui aussi un coup d’œil à ce qui est proposé pour faire son choix. La jeune femme parlait de sandwich, mais ici, ce sont des hamburgers qui sont proposés. Ce n’est pas très grave, ça fera tout aussi bien l’affaire. Roman attend que la blonde face sa commande, puis à son tour, il demande un Cheeseburger avec des frites. « Tu vas finir par croire que je veux te faire grossir. » Il rigole légèrement, faisant référence à ce qu’elle lui avait dit lors de leur soirée tous les deux. Le cuisinier tend leurs commandes, le pompier paye et ils partent tous les deux en direction de la plage. « Tu ne m’as pas amené ici pour te débarrasser de moi, hein ? »

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Bain de midi ~ Joman#5

— Tu étais la star du week-end, c'est normal.
Moi qui m’étais rongé l’esprit de ne pas l’avoir appelé, je ris maintenant intérieurement de ma propre bêtise. Roman est juste… un gars normal qui ne se prend pas la tête sur ce genre de détails. La pensée folle me vient tout à coup que j’aurais aimé partager avec lui ce dimanche en famille pour qu’il rencontre mes proches et que Roméo s’amuse avec ma petite nièce adorée, Victoria la fille de Gabriel.
— Nous sommes sortis, cela a fait du bien à Roméo de se dégourdir les jambes.
Mon sourire s'élargit alors que je me gare sur une place toute proche de la plage. Je récupère un plaid dans mon coffre pour nous installer confortablement tout en continuant de lui lancer un regard radieux.
— J'ai aussi passé une merveilleuse soirée samedi. Si jamais l'envie te prend un jour de recommencer, tu sais où me trouver.
Frapper à sa porte à l’improviste est pour le moment bien loin de ce que je me permettrais avec lui mais oui, j’aimerais qu’il y ait d’autres soirées comme celle-là. Beaucoup d'autres même. On arrive près d'un foodtruck et c'est exactement ce dont j'avais envie, mon estomac se manifeste joyeusement pour approuver après toute une matinée de travail bien remplie.
— Qu’est-ce que tu veux ? C’est moi qui invite.
— Merci. La même chose que toi, avec un supplément cheddar sur les frites.
Un peu de nourriture réconfort pour affronter la discussion qui nous attend. Il n'y a rien de mieux non ?
— Tu vas finir par croire que je veux te faire grossir.
Sa remarque me fait rire et j'aurai presque envie de prendre encore un dessert supplémentaire pour lui prouver s'il en avait encore besoin que je ne suis pas de ces filles qui se contentent de trois brins de salade au déjeuner.
— Crois-moi, je me débrouille très bien toute seule pour ça, c’est bien pour ça que le sport est mon meilleur ami.
On récupère notre commande rapidement pour poursuivre notre chemin et aller nous installer sur la plage un peu plus loin. Soudain il marque une pause et son regard est un peu inquiet.
— Tu ne m’as pas amené ici pour te débarrasser de moi, hein ?
La question de Roman me déroute autant qu’elle me fait sourire. Est-il aussi troublé que je le suis par cette situation ? Mon regard se plante droit dans ses yeux et je secoue la tête vigoureusement de gauche à droite finissant par baisser le nez en posant ma joue contre mon épaule toute gênée. Me débarrasser de lui ? Mais où est-il aller chercher ça ?
— Je sais que tu as remarqué que j’étais contrariée tout à l’heure… tu commences à trop bien me connaitre…
C’est tellement vrai, je ne sais pas ce que ça signifie mais au fond de moi je ne peux qu’en être ravie. On arrive au bord de la plage, il ne pourra pas faire des kilomètres dans le sable avec sa béquille alors on s’installe simplement là, j’étends le plaid pour nous assoir dans le sable, j’aurai même enlevé mes chaussures si on avait été en été, j’adore le contact des grains qui chatouillent les pieds et les embruns qui chatouille les narines. Venir ici régulièrement est presque vital que ce soit pour pour une séance de yoga ou courir en bord de mer avec Jules. L’endroit où je me sens bien au quotidien, c’est peut-être l’endroit idéal où nous confier avec Roman.
— C’était pas à cause de toi, enfin si un peu, mais tu n’y es pour rien. Le Directeur du centre m’a passé un savon ce matin en arrivant à la première heure. A cause… de nous… enfin du fait je te vois en dehors du centre.
J’ai l’impression de m’enliser dans des explications que je n’assumerai pas. On se voit comment ? Qu’est-ce que ça signifie ? C’est dur de me livrer à lui ne sachant même ce que je représente pour lui mais je poursuis, il est hors de question qu’il croit que cet épisode nous empêchera de poursuivre ce qui a commencé s’il en a envie lui aussi. Quoi que ce soit.
— Ce n’est pas que c’est interdit. Ce que je fais de mon temps personnel ne regarde que moi, mais c’est très mal vu. Le milieu médical et ses commères dans tous les couloirs me sort par les yeux parfois. C’est pareil chez les pompiers ?
J'ai peur de lui révéler que c'est la photo de moi qu'il a publié sur sa page Instagram est en fait ce qui a mis le feu aux poudres. Notre relation devrait être simple, notre attirance est évidente, et elle aurait continué à s'épanouir doucement au fil de nos rencontres dans un contexte "normal". Seulement il y a mon travail, la récente paternité de Roman, notre différence d'âge et d'expérience. Ai-je raison de vouloir suivre mon cœur envers et contre tout ? Toute proche de lui, mes lèvres se rapprochent fébrilement et lentement pour aller chercher la réponse...

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bain de midi
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« Merci. La même chose que toi, avec un supplément cheddar sur les frites. » Aussitôt dit, aussitôt commandé. Ils ont de la chance, pour l’instant, le food-truck est vide, c’est ça de gagné comme temps pour leur commande. Après les lasagnes, les hamburgers. Rien de bien healthy, en espérant que Jody n’en tiendra pas trop rigueur. En temps normal, lorsqu’il travaille, Roman n’est pas du genre à manger ce genre de choses. En arrêt maladie, c’est le moment d’en profiter. « Crois-moi, je me débrouille très bien toute seule pour ça, c’est bien pour ça que le sport est mon meilleur ami. » À ce rythme-là, le pompier va devoir aller courir matin, midi et soir quand il en sera capable. Car malheureusement pour lui, avec une jambe qui lui fait défaut, ce n’est pas l’idéal pour garder la forme. Et encore, il est plutôt chanceux, il a un métabolisme plutôt avantageux. Il élimine assez vite et se contente de la musculation pour l’instant, la seule chose qu’il peut faire, en fonction des parties du corps travaillées. Lorsque leur commande est prête, Jody récupère le sac que tend le cuisinier. Roman aurait bien aimé le faire, mais avec sa béquille, sa kinésithérapeute a préféré prendre les devants. Ils avancent un peu et s’installe sur la plage, dans un coin un peu plus tranquille, situé suffisamment loin du passage, mais pas à des kilomètres non plus. « Je sais que tu as remarqué que j’étais contrariée tout à l’heure… tu commences à trop bien me connaitre… » À ce moment précis, le jeune homme se demande si finalement c’est une bonne chose. Il sentait que quelque chose n’allait pas et pourtant, impossible pour lui de savoir de quoi il est question. De lui ? Sûrement. Malheureusement. « C’était pas à cause de toi, enfin si un peu, mais tu n’y es pour rien. Le Directeur du centre m’a passé un savon ce matin en arrivant à la première heure. A cause… de nous… enfin du fait je te vois en dehors du centre. » Les ennuis commencent et cela n’est pas pour plaire à Roman. « Ce n’est pas que c’est interdit. Ce que je fais de mon temps personnel ne regarde que moi, mais c’est très mal vu. Le milieu médical et ses commères dans tous les couloirs me sort par les yeux parfois. C’est pareil chez les pompiers ? » Parler d’autre chose avant d’aborder ce problème, leur relation. « Pour les commères ? Sûrement, il n’y en a partout. Mais je ne peux pas balancer mes collègues. Après.. il n’y a pas vraiment ce genre de situation. Le plus souvent, nous perdons contact avec les victimes quelques minutes après la fin de l’intervention. Il n’y a pas cette relation de soignant/patient. » Ils ne sont ici que pour les sauver. Après ça, ce sont d’autres personnes qui s’occupent d’eux, qui rentre dans leurs vies. C’est bête, mais cela plaît à Roman : il ne fait pas ce métier pour avoir de la reconnaissance. En réalité, il ne sait même pas comment il devrait réagir si cela arrive un jour. Il ne sait pas quoi dire, pas quoi proposer. Un savon, ce n’est pas énorme, ce n’est pas comme si Jody était au chomage et pourtant. Le jeune homme ne veut pas faire risquer le pire à la blonde. Il ne le veut pas et pourtant, il n’a pas envie d’arrêter avec elle. Elle lui plaît, c’est indéniable. Et là, assis à côté d’elle, son regard planté dans le sien, Roman ne le comprend que trop bien. La distance qui se réduit n’aide pas, il faut croire que la jeune femme est dans la même situation que lui. À son tour, il se rapproche un peu plus d’elle. Il glisse une main dans son cou et attire le visage de la blonde vers le sien. Comme samedi soir, le pompier ne peut pas résister plus longtemps. Il a envie de tout cela, il a envie de l’embrasser. Alors pourquoi s’en priver ? Ses lèvres viennent épouser à la perfection celles de Jody et tous les souvenirs de leur dernière soirée lui reviennent en tête. Sa main toujours posée le long de la mâchoire de la jolie blonde, Roman s’éloigne un peu. Le minimum possible pour pouvoir parler et être compris. « Tu me plais beaucoup. » Il n'y a aucun mensonge dans ses paroles. Les sentiments qu'il éprouve à l'heure actuelle ne sont pas souvent apparus dans sa vie. Seulement pour Odessa, au début de leur relation. Et si, avec Jody, cela annonçait de belles choses pour la suite ? Un large sourire se dessine sur ses lèvres, alors qu'il prend un peu plus de distance. C'est bien beau tout cela, mais ça ne solutionne pas les soucis de la blonde. Comme elle le dit, elle peut faire ce qu'elle veut de sa vie privée, mais si cela la tracasse, est-ce vraiment une bonne chose de s'arrêter à cela, de ne pas en discuter ? « Mais.. je ne veux pas que ce qu'il y a entre nous impacte ton travail. » Son sourire laisse maintenant place à une grimace. C'est grâce à son poste qu'ils se sont rencontrés et depuis le début de sa rééducation, depuis plusieurs mois maintenant, Roman a bien remarqué que c'était une partie importante dans la vie de la blonde. Il ne peut pas lui demander de tirer un trait sur cela, mais a-t-il envie que cela entraîne la fin de leurs petits rendez-vous ? Non. « Je peux peut-être être pris en charge par quelqu'un d'autre ? » Cette question est posée dans l'optique d'avancer, sans avoir à tracer un trait sur Jody. Un kinésithérapeute, ça doit pouvoir se trouver rapidement, non ? Alors que ce qu'il y a entre eux, c'est plus compliqué. Ça ne se retrouvera pas comme ça.

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Bain de midi ~ Joman#5

— Pour les commères ? Sûrement, il n’y en a partout. Mais je ne peux pas balancer mes collègues. Après.. il n’y a pas vraiment ce genre de situation. Le plus souvent, nous perdons contact avec les victimes quelques minutes après la fin de l’intervention. Il n’y a pas cette relation de soignant/patient.
Je souris à Roman agréablement surprise qu’il ne soit pas le genre de personne à s’attarder ni s’intéresser aux commérages.
— Oui je comprends ce n'est pas vraiment pareil.
C'est idiot, ça ne devrait pas m'atteindre. Il réduit l'espace entre nous et j'oublie tout ce qui me tracassait il y a quelques minutes. Ce baiser efface les doutes, les craintes qui pouvaient encore danser dans mon esprit.Les lèvres de Roman sont douces et sûres à la fois. Je crois qu’un petit son sort même de mes lèvres sans que je puisse le retenir. Un gémissement ? Etre tout près de lui me fait lâcher toutes mes barrières. Et quand il s’écarte de moi pour plonger son regard sombre dans le mien, j’ai presque l’impression que les vagues au loin m’emportent dans leur va et viens tellement ma tête est dans un flou total.
— Tu me plais beaucoup.
Il lâche ces mots comme une bombe qui m’atteint en plein cœur. Je ne m'y attendais pas. Mon souffle et court et mes mains deviennent moites. Jamais aucun garçon (homme ?) ne m’avait avoué ses sentiments ainsi. Sans détours. Sans hésitations. Et l’espace de quelques secondes je ne sais même pas qu’est-ce que je suis sensée répondre. Alors que je tente de trouver quelques mots cohérents, il enchaine sans m’en laisser le temps.
—Mais.. je ne veux pas que ce qu'il y a entre nous impacte ton travail. Je peux peut-être être pris en charge par quelqu'un d'autre ?
Même s’il a probablement raison, je ne peux m’empêcher de grogner intérieurement à sa question. C’est idiot mais j’aime suivre un patient de bout en bout et j’aurai une amère sensation d’échec et de travail bâclé si j’abandonnais le traitement de Roman maintenant. Mais ce n’est pas pour autant je veux renoncer à ce qu’il a entre nous, surtout maintenant que je sais que ça compte pour lui aussi.
— Ce ne serait pas un problème. Mais c’est moi qui en aurais un. Tu crois que j’accepterais que quelqu’un d’autre que moi te touche ?
Une petite moue taquine s’affiche sur mes lèvres pour lui montrer que mes propos ne sont qu’un trait d’humour. La jalousie et la possessivité n’ont jamais été mes grands amis. Mais pourtant… en prononçant ma« bêtise » je me rends compte aussi qu’il y a une part de vrai et je tente de me justifier un peu mieux.
— Non plus sérieusement. Il n’y a pas de problème, il nous suffira de garder nos distances dans le cadre du centre. En dehors… ça ne regarde que nous.. Tu crois que c’est faisable ?
Prononcer « nous » pour parler de Roman et moi me fait prendre conscience de ce qui est en train de se produire. Pour tenter de trouver une distraction à ces pensées qui volent dans tous les sens, j’ouvre le sachet contenant la nourriture du foodtruck et en sort les deux barquettes de frites en lui en tendant une. Une fois l’estomac un peu plus remplit, je trouve enfin le courage de m’ouvrir à lui.
— Roman.. tu me plais aussi beaucoup… Même plus que beaucoup.
Laissant tomber momentanément tout intérêt pour la nourriture, je me penche à nouveau vers lui et lui chuchote à l’oreille en m’agrippant au col de son polo un sourire aux lèvres.
— Follement…
Je dois avoir les joues rouges d’avoir osé lui dire ça.Peut-être que je pourrais rester là, le nez enfoui dans son cou à profiter de sa chaleur et son odeur de gel douche frais. Je lui dépose quelques baisers près de l’oreille en l’effleurant de mon souffle chaud et plein d’émotion. J’ai envie de plus avec lui, le découvrir enfin, je sais parfaitement que ce sera compliqué, il a ses enfants et des responsabilités, mais pour moi c’est loin d’être une contrainte.
— Est-ce que tu veux qu’on fasse quelque chose ensemble ce week-end ?
Faire des projets avec lui me parait aussi naturel que déconcertant. Je n'ose même pas lui proposer quelque chose en particulier de peur de m'imposer ou le pousser à une sorte d'engagement auquel il n'est pas encore près. J'ai simplement envie de passer du temps avec lui. Peu importe comment.

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bain de midi
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« Oui je comprends ce n'est pas vraiment pareil. » Et Roman ne changerait cela pour rien au monde. Il serait bien incapable de faire ce que fait la blonde. À vrai dire, avec les gens en général, il n'est pas forcément à l'aise. Quand il connaît, c'est autre chose, mais avant, c'est compliqué. Lorsque Jody évoque le problème qu'il y a à son boulot, le pompier comprend rapidement sa distance tout à l'heure. Visiblement, dans un centre de rééducation, les commérages vont vite. Et même si Roman tient à la blonde, il ne veut pas que sa carrière en pâtisse. La seule solution qu'il voit pour l'instant, c'est qu'il continue sa rééducation avec quelqu'un d'autres. Mais si Jody ne souhaite plus le revoir, alors il l'acceptera. « Ce ne serait pas un problème. Mais c'est moi qui en aurais un. Tu crois que j'accepterais que quelqu'un d'autre que moi te touche ? » Il arque un sourcil, intrigué par cette remarque. De la jalousie ? Tant qu'elle n'est pas excessive, ça reste intéressant. « Non plus sérieusement. Il n'y a pas de problème, il nous suffira de garder nos distances dans le cadre du centre. En dehors… ça ne regarde que nous.. Tu crois que c'est faisable ? » Par réflexe, Roman hoche la tête comme première réponse à la question de la blonde. « Oui, je pense. Nous sommes tous les deux adultes. » Et il serait dans leur intérêt à tous les deux de se tenir au silence, au moins le temps que la rééducation de Roman soit terminée. La jeune femme ouvre le sac contenant leurs repas. Elle sort d'abord les frites. Roman positionne les siennes au sol, au niveau de ses genoux, pour pouvoir ensuite recevoir son hamburger. Il pioche à plusieurs reprises dans sa barquette de frites, avant que la blonde ne reprenne la parole. « Roman.. tu me plais aussi beaucoup… Même plus que beaucoup. » Après un bref instant avec une distance raisonnable entre eux, Jody se rapproche du pompier. « Follement… » Un large sourire se dessine sur son visage, comprenant ainsi que ses sentiments sont réciproques. « Est-ce que cela veut dire que tu accepterais d’aller plus loin avec moi ? De ne plus être de simples amis, ou tout autre chose que nous sommes actuellement ? » Le jeune homme a vingt-sept ans, bientôt vingt-huit, et pourtant là, il a l’impression d’en avoir seize. La dernière fois qu’il a été en couple avec une femme, ça remonte et aujourd’hui, il a l’impression d’être maladroit. « D’être ma petite amie. » Maintenant que c’est dit, il ne peut plus faire marche-arrière. Mais cela ne le dérange pas. Avec la blonde, il préfère être honnête. Rester sur des non-dits n’est pas bon. « Est-ce que tu veux qu’on fasse quelque chose ensemble ce week-end ? » Il serait bête de refuser une telle proposition. Surtout que cette idée, de la voit où ce week-end, lui plaît beaucoup. « Avec plaisir. J’avais pensé aller au zoo, avec Roméo et Louise. Tu peux venir avec nous. » Le printemps fait doucement sa place dans la ville, les températures sont plus agréables, alors il peut être intéressant de sortir de la maison. La pluie sera peut-être du rendez-vous, ce qui freinerait Roman vis-à-vis de Louise. À l’inverse de Roméo. Lui, rien ne l’arrête. « J’en connais un qui serait content de te voir. Et je ne parle pas de moi. » Même si ce sera aussi son cas, ils seront deux. Mais là, Roman parle de son fils. Depuis qu’il a rencontré Jody, il n’y a pas un jour où il ne parle pas d’elle. Il a peut-être compris que la jeune femme était différente pour son père, qu’elle était spéciale. « Ou alors, nous pouvons voir pour autre chose. » Le zoo n’est pas une obligation et puis, il y a certainement d’autres choses possibles en ville. Il n’imposera rien à Jody, il est ouvert à toutes ses propositions.

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Bain de midi ~ Joman#5

Au final comme d’habitude avec Roman, tout ce qui aurait pu être un obstacle infranchissable paraît d’une simplicité déconcertante. Peut-être est-ce parce qu’il est plus âgé que les garçons que j’avais côtoyé jusqu’à présent. Pas que la liste soit longue… Mais il est plus mature et plus adulte que mes amis de l’université.
— Oui, je pense. Nous sommes tous les deux adultes.
Il me répond comme s’il avait lu dans mes pensées. Me confier à lui devient de plus en plus naturel. D’habitude j’aurai perçu ça comme un danger. Ma précédente relation n’a pas forcément aidé à développer ma confiance en moi et en les autres. Pourtant Roman efface tout ça. Plus je me rapproche de lui, plus j’ai envie de lui confier tout un tas de choses qui parcourent mon coeur. Jusqu’à lui avouer entre deux baisers combien il me plait. Me laissant le coeur comme dans un tourbillon, ses lèvres s’écartent dans un sourire magnifique quand je lui réponds.
— Est-ce que cela veut dire que tu accepterais d’aller plus loin avec moi ? De ne plus être de simples amis, ou tout autre chose que nous sommes actuellement ? D’être ma petite amie.
Mes yeux s’ouvrent ronds comme des soucoupes sous la surprise. C’est à ça que ça ressemble quand un garçon est vraiment intéressé ? Je croyais que ce n’était possible que dans les romans à l’eau de rose et très idéalisé. Revers de ma matinée plus que pourrie, le pompier éclaire ma journée de ses paroles. Veut-il vraiment que nous soyons un couple ? Ai-je bien compris ? Mon coeur bat tellement fort qu’il me comprime la poitrine.
— Quelque chose comme ça oui…
Je hoche la tête les yeux brillants dans les siens. M’amusant même un peu du côté solennel de ce moment. Je passe mes bras autour de sa nuque, le renversant avec moi sur le plaid dans le sable pour me lover contre lui et lui murmurer tout près des lèvres, la voix pleine d’émotions.
— Et vous monsieur Hellington, acceptez-vous d’être mon petit ami ? Pour le meilleur et pour le pire...
Il hoche la tête en réponse en éclatant de rire. Je crois que c’est la meilleure pause déjeuner que j’ai jamais eue. Je me blottis doucement dans ses bras, allongés et enlacés l’un contre l’autre, c’est le meilleur endroit de la terre. Nos lèvres se dévorent de plus belle et je voudrais que cela ne s’arrête jamais. Je sais qu’il y aura encore du chemin, que les simples mots que nous nous sommes dit ne sont que le début de nos sentiments, mais pour une fois j’y crois. Je veux le voir le week-end prochain et les suivants et je lui montre dans chaque baiser et chaque regard.
— Avec plaisir. J’avais pensé aller au zoo, avec Roméo et Louise. Tu peux venir avec nous. J’en connais un qui serait content de te voir. Et je ne parle pas de moi. Ou alors, nous pouvons voir pour autre chose.
Passer toute une journée avec lui, Roméo et Louise, c’est tout ce que je voulais, sans avoir osé m’imposer. Etre sa petite amie ne veut pas forcément dire non plus qu’il veut partager sa vie de famille avec moi. Pourtant je crois que j’ai envie de tout avec lui, j’aime autant l’homme tendre et prévenant qu’il est avec moi, que le papa poule avec ses enfants.
— Le Zoo c’est parfait. J’ai hâte d’être à ce week-end. Ca fait longtemps que je n’y suis pas allée et j’ai hâte d’imiter tous les cris d’animaux avec Roméo.
Mon sourire doit témoigner de ma joie à cet instant. C’est tellement parfait que je croirais presque rêver.

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