A funny and tasty workshop with a friend {ft. Liam}

A funny and tasty workshop with a friend

Aujourd’hui, nous avions décidé de nous retrouver au marché de noël avec Liam. C’était l’occasion idéale pour joindre l’utile à l’agréable en passant un peu de temps ensemble tout en se donnant des idées de cadeaux pour nos proches. De plus, j’avais enfin réussi à me libérer du temps et cela faisait une paie que nous ne nous étions pas vus ! En farfouillant un peu sur internet, j’avais repéré quelques stands intéressants mais surtout une activité qui nous parlerait à coup sûr… : un atelier de création de maison en pain d’épice. Bon, pâtisser n’allait pas vraiment changer ma journée mais le faire en tant que loisir et accompagnée d’un ami serait un très bon moment. C’était la raison pour laquelle j’étais arrivée en avance à l’adresse indiquée, emmitouflée dans mon long manteau d’hiver. Le spectacle des chalets colorés d’où s’échappaient bon nombre d’odeurs alléchantes et de lumières par milliers me ramenait tout droit vers l’enfance. Noël avait toujours été ma fête préférée. Toute la famille se réunissait chaque année pour partager un repas et des instants qui semblaient plus précieux que d’ordinaire. Et puis la neige nous faisait tous tourner la tête si bien que peu importe l’âge de chacun, nous nous retrouvions toujours à construire un bonhomme de neige ou des murailles pour faire des batailles. Je souriais en rêvassant, oui j’avais déjà hâte d’être au réveillon.

L’arrivée de Liam me ramena sur terre et je le saluais avec bonne humeur :

« Je nous ai trouvé une super activité qui va commencer d’ici… » Je consultais ma montre. « Une dizaine de minutes ! Je pense que tu ne m’en voudras pas si je nous ai inscrits sans te consulter, tu vas comprendre. »

Je souriais de façon énigmatique tout en l’empoignant doucement par le bras pour le mener tout droit vers une petite salle non loin du marché bondé. Des odeurs sucrées embaumaient déjà l’atmosphère alors que seuls les ingrédients principaux étaient disposés sur chacun des plans de travail. Je me félicitais de m’être gavée de gâteaux de Noël un peu plus tôt dans la journée, ainsi j’allais avoir plus de facilité à garder mon self-contrôle et je n’allais pas me jeter sur la pâte que nous allions préparer. Malgré mon métier, j’adorais toujours autant manger des pâtisseries, heureusement que je courrais régulièrement avec Debbie pour pallier à tout ça d’ailleurs ! Je donnais nos noms à la pâtissière en chef et nous nous dirigeâmes vers une patère afin de déposer nos manteaux. Ceci fait, nous récupérâmes nos tabliers et j’enfilais le mien avant de m’adresser à Liam :

« Ça fait longtemps que nous n’avons plus pâtissé ensemble. Je me suis dit que c’était une bonne idée. En plus, tu pourras en refaire pour Lily ! »

Je lui donnais un petit coup de coude amical avant que nous ne rejoignions docilement un plan de travail. L’activité pouvait aussi bien se pratiquer seul qu’à plusieurs mais je notais que la majorité des personnes présentes étaient accompagnées de leur famille ou de leur conjoint.

« La prochaine fois, tu m’apprendras à cuisiner une dinde pour compenser. »

Je lui souriais avec chaleur. Si j’étais la pro du sucré, il était sans conteste le meilleur cuisinier d’entre nous. Mes compétences culinaires étaient plutôt moyennes, en tout cas, pas assez élevées pour préparer une dinde farcie aux marrons ou tout autre plat de fête qui nécessitait un peu plus de compétence que de simplement les mettre au four. Je n’étais pas médiocre non plus mais disons que chacun avait sa spécialité. J’attrapais la fiche qui contenait la recette et la parcourait des yeux un instant avant de la tendre à mon ami. Il n’y avait rien de sorcier pour moi, j’étais tout à fait capable de préparer du pain d’épice. En revanche, nous allions bien nous amuser à monter la fameuse maison ainsi que de la décorer.

Codage par Libella sur Graphiorum

Spoiler:


Si Liam n’aimait pas spécialement Noël ou plutôt, la course effrénée aux cadeaux, il était forcé d’avouer que pour l’occasion, Island Bay avait revêtu de belles couleurs et surtout, proposait un choix d’activités intéressantes. Bien sûr, il y avait toujours un peu trop de monde à son goût, même si ça n’avait rien à avoir avec la folie de la capitale. Mais le marché de Noël, par exemple, lui rappelait de bons souvenirs, évoquant la neige, le ramenant à la période où Lily et lui vivaient à Londres. En fait, Noël en Europe était plus magique qu’en Nouvelle-Zélande, même si c’était ce qu’il avait connu depuis son enfance. Et en l’occurrence, Liam avait l’impression de se retrouver en hiver (le froid en moins) dans un village européen, comme ils en avaient beaucoup visité avec Lily. Et c’était quelque chose qui le rendait un peu nostalgique. Londres lui manquait et il savait que c’était aussi le cas de sa fiancée. Mais ici, ils avaient leur famille et n’était-ce pas le principe même de cette fête ? Quoi qu’il en soit, libéré des nombreux achats et cadeaux à faire, Liam avait relâché la pression. Il s’émerveillait des décorations et autres activités, même s’il aurait préféré venir à un moment où il y avait encore moins de monde. Mais de toute façon, il n’aurait pas osé dire non à Hannah. Elle avait l’air tellement heureuse de lui proposer un atelier surprise qu’il n’aurait voulu pour rien au monde étouffer son enthousiasme. Alors il l’avait rejoint sans poser de questions, se demandant à quand remontait la dernière fois où ils avaient tous les deux été ici pour Noël. Des années, c’était une certitude.
« Quoi qu’il en soit, je te promets de ne pas râler ! » Même s’il y avait des choses qui ne lui disaient rien qui vaille, le jeune homme était quelqu’un de facile à vivre, qui s’accommodait facilement aux autres sans râler. Aussi se laissa-t-il entraîner sans protester, reniflant avec envie une odeur sucrée qui réveillait sa faim rarement satisfaite. Il ne put donc que sourire jusqu’aux oreilles quand il comprit de quoi il s’agissait, enfilant son tablier. « Toi, tu sais que pour parler à mon coeur, il faut passer par mon estomac » plaisanta-t-il dans un accès de gaieté. « Tu as raison, c’est une bonne idée et Lily sera enchantée. » Il adorait faire de la pâtisserie. Ça ne faisait pas partie de son travail actuel, mais il avait appris les bases à l’école et avait suivi une formation en France. Certaines choses ne s’oubliaient pas - surtout quand on aimait les pratiquer à la maison. « Ceci dit, je suis sûr que ta recette de pain d’épices est encore meilleure ! Je m’approprie donc le papier et toi, tu apportes des améliorations dignes de la chef pâtissière que tu es. C’est un privilège d’apprendre de toi. » Ils commencèrent donc la préparation. Ce n’était rien de bien compliqué, en réalité. Mais Hannah avait des astuces qui ne figuraient pas sur la recette de base. Et surtout, pâtisser à deux, c’était plus amusant et ça ne les empêchait pas de discuter. « Ça me fait plaisir de passer un moment avec toi. Mais je me demande si je n’aurais pas dû venir avec Lily. Ça jase facilement, ici. La dernière fois, on m’a vu en train de discuter au cimetière avec… Euh… On va dire une ex, et ça a fait toute une histoire. Je m’en fiche, perso, mais Lily a eu de la peine et ça, ça passe mal. Les petites bourgades dans toute leur splendeur. »

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« Toi, tu sais que pour parler à mon cœur, il faut passer par mon estomac !
- N’est-ce pas le fonctionnement de tous les hommes ? C’est aussi ce qui a motivé ta vocation, non ? » Le taquinais-je dans un large sourire.

En réalité, je ne me souvenais plus du nombre d’heures que nous avions passées dans nos cuisines respectives pour peaufiner à ce point nos talents. Nous étions des bons vivants après tout. Les éloges de Liam sur ma pâtisserie me firent plaisir mais je continuais sur le ton de la plaisanterie :

« Attention, si tu me complimentes trop, je vais prendre le melon… ce qui serait dommage pour faire du pain d’épice ! »

Oui, j’étais la pro des blagues nulles mais il avait l’habitude à force de me côtoyer. Je me demandais vaguement si c’était une bonne chose pour lui d’ailleurs… Nous nous mîmes au travail sans réellement écouter la pâtissière en chef mais plutôt en discutant tout en allant à notre rythme. Le résultat serait, de toute façon, le même à la fin. J’aiguillais Liam sur certaines quantités et façons de faire. Il m’évoqua alors ses craintes et je haussais les épaules :

« S’il suffit de dessiner Rudolph sur une maison en pain d’épice pour considérer que tu fréquentes quelqu’un, je dois probablement coucher avec toute la ville pour vendre mes pâtisseries ! Non mais plus sérieusement, tu me connais et Lily aussi, ce n’est pas comme si j’étais la parfaite inconnue. De toute façon, tu as dû lui dire que tu passais l’après-midi avec moi, non ? Je ne vois pas ce qui pourrait l’inquiéter mais tu sais que tu peux compter sur moi pour le lui prouver en cas de besoin. »

La situation serait quand même assez ridicule. Lily ne croirait pas un seul instant qu’il pouvait se passer quoi que ce soit entre Liam et moi. Je le considérais et je l’avais toujours considéré comme un frère. De plus, je n’étais pas pour la consanguinité ! En revanche, j’avais tiqué sur un mot dans sa déclaration précédente :

« Donc tu as parlé à une ex récemment… ? »

Ok je n’étais pas sa copine mais je restais une fille et ma curiosité avait été piquée au vif. Je l’observais avec grand intérêt. Tout en discutant, nous avions terminé la préparation du pain d’épice. Je la disposais avec grand soin sur deux plaques puis je les enfournais en vérifiant le thermostat et le temps de cuisson. Il ne manquait plus que nous rations les fondations de la future maison à construire et à décorer ! J’attrapais ensuite l’éponge qui bordait le plan de travail et je tendais la main vers Liam pour qu’il me donne les plats à nettoyer. S’il y avait bien un trait qui me caractérisait en règle générale et d’autant plus dans mon travail c’était la maniaquerie et à juste titre ! J’avais horreur de pâtisser sur des surfaces salies quand bien même il s’agissait de farine, de chocolat ou de n’importe quel ingrédient ayant laissé des traces de son passage. A vrai dire, c’était une des bases du métier, ne serait-ce que pour l’hygiène ou le rendu final du gâteau. Une fois la vaisselle terminée, je m’essuyais les mains avec un torchon tout en m’adossant au comptoir. La cuisson n’en était qu’à la moitié, nous avions donc tout le loisir de discuter.

« Vous avez prévu de repartir en France bientôt ? »

Je posais la question tout simplement parce que j’allais retrouver ma mère au mois de janvier pour partager un repas de fête, un peu en retard, avec elle. L’idée de faire le voyage avec le jeune couple me plaisait tout autant. J’adorais leur montrer de nouveaux endroits mais aussi les lieux où j’avais grandi et passé la plupart de mes vacances scolaires. Etant donné que les deux adoraient l’Europe et les voyages, c’était toujours intéressant d’en discuter.

Codage par Libella sur Graphiorum

Spoiler:

Sans hésiter, Liam hocha plusieurs fois la tête en signe d’approbation. « Moi qui pensais être unique, c’est dommage… Mais tu as raison, c’est le mode de fonctionnement de tous les hommes. » Et oui, c’était en effet d’abord parce qu’il aimait manger que Liam s’était tourné vers la cuisine comme domaine d’apprentissage puis de travail. C’était vite devenu une véritable passion, un art à part entière à ses yeux. Et le jeune homme était sûr qu’il en était de même pour la pâtisserie à l’égard de son amie Hannah, ce qui leur faisait un autre point commun. Ils se connaissaient depuis l’enfance, mais leur amitié s’était renforcée par la suite. Dans une ville aussi petite qu’Island Bay, la plupart des enfants qui n’avaient pas un trop grand écart d’âge se connaissaient tous plus ou moins. Liam s’était d’ailleurs rendu compte, en revenant qu’au bercail, qu’un grand nombre de ceux avec qui il était allé à l’école étaient toujours là. En revanche, il n’avait pas gardé contact avec beaucoup d’entre eux, surtout quand il s’était envolé avec Lily à l’autre bout de la planète. Il était content qu’il n’en ait pas été de même avec Hannah, même s’ils ne s’étaient pas beaucoup vus en plusieurs années. « Je crois que même tes blagues m’avaient manqué, c’est pour dire ! » la taquina-t-il, avant de reporter son attention sur les ingrédients. Il suivait ses instructions, content de ne pas être tout seul à faire de la pâtisserie pour une fois. Et en même temps, il pouvait lui parler. Il ne put s’empêcher de lui dire que le fait de le voir en compagnie d’une autre femme que sa fiancée avait déjà fait parler, révélant un peu de la rancoeur qu’il éprouvait suite à cet épisode encore frais dans sa mémoire. La réponse de la brune le surprit tellement qu’il en toussa de rire. « Heureusement que tu n’as besoin de rien de tel pour vendre tes merveilleuses pâtisseries ! »
Tout en attrapant un bol, il poursuivit. « Bien sûr que je lui en ai parlé. Je lui cache rien du tout, sauf, euh… Si j’oublie. » Parce que ça lui arrivait. Rien d’intentionnel donc. Mais ça pouvait être mal interprété, il l’avait bien compris au fil des années. « Je pense pas que quoi que ce soit l’inquièterait. C’est juste que… Des dires comme ça… Bah ça fait jamais plaisir, c’est sûr. » Il fallait dire que ce n’était pas la même personne. Il n’avait aucun passé amoureux avec Hannah. En revanche, il la connaissait suffisamment bien pour savoir qu’elle lui poserait la question et il lui lança un regard amusé. « Oui. Avec Mikayla, si tu veux tout savoir. C’est pas comme si j’avais beaucoup d’ex, de toute façon. Quand on se case à dix-sept ans, c’est assez prévisible… » Il lui passa le sucre vanillé, à sa demande. « Je l’ai croisée au cimetière. On a discuté un peu. C’est tout. A en croire les racontars, on aurait pensé que j’avais fait quelque chose d’aussi grave que de passer la soirée seul avec elle dans un endroit désert et sombre. » Tout en l’écoutant, Hannah enfourna le pain d’épices. Liam trouvait qu’ils avaient été rapides, mais après tout, les autres participants ne pouvaient pas avoir le même niveau qu’elle en pâtisserie. Plutôt content de cette séance, le Millstone se lava soigneusement les hommes et s’adossa à son tour contre le comptoir. « En France ? Franchement, ça m’étonnerait beaucoup. Oh, bien sûr, on adorerait. Mais on est en mode économies. Qui aurait cru que ça coûtait aussi cher de se marier ? Enfin, peut-être d’autres, mais… Pas moi. Bref, en tout cas, j’ai prévu de l’emmener en lune de miel, mais avec les moyens limités, ce sera beaucoup moins loin que ça. » Il avait bien sa petite idée là-dessus. « Et toi ? Tu as des projets ? On parle trop de moi, raconte-moi comment tu vas. »

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« Oh, si mes blagues t’avaient manquées, c’est que ça fait vraiment longtemps qu’on ne s’est pas vus ! Ou bien tu es maso sur les bords, mais ça je l’ai toujours su ! »

Et nous rîmes ensemble de mes commentaires stupides. J’adorais notre relation avec Liam, tout était toujours simple et bon enfant, à croire que la distance et le temps n’avaient eu aucune prise sur nous. Pourtant nous avions évolués chacun de notre côté et à notre rythme mais au fond nous étions restés les mêmes. Il m’était un ami très cher et nos moments de complicité retrouvée me réchauffaient le cœur.

« Toi oublier ? Ce n’est tellement pas ton genre… » Le taquinais-je gentiment en lui donnant un léger coup de coude.

Je hochais la tête à ses dires mais je faisais un peu la moue :

« Attend, c’est ça l’info croustillante que les racontars font circuler ? Je m’attendais à un autre résultat pour un tel teasing ! Mais tu sais, techniquement, un cimetière c’est généralement un endroit désert et sombre donc ça pourrait coller… »

Je me triturais le menton avec un faux air sérieux avant de pouffer. Pour moi, les gens qui perdaient leur temps à faire circuler des rumeurs sur les autres ne valaient même pas la peine que j’y prête une réelle attention. A vrai dire, je les haïssais même. La méchanceté gratuite qui les amusait tant avait le pouvoir de gâcher des vies aussi bien légèrement que gravement. C’était quand je croisais ce genre de personne que mon caractère chaleureux s’éteignait pour laisser place à une froideur mordante à leur encontre. Et puis de toute façon, même si leurs propos étaient véridiques… qu’est-ce que ça changeait vraiment dans leur vie ? Était-elle si ennuyeuse qu’il fallait se mêler de celle des autres ? Et voilà, songer à tout ça m’avait agacée. Heureusement Liam répondait déjà à mon autre question qui regagna entièrement mon intérêt :

« Et où est-ce que tu as l’intention d’emmener ta promise ? Après concernant le budget, tout dépend du style de mariage que vous voulez mais pour quelque chose de bien, oui les prix sont plutôt élevés… Ça veut dire que vous avez bloqué une date ? »

Mes yeux s’étaient illuminés façon chat potté à l’évocation de son mariage à venir avec Lily. J’adorais les mariages d’autant plus quand les mariés étaient de très bons amis. Pourtant, malgré tout le bonheur que je leur souhaitais, je ne pouvais m’empêcher de ressentir une pointe de jalousie. Oh rien de mesquin ou de méchant ! Mais les deux tourtereaux étaient plus jeunes que moi, s’étaient rencontrés très tôt et étaient sur le point de concrétiser leur vie de couple. Ils étaient en train de réaliser le schéma de vie que j’avais toujours rêvé de suivre. A la place de ça, j’étais encore célibataire à bientôt trente ans alors que je rêvais de mariage de princesse et d’enfants. Mon cœur se serra dans ma poitrine et je me crispais sur mon éponge. Cette « mini-crise » dura seulement quelques secondes avant que la joie ne reprenne le contrôle de mes émotions.

« Et toi ? Tu as des projets ? On parle trop de moi, raconte-moi comment tu vas. »

Je lâchais un petit soupir avant de lui répondre :

« Professionnellement parlant, tout roule. Ça va faire un an que ma pâtisserie tourne et les clients sont ravis, je pense même embaucher bientôt. Personnellement, c’est un peu plus… compliqué. » Je me mordillais la lèvre. « Comme j’ai beaucoup travaillé pour en arriver là, je vis chez mon père depuis mon retour en Nouvelle-Zélande. Ça fait quelques semaines que je cherche une colocation mais dès qu’on évoque ma récente boutique, les propriétaires prennent peur et refusent mon dossier. J’ai peut-être une piste grâce à Luana, j’ai rendez-vous pour une visite d’appart’ avec un ami à elle et une autre coloc’ alors je blinde mon dossier et je croise les doigts ! Il est grand temps que je retrouve mon indépendance depuis mon retour au pays. »

Mes parents ne me mettaient pas à la porte et malgré mon emploi du temps très chargé qui me laissait rarement le loisir de traîner dans la maison, j’allais quand même avoir trente ans ! Et je n’avais aucune intention d’être une Tanguy. Je n’évoquais pas mes relations foireuses, il devait probablement s’en douter ou bien il me poserait la question par la suite. Je relevais les yeux vers les autres plans de travail pour évaluer mentalement leur avancée et je m’intéressais à une mère et sa petite fille qui se situaient juste à côté de nous. Elles s’intéressaient déjà aux couleurs qu’elles allaient mettre sur leur maison sucrée tout en évoquant l’idée de dessiner Saint Nicolas en Père Noël. En grande traditionnaliste que j’étais, je ne pus m’empêcher de marmonner dans ma barbe :

« Non, Saint Nicolas était là avant l’histoire du Père Noël et il ne portait pas un bonnet rouge ni ne volait en traîneau. Il est habillé en évêque et est juché sur un âne. A la rigueur, le seul point commun qui peut les représenter ensemble est le fait de récompenser les gentils enfants avec des cadeaux. »

Codage par Libella sur Graphiorum

Spoiler:

« Chacun ses défauts hein » tenta piteusement de se défendre Liam, parce que oui, le fait d’être tête en l’air faisait partie des siens. Ça lui avait d’ailleurs déjà valu pas mal de soucis ou autres malentendus et Hannah le connaissait suffisamment pour savoir ça. Heureusement, elle connaissait aussi ses qualités et il était certain que, si elle avait entendu quoi que ce soit à son sujet et au sujet d’une autre femme, elle n’en aurait rien cru. « Oui hein, toi aussi tu trouves ça aussi ridicule que stupide ? Ouf, je me sens moins seul. » Un peu soulagé, Liam lui adressa un sourire, lequel se transforma en grimace quand la brune lui rappela néanmoins qu’un cimetière était souvent désert et sombre. Il fit mine de lui donner un léger coup de coude. « C’est ça, charrie-moi, toi aussi ! » En réalité, il savait qu’elle était de son côté et qu’elle le serait probablement toujours. Cette certitude lui apportait un peu de réconfort parce que, quand il entendait ce genre de racontars et que ça touchait quelqu’un qu’il aimait, il avait en horreur le petit bled dans lequel il avait notamment la majeure partie de sa vie. « Tu sais, franchement, ces trucs-là… Cet aspect-là des petites villes, oui il y a un avantage à ce que tout le monde se connaisse plus ou moins, mais le gros inconvénient c’est vraiment que du coup beaucoup s’intéressent de trop près à la vie des autres. Après ce qui s’est passé, j’ai repensé à l’anonymat londonien et ça a vraiment du bon. Alors l’envie me prend de déménager, ne serait-ce qu’à Wellington. Puis ensuite je me souviens pourquoi on est rentrés au bercail. » Pour être plus proche de leur famille. Parce que tout pouvait changer en un clin d’oeil. Parce qu’ils voulaient profiter de ceux qu’ils aimaient.Et bien sûr, maintenant  qu’ils préparaient leur mariage, c’était bien d’être à côté de tout le monde. Les parents de Liam n’auraient peut-être pas pu, financièrement, se déplacer jusqu’en Europe - en tout cas, ils auraient eu du mal à économiser en quelques mois, vu que les choses se précisaient rapidement.
D’ailleurs, Hannah lui posa la question, les yeux brillants. « Oui, on a bloqué une date. Tu recevras bientôt ton carton d’invitation. Tu verras, il est super joli, c’est Lily qui l’a choisi. Y’a pas à dire, elle a vraiment bon goût… La preuve, elle m’a choisi. » Bien entendu, elle savait qu’il plaisantait. Il avait horreur des personnes qui avaient une trop haute opinion d’eux-mêmes. « J’imagine que toutes les filles rêvent plus ou moins d’un mariage de princesse… Personnellement, je préfère partir en voyage, mais j’ai bien compris que c’est une journée unique à marquer absolument. Quant au lieu de la lune de miel… Eh bien, je sais pas encore si ce sera possible. Mais si c’est le cas, je lui en ferai la surprise. Et je t’enverrai une devinette quand je serai fixé, tiens ! » Jetant un coup d’oeil au pain d’épices qui cuisait en répandant une odeur divine, Liam demanda à son amie comment elle allait, tout simplement. « Je t’assure, les clients sont ravis ! J’en entends parler, parfois. Du coup, si tu envisages d’embaucher, pense à moi et on développera une gamme vegan » lança-t-il en plaisantant. « J’espère que cette nouvelle recherche de colocation marchera. J’imagine à quelle point c’est la galère. On a beau adorer nos parents, je ne vis plus avec eux depuis tellement longtemps que si la cohabitation était à nouveau nécessaire, ce serait pas sans difficultés. Ce serait pour vivre dans quel quartier ? » Il n’osa pas lui demander ce qu’elle entendait par plus compliqué personnellement. Il ne savait pas si elle parlait de ses relations amoureuses, mais ce n’était pas lui qui se montrerait indiscret. Il préférait qu’elle en parle d’elle-même, si c’était ce qu’elle désirait. Mais pour le moment, elle semblait préoccupée par autre chose, visiblement dérangée par les propos qu’elle entendait. « En tout cas, tu es calée en histoire de Noël » fit-il en riant tandis qu’elle parlait entre ses dents. « Tu m’apprends des choses par la même occasion, histoire que je me couche moins bête ce soir. »

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« Tu sais, franchement, ces trucs-là… Cet aspect-là des petites villes, oui il y a un avantage à ce que tout le monde se connaisse plus ou moins, mais le gros inconvénient c’est vraiment que du coup beaucoup s’intéressent de trop près à la vie des autres. Après ce qui s’est passé, j’ai repensé à l’anonymat londonien et ça a vraiment du bon. Alors l’envie me prend de déménager, ne serait-ce qu’à Wellington. Puis ensuite je me souviens pourquoi on est rentrés au bercail.
- Et Lily ? Elle en pense quoi de tout ça ? Tu sais, rien ne vous empêche de déménager après le mariage si vraiment tu ne te sens pas bien ici. Je ne te dis pas de vivre en Europe mais une ou deux heures de route n’ont jamais fait de mal à personne. »

L’ampleur que prenait cet incident dans l’esprit de Liam m’inquiétait légèrement. Sa fiancée n’était pas une petite chose fragile et quand bien même je pouvais comprendre son souhait de la protéger des racontars, ce genre de chose pouvait se produire n’importe où à partir du moment où on restait un certain temps dans un coin. Cela prendrait plus de temps étant donné qu’il avait grandit ici mais le résultat serait le même dans dix ans, voire même bien avant. Heureusement, la discussion prenait une note plus joyeuse lorsque nous discutions du mariage.

« Ce n’est pas la modestie qui t’étouffe ! » Riais-je en lui rendant son coup de coude. « Mais pour de vrai ? Tu ne vas réellement rien me dévoiler ? Tu peux au moins me dire le thème et même une ou deux choses, je suis ton amie d’enfance quand même… » Trépignais-je en m’agrippant à son bras telle une enfant.

On pouvait dire que pour une curieuse telle que moi, le côté secret de Liam me faisait tourner en bourrique. Il le savait en plus, que je voulais tout savoir dès que ça concernait mes proches ! Bon, je ne lui demandais pas non plus de me donner le programme de la journée avec des heures précises ainsi que le plan de table mais au moins quelques petites choses à se mettre sous la dent, comme par exemple : le thème.

« Si tu ne me dis rien et que ma robe n’est pas accordée à la cérémonie, je te tiendrais pour unique responsable, je te préviens ! » Geignais-je encore.

Tel que je le connaissais, mes gamineries n’auraient pour effet que de le faire rire mais j’adorais l’embêter – tout autant que parvenir à mes fins. S’il restait trop secret, j’avais toujours l’option de contacter la mariée elle-même. Et il était bien connu que les femmes étaient plus bavardes que les hommes ! Oui, je n’avais pas peur de me servir des clichés. Et le sujet dérivait sur moi et sur mes ambitions :

« Que d’éloges ! Ne t’inquiète pas, je t’appellerais pour concocter des macarons saveur poulet braisé ou des cupcakes goût concombre mariné ! »

Quitte à faire appel à un cuisinier, autant profiter de l’intégralité de ses talents. Une gamme vegan, moi ? Et puis quoi encore ? J’étais trop viandarde pour ça !

« Je ne me suis pas arrêtée à un quartier spécifique. Enfin disons que si, au début je visais West Bay mais les refus s’accumulant, je suis maintenant prête à accepter n’importe quel logement à condition qu’il ne soit pas trop loin de mon boulot. Je sais que j’y vis mais quand même… Ce n’est pas tant la cohabitation avec mon père et ma belle-mère qui est difficile mais j’ai l’impression d’être une ado dans une vie d’adulte, tu vois ce que je veux dire ? Quant aux relations, n’en parlons même pas… Comment veux-tu avoir la moindre intimité dans cette situation ? »

Sans parler de relations charnelles, il était plutôt compliqué d’inviter un mec fraîchement rencontré à venir passer la soirée chez ses parents. Oh bien sûr, je pouvais toujours aller chez lui mais ce détail assez important n’était pas la seule raison de mon célibat. Je me mordillais la lèvre.

« Dis… tu trouves que je suis une femme envahissante ? Honnêtement ! »

J’observais la réaction de Liam du coin de l’œil. C’était un homme après tout et même si nous étions simplement amis, il pouvait déceler certains de mes comportements différemment de mes amies féminines. Pourquoi effrayais-je tant la gent masculine ? La sonnerie du four me fit sursauter et je redescendais sur terre. Ce fut à cet instant que je relevais l’erreur de la jeune maman entre le père noël et saint nicolas. Liam en fut d’ailleurs amusé si bien que mon sourire refit surface :

« Oh tu sais, avec la pâtisserie et ma famille, il y avait peu de chances que j’échappe à cette histoire. Et je suis très traditionnelle, tu me connais ! »

Ce fut l’instant que choisit la pâtissière en chef pour faire le tour des plans de travail avec un plateau chargé de verres originaux. Elle les distribua à chacun d’entre nous avant de se planter face à l’ensemble de ses élèves :

« Le moment le plus difficile est sur le point de commencer : l’assemblage de vos maisons. Pour vous donner du courage, j’ai pensé qu’un bon lait de poule serait approprié. »

Elle tendit son verre et nous fîmes de même avant que je ne me tourne vers Liam pour trinquer avec lui et que je ne boive quelques gorgées de ce délicieux lait de poule.

Codage par Libella sur Graphiorum

Spoiler:

Comme à beaucoup de questions qu’on lui posait, Liam haussa vaguement les épaules. « Elle pense comme moi, en gros. Mais on a envie, enfin peut-être surtout moi, d’être auprès de nos familles. C’est tellement pratique de faire un tour chez mes parents après le boulot, ou encore d’organiser un dîner à la maison avec Poppy ou Freya. Ce serait déjà différent si je vivais à Wellington, par exemple. Je sais qu’on vit pas forcément pour être à côté de sa famille, mais… J’ai vécu pendant huit ans à l’autre bout du monde et franchement, je regrette de ne pas avoir mieux profité… De ma nièce, notamment. Je l’ai vue grandir à travers nos appels FaceTime. Je me disais que j’avais hâte d’être auprès d’elle et… J’ai jamais vraiment eu l’occasion de l’être, au final. » Depuis le terrible accident qui avait endeuillé la famille Millstone, les reproches avaient tourné dans la tête de Liam et aucune des paroles de réconfort procurée par ses proches n’avait eu l’effet escompté. Il avait compris que se rassurer mutuellement n’était pas forcément utile : chacun d’eux devait apprendre à se pardonner à soi-même, ce qui n’était pas gagné. « On m’a dit qu’il ne faut pas vivre dans la peur. Mais je n’ai pas l’impression de vivre dans la peur. J’ai seulement… Revu mes priorités. Ce sera toujours Lily, bien sûr. Mais je veux être là pour eux aussi. Perdre un frère, c’est horrible, Freya a eu un mal fou à remonter la pente et l’équilibre reste fragile. Alors tu imagines perdre un fils et une petite-fille en même temps ? C’est pas dans l’ordre normal des choses. Je suis pas dupe, mes parents ne seront plus jamais comme avant, plus tout à fait en tout cas. Ce jour-là, quelque chose s’est brisé définitivement en eux. » Il ne voulait pas donner l’impression d’être pessimiste, il décrivait simplement la réalité de sa famille à Hannah.
Heureusement, il y avait bien d’autres sujets de conversation joyeux, comme les préparatifs du mariage. Le jeune homme se mit à rire en entendant les jérémiades de son amie. « Ça te va bien de faire l’enfant, dis donc ! Mais t’en fais pas pour ta robe, le thème est bien spécifié sur les invitations. Lily a pensé à tout. Quant au reste, qu’est-ce que tu veux que je te dise ? Dis-moi ce qui t’intéresse, mais je suis pas sûr de pouvoir t’aider. Je me contente d’exécuter les tâches qui me sont assignées et ce rôle me convient tout à fait. C’est sûr que tu obtiendras plus d’informations croustillantes auprès de Lily. » Depuis qu’il avait des discussions régulières à ce sujet, Liam se rendait compte qu’ils étaient parfois enviés. En réalité, il savait qu’il avait simplement de la chance d’avoir rencontré la femme de sa vie avant de ressentir le poids du célibat - certains voyaient ça comme un avantage et d’autres comme un inconvénient. Beaucoup étaient encore très contents d’en être à un stage bien différent de leur vie. « Oui, je vois ce que tu veux dire. Je crois que ça m’aurait pas dérangé d’être en mode ado chez mes parents jusqu’à trente ans, mais c’est sûr que c’est bien d’être totalement indépendant. Si tu veux, je chercherai aussi un peu de mon côté, je peux voir si je trouve des pistes intéressantes. » Il se tourna vers elle, un peu surpris, quand elle lui posa une question qui, visiblement, lui tenait à coeur. « Non, je ne trouve pas que tu sois envahissante. Tu as plein de qualités et en plus, tu vas lui préparer plein de bonnes pâtisseries ! Le truc, c’est peut-être de retenir un peu tes élans romantiques au début. Je me souviens de ce que tu m’avais raconté une fois, comme quoi tu as tendance à parler de mariage et tout au bout de trois mois. Il y en a pas mal à qui ça fait peur, apparemment… Après, mon avis n’engage que moi, mais je suis sûr que si c’est le bon, il n’hésitera pas à s’engager. Mon grand frère s’est marié jeune et il n’a jamais eu d’hésitation, ça s’appelle le véritable amour j’imagine. Je vois pas comment ça pourrait ne pas t’arriver à toi. C’est juste… Plus long, mais ça te donne l’occasion de faire plein de choses en attendant, non ? » Liam accepta poliment le joli verre distribué par la chef pâtissière, mais il le laissa pour Lily. Il ne buvait pas de lait de poule, sauf si c’était lui-même qui le préparait sans produits d’origine animale. « Alors, prête pour l’assemblage de la maison ? »

A funny and tasty workshop with a friend

L’évocation du drame qui avait frappé la famille de Liam me faisait froid dans le dos. Oui, dans ces circonstances je pouvais parfaitement comprendre son envie d’être au plus près des siens ainsi que sa culpabilité. Or, s’il y avait bien quelque chose pour lequel il n’était pas coupable, c’était le drame en lui-même.

« Oui, tu étais absent et oui, tu as loupé les premiers pas, les premiers mots et certaines phases de vie de ta famille. Je sais que c’est extrêmement facile à dire quand on est extérieur à tout ça et nous en avons déjà parlé mais tu n’as pas à t’excuser de vouloir vivre ta vie. Vous avez partagé tellement de choses avec Lily, vous avez pu partir à la découverte de nouveaux pays et vous enrichir, il y a énormément de points positifs ! Je suis heureuse que vous ayez pu vivre ça tous les deux et surtout personne n’aurait pu prévoir ce qui est arrivé. Ce qui importe maintenant, c’est de faire ce qui te semble juste, aussi bien pour ta famille que pour toi. Si jamais ce style de vie ne te convient plus un jour, essaye de trouver un compromis au lieu de te sacrifier, d’accord ? »

Et j’étais très sérieuse dans mes propos. J’étais consciente que ce que je disais pouvait paraître idéaliste voire impossible puisque dans sa situation, j’aurais probablement réagi de la même manière que lui. Qui tournerait le dos à sa famille pour continuer à vivre ses rêves alors que celle-ci était en train d’imploser ? Mais le fait d’avoir un œil extérieur me permettait aussi de prendre du recul pour me rendre compte que s’il s’oubliait trop pour rendre les autres heureux, il finirait par imploser lui aussi. Qu’adviendrait-il alors de ce fameux équilibre délicat ?
L’évocation du mariage ramenait un peu de joie à nos échanges lugubres.

« Je sais, il faut bien que je me mette dans la peau d’une enfant pour mieux réussir à les connaître ! » Rétorquais-je en lui tirant la langue. « J’ai tellement hâte d’avoir votre faire part entre les mains ! J’ai envie de découvrir Lily dans sa robe de mariée remontant l’allée sous ton regard énamouré, découvrir la salle, les festivités mais surtout de manger ce délicieux dessert… hm préparé par une excellente pâtissière de surcroît ! »

Je pris une pose sophistiquée et je glissais une main sous mon menton tout en maintenant son regard dans un sourire espiègle. Qui était la mieux placée pour servir le dessert de ce couple de jeunes mariés, sérieusement ?
La proposition de Liam concernant ma recherche d’appartement me fit chaud au cœur. A vrai dire, je n’en attendais pas moins de lui-même si je préférais faire les choses par moi-même. Il fallait dire que je n’avais aucun résultat concluant pour l’instant.

« Merci Liam, tu es un amour ! »

Vint alors ma fameuse question à laquelle il répondit avec franchise.

« Merci pour ton honnêteté. Il faut croire que je ne tombe pas sur les bons ou alors que je leur fait peur avec mes envies mais je vais avoir trente ans Liam… J’ai passé l’âge de vouloir des amourettes. Je veux sortir avec un homme sérieux, me marier et avoir des enfants avant d’être trop vieille. Pourquoi est-ce que la vérité effraie tant que ça les hommes ? Je dis quoi au prochain que je rencontre pour le retenir ? Que je veux juste une partie de jambes en l’air ? »

Je passais une main dans mes cheveux en soufflant. Les relations n’étaient jamais simples, du moins les miennes. Je ne devais pas m’y prendre correctement mais pourtant j’avais toujours été sincère, que ça soit dans mes propos comme dans mes comportements. Alors quoi ? Je devais faire comme au lycée et devenir une autre pour qu’on m’apprécie ?

« Pardon, je me suis emportée… Mais je t’avoue que je commence à être lassée de ma vie de célibataire. Oui, j’ai plein de temps libre. Grâce à ça, j’ai même ouvert ma propre pâtisserie et j’en suis fière mais j’aspire à autre chose personnellement. »

J’offrais un sourire timide à mon ami avant de me remettre en mouvement :

« Prête ! »

Je sortais alors les différentes formes de pain d’épice qui allaient constituer notre maison. Il ne manquait plus que la préparation principale pour les faire tenir ensemble. Je rapprochais le saladier et les deux ingrédients nécessaires - à savoir des blancs d’œufs et du sucre glace - avant de me tourner vers Liam :

« Tu préfères préparer le ciment ou couler les fondations ? »

Codage par Libella sur Graphiorum

Spoiler:

« Oui, je le sais bien. » En théorie. Parce que dans la pratique, c’était souvent une autre histoire. Combien de fois ne s’était-il pas répété que personne n’aurait pu prévoir ce qui allait arriver ? Combien de personnes lui avaient dit de ne pas culpabiliser ? Il avait beau comprendre, ça ne l’aidait pas forcément ou en tout cas, ça ne chassait pas tous les mauvais sentiments. « Mais je crois que quand on a perdu des gens qu’on aime… On peut devenir irrationnels à certains moments et j’imagine que c’est normal. Le temps aidera. » La douleur était déjà moins intolérable qu’au début. Liam savait qu’elle serait toujours là, quelque part. Mais c’était moins insoutenable. Moins déchirant. Plus supportable. Ces derniers mois, ce qui chagrinait Liam, c’était de ne pas avoir son grand frère comme garçon d’honneur, ni sa nièce pour éparpiller les fleurs et apporter les alliances. Il aurait tellement, tellement aimé qu’ils soient là. Alors il essayait de penser à ceux qui seraient bel et bien là. Les autres membres de sa famille, y compris Maxine. Gus. Charles. Debbie. Hannah. « Merci d’essayer de me rassurer, en tout cas. » Il lui adressa un sourire en rebondissant sur un sujet plus joyeux. « Les mariages, c’est vraiment le dada des filles, hein ? Encore maintenant, Lily a du mal à contenir son excitation, sans parler de mes soeurs. » Il avouait sans détours qu’il n’était pas tellement porté sur ce qu’il considérait comme les détails de la cérémonie mais plutôt sur l’importance de l’événement en lui-même et les gens qu’ils aimaient réunis pour le célébrer. « Dis-moi, tu sais que si tu veux préparer mon gâteau de mariage, il faudra bien que tu te lances dans le vegan ? Mais c’est sûr que t’en es capable, pour végétaliser une recette, il suffit globalement de faire quelques substitutions. » Jusqu’ici, plus porté sur le salé que sur le sucré, le jeune homme avait surtout pensé aux plats principaux et pas encore vraiment au dessert. Mais il se doutait que la question serait bientôt abordée avec Lily.
En revanche, s’il y avait bien un sujet qu’il ne pensait être abordé, c’était la lassitude de son amie vis-à-vis du célibat. « Comme tu sais, j’ai pas beaucoup d’expérience en matière de rendez-vous et de séduction des premiers temps. J’avoue que je sais pas si je peux te donner des conseils, vu que j’ai pas tardé à trouver la bonne… » Il ne put s’empêcher de sourire lorsque Hannah évoqua l’expression partie de jambes en l’air. « Ne t’excuse pas. Tu as le droit de t’exprimer. » Se tournant vers elle, il posa les mains sur ses épaules. « Je peux essayer de comprendre ce que tu ressens. J’ai pas mal de potes qui se vantent de leur célibat parce qu’ils peuvent faire ce qu’ils veulent, mais ils avouent que des fois, ils se sentent seuls. Et de mon côté, je sais que sans Lily, ma vie serait souvent bien vide. Et puis tu n’es plus une gamine. Bien sûr que tu aspires à autre chose, c’est normal. Mais on met plus de temps à mûrir, nous. On est lents à la détente, hein… Je sais même pas si je pourrais trouver un pote à te présenter dont je suis certain qu’il recherche quelque chose de sérieux. Mais il y en a, c’est sûr, peut-être un peu trop rares. Ceci dit, je te connais, tu es bourrée de qualités. Tu finiras forcément par trouver quelqu’un qui aspire à la stabilité, lui aussi. Peut-être… Essaye de faire des rencontres tranquillement ? Ne te prends pas trop la tête et vois doucement où ça te mène, puisque certains mots paraissent effrayants. Je suis presque sûr que la majorité des mecs captent très vite quand une femme ne recherche pas seulement quelque chose de physique. Enfin, je crois que mes soeurs auraient de meilleurs conseils que moi. » Il prit le saladier qu’elle lui tendait. « Je vais préparer le ciment ! Il me semble que c’est le plus facile. Je laisse les tâches plus complexes aux pros. »