get ready for the party (robin)

L'anniversaire d'Elliot approche à grands pas et même si j'étais loin de l'oublier, son père a jugé bon de me le rappeler. Il m'a aussi proposé de l'aide pour l'organiser, mais j'ai bien peur que ma fierté me pousse à refuser. Depuis maintenant trois ans, je me débrouille seule, je ne vois pas pourquoi cela changerait aujourd'hui. Je sais bien qu'il essaye de se rattraper, mais tout ce qu'il pourra faire n'enlèvera jamais le fait qu'il vit une double vie, qu'il passe le plus clair de son temps dans une autre maison, alors que son fils est ici. Un fils non légitime puisqu'il ne l'a jamais reconnu. Néanmoins, il n'a jamais cherché à l'ignorer. Aux yeux de tous, Elliot n'existe pas, mais pour lui, si. C'est sûrement pour cette raison que je lui laisse l'opportunité de faire partie de sa vie. Seulement, le petit garçon grandit et bientôt, il se posera des questions. Il se demandera pourquoi son père n'est là que par intermittence, pourquoi il ne connaît pas ses grands-parents. J'ai envie de le préserver de tout cela, mais j'ai peur des conséquences aussi. Si je commence à refuser ces visites à Archie, j'ai peur qu'il utilise l'argent de ses parents pour me retirer mon fils. Aujourd'hui, ce n'est pas dans ses intentions, mais si je change les règles, il pourrait vouloir me faire du mal. C'est pour le petit garçon, pour qu'il ait un anniversaire heureux, que j'ai donc décidé de le fêter avec les membres de ma famille. La parfaite excuse pour que son père ne s'en mêle pas, pas le jour j en tout cas. Mais maintenant qu'il va avoir trois ans, Elliot commence à comprendre la signification de ce jour si spécial, alors il faut que ce soit à la hauteur de ses attentes. Je ne peux pas faire cela seule, j'ai besoin d'une alliée et qui de mieux pour cela que ma sœur aînée ? Personne, surtout que le petit garçon adore sa tante. Ne voulant pas la déranger, je lui envoie un simple SMS. Cela lui laissera la possibilité de me répondre quand elle le voudra. Un message clair, une invitation à se lancer dans les préparatifs d'un anniversaire attendu par toute la famille. J'attends la fin de la sieste du petit garçon pour pouvoir partir. Avec son quota de sommeil, il sera plus à même d'être calme durant nos achats. Je nous installe dans la voiture et conduis jusqu'aux parkings gratuits de la ville. Ce ne sont pas forcément les plus près des magasins où nous allons, mais ce n'est pas un problème, ça me fera marcher un peu. Je prends la poussette du petit garçon, pour plus de facilité et je me dirige vers le point de rendez-vous. Arrivés là, j'y découvre ma sœur, déjà présente. « Merci beaucoup d'être venue. » Je souris et naturellement, je lui offre une accolade. « J'avais peur de ne pas m'en sortir toute seule. » J'espère qu'elle pourra m'aider et surtout, que nous n'allons pas passer une éternité ici. « Si nous nous en sortons bien, ça ne devrait pas durer très longtemps. » J'essaye d'être optimiste. Ça serait quand même dommage de se décourager avant même de commencer. « Comment vas-tu ? »

Trois ans. C’est dingue comment le temps passe vite. Plus le jour de son anniversaire approche et plus je repense à ces moments partagés avec lui, à sa naissance et à ce qu’il est devenu depuis. Elliot est le soleil de ma vie. Il n’était pas prévu, mais désormais, je ne vois pas ma vie sans lui. Je ne sais même plus comment c’était avant. Je crois bien, qu’avant mon accouchement, j’avais peur. Peur par rapport à ce que notre mère avait vécu, en étant seule et en élevant des enfants. Mais avec le petit garçon, ça s’est finalement faire naturellement, comme s’il sentait que j’avais besoin d’être rassurée. « Faut que tu arrêtes de pousser aussi vite, toi, sinon tu vas bientôt me dépasser. » Une remarque qui fait son effet au petit garçon. Même s’il grandit bien trop vite pour moi, c’est plutôt l’inverse pour lui. À son goût, il est trop petit et il a hâte de ne plus être considéré comme un bébé. Et oui, l’indépendance commence à faire partie de son vocabulaire. Il a envie de faire les choses seules, de me montrer qu’il est capable et qu’il n’a plus besoin de moi. Cela a un double effet sur moi. Je suis fière de le voir grandir, de le voir devenir ce petit garçon, mais j’aimerais aussi pouvoir le garder rien que pour moi, aussi petit possible. « Tu plaisantes, j’espère. Ça me fait une occasion de me sortir la tête du travail alors c’est plutôt moi qui devrais te remercier. » Travailler ou passer une après-midi à faire les magasins, à goûter des gâteaux. C’est vrai que le choix a dû être difficile. Néanmoins, j'aurais aimé que tout ceci soit prévu à l'avance et que je n'ai pas à lui proposer à la dernière minute. La voir ici me montre à quel point j'ai de la chance d'avoir une famille à mes côtés, peu importe ce qu'il se passe. « Super bien, et toi ? Pas trop le cafard ? » Je grimace légèrement, alors que je pose mon regard sur Elliot, qui commence déjà à essayer de s'éloigner un peu. « Ne m'en parles pas. Ça va tellement vite. Dans deux jours, il va me demander s'il peut ramener sa copine à la maison. » C'est un peu exagéré, c'est vrai, mais c'est pour mieux représenter ce que je ressens. « Alcool, drogue, sexe. Dans pas longtemps, je vais me transformer comme maman, à imaginer le pire. » Là encore, tout est relatif. Avant de devoir m'inquiéter de ces sujets, il me reste quelques années. Même si bien vite, d'autres problèmes vont survenir. L'école, les devoirs, les autres enfants. Des choses finalement banales, mais qui me font néanmoins peur. Et si je n'étais pas préparée pour tout cela ? J'appréhende aussi toute cette histoire avec Archie, à la réaction qu'aura le petit garçon plus tard. « Il faut en profiter au maximum, tant qu'il en est encore temps ! » C'est bien ce que je fais chaque jour, en passant du temps avec lui. « Par quoi veux-tu commencer ? » Plusieurs choix s'offre à nous et puis, si elle n'est pas pressée, nous pouvons même un peu flâner pour l'instant.

L'avantage, enfin il me semble, c'est que de toute la famille, proche ou moins, je suis la seule à avoir un enfant. Il a de la chance d'être aussi bien entouré, moi aussi par la même occasion. Alors même si au quotidien je vis seule, je ne lui suis pas réellement. « Ah, ne t'en fais donc pas pour ça, je serai là pour tempérer quand tu en auras besoin. » Imaginer les choses aussi loin, c'est sûrement le réflexe de toutes mères. Du moins, je l'espère. Sinon là, je suis clairement en train de tourner folle. Même si au fond de moi, je pense que c'est ironique : je ne pense pas clairement au moment où Elliot me ramènera une petite-amie, c'est juste une façon de dire que le temps passe vite. Passé cet échange, je demande à ma sœur si elle a une préférence pour commencer. « Ça dépend, t'as prévu un thème particulier ? » L'idée m'a traversé l'esprit, j'ai même regard" des sites sur internet pour trouver l'inspiration. Mais rapidement, je me suis rendu compte que pour répondre aux envies du petit garçon, cela allait être compliqué. Il veut tout et rien à la fois. J'ai donc réduit mes attentes concernant la décoration. Nous verrons ensemble l'année prochaine, il aura peut-être une idée plus précise. « J'ai plus pensé à une couleur. Il y a bien un thème aussi, mais seulement si on trouve des choses. Elliot a quelques choses avec les dinosaures en ce moment. » Je ne suis pas une experte, je ne sais pas ce qui est à la mode en ce moment, alors peut-être qu'on trouvera quelque chose ou peut-être que non. Au pire, on verra avec lui sur place. S'il apprécie un élément de décoration, alors on partira dessus. « Y a quoi sur ta liste ? Le gâteau, les ballons, les assiettes en carton, les gobelets et boissons ? » Elle vise plutôt juste. Il faut dire que pour l'anniversaire d'un enfant, c'est souvent la même chose. « C'est ça. Des bonbons aussi. » Une petite friandise, un écart à ce que je lui autorise en temps général, mais pour lui, c'est jour de fête. Sans compter les quelques enfants qui seront là pour l'accompagner, ça leur fera sûrement plaisir. « Ce que je te propose, c'est qu'on commence par le moins fun, comme ça on garde le meilleur pour la fin, ça sera notre carotte. » « Tu as raison, c'est mieux ainsi. Je suppose qu'on va terminer par le gâteau ? » De toute la liste, c'est ce qui serait le plus motivant pour moi. Pour Robin aussi, je le sais, c'est bien pour cette raison que ma question est rhétorique. « Commençons par la décoration alors. Ça permettra d'éviter de nous trimballer tout ce qui est nourriture trop longtemps. » Le gâteau oui, mais aussi les différentes bouteilles. Nous n'allons pas dévaliser le magasin, mais il risque d'y en avoir un certain nombre et ça risque de peser sur nos bras rapidement. Même si nous avons le panier de la poussette pour nous aider. « Ne me laisses pas acheter n'importe quoi, d'accord ? » Je la regarde, un fin sourire sur les lèvres. Il se peut qu'avec tout ce qui concerne mon fils, je sois un peu faible. Les limites n'existent plus vraiment, mais je n'ai pas envie de partir dans quelque chose de trop kitch ou de trop gros.

Passer du temps avec ma sœur aînée, ça m'a toujours fait du bien. Elle a toujours été là pour moi et elle l'est encore aujourd'hui. C'est bien pour cette raison qu'en l'invitant ici, je savais que je faisais un bon choix. « Oh j'suis sûre qu'on va trouver des tas de choses en rapport avec les dinosaures, on a de la chance que Jurassic World ait remis tout ça au goût du jour. » À ces mots, je ne peux m'empêcher de froncer légèrement les sourcils. C'est vrai qu'il y a ce film et ceux qu'ils l'ont précédé, mais je ne m'en souvenais plus. Ce n'est peut-être pas adapté pour un petit garçon. Surtout que si mes souvenirs sont bons, j'avais moi-même eu peur de certaines séquences des films. J'étais plus jeune, c'est vrai, mais quand même. Je pensais plus à un dessin animé, ou aux jouets pour enfant que l'on croire facilement dans les rayons des magasins. Les deux seront peut-être disponibles. Les commerçants ne sont pas idiots, ils savent qu'il faut convenir à tout le monde, aux plus grands, comme aux plus petits. « Faisons ça ! Puis si tu veux, je rapprocherai la voiture quand on aura fait le plein de bouteilles, il vaut mieux qu'elles traînent dans le coffre en nous attendant. » Elle marque un point. Ma solution n'était pas mauvaise, mais la sienne est bien meilleure. Même si nous ne les avons pas sur les bras, les avoir dans le panier de la poussette risque de nous pénaliser à un moment donné. Ce n'est pas tout, mais il faut quand même la pousser et avec le poids de ce qu'elle porte. Avant de nous lancer dans cette "aventure", je lui demande de me contrôler. Je ne suis pas du genre à acheter plus que je ne peux dépenser, mais quand même. Pour un anniversaire, beaucoup de choses sont optionnelles et si elle pouvait m'arrêter avant que je n'achète quelque chose d'inutile. « Et moi, j'ai le droit d'acheter n'importe quoi pour mon neveu unique et préféré ou bien c'est toi qui vas me surveiller ? » Je soupire légèrement avant de sourire. « Il n'est pas impossible que je te surveille. Je te rappelle que tout ce que tu lui achètes, ça va dans mon logement. C'est moi qui dois ranger. » C'est ça aussi de venir d'une famille nombreuse. Robin n'est pas la seule à vouloir gâter son neveu et petit à petit, les objets de toutes sortes se sont accumulés chez nous. Ma sœur attrape la main d'Elliot et nous nous avançons vers notre première boutique. La décoration, comme convenu. Et à en voir la taille des rayons, il y a de quoi faire ici. Reste à savoir si je vais trouver mon bonheur. Je m'avance doucement dans le premier rayon, puis le deuxième, avant de tomber sur quelque chose qui pourrait rentrer dans le thème. « Trop flashy, non ? » Dis-je en lui montrant des assiettes en carton. Finalement, je suis en train de me dire qu'avant, quand Elliot n'avait pas conscience que le jour de son anniversaire était un jour spécial, c'était plus facile. Il n'y avait pas tous ces préparatifs à faire. Je pense que rapidement, au fil des années, je vais perdre patience et je vais demander à quelqu'un d'autre de le faire. Si déjà dès le premier magasin, les premiers éléments de décoration je me retrouve en difficulté, ça promet. « Je ne pensais pas que ce serait aussi compliqué. Pourquoi est-ce qu'il grandit déjà ? »

Les jouets, ce n'est pas ce qui manque chez nous. Entre ceux qu'Elliot n'utilisent plus, ceux avec qui il joue et enfin ceux qui ne sont toujours pas déballés, ça pourrait remplir une pièce entière. Et pourtant, c'est bien souvent les mêmes qu'il utilise. Les autres s'entassent, jusqu'au jour où il décidera de changer. Il est donc inutile pour l'instant de trop le gâter. « Okay chef, il n'y aura pas de débordement alors, c'est promis. » Dans le cas où ma famille ne m'écouterait pas, il faudra utiliser les grands moyens : faire un tri et donner les jouets qui ne servent plus à une association. Je les aurais bien donnés à mes frères et sœurs, pour leurs enfants, mais visiblement, ils ne sont pas pressés à ce sujet pour l'instant. Mon regard parcourt les différents rayons jusqu'à se poser sur des assiettes en carton dans le thème que j'espérais. « Non t'inquiète, c'est un anniversaire, pas une garden party à l'Elysée. La seule règle c'est de ne pas se tromper pour le gâteau, de ne pas faire venir de clown et de ne pas se tromper de rayon surtout. » Elle n'a pas complètement tord, la décoration ne sera scrutée qu'au début, après cela, lorsque les festivités auront commencé, elle passera au second plan. « Tu as raison. Et puis, une fois que le gâteau sera posé dans l'assiette, la couleur importera peu. » Ça reste du vert, ce que je voulais à la base. Ce n'est peut-être pas la nuance que j'imaginais, mais s'il ne reste que cela, ça fera parfaitement l'affaire. « J'en sais trop rien, ça serait tellement plus simple s'ils restaient bambins, tous. Pas de crise d'adolescence ! T'imagines un peu le rêve. » Je soupire légèrement en pensant à cette idée. « Ne m'en parles pas. » Je mangerais la bouille de mon fils si je le pouvais. Pour l'instant, il ne s'en plaint pas vraiment, mais dans quelques années, il voudra se tenir le plus loin possible de moi, pour montrer à ses amis que c'est un grand garçon. « Ne perdons pas trop de temps ici, sinon un gâteau ne suffira pas à nous remonter le moral. » Comme elle l'a dit un peu plus tôt, la décoration n'est pas ce qui compte le plus. Avoir le strict minimum, pour éviter de faire la vaisselle pour un régiment, à l'image des dinosaures, c'est bien suffisant. Je me rattraperais les années suivantes si besoin est. La jeune femme vient compléter les assiettes que j'ai trouvées, dans les mêmes couleurs. Il va avoir trois ans, il est plein de vie, du vert un peu flashy, ce n'est pas tant un problème. Je passe dans les différents rayons et fais preuve de nostalgie. Ce n'est pas la première fois que je viens dans ce genre de magasin. J'ai déjà eu à venir pour accompagner notre mère lorsqu'elle préparait nos nombreux anniversaires. « C'est toujours autant bizarre de faire ce genre de fête sans papa. Mais je suis sûre qu'il serait fier de ce que nous sommes devenus. » Je grimace légèrement, alors que je ne peux m'empêcher à ce que serait notre vie avec lui, aux activités qu'il aurait pu faire avec Elliot.

Préparer l'anniversaire d'Elliot, ça me remplit de joie, c'est certain. Car même s'il grandit un peu trop vite à mon goût, il va devenir un petit garçon et je vais pouvoir découvrir une nouvelle facette de lui quand il va commencer à affirmer ses goûts et ses envies. Mais un tel évènement me ramène toujours à mon père, à notre père. Son anniversaire est quelque chose que nous allons partager en famille, mais ce sera sans lui, une nouvelle fois. Nous avons dû faire à son décès alors que nous n'étions que des enfants et à ce moment-là, nous pensions qu'aux retombées proches, pas à celles qui impacteront aussi notre futur. J'aurais aimé qu'il soit là, qu'il puisse rencontrer son petit-fils, jouer avec lui et lui apprendre tout plein de choses comme il l'avait fait avec nous. « C'est évident. C'est qu'on est tous devenus des gens bien, exactement comme ils le souhaitaient avec maman. » Il est vrai que malgré ce tragique évènement, nous avons tous gardés la tête haute et nous sommes aujourd'hui de bonnes personnes. Cela aurait pu nous détruire, mais nous avons fait front tous ensemble et c'est sûrement ce qui nous a permis d'en sortir aussi forts. « Puis tu sais, même s'il n'est physiquement pas avec nous, il est quand même là, j'en suis persuadée. » Un fin sourire se dessine sur mes lèvres. Je ne sais pas trop quoi penser de tout cela. Parfois, je me dis qu'il est à nos côtés de temps en temps, et puis les autres fois, je me dis que c'est sûrement impossible, que je pense cela uniquement pour me rassurer un peu et pour me dire qu'il continue de veiller sur moi. « Ça doit être un peu particulier pour toi ? » Robin a un.. don, si on peut dire cela comme cela. « Je ne sais pas si je pourrais vivre avec une capacité comme la tienne. Je ne dormirais plus sur mes deux oreilles je pense. » Ressentir des présences, ça ne doit pas toujours être rassurant. En réalité, ça dépend de qui se trouve "en face". Je ne comprends pas vraiment ce qu’elle ressent dans ces moments-là, si elle sait vraiment qui est l’esprit ou si elle sent juste la présence de quelqu’un. Il s’agit peut-être uniquement de personnes qu’elle a connu par le passé et là, ça va encore. Mais si elle peut être en "contact" avec des personnes qu’elle ne connaît pas, c’est là que ça peut-être étrange. Et si c’était l’esprit d’un tueur en série ? « Bon.. je crois que nous avons tout vu dans cette boutique et comme nous ne repartons pas les mains vides, c’est déjà une grande victoire. » Assez de bavardages. Il ne nous reste plus qu’à passer en caisse pour payer ce qui se trouve dans le panier. Je propose à ma sœur de prendre Elliot avec elle et de m’attendre à l’extérieur, il pourra plus facilement se dégourdir les jambes et il sera plus libre de ses mouvements que dans le magasin. Je prends la direction de la caisse et paye pour tous les éléments de décoration. Je pense que nous avons trouvé de quoi faire une bonne base et si jamais je réalise qu’il me manque quelque chose, j’aurais encore un peu de temps pour revenir acheter autre chose. Le paiement effectué, je glisse toutes les affaires dans le panier de la poussette et je les rejoins dehors. « Un tour dans une supérette pour trouver les boissons et les bonbons ? »

Le sujet de ce don qu’à Robin, ce n’est pas celui que je maîtrise le mieux. Pour être honnête, il arrive même souvent que je l’évite. Non pas parce que cela sonne bizarre pour moi, mais je ne peux m’empêcher de me dire que parfois, elle doit sentir notre père auprès d’elle. Et je crois qu’indirectement, ça me rend jalouse. Oui, c’est un peu contradictoire. Je ne voudrais pas avoir ce don et pourtant, parfois je voudrais sentir notre père à mes côtés. Sûrement parce qu’il est parti trop tôt et que j’aimerais qu’il puisse être présent pour les événements de ma vie. « Oh, c’est comme tout, on finit par s’y faire. Puis les personnes qui me suivent sont bienveillantes alors je ne crains pas grand-chose. » Il est vrai qu’à force de vivre avec quelque chose dont tu ne peux pas te séparer, tu finis par t’y habituer. Néanmoins, j’admire le courage de ma sœur, un bon nombre de personnes serait déjà devenu fou à cause de cela, se sentant impuissant face à ce qui se passe pour eux. Les courses terminées dans ce premier magasin, je suggère à Robin de m’attendre dehors avec Elliot, le temps que je passe en caisse. Inutile d’être trois pour cela et ça devrait plaire au petit garçon de sortir un peu. Il a été sage jusque là, ça serait le torturer de lui demander d’attendre à la caisse, alors qu’il pourrait être à l’air libre. Je ne tarde pas à faire mes affaires, avant de les rejoindre dehors. « Super idée, ça. Je connais un petit bonhomme qui a bien mérité une récompense pour avoir été aussi sage. » Être au centre de l’attention, Elliot adore ça. Il sait parfaitement en profiter, sans pour autant dépasser les bornes. « Si seulement il n’y avait que lui. » Je ne peux m’empêcher de poser mon regard sur ma sœur. « Je te connais. » Mais est-ce que je peux vraiment lui en vouloir ? À force de piétiner, à l’approche de quatre heures, il est normal de commencer à avoir une petite faim. « Même si pour être honnête, je ne dirais pas non à une récompense aussi. Allez, c’est parti ! » Le petit garçon s’installe dans la poussette et nous nous dirigeons vers l’une des supérettes de la rue commerciale. Ici, l’arrêt ne devrait pas être long. Surtout que là, Elliot peut nous aider et il le fera sûrement, notamment au rayon des bonbons. J’ai beau limiter les sucreries pour lui, il s’y connaît plutôt bien, à croire qu’ils s’amusent à en faire des trafiques à la récréation de son école. « Il faut que j’arrive à compter combien on sera. Sinon je me connais, je vais encore en acheter trop. » En soi, ça ne serait pas du gâchis. Mais bien souvent j’oublie les bouteilles en rab dans un coin du cellier et elles restent là jusqu’à la prochaine fête, ce qui n’est pas forcément une bonne chose. Il y aura trois, quatre amis du petit garçon, un couple de parents, quelques amis et ma famille. Ma mère, mes sœurs et le plus jeune de mes frères. Ce n’est pas vraiment nous qui gonflons les chiffres, c’est ça d’avoir que des enfants célibataires, enfin presque.

L'organisation pour ce genre d'événements, ce n'est pas encore trop ça. Ce n'est que la troisième année, je suis sûre qu'avec le temps, je prendrais en expérience et en maîtrise. « Estimons-nous heureuses qu'il ne s'agisse pas encore d'une boum. » Cette période arrivera bien assez vite, mais oui, Elliot était encore petit pour cela et ses copains aussi. L'avantage aussi de fêter l'anniversaire avec des tout petits, c'est qu'ils étaient assez vite rassasiés, que ce soit en terme de nourriture ou de boissons. Mais il n'y aurait pas que des enfants, une partie de ma famille sera là et certains parents et c'était cela qui m'inquiétait le plus : je ne voulais pas qu'ils pensent que j'étais radine ou que je souhaitais les laisser mourir de soif. Alors finalement, je prenais la dose de bouteille. Ce qui n'était pas ouvert ne pouvait pas s'abîmer de toutes façons et ça servirait sûrement pour une autre occasion. « Champagne pour fêter ça ? Ça sera ma petite contribution. » La jeune femme est hésitant, craignant peut-être que je lui demande de reposer la bouteille. « Avec plaisir, il faut bien que les adultes s'occupent un peu pendant que les enfants jouent. » Même si c'était l'anniversaire d'un enfant, il ne fallait pas oublier qu'il y aurait aussi des adultes et qu'il faut les satisfaire. S'ils se servent de quelques bonbons, c'est déjà bien, mais il faudra des choses plus adaptées pour eux et du champagne, ça collait plutôt bien à l'idée que je pouvais me faire. « Je vais déjà rapprocher la voiture, si tu veux. » « Oui, c'est une bonne idée. » Je récupère les différents articles que Robin a pu sélectionner et je la laisse quitter la boutique. Rapidement, je fais le compte des personnes présentes et je rajoute dans le chariot les bouteilles nécessaires, ainsi que quelques friandises et un paquet de bonbons qu’Elliot arrive à me faire prendre. Je me dirige ensuite vers la caisse, règle tout et ressort avec une bonne partie des affaires dans la poussette et le reste dans mes bras. Il est vrai qu’avec la voiture rapprochée, ce sera plus simple. J’appelle ma sœur afin de savoir où elle se trouve et je parcours le chemin pour la rejoindre. Alors que nous mettons les affaires dans le coffre, je remarque que son regard s’arrête sur le paquet de bonbons. « Il a réussi à m’amadouer. Ça promet pour la suite. » Il y a avait l’argument de son anniversaire, alors j’essayais de me convaincre que c’était ça la raison. Il y avait sûrement un peu de sa gueule d’ange aussi, mais je refusais d’en faire un enfant gâté et à qui tout est acheté, c’est bien pour cela que rares sont les achats pour répondre à un besoin qui n’est pas nécessaire. Il avait gagné aujourd’hui et puis ce paquet de bonbons servirait sûrement pour plusieurs jours, il ne mangerait pas tout d’un coup. « Il reste la meilleure partie maintenant, le gâteau. Sauf si tu as quelque chose à faire dans le coin. Tu m’aides, je peux bien en faire autant un peu. » Que ce soit aujourd’hui ou un autre jour, Robin pouvait toujours compter sur moi, de jour comme de nuit. Il n’était pas question de seulement rendre la pareille, même si j’ai un peu l’impression de me servir d’elle pour ces courses. Avec un peu de volonté, j’aurais certainement pu m’en sortir.