Emergency n°140 EastBay

Olympe Rosenthal n'avait jamais été une voisine chiante. C'était le genre de personne à ouvrir sa porte à qui voulait bien toquer et c'était ce que déplorait souvent son ex-mari. Elle voyait le mal nul part et pourtant, ça pouvait arriver à n'importe quel carrefour. C'était idiot mais la jeune femme n'avait pas envie de ressembler à sa mère, snob, à l'affût de la moindre dépense alors qu'elle n'avait pas besoin de compter le petit sou. Cela ne s'était pas arrêté à ça. Mère Rosenthal avait tout mit en place pour que Karl et leur fille fassent connaissance. Evidemment, trop prise dans ses études pour devenir enseignante, la jeune femme n'avait pas du tout envie de réfléchir. Karl, un bel allemand et surtout, très gentil avec elle, avait réussi à la séduire avec ses beaux yeux bleus et sa crinière châtain clair. Elle n'y voyait que du feu, même durant leur mariage, elle pensait qu'elle faisait le bon choix. Sa mère n'arrêtait pas de lui dire qu'elle était heureuse et fière de sa fille. C'était à ce moment-là qu'elle aurait dû se méfier, peut-être même avant puisque cette dernière avait accepté Karl dès leur première sortie en couple. Elle rejetait, même sans les connaître, ses anciens petits copains. Bref, leur divorce avait saigné sa mère à blanc, sortant de son idéal familiale, Olympe avait été renié par sa mère, renfrognée et trop fière pour revenir sur sa décision.
Cela faisait un an qu'elle vivait dans ce pâté de maison fleurie et où il y faisait bon vivre. Olympe ne pouvait plus penser que par elle-même, elle avait ce petit bout d'chou qui vagabondait partout à quatre pattes, chantonnant les syllabes dans une musique qu'elle était seule à connaître. Nola faisait le bonheur de sa maman et il était facile de s'en rendre compte. La jeune maman ne vivait qu'au travers de sa fille, aime t-elle ça ? Est-ce que c'était bon pour sa santé ? Est-ce  qu'elle avait eu raison de la sermonner ? Est-ce qu'elle pouvait faire ça pour elle ? Heureusement, même si sa mère gardait ses distances, Olympe pouvait compter sur des personnes notamment sur son père, qui était beaucoup trop gâteau avec sa petite fille pour remettre en doute les décisions de sa fille quant à son divorce. Et puis il y avait sa voisine, Baylee. Une femme pleine de vie et enseignante elle aussi, dans un cursus plus élevé que celui où enseignait la Rosenthal. Baylee n'était pas seulement ça, elle avait aussi une famille, un mari et des enfants. Epanouie jusqu'au cou, un ventre légèrement arrondi que la blonde reconnaissait comme les premiers mois d'une nouvelle vie poussant dans son ventre. C'était facile à deviner pour une femme n'étant pas à sa première grossesse, de ce qu'elle avait entendu, son corps connaissait déjà ses changements et ne faillissait pas à se développer pour le petit être.
Bref, depuis qu'elle était arrivée dans sa petite maison, elles s'étaient croisées alors qu'Olympe avait beaucoup de mal à comprendre ou à saisir ce que sa petite fille avait à pleurer sans arrêt. Ces fameuses colliques ne passaient pas avec le traitement du pédiatre et malheureusement, le temps où il fallait dormir, Nola semblait être en pleine forme. Ce fut à ce moment là, l'année précédente, que Baylee s'était proposée à l'aider. Le massage du ventre semblait être un cadeau que la brunette faisait à la pauvre mère impuissante aux douleurs de son enfant. Alors forcément, suite à cette aide précieuse, Olympe avait été très insistante pour la remercier et depuis, elles se donnaient très souvent rendez-vous pour boire un café, raconter leur déboire avec des élèves plus ou moins récalcitrants, ou même les petites bêtises faites par leurs enfants respectifs. Évidemment, Baylee avait de l'avance mais ça n'empêchait pas les deux jeunes femmes à s'en amuser. Ce petit rituel s'était installé et renforcé par cette amitié.
Aujourd'hui, Baylee avait envoyé un message à Olympe. Elle voulait que ce petit moment se passa chez elle et puisque Nola se trouvait en balade avec son parrain, elle n'avait pas hésité une seule seconde. Chaussures et sac à main sur l'épaule, elle quitta sa demeure pour traverser sa cour avant et rejoindre celle de son amie. Replaçant quelques mèches désordonnées par ce léger vent saisonnier puis toqua à la porte. Après quelques secondes, elle entendit les pas précipités de son amie venir ouvrir la porte : « Salut, Lee. » Un surnom survenu de nul par au cours d'un échange de SMS  quelques mois auparavant. Elles en étaient restées là : « Comment vas-tu ? » demanda t-elle, en regardant son petit ventre, de futur maman. Deux ans qu'elle avait connu les débuts difficiles d'une grossesse avec ses nausées et l'impression que ça n'allait pas s'arranger du tout. Dieu qu'elle regrettait ces moments là puisqu'elle les avait vécus seule, loin de l'homme avec qui elle avait voulu passer ses moments importants. Au moins, Baylee avait son mari et ses enfants pour la soutenir. « Tu tiens le coup ? » demanda Olympe, en entrant dans le hall d'entrée après que la brune l'avait laissé entrer en s’effaçant.