well... the f* are you ? ; pv. noa

Nous nous sommes promis des sorties amicales Nathan et moi, pour rompre nos solitudes et mettre en sourdine nos inquiétudes sur tant de sujets mais surtout, lui concernant sa femme et moi concernant les recherches sur mes kidnappeurs qui m’entrainent aux bords de l’illégalité. Aujourd’hui, j’ai envie de lui faire la surprise d’une virée improvisée. Rien de bien défini, mais de toute façon avec une certitude, c’est qu’on ne la passera pas entre quatre murs à tourner en rond. Je stationne ma BMW à proximité de chez lui et finit les quelques mètres à pieds. En même temps, je réfléchis où nous pourrions aller. J’ai presque la sensation de préparer la sortie du mois de mon papounet qui vit en ermite. Nathan ! Il fait parfaitement office de père, il remplace mieux que je ne pouvais l’imaginer le père que je ne connais pas. C’est venu comme ça, sans crier gare. Un jour je me suis mise à penser à lui comme à un père. Heureusement que mon frère n’est pas au courant, c’est pour lui un sujet tabou. Il l’a rayé de notre existence, sans l’ombre d’un doute. J’ai suivi le mouvement, même si parfois j’ai eu des doutes et des envies de le chercher. J’ai fait de son opinion la mienne jusqu’à ce que je rencontre Nathan et que nous parlions ensemble d’enfants et de géniteur.

A peine le temps d’appuyer sur la sonnette que la porte s’ouvre. Je me retrouve nez à nez avec une femme. Qui ? C’est qui elle ? La femme de ménage ? Et la manière plutôt sèche de m’accueillir me fait avaler ma salive sans parvenir à répondre. C’est Kayla qui me sauve de l’immobilité en jappant et en approchant de moi. Je m’accroupis pour réceptionner son euphorie de me voir. — Salut princesse, comment tu vas ? Une léchage en guise de réponse. Je la caresse. Ça fait plaisir de la revoir à chaque fois. Elle continue de me faire la fête, mais j’ai du mal à me relever pour répondre à la question de la femme. — Je viens voir Nathan. Est-ce qu’il est là ? pourrais me permettre de rentrer, il ne m’en voudrait pas, mais pas sûre que la Cerbère de la porte me l'autorise.

Je viens de débarquer avec mes gros sabots, comme un chien dans un jeu de quilles, comme un ours à peine sorti de sa caverne, comme je ne sais pas quoi, mais cela n’a rien de construit et respectueux. On va mettre ça sur le compte de la surprise. Surprise totale, là c’est une évidence. La seule créature que j’ai salué, c’est ma copine Kayla. Ce n’est pas mon habitude. Je ne sais plus comment rattraper le coup, d’autant que la femme qui me réceptionne fait preuve d’une autorité étonnante envers la chienne. Elle m’abandonne pour aller se poser auprès d’elle. Je soupire. Nathan n’est pas là. Voilà qui va compliquer les choses. Ah c’est bête ! Je voulais lui proposer un truc sympa. Est-ce que vous savez quand il rentre ? Je regarde à droite et à gauche dans la maison, en même temps que je pose ma question, machinalement, non pas que je ne la crois pas quand elle dit qu’il n’est pas là, non cela tient d’une étrange impression. J’ai besoin de comprendre qui elle est et ce qu’elle fait là. Elle aussi veut savoir qui je suis, okay. Noa. C’est rangé. Un peu trop. Cela me ramène à l’idée de la femme de ménage. Il ne m’a jamais dit qu’il avait une femme de ménage, mais après tout ce n’est pas le sujet qu’on met en avant systématiquement. Est-ce que j’ai eu l’occasion de plaisanter avec lui au sujet de chaussettes qui trainent ? Me souviens pas. Par sécurité, je remets les choses à leur place. J’abandonne mon inspection des lieux que je perçois derrière elle pour la fixer du regard. Je suis une amie de Nathan. Et, à qui ai-je l’honneur ? Ben oui, elle ne va pas se cacher derrière l’anonymat quand moi je révèle mon identité.

J’écoute, avec surprise, sa réponse concernant son identité. Il me faut quelques secondes pour bien recoller les morceaux les uns à côté des autres. Mari ? LA femme de Nathan ? Les photos où Nathan rayonne de bonheur au côté d’une femme resplendissante ? Putain le coup de vieux qu’elle s’est pris dans les dents ! Certains et certaines portent moins bien l’âge que d’autres. Elle n’est pas sur le podium de la réussite ! Je comprends que la chienne lui obéisse. Les photos ? Elles datent. Si je ne connaissais pas Nathan aussi bien, j’aurais des doutes sur sa propre ressemblance. On ne peut pas dire, que depuis un bon moment, le bonheur lui ait donné le sourire tous les jours. Contrairement à l'image que renvoient les photos. Je ne peux pas m’empêcher de lui faire cette remarque parce que son absence a fait du mal à Nathan, alors la miss mieux vaut qu’elle sache que j’ai une piètre opinion d’elle et de son comportement. Il ne m’a pas dit que sa femme devait lui rendre visite aujourd’hui. Sa présence est en train de m’énervée. Il faut que je me calme. C’est la vie de Nathan, c’est à lui de mettre les point sur les i avec son épouse, si elle se considère encore comme telle. En tout cas face à moi, elle le fait. Peut-être qu’elle remplie l’espace photographique, mais pas l’espace réel. Alors non, elle ne m'est pas sympathique. Vous repartez quand ? Je reviendrai à ce moment-là. Nathan aura besoin d’amitié après son départ. C’est toujours comme ça, ces passages font du dégât. Il vaudrait mieux qu’ils coupent les ponts définitivement, ça fait mal au départ, mais après on peut remonter la pente. Et puis, difficile de dire qu’ils sont encore ensemble, déjà séparés par les kilomètres. Elle a abandonné son mari, son chien, pour un job. Quand l’amour unit les gens, on n’a pas ce comportement. Qui fait ça ? Les gens qui en ont rien à foutre de leur famille, de leurs proches. Mon père. Quand je la vois elle, ressentant ce que je ressens, il faudra qu’il me donne une excellente raison de nous avoir abandonnés.

Je vois parfaitement que je ne suis pas la bienvenue. Il est vrai que j’ai forcé la note. Mais la tristesse de Nathan est telle que je ne vois pas comment me réjouir du passage de cette très chère épouse entre les murs de la maison. Juger du bonheur des autres, la remarque est incroyable ! Est-ce qu’elle se rend compte des dégâts que son attitude cause à son mari ? Elle devrait faire un introspection pour comprendre quelle absence de bonheur elle répand autour d’elle. Que ferait-elle de son côté si elle devait retrouver son ami en miette après les départs de celle qui devrait combler sa vie, ami désespéré qui erre trop souvent de façon fantomatique ? Elle serait là pour lui, pour l’aider... ou pas. Apparemment, elle est du côté du “ou pas”, sinon elle ne privilégierait pas son job au point d’abandonner celui qui tient à elle, d’être complètement aveugle. Justement, elle devrait les examiner de près ces photos, elle verrait la différence, apparemment ce n'est pas le cas. J’espère que je ne suis pas personne pour lui, mais quelqu’une sur laquelle il peut compter autant qu’il a besoin. Je ne vais pas la mordre, même si elle le mérite parce que déjà elle me refuse l’accès à la maison. Elle s’imagine peut-être que je n’ai pas d’autres moyens de voir Nathan. Maintenant c’est physiquement qu’elle me repousse en sortant et fermant la porte derrière elle. Soit, faisons comme cela. Qu’elle parte se promener. Très bien, alors bonne journée. Une simple formule de politesse. Je ne lui veux cependant pas de mal, une jambe cassée en glissant sur une peau de banane, un accident de la circulation, un infarctus. Je ne lui souhaite pas de mal, non pas pour elle, en soit sa santé ne m’intéresse pas, mais pour Nathan. Bien que parfois je me dis que trancher ce lien comme on arrache un sparadrap sur une blessure, d’un coup sec, serait une solution. A mon tour de tourner les talons, inutile de camper devant la porte et j’ai de mon côté de quoi m’occuper. Je la laisse donc aller de son côté et je pars à l’opposé, même si cela me fera faire un détour pour retrouver ma voiture.