Let that sink in - Cami

Les rues ne se désemplissaient pas. Le goudron était bouillant sous la gomme des véhicules qui roulaient dessus. Les pierres et le béton utilisaient pour construire et détruire l’environnement naturel s’étendaient à perte de vue. Malcolm n’aimait pas du tout la ville, les étendues sauvages et la faune présentes en Irlande lui manquaient comme une amante inoubliable notamment dans la ville de Swan ou le Connemara. Seulement, ça faisait sept ans qu’il avait quitté son train de vie mais il gardait espoir qu’un jour, il y retournerait. Les choses avaient dérapé en 2014, à la mort de son frère, il avait décidé de rester quelques temps. Ce “quelque temps” était devenu un terme plus vague au fur et à mesure qu’il avait pris conscience de l’effet dévastateur qu’avait son frère aîné. Alcoolique, violent et toxique, son suicide n’avait été qu’un échappatoire aussi lâche que son comportement avant l’acte. Malcolm avait eu besoin d’un peu de temps alors qu’il idéalisait ce dernier l’ayant mis sur un grand piedestal. Forcément, il ne le voyait qu’à de rares occasions, jamais dans la vie de tous les jours, jamais dans son environnement. Il prit une profonde respiration et se tenait sa jambe droite. Ces douleurs - dites, “fantômes” par les médecins qui l’avaient suivis durant un an après son accident de voiture, - le reprenaient quand il faisait ce type de marche de chez lui à son lieu de travail. Son petit appartement n’était pas si loin mais l’appui sur sa jambe lui était encore particulièrement douloureuse. Il avait hâte de retrouver son bureau et de mettre en place les prochaines modifications. Les grandes portes de cette enseigne téléphonique Vodafen s’ouvraient et se fermaient automatiquement lorsqu’une personne entrait et sortait du bâtiment. Quelques sourires timides habituels s’affichèrent sur son visage devant des signes polis et il franchissait le hall d’entrée. Ses pas faisaient craquer le parquet qui devait être d’origine. En tout cas, il évita de regarder son reflet dans les miroirs à hauteur d’homme. Il gravit les trois petites marches avec aisance et souffla en masquant quelques petites grimaces de douleur. “Bonjour… Oh.” Il reconnut Cami sans aucune hésitation. La jeune femme avait été intérimaire dans son ancienne entreprise. Cette dernière n’avait pas eu la décence d’attendre la fin de sa rééducation pour le renvoyer et trouver quelqu’un d’autre pour faire le boulot. “Bonjour Cami.” souffla t-il. Il prit une profonde inspiration. Son dernier souvenir avec cette jeune femme était lointain et pourtant, en regardant ses yeux, tout lui revenait comme un boomerang. C’était un peu comme une sorte de malédiction de se souvenir de tout, qu’au moindre rappel, le tiroir du souvenir lui revenait avec une violence incroyable : “T’as l’air en forme.” Il consulta sa montre et s’appuya contre le comptoir d’accueil. Même si c’était hésitant, il se montrait toujours affable envers n’importe qui.

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