Je suis détendu de chez détendu

Jimmy avait du mal à la croire quand elle disait qu’elle avait déjà nagé avec des requins sans cage. Nager avec des roussettes ou d’autres espèces inoffensives n’était pas un problème. Et elle venait de lui expliquer les circonstances inattendues dans lesquelles elle s’était retrouvée à plonger avec des grands blancs. Ce n’était pas voulu. Sinon, Max n’était pas une tarée à ce point, elle ne s’y serait pas risquée sans un minimum de protection. « Comme dit, on n’avait pas exactement prévu ce scénario. Quand t’es dans la situation, il faut essayer de gérer l’angoisse. Bien sûr que je n’étais pas sereine et qu’on a tenté de les contourner pour sortir de l’eau. Mais ça prend du temps, on a essayé de ne pas agir dans la précipitation. » Le temps de les éviter et de remonter à la surface en gardant un œil sur les animaux, ils étaient restés de longues minutes dans l’eau à côté des squales. Heureusement, Max n’était qu’avec d’autres plongeurs expérimentés ce jour-là pas dans une excursion touristique. Il y aurait probablement eu des ennuis sinon. Après, libre à Jimmy de la croire ou non. Peu lui importait à vrai dire, elle n’avait rien à lui prouver. De son côté, l’homme d’affaire lui raconta ses bêtises d’étudiant. « Et vous n’avez jamais essayé d’emmerder des profs aussi ? Avec ton groupe. On en entend parfois des histoires sur les universités américaines. » Quand ils rigolèrent sur le fait que Jimmy finissait toujours ses soirées à poil, il précisa qu’il avait amélioré la formule, ce qui était vrai aussi. Il avait déjà perdu son sang-froid après une réunion de travail et Max se demanda comment il en était arrivé à ce stade. Un combat de coqs en gros. L’un qui pique l’autre, l’autre qui répond, et ainsi de suite. C’était monté graduellement et celui d’en face avait craqué en lui collant une droite. « Oui, je vois le genre. » Les hommes et leur égo. Ou tout simplement leur sale caractère parfois. Les femmes n’étaient pas toujours en reste non plus entre elles. D’ailleurs, Max n’était pas du genre à se laisser faire, c’est sûr. Elle répondait par la parole quand on l’attaquait verbalement et parfois plus si la dispute montait d’un cran, mais il fallait aussi une bonne raison pour qu’elle parte complètement en vrille. Certes, elle était impulsive mais elle ne se bagarrait pas pour le plaisir non plus. En général, Max rusait pour ne pas se laisser faire, comme elle avait notamment usé de cette technique pour balader son voisin du dessous pendant des mois. « Ah oui, je ne t’imaginais pas en mode kung-fu. Je te voyais plus cérébral, le genre à réfléchir à des stratégies ou chercher les points faibles pour les retourner contre les autres. Et oui, tout ça avec de la répartie bien sûr. Après, je me trompe peut-être. » En général, Max ne jugeait pas un livre seulement à sa couverture mais ce serait mentir d’affirmer qu’elle n’avait pas pris quelques raccourcis clichés avec O’Reilly. Après ce moment de détente dans le jacuzzi, Jimmy proposa de « déménager » au hammam. Elle esquissa un sourire à sa remarque, n’était-ce pas ce qu’ils faisaient déjà ? Se détendre, profiter, se mettre à l’aise. « Yep. Let’s go. » Ils sortirent du jacuzzi et se dirigèrent vers leur nouvelle destination.

« On t’aurait balancé toi, ça aurait sauvé le groupe. » Répondit Max à l’idée lumineuse de Jimmy pour s’en sortir vivant face à un groupe de requins. Il lui avait demandé sa plus grande folie et il avait été servi. En revanche, ses anecdotes relevaient de délires d’universitaires ou d’un écart professionnel, rien qui ne sortait vraiment de l’ordinaire. Max aussi avait déjà participé à des bêtises dans son école de natation, du style faire disparaître le maillot ou les vêtements d’un collègue nageur, qui se retrouvait à devoir se promener à poil ou quasiment dans les vestiaires et les couloirs, embêter un entraineur. Tout comme tenir tête à des clients chieurs dans le cadre de son travail, persuadés que puisqu’ils étaient les rois avec leur argent, ils pouvaient aller plonger n’importe où comme bon leur semblait alors que des zones de préservation de la faune sous-marine existait un peu partout en Nouvelle-Zélande. Mais quelle était la plus grande des folies de Jimmy ? Était-ce vraiment une de ses histoires de se retrouver à poil dans des positions inconfortables ? Elle en doutait, mais après tout, il y avait peut-être juste un goût de trop peu dans sa vision de la folie. D’ailleurs, sa bande et lui ne s’étaient pas tellement frottés à des professeurs non plus, au risque de se voir infliger des sanctions ou de se faire renvoyer. « Petits joueurs. Faut pas faire trop mauvais genre. » Lança-t-elle pour le taquiner un peu. Maxyne ne l’imaginait pas non plus en gros bras, plutôt à attaquer sur les points faibles d’une personne verbalement, attendant le moment idéal pour agir. Et il lui donna raison, sans non plus être omniscient. « Je suis d’accord. En général, on peut se faire une opinion très vite. » Pas toujours, parce que parfois des personnes cachaient bien leur jeu ou se révélaient surprenantes, mais la plupart du temps. Après la phase jacuzzi, Jimmy proposa de se déplacer vers le hammam. Maxyne acquiesça, réenfila son peignoir et le suivit jusqu’à leur destination suivante. Elle retira à nouveau le peignoir avant d’entrer dans la pièce chaude. Le contraste de température la saisit un instant mais elle s’habitua rapidement, étalant sa serviette sur un des bancs et s’allongeant sur le dos pour se mettre à son aise, sans attendre la permission d’O’Reilly à cet égard. Elle arqua un sourcil lorsqu’il lui lança que si elle étouffait trop, elle n’avait qu’à le lui dire. Lui supportait bien la chaleur, et elle aussi, encore plus le manque d’oxygène, habituée à de longues apnées quand elle nageait. Son cœur soutenait bien les nouvelles conditions. « Normalement, ça devrait aller. » Elle ne resterait pas des heures mais elle savourerait le moment. Fermant un instant les yeux, Max posa les mains sur son ventre et se détendit. Curieuse, et toujours les paupières fermées, elle s’attaqua alors à un aspect de leur vie qu’ils n’avaient jamais abordés. Juste parce que l’ambiance était chill et sans prise de tête. « Y’a jamais eu de Madame O’Reilly ? D’officielle, je veux dire. Dans les familles comme la tienne, avec un empire derrière, ça cherche souvent des héritiers. » Elle se demandait si Jimmy avait de la pression de sa famille par rapport à tout ça ou s’il était complètement libre. Après tout, il était déjà trentenaire. Jusqu’à présent, il semblait mener une vie à quatre cents à l’heure et loin de telles préoccupations. Puis, réalisant ce que cette interrogation pouvait laisser sous-entendre comme intérêt, Maxyne reprit la parole. « Avant que t’essaies de voir des intentions dans ma question, j’essaie pas de me porter candidate. Les gosses, non merci. »

« Vu que je n’étais pas miss études, ça ne m’aurait pas dérangé de foutre un peu le bordel dans la fourmilière. » Répondit-elle, rieuse. Au niveau des délires, Jimmy ne la prenait pas au sérieux mais elle pouvait se montrer un peu peste parfois quand elle avait envie de faire chier son monde, même si elle avait ses limites comme tout un chacun. Quand elle avait appris qu’une nageuse avait été indisposée et avait déclaré forfait à une compétition à cause d’une autre élève qui lui avait dilué des laxatifs dans son verre pour une histoire de rivalité sportive, l’autrice du méfait avait été renvoyée séance tenante après enquête interne au sein de l’établissement. Toucher à l’intégrité physique d’une personne faisait partie des limites que la blonde n’avait jamais franchies, du moins dans les délires susceptibles d’amener des conséquences sur la santé de la personne. Pousser quelqu’un comme Jimmy à poil dans une piscine n’avait pas les mêmes répercussions, c’était juste drôle. « Surtout dans ton milieu. Les affaires. Les gens essaient de bien cacher leur jeu. » Cependant, Maxyne ne pensait pas qu’O’Reilly en jouait un avec elle. Il n’y avait aucune raison de toute façon. Les deux partenaires de tennis d’un jour passaient la journée à se détendre et à profiter des bienfaits de l’hôtel. Dans le hammam, la nageuse prit ses aises et s’allongea sur le dos tout en relançant la discussion sur un aspect de leur vie encore jamais abordé. « C’est ça. Tik tak, l’horloge tourne. » Répliqua Max en riant lorsqu’il l’accusa de le qualifier de vieux. « Enfin pour les hommes, c’est moins problématique. Y’a pas vraiment de limite dans le temps. » Au passage, elle était plus âgée que lui aussi, à quelques mois près. « T’as bien raison de ne pas t’en mettre, surtout si ce n’est pas un sujet de préoccupation majeure dans ta famille. » A ce sujet, Max et Jimmy étaient sur la même longueur d’ondes. Pas besoin de s’encombrer de telles responsabilités maintenant. Néanmoins, il était un parti convoité, en riche héritier. Il n’était pas à l’abri d’un accident ou d’un piège. « Mince alors ! Moi qui voulais me marier avant la fin de l’année. Tu brises tous mes rêves-là. On peut faire comme si je n’avais rien entendu. » Riant de plus belle, Max rouvrit les yeux et se rassit en ramenant ses jambes sous elle. « N’empêche, ce serait drôle de le faire en mode délire. Je suis sûre que l’hôtel nous garantirait une soirée inoubliable, il suffit juste de poser un genou au restau. » D’ailleurs, elle avait les bagues en stock. Depuis le divorce de ses parents, Maxyne portait leurs alliances comme pendentif sur une fine chaine en or qui ne la quittait que lorsqu’elle plongeait ou comme aujourd’hui pour le spa. Elle les avait laissées avec ses effets personnels. Cela dit, Jimmy avait raison. En réalité, la jeune femme n’avait nullement pour projet de se caser. « Non, c’est pas trop mon truc. » A une époque, Max était déjà tombé amoureuse et elle en avait payé le prix fort. Plus jamais. « Tu peux faire des trucs que tu aimes avec l’autre personne aussi, rien ne t’oblige à t’emmerder. Non vraiment, t’as jamais été dans une relation sérieuse pour dire ça ? » Ok, pas le mariage, mais il n’avait jamais fréquenté une même personne sur une plus longue période ? Surprenant. Commençant à avoir chaud, Maxyne proposa ensuite de bouger vers la case massage.

En ouvrant le sujet des relations sérieuses et des mariages, Maxyne ne pensait pas que la conversation creuserait aussi loin, notamment par rapport aux enfants. L’avantage avec Jimmy, c’est que l’un et l’autre pouvaient partager franchement leur opinion sans se prendre la tête. Pas de jugement ou de personne choquée dans cette pièce. C’était même marrant d’avoir l’avis d’une personne qui voyait la vie un peu comme elle : une grande fête dont il fallait profiter de tous les bienfaits et entrecoupée de moments plus sérieux. « C’est clair. Faut pas avoir l’âge d’être grand-père pour décider de devenir parent, c’est pas l’idéal. Faut le faire quand t’es prêt. Si t’es avec la bonne personne. Ou jamais si tu veux pas. C’est personnel comme choix. » Maxyne délira alors sur une hypothétique demande en mariage au restaurant de l’hôtel mais même en mode rigolade, Jimmy en avait une sainte allergie. Enfin, c’était surtout parce que pour lui, ça ne changerait rien dans l’établissement de standing où ils logeaient. « De toute façon, la meilleure partie dans un mariage, en dehors de la grosse fête, c’est quand même le voyage. » Depuis qu’elle avait arrêté les compétitions internationales, Max n’avait plus tellement bougé de Nouvelle-Zélande et elle se prenait à rêver de repartir. Bientôt, peut-être, quand elle en aurait fini de ramer avec ses factures sur le dos. Ce que Jimmy n’aimait pas dans les relations sérieuses, c’était le côté « contraintes et concessions ». L’exemple de la belle-famille était parlant et bien trouvé. « J’avoue, les histoires de belle-famille… On s’en passerait. » Max avait déjà été en couple par le passé mais elle aimait bien trop sa liberté pour retenter sa chance à court terme. C’était plus cool de vivre sa vie et de ne pas avoir de compte à rendre tout le temps. La jeune femme proposa ensuite de passer à l’étape massage. Rien de mieux pour se détendre pleinement. Ils se dirigèrent vers l’endroit suivant et s’installèrent sur les tables dédiées. Evidemment, Jimmy ne manqua pas une occasion de crâner un peu. Enfin plus ou moins. Pour le coup, il se tacla sur ses talents de masseur par rapport aux professionnels. « Comment ? Je suis choquée ! Tu n’excelles pas dans tous les domaines ? » S’exclama-t-elle, amusée par sa réflexion. Elle avait utilisé une voix exagérément maniérée. « Oui, heureusement que ce n’est pas toi alors. Je tiens à marcher en sortant. » Il avait tendu la perche, aussi. Toutefois, pas le temps de continuer de déconner. Un masseur et une masseuse arrivèrent pour s’occuper d’eux. Max posa la tête au bon endroit et laissa ses muscles se détendre.

« Parle pas de malheur » Répondit Max en levant les yeux au ciel. Jimmy n’avait pas tort. On ne contrôlait pas tout dans la vie. Même en prenant des précautions, le risque zéro n’existait pas. Sans parler de mauvaises rencontres, le hasard en décidait parfois autrement. De son côté, la jeune femme veillait à éviter toute mauvaise surprise. Certains avaient beau lui voir un instinct maternel, comme Chance qui lui avait déjà dit qu’elle lui rappelait sa mère quand elle le réprimandait après une bêtise ou Piotr qui la considérait comme ce qui s’en rapprochait à défaut d’avoir la sienne en Nouvelle-Zélande, Max ne se voyait pas du tout devenir maman, en tout cas pas dans un avenir proche. Bien sûr, elle avait été heureuse lorsque son frère lui avait proposé de devenir la marraine de son fils, acceptant ce rôle sans hésiter. Mais ce n’était pas pareil qu’une responsabilité à plein temps. Et elle n’avait pas du tout les qualités pour devenir parent. Bien qu’elle reste pro dans le cadre de son travail, la blonde se montrait le plus souvent immature, déjantée et irresponsable. Pas tout le temps non plus, tout dépendait du contexte et des personnes avec qui elle était. Aujourd’hui, elle était relativement calme parce qu’elle profitait de la journée pour se détendre. Depuis le temps où elle n’avait pas appuyé sur le bouton pause… Cette constatation s’appliquait aussi pour les voyages. Fauchée, Max n’avait pas quitté la Nouvelle-Zélande depuis longtemps. Dur, dur. Alors quand Jimmy plaisanta sur un projet de voyage en lieu et place d’une fausse lune de miel, elle se contenta de sourire. Tous frais payés ? Heureusement, ce n’était qu’un délire. Certains ne se gêneraient pas pour en profiter, pour mettre au placard les bons sentiments. Mais non, Jimmy et elle n’étaient pas des amis de longue date. S’il le lui avait réellement proposé, la blonde aurait eu l’impression de jouer à ces bimbos écervelées qui accompagnent les riches juste pour leur fric. A défaut d’argent, il lui restait sa fierté, elle aurait refusé. De toute façon, O’Reilly l’avait lancé sur le ton de l’humour, pour lui emboîter le pas, et c’était mieux d’en rire. Après ces discussions sur les relations sérieuses et l’amour de leur liberté, ils passèrent au salon de massage où ils ne manquèrent pas de s’échanger de nouvelles piques. « Mais ! Je croyais qu’on avait dit qu’on ne faisait pas de remake de mariage ici ! » Répliqua Max à la dernière remarque de Jimmy à propos d’un hypothétique porté jusqu’en chambre, en référence à cette tradition du marié de porter sa femme dans ses bras lors de la nuit de noce. Trêve de mauvaises blagues. Les professionnels du massage arrivèrent et s’occupèrent d’eux. Sentant les nœuds dans son dos, la blonde se raidit légèrement au premier contact avant de se détendre progressivement sous les mains expertes. Plusieurs événements l’avaient rendu tendue dernièrement, entre sa blessure, les ennuis avec Jay, le retour de Chance à Island Bay, les contrariétés. Il fallait faire le vide. Au bout de deux minutes, la nageuse se laissait complètement aller et elle avait presque envie de dormir tellement elle était bien. Même Jimmy ne pétait plus un mot, signe qu’il devait apprécier le moment lui aussi, parce qu’il était un véritable moulin à paroles sinon. A la fin du massage, les deux spécialistes les quittèrent et Max se redressa lentement en remettant son peignoir. « Wow. Je serai bien restée allongée tout le reste de la journée. » Sauf qu’il était venu le temps de quitter l’espace wellness de l’hôtel et de retourner dans leur chambre pour se préparer avant la soirée au restau.

Après la journée détente à profiter des bienfaits de l’hôtel dans l’espace wellness, Jimmy et Max retournèrent dans leur suite. Comme l’homme d’affaire l’avait expliqué, ils avaient largement le temps de se préparer. Puisque le restaurant était d’un certain standing et que Jimmy l’avait prévenue au préalable, la nageuse comptait faire un effort et ne pas se contenter de sa tenue de ville habituelle. Elle avait emmené une robe qu’elle n’avait portée que deux ou trois fois, la première occasion avait été lors du remariage de son père avec son compagnon. Cependant, Maxyne ne prendrait jamais deux heures pour se préparer, aussi elle décida de prolonger la détente dans la chambre. « Comme tu veux, je me reprends un verre d’abord. Tu veux quelque chose avant de dormir ? Sinon, si tu as peur d’arriver en retard, tu peux déjà y aller. » Dans un sourire, la jeune femme se servit un verre de champagne de la bouteille qui avait été ouverte plus tôt dans l’après-midi, puis elle se posa sur le lit et but une gorgée tout en allumant l’écran plat pour mettre de la musique. La chanson qui passait parlait de paris et de jeux de hasard. « Tu t’y connais en jeu ? » Demanda-t-elle, songeuse. « Poker, tout ça. » Prenant le paquet de clopes qu’elle avait posé sur la table de nuit, la jeune femme se releva et en alluma une, s’approchant de la porte-fenêtre de la chambre dans l’idée de ne pas inonder la pièce de fumée. Faudrait pas déclencher un détecteur ou une connerie de ce genre. Son regard interrogateur plongea dans celui de Jimmy. « Tu m’apprendrais ? » Ce serait peut-être pratique pour gagner ou perdre de l’argent facilement quand le besoin se ferait ressentir. Joueuse, Maxyne l’était. Dans sa vie, dans ses relations, dans ses délires. C’était d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles elle se retrouvait dans cet hôtel aujourd’hui, parce qu’elle avait accepté un défi au pied levé. Alors, pourquoi ne pas tenter sa chance sur un tel terrain ? Elle apprécierait la tension générée par le sort incertain des cartes couplée à un facteur que les joueurs étaient en mesure de contrôler : le bluff. Après son verre et sa cigarette, la blonde attrapa le nécessaire dans sa valise pour aller dans la salle de bains, tout en laissant sa robe emballée dans son sac. Jimmy ne la verrait qu’en allant au restaurant, ça n’avait pas d’enjeu particulier mais garder le suspens avait un côté amusant. Dans la salle de bains, Maxyne se glissa sous la douche et profita un moment de l’eau chaude. Peu après, elle termina de se préparer par une touche de maquillage et de parfum. Elle enfila ensuite son peignoir par-dessus ses sous-vêtements et libéra la salle de bains pour Jimmy. « Moins d’une heure je crois ? On verra le temps que met la diva. » Plaisanta-t-elle. Il avait tellement cherché à s’assurer qu’elle serait sur son trente-et-un qu’elle avait failli prendre une brassière et un legging à porter au restaurant rien que pour l’embêter. Mais en vrai, elle avait envie de changer ses habitudes de garçon manqué. Pendant qu’il était occupé, Maxyne consulta son téléphone et envoya quelques messages avant de s’habiller. Elle était fin prête pour le restaurant.

Cette fois, Jimmy décida de se joindre à Maxyne pour le champagne. La jeune femme ne se gênait pas car elle voulait profiter à fond comme dans tout ce qu’elle faisait. C’était comme si la nageuse récupérait les années où elle avait vécu dans la restriction quand elle était sportive. Son accident lui avait remis les idées en place, notamment celle que tout pouvait s’arrêter du jour au lendemain, qu’il ne fallait pas perdre son temps. Alors, depuis qu’elle s’était rétablie, la blonde brûlait la vie par les deux bouts, elle vivait en permanence comme si elle participait à une grande fête prolongée. Parfois, c’était rafraichissant pour son entourage, ce côté pas prise de tête. D’autres fois, son comportement agaçait parce qu’elle manquait de sérieux ou de maturité – sauf dans les moments qui le nécessitaient vraiment comme dans le cadre de son travail où elle ne déconnait pas avec les plongeurs et restait attentive. Maxyne tendit un verre à Jimmy, prit ses aises sur le lit et alluma la télévision, s’interrogeant sur les habitudes de jeux de l’homme d’affaires. L’héritier maitrisait un peu le poker, il provoqua ensuite un rire chez la blonde quand il avoua qu’il n’était pas bon perdant. Le contraire l’aurait étonnée. « C’est un bon moteur pour gagner. » La nageuse rejoignit ensuite la porte-fenêtre pour se griller une clope ; elle adorait la sensation de la nicotine à celle d’un verre d’alcool. Et puis, il avait de l’argent à dépenser, ce n’était pas comme si un gros billet allait lui manquer. Par contre, Maxyne espérait apprendre à jouer pour du beurre aux côtés d’un bon bluffeur avant de tenter sa chance dans une vraie partie. « Mais la difficulté, c’est que tu ne joues pas toujours contre des gens que tu connais. Ce jeu, c’est 50% les cartes, 50% l’art de démêler le vrai du faux non ? » Après cette conversation, Maxyne partit se préparer et ressortit ensuite en taquinant Jimmy. L’ambiance était bon enfant, pas vraiment dans des délires trop sérieux, ni même séducteurs. Profitant de l’instant présent, la nageuse se laissait porter par la journée. « C’est parti alors. » Elle mima l’activation d’un chronomètre imaginaire et termina de se préparer tranquillement dans la chambre pendant qu’il était occupé dans la salle de bains. Quand Jimmy ressortit, il découvrit la tenue de Maxyne et lui adressa un compliment. « Oui, c’est un peu l’effet qu’est censé avoir cette robe. » Répondit-elle sur le ton de l’humour, en référence à la couleur. « Et je serai bien accompagnée, ce soir. » Façon détournée de lui retourner le compliment. Dans son costume, il était classe aussi, un peu James Bond gentleman, version plus jeune que l’acteur actuel. L’air de rien, ça faisait son petit effet aussi de se mettre sur son trente et un. Jimmy était souvent tiré à quatre épingles alors ce n’était pas si inhabituel mais Maxyne s’apprêtait rarement ainsi, les occasions ne se bousculaient pas au portillon et ce n’était tout simplement pas dans ses habitudes. Lui tendant son bras, Jimmy vérifia qu’elle était prête. D’un signe de tête positif, la blonde lui emboita le pas et le duo sortit de la chambre, direction le restaurant. Dans la salle, on les plaça à une table avec de l’espace. La décoration du restaurant en jetait comme l’entrée de l’hôtel tout à l’heure. Maxyne essayait de ne pas trop regarder autour d’elle mais c’était difficile de ne pas admirer la beauté des lieux. Non loin de leur table, un fond musical émanant de l’estrade complétait l’ambiance de la soirée. Les serveurs et serveuses ressemblaient au personnel d’hôtel que l’on voyait dans des séries un peu grandioses. Tout était classe et luxueux. On leur apporta les cartes et Maxyne parcourut la sienne. Même si elle ne fréquentait pas souvent des établissements de ce standing, elle avait déjà été invitée par son père et son beau-père dans de bon restaurants alors les noms de plats un peu pompeux n’étaient pas durs à comprendre. « On va peut-être essayer de ne pas se rendre malade, le menu classique, ce sera parfait. Tu me conseilles des choses en particulier ? » Vu qu’il était déjà venu, Jimmy avait peut-être retenu des spécialités. De son côté, Maxyne n’était pas très difficile, elle n’avait pas d’allergies alimentaires particulières et elle mangeait de tout sauf ce qui se rapprochait des crustacés. Ses yeux étant plus forts que son ventre, elle repoussait tout ce qui la rebutait à l’œil nu.  

« Mince, t’es pas le prof idéal alors. » Répondit Maxyne, en riant, lorsque Jimmy expliqua qu’il se faisait berner à tous les coups. Pour un homme d’affaire aux dents longues, elle ne le pensait pas si facilement dupé mais il exagérait peut-être le trait. Ou pas. Selon lui, le bluff était l’atout majeur de la partie. On pouvait avoir la meilleure suite de cartes entre les mains, si l’adversaire nous entubait, c’était peine perdue. « Eh ben… impressionnant. Pas très lucratif pour les amateurs, tout ça. Faut être sacrément doué pour ne pas se faire plumer. » Des petites parties entre potes pouvaient être amusantes mais elle ne chercherait jamais à s’adonner à des jeux au point de dépenser des sommes folles. Des sommes qu’elle n’avait certes pas de toute façon, mais certains engageaient leur maison, leur voiture et tout ce qu’ils possédaient pour jouer des parties supplémentaires. Après cette conversation sur les jeux, les deux trentenaires se préparèrent pour la soirée. Quand Jimmy sortit de la douche, c’est comme si Max et lui avaient changé d’univers. Ce n’était pas très difficile en même temps. Passer de maillot et bikini à un costume sur mesure et une robe scintillante, il y avait clairement deux ambiances. Sur ces entrefaites, ils descendirent au restaurant et furent placés dans un coin tranquille non loin de l’orchestre. Comme Jimmy était déjà venu, Maxyne lui demanda conseil mais il lui assura qu’elle pouvait y aller les yeux fermés sur tout ce qui était à la carte. « D’accord. Tout est super tentant en fait ! » La blonde détailla la carte du regard et opina quand il lui recommanda la Piña Colada. « C’est vrai que ça peut vite devenir écœurant si c’est mal dosé mais j’vais tenter ça. » Ils commandèrent justement l’apéritif, ce qui donna un peu plus de temps à Maxyne pour se décider par rapport au repas. Elle choisit une entrée et un plat à base de poisson. On leur servit leur verre apéritif et ils passèrent commande pour la suite, puis Jimmy reprit le fil de la conversation. « Franchement, oui. Je t’avais un peu pris pour un rigolo quand on a joué au tennis, parce que bon… Une partie contre une journée entière au spa et de services hôteliers, c’est pas tellement comparable. Mais je dois reconnaître que cette journée, c’était une belle surprise. Ça fait longtemps que je m’étais pas détendue comme ça. » C’est vrai que Max avait un peu rigolé mais elle n’avait pas fait la folle par rapport à la façon dont elle était d’habitude. Non, elle avait juste profité du moment et de la compagnie en étant complètement zen et relâchée. Ça faisait du bien, surtout pour elle qui n’avait plus souvent l’occasion de partir en vacances. C’était aussi l’occasion d’apprendre un peu à mieux connaitre Jimmy, puisque leurs routes ne s’étaient pas croisées maintes et maintes fois avant. « Et toi, tu passes un bon moment ? ça ne ressemble pas trop à ce que tu fais tout le temps ? » Maxyne le taquinait mais elle n’était probablement pas si loin de la vérité. Il en avait plus l’habitude que la plupart des gens, c’est sûr. « Du coup, à ce petit week-end d’évasion. » Elle trinqua avec lui puis goûta à son cocktail. « Tu as raison, ça valait le coup d’essayer. »

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