Mon beau sapin (Wade et Eve)

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mon beau sapinWade & Eve

Des guirlandes partout. Des chants typiques sortant des hauts-parleurs. Et ce foutu traineau tiré par un renne au nez rouge qui n’a rien à faire sur la plage. C’est Noël, toutes les excentricités sont permises ! Une gamine peu douée en zoologie prétend que l’animal est un caribou, son frère lui donne une tape dans le dos en lui criant « T’es nulle, c’est un cerf. » Pas mieux ! Eve les regarde en s’amusant de leurs commentaires. Quand la mère les récupère, elle abandonne son poste d’observation pour se diriger vers le stand où l’on vend des sapins. Elle a passé commande. Prudente. Elle a été précise sur ce qu’elle voulait. La raison est simple, pouvoir ramener le sapin par le bus. Sans véhicule, ni permis de conduire, impossible de faire autrement. A pied, l’arbre sous le bras ? Et puis quoi encore ! Demander à son grand-père ou au frère de Priam pour une voiture ? Possible, mais elle préfère se débrouiller par elle-même. Et puis un sapin n’a pas besoin d’être gros pour être l’attraction dans la maison. Quand l’un des vendeurs-lutins s’approche d’elle, elle lui donne son nom pour récupérer le sapin désiré. Il vérifie sa liste de commande et l’entraine au milieu de la verdure. Il vérifie l’étiquette accrochée à la branche et claironne « C’est celui-là. » Le regard d’Eve passe de l’homme au végétal et vice versa. « Ah non, pas du tout. J’ai demandé un petit, j’ai même donné les mesures exactes qu’il fallait. » L’homme, radical et pressé, n’en démord pas « C’est ça ou c’est rien, tout est vendu. » Il l’abandonne aussi sec pour se diriger vers un autre client. Eve lève les yeux, n’en finit pas de les lever pour trouver le sommet de l’arbre. A quoi sert de commander, ah oui, payer d’avance ! Elle soupire. Mode détresse activé. Peut-être acheter une scie, couper une branche et se contenter de cela ?

**○ inscrit le** : 30/08/2020

Noël approchait à grand pas. Au sein de la colocation, tout le monde se mettait en effervescence pour célébrer comme il se doit ce moment important de l'année. A vrai dire, Wade devait sans doute être celui qui se sentait le plus investi, parce qu'il était croyant, un peu pratiquant. Et puis, cette année, il avait pas mal réfléchi à certaines choses. Sauver des vies au quotidien ne lui suffisait pas. Il voulait mettre à profit son temps et sa motivation pour d'autres choses. Lui, il ne croyait pas trop aux résolutions de comptoir, celles que l'on prenait le 1er janvier que l'on appliquait deux jours avant de les passer aux oubliettes pour l'éternité. Par contre, il n'était jamais trop tard pour décider de faire quelque chose d'utile et de constructif, sur le plan personnel. Sa résolution principale était de s'investir plus intensément dans tout ce qui était caritatif. A vrai, ça lui venait de l'escape game auquel il s'était inscrit pour Halloween. Le lieu choisi, Tapu Te Ranga, le faisait réfléchir sur ce qui pouvait exister désormais à la place, l'utilité d'un tel endroit avait sur la vie de tous les jours, pour certaines personnes. Ayant participé à l'intervention visant à éteindre les flammes, cet épisode lui rappela des souvenirs. Il n'était pas du genre à vivre dans le passé, mais cela ne l'empêchait pas de se poser beaucoup de questions. C'est donc ainsi qu'il se résolut à aider, pour Noël, une association visant à lutter contre le racisme et une autre visant à favoriser l'insertion des nouveaux arrivants étrangers, à la société.

Ce combat, louable, il le vivait d'autant plus de l'intérieur qu'il était personnellement concerné. Sa mère avait été tuée à cause du racisme, laissant dans sa vie un vide conséquent, qu'il n'avait jamais su trop combler. Il vivait avec son absence, cruelle et perpétuelle. Ainsi donc, Rhodes proposa son aide et fut maintes fois appelé à la rescousse pour conduire des gens dans leur solution d'hébergement provisoire, distribuer des repas, donner quelques informations sur la ville... Ce soir, il était chargé d'une mission spéciale : récupérer un sapin de Noël pour l'apporter au centre d'accueil, là où se trouvaient toutes celles et ceux en attente d'un logement. Oui, eux aussi avaient droit à Noël, à un moment chaleureux où le partage et l'amitié suffisaient à mettre du baume au coeur. L'arbre, Wade l'avait choisi directement par le site internet. Ce système de click and collect, il l'aimait bien, ça permettait de gagner un peu de temps ! Et aussi de pouvoir choisir à l'avance. Par chance, le sien fut toujours en stock lorsqu'il arriva. Il avait donné son numéro de commande et on lui montra le bel arbre en question. Magnifique. Il retourna à sa fourgonnette louée pour l'occasion sur ses deniers personnels, pour en récupérer un diable. Ce serait quand même beaucoup plus facile à transporter. Alors qu'il revenait pour enlever son arbre, il entendit une voix qui lui fut familière. Il la connaissait de quelque part. Il observa autour de lui et ses yeux se posèrent sur une brune, à quelques mètres. A en juger par son air quelque peu contrarié et songeur, elle semblait peu satisfaite du sapin qu'elle avait acheté. Mais surtout, Wade la reconnut presque aussitôt.

Eve. Quelques années plus tôt, elle fut victime d'un terrible accident. Percutée par un véhicule, envoyée dans un magasin éventré sous le choc... En arrivant, Rhodes et son équipe portèrent secours à tous les blessés. Lui, il se chargea de la jeune femme, inconsciente, en grosse détresse respiratoire. Quand il n'avait plus senti de pouls, il n'avait pas perdu son calme, il avait entrepris des gestes élémentaires pour lui porter assistance. Et puis vint le défibrillateur... grâce auquel il la ramena à la vie. Un soulagement, mais peu palpable car sur le moment, elle fut évacuée à l'hôpital. Quelques jours plus tard, quand elle quitta les soins intensifs, Wade alla la voir et se présenta. S'il aimait son métier, c'était justement parce qu'il se battait pour protéger la chose la plus précieuse au monde : la vie. Il laissa son diable et son sapin en plan pour s'approcha, un sourire rayonnant sur le visage :

- Et bien ça alors ! Eve Bramwell !!! Comment ça me fait plaisir de te revoir ! Tu vas bien ?

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Quand on ne peut revenir en arrière, on ne doit se préoccuper que de la meilleure façon d’aller de l’avant.
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Eve imagine des solutions pour récupérer l’arbre, un morceau de l’arbre, l’abonner purement et simplement et se rabattre sur autre chose. D’ailleurs, elle s’est mise au bricolage depuis un mois pour faire des objets décoratifs pour Noël. Décorer la maison qu’elle partage avec Priam, celle de ses grands-parents. Elle a même envisagé de les mettre en vente. Peut-être sur un site internet. Peut-être au marché de Noël lui-même. Tout est possible. Peut-être même les offrir aux clients du salon de tatouage en guise de cadeaux de fin d’année, il faudra cependant l’autorisation de Maya.

Perdue dans ses pensées comme trop souvent, la voix d’un homme la fait sursauter. D’autant qu’il l’interpelle par son nom. Ils ne sont donc pas des inconnus ! Elle se tourne dans sa direction pour apercevoir le sourire de celui qui s’avance vers elle. Son visage. Elle le reconnait aussitôt. Comment oublier ? Son pompier. Son ange gardien. Son sauveur. Elle hoche de la tête en souriant à son tour. « Oh moi aussi, cela me fait extrêmement plaisir de vous voir. » Elle a remarqué qu’il l’avait tutoyée, mais comment en faire autant, on ne tutoie pas les anges, on les vénère. « Je vais bien. Mieux que la première fois que nous nous sommes rencontrés. » Difficile de faire pire en effet ! « Je vais refaire du vélo. » La résolution qu’elle annonce sonne comme celles que l’on prononce lors du changement d’année, bien souvent abandonnée quelques mois plus tard. Pour elle c’est tout autre chose. Jusqu'à présent elle avait fui les bicyclettes. L’engin en question lui ayant coûté la vie, il n’était pas question de tenter le diable une seconde fois. Or, il est temps de passer à autre chose et la vue de son sauveur n'y est pas étrangère. Sa simple présence lui donne du courage. « Et vous ? Est-ce que tout va bien pour vous ? » Dans la logique des choses et du lieu de rencontre sa question suivante n’a aucune originalité. « Vous préparez Noël ? Vous avez trouvé votre sapin idéal ? » Elle ne peut s’empêcher d’avoir un coup d’oeil au sien. Non, il n’a pas rétréci.

**○ inscrit le** : 30/08/2020

Effectivement, Eve semblait se porter bien mieux que lors de leur première rencontre. Elle parlait, elle bougeait et surtout elle n'était pas allongée au sol, en train de doucement crever. Une amélioration forcément notable ! Cela dit, la probabilité qu'ils tombent l'un sur l'autre, ici, dans ce marché de Noël, ça restait quand même exceptionnel. Si ce n'était pas déjà fait, ils devraient jouer au loto, histoire de profiter de la situation jusqu'au bout. Elle avait toujours eu du mal à le tutoyer, et il ne pouvait pas lui en vouloir. Après tout, hormis l'accident, ils ne connaissaient pas plus que ça. Ils avaient parlé, à l'hôpital, et puis les choses en amenant d'autres, ils s'étaient perdus de vue. Le destin les amenait à se rencontrer à nouveau, en ce lieu hautement improbable. Wade ne put s'empêcher d'avoir un sourire fier quand elle lui indiqua qu'elle allait remonter à vélo. Il approuva du chef, en lui disant :

- Génial ! Tu as bien raison de te remettre en selle ! Il ne faut jamais rester au sol ! Il faut apprendre à se relever, même si ça prend du temps et que ça n'est pas facile à faire ! Mais il ne faut pas abandonner, ça en vaut la peine !

Il lui porta un regard bienveillant. Même les plus petites avancées méritaient d'être félicitées. Mais là, on parlait tout de même d'un gros pas en avant. Eve avait frôlé la mort sur ce vélo. Outre le traumatisme évident, il y avait aussi une crainte de ne rien maîtriser à nouveau. D'être un peu la marionnette heurtée par une voiture, envoyée dans le décor et de ne posséder aucune solution pour éviter le pire.

- Ca va bien pour moi ! Ma vie professionnelle n'a pas trop changé, si ce n'est que je suis passé capitaine. Mais j'interviens toujours sur le terrain, je ne peux pas m'en passer ! Sinon, j'habite toujours ici sur Island Bay, rien de nouveau de ce côté là !

Bon, il était aussi toujours célibataire, mais ce genre d'information, nul besoin de la relater à Eve. Alors qu'arrive la question du sapin de Noël, Wade acquiesce gaiement et lui montre l'arbre :

- Je suis bénévole dans une association qui vient en aide aux étrangers en situation irrégulière. Et je me suis proposé pour aller chercher le sapin que nous allons mettre au centre d'accueil ! Je suis content, c'est exactement celui que je voulais ! J'avais un peu peur qu'ils se fasse dévaliser, mais le vendeur m'a expliqué que ce sont les petits modèles qui sont partis en premier ! Ouf !

Il vit alors un Père Noël passer juste à côté d'eux. Laissant temporairement la conversation de côté, il lui fit signe et demanda poliment s'il accepterait de faire un selfie. Un de ses collègues à la caserne, lui avait lancé un défi à la noix : faire un selfie avec le Père Noël et lui envoyer. S'il réussissait, Wade pourrait lui coller un défi en retour. Ce genre de jeu, c'était commun à la caserne. L'homme, qui avait fini sa journée hésita, et devant la bonne bouille de Wade, il finit par accepter. Rhodes sortit son téléphone, prit la photo de lui et de l'homme en rouge. Il le remercia chaleureusement. Avant de se concentrer à nouveau sur Eve :

- Désolé, un de mes collègues m'a lancé un défi où il fallait que je fasse un selfie avec le Père Noël ! Je ne dis jamais non à un défi ! Je suis joueur. Limite je suis un peu fanatique là-dessus ! Hahaha !

Il rit de bon coeur. Il remarqua rapidement qu'Eve jetait un oeil à son sapin et que celui-ci était assez grand. Trop pour elle. Avait-elle quelqu'un pour l'accompagner ? Visiblement non...

- Et toi ? Je vois que c'est un sacré bel arbre ! Il est grand ! Tu as quelqu'un pour t'aider à le porter ? Ou tu es toute seule ?

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mon beau sapinWade & Eve

Eve se réjouit que la vie du pompier se passe bien. C’est une bonne nouvelle. Elle n’est nullement étonnée d’apprendre qu’il fait du bénévolat. Voilà qui fait partie du travail régulier des anges gardiens, veiller sur les malheureux et en l’occurence des étrangers avec des tonnes de problèmes. Wade est bien là pour un sapin et ce qu’il lui dit des petits modèles lui enlève son sourire un instant. Voilà où se trouvait le problème, tout le monde a commandé un petit. Cependant, d’un coup elle en veut aux vendeurs d’avoir accepté davantage de commandes qu’ils ne pouvaient en fournir. Pas pro du tout comme attitude. Des tiroirs-caisses, voilà ce qu’ils sont, des profiteurs. L’année prochaine, elle s’y prendra différemment, quitte à venir le choisir sur place, le payer et l’emmener un mois avant la date.

Les agissements suivants de son sauveteur l’étonnent un instant, mais après tout, est-ce si étonnant ? Un ange qui interpelle son ami de rouge vêtu. A bien y regarder, deux supers héros ensemble. Superman, Captain America, on les voit sur les écrans, elle a devant elle, ensemble, Super Captain Wade et le père Noël, magicien qui donne le sourire à tous les enfants, avec en fond son sapin monumental et plus loin le super vilain autrement dit le Grinch déguisé en vendeur d’arbres, il est nécessaire d’immortaliser l’instant pour le montrer à ses grands-parents qui avaient, à l’époque, remercié cent mille fois le pompier d’avoir sauver la gamine. Selfie oblige ! Deux clics en même temps, celui de Wade et son pote encapuchonné, celui d’Eve en compagnie des héros. Bien sûr, tout super héros a son identité secrète et le pompier se lance dans des explications dont elle n’est pas dupe. Sourire complice alors que des enfants sautillent autour d'eux et du père Noël.

Wade a remarqué le sapin, source des problèmes présents d’Eve. Une moue qui en dit long sur la situation. « Je suis seule. J’avais commandé un petit. Et... » Une voix au bord du déraillement. Un air triste en complément. « Ils m’ont fourni un immense. Je pensais le ramener par le bus et l’installer dans le salon, mais il ne rentrera ni dans le bus, ni dans la maison. Trop grand ! Je ne sais pas du tout quoi faire. J’ai pensé pendant un moment couper une branche avec une scie et ne ramener que ça, mais une branche, ce n'est pas un arbre. Vraiment je ne sais pas. » Elle se tourne vers l’arbre. Ce n’est pas de sa faute s’il est grand. Il y a des personnes petites et d’autres grandes. Les arbres, c’est pareil. Elle lui offrirait volontiers une place dans le jardin, on n’abandonne pas quelqu’un de seul en période de fête et on ne l’ampute pas juste parce qu’il ne convient pas dans le décor. Mais le problème n’est pas là. Le problème c’est le transport.

**○ inscrit le** : 30/08/2020

- Oh... Couper une branche ? Oh non... Il est très beau ton arbre !

Wade n'avait pas pu retenir ses mots. L'idée que ce sapin puisse être tronçonné une deuxième fois, juste pour une branche, ça le mettait en émoi. Voilà qu'Eve envisageait de casser le végétal pour pouvoir avoir une chance de le transporter chez elle. Même une parfaite étrangère aurait mérité de l'aide. On ne transigeait pas avec ce genre de situation. D'accord, dehors, il y avait certainement pire, en témoignaient les trois mendiants qui arpentaient le marché à la recherche de quoi casser la croûte. Cependant, la simple idée que la jeune femme ne puisse pas profiter d'un bel arbre comme celui qu'elle avait commandé, ça lui mettait la boule au ventre. C'était Noël après tout ! Le moment où la magie de la vie venait mettre un rayon de soleil à tout le monde. Il imaginait son interlocutrice dans son salon, avec sa bouture dans un petit pot... une maigre guirlande autour, pas de boule pour éviter que la branche ne casse. Triste vision... Mais, fort heureusement, la solution se dessina dans son esprit, en l'espace de quelques secondes. Après un petit grimace triste, un sourire traversa son visage, alors qu'il bomba le torse :

- Tu sais quoi ? C'est ton jour de chance ! J'ai loué un fourgon où il y a largement de la place pour deux sapins de Noël entier ! Oui m'dame ! Tu as bien entendu ! Donc voilà qui règle ton problème de transport !

Il ponctua par un client d'oeil. Le diable qu'il avait pris lui permettrait de transporter l'arbre jusqu'à la voiture. D'abord, il devait stocker le sien.

- Attends-moi là ! Je vais ranger celui-là d'abord et puis je reviens !

Il joignit le geste à la parole et s'éclipsa. Sur le parking, il se hâta de charger le sapin, usant des muscles de tout son corps pour y parvenir. C'est qu'il n'était pas des plus légers, le bonhomme ! Quand il eut fini, il referma les portes, verrouilla le véhicule et retourna avec son diable, voir Eve. Non loin d'eux, un vieillard passa, en maugréant vertement contre Noël. L'homme aigri, s'arrêta à leur niveau pour pousser un soupir de dédain et hausser les épaules. Il continua sa marche, alors que Wade le regardait, avec un mélange d'amusement et aussi de pitié. Franchement, il pouvait comprendre que Noël soit devenue une fête trop commerciale et mercantiliste. Mais était-ce une raison pour la rejeter en bloc ? Alors qu'il croisa les bras pour caresser sa barbe de plusieurs jours, il dit :

- C'était un M. Scrooge ! Tu sais le personnage du conte de Charles Dickens ? Tu ne connais peut-être pas le conte d'origine parce qu'il y a eu un film dessus et même Disney a fait un dessin animé. Scrooge c'est un habitant de Londres, un vieil avare, aigri, pas gentil du tout et surtout odieux au possible. Quelques jours avant Noël, le fantôme de son ancien associé, mort sept ans auparavant, vient à sa rencontre pour le mettre en garde. A force d'être aussi méchant et de ne pas se concentrer sur des faits plus positifs, notamment à l'égard des autres, Scrooge risque de finir comme lui, à errer sur la Terre, chaînes au pieds et aux mains, entravé de toute possibilité de libérer son âme.

Il marqua une petite pause, alors que deux enfants s'étaient arrêtés pour écouter son histoire. Se rendant compte de leur présence, Wade poursuivit, en ajoutant des gestes et des expressions sur son visage pour faire vivre son récit.

- Pour se racheter et ne pas connaitre de triste sort, Scrooge va recevoir la visite de trois esprits ! Le premier est celui du passé. Quand il vient, alors, Scrooge se remémore les soirées de Noël de son enfance. Elles n'étaient pas très heureuses car hélas pour lui, il avait grandi dans un orphelinat. Mais à l'époque, une belle et ravissante jeune fille suscitait son intérêt. Tant et si bien qu'ils se promirent un jour de se marier. Pourtant, la soif d'argent de Scrooge, son manque évident de générosité et d'altruisme eurent raison cette promesse. Secoué par le fait de revivre ce souvenir douloureux où sa dulcinée lui rendit sa bague, Scrooge revint doucement à la réalité avec de quoi méditer.

Les gamins étaient subjugués. Rhodes s'accroupit pour se mettre à leur niveau et continua son récit :

- Le lendemain, c'est l'esprit du présent qui vient le voir. Et qui l'amène dans les rues de Londres, jusqu'à la demeure de Bob Cratchit. Bob est un employé de Scrooge, que celui-ci exploite au possible. Et bien évidemment qu'il paie au lance-pierres. Observant la famille Cratchit par la fenêtre, il constate que le repas est bien maigre, là où certains ont une floppé de victuailles et de boissons, eux n'ont que des assiettes à moitié pleine. Les quelques gourmandises présentes sont données aux enfants. L'un d'eux, Tiny Tim est malade. Ses parents n'ont malheureusement pas assez d'argent pour le faire soigner... Très pâle, éprouvant beaucoup de mal à se déplacer, Scrooge en vient à se demander s'il sera toujours là pour fêter Noël. Mais la famille Cratchit savoure le moment présent. Elle est unie, elle est heureuse, parce que même si elle n'a pas d'argent, elle a de l'amour.

Nouvelle pause. Wade prit un air un peu plus solennel, un vrai conteur.

- Et puis le soir suivant, c'est l'esprit du futur qui rend visite à Scrooge, tout vêtu de noir. Il le conduit alors dans une chambre faiblement éclairée où un corps couvert par un drap est allongé sur le lit. Ne parvenant pas à soulever le drap pour voir ce qui est en dessous, Scrooge est alors conduit dans la maison des Cratchit. L'ambiance y est bien morne... Le jeune Tiny Tim a succombé à la maladie. Et ses parents ont le coeur brisé. Scrooge se décide alors à voir qui se cache sous le drap. C'est alors qu'il fait face à une tombe. Sa tombe, car son nom est gravé sur la stèle. Il revient alors à la réalité, complètement remué par ce qu'il vient de vivre. Sorti de son "rêve", il apprend que c'est le jour de Noël. Lui, l'intarissable grippe-sou, qui déteste Noël, les rires, les enfants... voilà qu'il se met à acheter des décorations, même un sapin de Noël, comme celui-là ! Il accepte même de se rendre chez son neveu, dont il avait rejeté l'invitation quelques jours plus tôt, non sans méchanceté. Mais surtout, le plus important, il rend visite à son fidèle employé, Cratchit, pour lui offrir un beau cadeau de Noël : une augmentation, qui lui permettra de remplir davantage les assiettes de sa famille et le plus important, de soigner Tiny Tim. Et le soir même, alors qu'il retourne se coucher, il se sent libéré. Ses chaînes ont disparu. Tant qu'il sera ce nouvel homme, il se sentira bien. La morale de cette histoire les enfants, c'est qu'il faut toujours aimer les autres avant les choses et pas seulement à Noël.

Les gosses hochèrent la tête. Leur mère ne tarda pas à faire irruption, visiblement courroucée qu'ils aient échappé à sa vigilance. Elle les saisit par le bras et avant même qu'ils n'aient pu dire un mot, elle les éloigna de Wade, en les grondant :

- Je vous ai cherchés partout ! Je vous ai déjà dit de ne pas parler à des inconnus !

- Tout va bien Madame ! Je ne mange pas les enfants !

Wade s'était relevé et regardait la femme partir sans même se retourner. Il soupira et ne put s'empêcher de dire, en se tournant vers Eve :

- Eh ben... ça c'est un sacré balai dans le cul où je ne m'y connais pas... Bon... occupons-nous de ton sapin !

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Wade a la solution pour tout. Le retrouver là est déjà incroyable, mais en plus il peut s’occuper du transport du sapin. Eve lui sauterait au coup pour le remercier, mais craignant que ce soit trop, elle se contente de lui rendre son clin d’oeil accompagné d’un joyeux sourire. Tout naturellement, il s’occupe de son propre sapin en premier. Elle l’attend sagement sur place, tout en regardant les passants qui se promènent dans le marché de Noël. Ce moment est sensé être la période la plus cool de l’année, mais visiblement tous n’ont pas accès à la joie qu’elle doit offrir. La différence de moyens entre certains semble assez évidente. Différence aussi entre les grognons qui ont du mal avec la foule des acheteurs et les bambins qui s’émerveillent de tout.

Le pompier revient après son premier chargement. Lui aussi a noté les disparités. Il mentionne un monsieur Scrooge. Eve secoue la tête, elle ne connait pas. Qu’à cela ne tienne, il se lance non seulement dans une explication mais dans le récit de tout un conte qui ne manque pas d’attirer des oreilles. Le voilà qui se transforme en animateur au milieu des allées. Eve se met à rire de le voir faire. Il ne lui manque qu’un costume de lutin et il serait parfait !

L’aparté étant fini, ils se retrouvent face à l’arbre à transporter. Le diable disparait complètement sous les branchages et les épines au vert intense. Il en aurait fallu plusieurs, c’est certain ! Ils tentent d’équilibrer comme ils peuvent. Eve soutient la tête de l’arbre qu’elle prend entre ses bras. Les voilà partis, zigzaguant entre les promeneurs et les stands. Eve met de la voix pour annoncer le convoi. « Attention ! Désolée ! Attention ! » Le tout est d’éviter de heurter quelqu’un ou de renverser quelque chose. Elle s’y reprend plusieurs fois, l’arbre lui échappant parfois. Elle jette un coup d’oeil à Wade. « Merci de votre aide. Vraiment, je ne sais pas comment j’aurais fait sans vous. Vous me sauver la vie une seconde fois. »

**○ inscrit le** : 30/08/2020

Wade avait veillé à ce que le plus gros du poids soit pour lui. Il était habitué aux charges lourdes. Quand il devait extraire quelqu'un de sous les débris, pour qu'il puisse être secouru ou aidé, quand il devait extraire des gens insconscients, de véritables poids morts, pour les amener loin du danger, il utilisait ses muscles. Ce n'était pas pour rien qu'il s'entretenait. Être pompier, ça demandait une sacrée condition physique. Et puis de la volonté. Sur le moment, il ne pensa donc pas au poids, ni même au trajet. Plus on se focalisait sur quelque chose, et plus on avait tendance à ne plus rien voir autour de soi. Dans le cas de tâches pénibles, ne faire qu'y penser, ça avait un effet pervers et démotivant. Avec entrain, il se chargea de caler l'arbre sur le diable et d'utiliser sa musculature pour se frayer un chemin dans les allées. Il ne faisait pas ça pour obtenir quelque chose à l'arrivée, simplement parce que ça venait naturellement. Il aimait rendre service, surtout à des personnes comme Eve, dont il avait aperçu un des moments de vie particulièrement tragique. Son empathie faisait le reste. Et puis il n'allait quand même pas la laisser là, en plan, sans lui apporter un peu d'aide ! Ils arrivèrent enfin devant le fourgon. Wade usa de ses bras pour charger le sapin, à côté de son frangin, en veillant à ne pas l'abîmer. Heureusement, un filet protecteur entourait l'arbre, réduisant ainsi le risque que des branches ne cassent dans leurs manipulations. Quand elle lui témoigna de la gratitude, Wade, un peu essoufflé, lui répondit :

- Oh, c'est normal ! Et puis, je suis content d'avoir pu t'aider dans un tout autre contexte ! Allez, viens, installe-toi ! Je te ramène chez toi !

Il l'invita à monter dans le fourgon et pendant qu'elle s'installait, il prit place sur le siège conducteur et attacha sa ceinture. Il attendit qu'elle en ait fait de même pour démarrer le moteur. Celui-ci était un peu bruyant, mais vu le gabarit du véhicule, rien de bien surprenant. Au volant, Wade était très prudent, quand il y avait quelqu'un d'autre avec lui. Tout seul, il lui arrivait de chercher l'adrénaline, mais dès l'instant où des vies dépendaient de lui, il s'abstenait de toute prise de risque inconsidérée. Alors qu'ils avançaient très doucement dans les bouchons, Wade avait repris la conversation.

- Alors qu'est-ce que tu racontes de beau ? Tu as prévu quoi pour les fêtes ? Un si beau sapin ! J'imagine que tu vas organiser un petit moment sympa avec quelques proches ! Faut que tu le montres cet arbre ! Il est beau ! Oh et en guise d'étoile, je serais toi, je mettrais un vélo miniature ! Pour valoriser encore plus le symbole, tu vois !

Wade avait tendance à être bavard et à pas mal occuper les silences. Mais il lui laissa quand même le temps de répondre. Le voyage se passait plutôt bien. Leur progression était difficile parce qu'à cette heure-ci, tout le monde empruntait sa voiture... ça provoquait des bouchons pas possibles ! Sauf qu'à un moment, alors qu'il était arrêté à un feu rouge, Wade se mit à rire tout seul. Il se tourna vers Eve et lui expliqua :

- Je conduis, je conduis... mais je ne t'ai même pas demandé où tu habitais ! Si ça se trouve, on a pris les bouchons pour rien parce que tu loges à l'opposé de là où je suis parti !

Ca l'amusait beaucoup qu'ils n'aient pas pensé à ça, trop à fond dans leur sauvetage de sapin et dans leurs retrouvailles hautes en couleur !

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mon beau sapinWade & Eve

L’arbre n’est pas pas un blessé à sortir d’une maison en feu, mais le pompier fait preuve d’autant de précaution pour le mener à bon terme. Dans un premier faire le chemin jusqu’au fourgon, puis le charger. On voit clairement la technique du professionnel. Ce qui donnerait presque envie à Eve de prendre des cours de secourisme ou d’aller faire un tour à la caserne lors des portes ouvertes. Pompiers volontaires... non bien sûr, si on l’a refoulée lors d’un engagement dans l’armée, il ne fallait pas compter sur un job de cet acabit. Elle le comprend. La moindre défaillance lors d’une intervention et ce n’est pas sa propre existence qui sera en jeu, ni du matériel, mais bien la vie de d’autres personnes. Au final, elle ne s’imagine même pas grimper à la grande échelle !

Ils s’installent dans le véhicule et prennent la route. Visiblement, ils n’étaient pas les seuls. Le rush d’avant Noël ! Il reste encore une belle poignets de jours, mais quand on a des achats à faire et souhaite avoir le choix, mieux vaut éviter de trainer. « Je vais passer le réveillon de Noël avec mon colocataire et le jour de Noël et avec mes grands-parents. » Elle a un temps d’hésitation puis reprend. « Je n’avais pas imaginé faire une visite guidée autour du sapin, mais après tout, je vais solliciter du monde pour avoir suffisamment de décorations pour l’orner, donc en soit, c’est normal de montrer le résultat. » Un large sourire illumine son visage. « Je vous invite à venir voir l’arbre quand il sera couvert de guirlandes et de lumières. Je serai très contente de vous montrer l’oeuvre. » Empressé de livrer son chargement, son chauffeur fait remarquer qu’il est parti au hasard. Elle éclate de rire. « Je crois que quelque soit la direction prise, on aurait été bloqués de la même manière ! On dit que “tous les chemins mènent à Rome”, alors c’est bon, on ne va pas jusque là ! 71 East Bay. » Elle fait un signe de la main pour indiquer une direction que seuls les oiseaux pourraient emprunter sans détour. « Par là. On installera le sapin dehors. On a un grand jardin. Une chance ! Dans la maison, il va prendre toute la place, même pas certaine que le plafond soit assez haut ! Peut-être qu’il faudra creuser un trou pour mettre le pied et l’attacher pour qu’il ne tombe pas. Vous imaginez qu’on soit obligé d’appeler les pompiers parce que l’arbre a chaviré sur la maison à cause d’un coup de vent et que ce soit vous qui venez ? Un comble ! » La bonne blague, l’accident de sapin à Noël ! Mauvaise blague plutôt, cela gâche les fêtes, mais peut-être que ce genre de chose arrive. « Oh ! Je suppose qu’il y a des pompiers de service même durant le réveillon. Ce ne doit pas être très cool quand on a de la famille. » Même chose pour les métiers liés à la santé, dans les hopitaux, les maisons de retraites, tous les services qui doivent réparer en urgence l’électricité ou le gaz, les dépanneurs de véhicules, les gardiens de prisons... Elle se perd dans une tentative d’énumération mentale, convaincue d’oublier du monde, triste pour ces oubliés et contraints au travail.

**○ inscrit le** : 30/08/2020

- Attends, tu me proposerais pas un plan jardinage là ? J'ai toujours rêvé de creuser un trou à la pelle ! Bon l'ennui, c'est que ton sapin n'a pas de racines, donc s'il y a du vent, il a de fortes chances de s'écraser par terre !

Wade réfléchissait à la façon dont il pourrait éventuellement le bloquer. C'est vrai qu'à l'intérieur, avec un système de trépied ou de cales, il pouvait faire en sorte que rien ne s'effondre. Ce serait le défi bricolage du soir. Il ne pensait même plus à la livraison du sapin auprès de l'association. Il la ferait, oui, un peu en retard mais rien ne pressait finalement ! Il fallait toujours qu'il s'arrête pour aider les autres, c'était plus fort que lui. En plus, Eve était le genre de personne exceptionnelle avec laquelle on apprécie de passer du temps. Lorsqu'il lui avait porté secours, lui sauvant la vie au passage, il ne la connaissait pas. C'est après, lorsqu'elle fut en convalescence qu'il la rencontra et en apprit davantage sur elle. On pouvait se dire que ce n'était pas très courant qu'un pompier s'enquière de la santé des personnes secourues. Disons que ça n'avait rien de banal et de commun. Rhodes faisait ça sur son temps libre, sans y être contraint ou forcé. Il s'agissait d'une démarche totalement naturelle, parce qu'il se souciait vraiment d'autrui. En devenant soldat du feu, il avait trouvé sa vocation. Le métier lui allait comme un gant ! Ca ne le dérangeait donc pas de travailler pour les fêtes, d'avoir des gardes, parfois d'être réquisitionné en plein milieu de la nuit pour aider des collègues. C'était le genre d'événements assez courants, qui marquaient le quotidien. Est-ce qu'il en attendait une médaille ? Pas du tout... bien au contraire. Mettant le cap sur l'adresse indiquée par Eve, qui se trouvait bien sur leur route, Wade poursuivit sa réflexion :

- En plantant quatre piquets autour du tronc et en attachant le tout avec une corde, en fait, ça devrait le faire. J'ai pas les outils, mais si tu veux, je peux aller en acheter avec toi. Ce soir, ça risque d'être compromis, parce que vu la circulation, on aura jamais le temps d'acheter avant la fermeture du magasin de jardinage. Mais on peut se dire demain matin ? Je t'emmène acheter ce qu'il faut, je te le bloque et comme ça, vous pourrez commencer à le décorer un peu ! Ca te va ?

Il se lèverait plus tôt mais c'était loin de le déranger. Tant que la pétillant Bramwell pouvait fêter Noël et avoir la conscience tranquille, ça lui convenait ! Le fait de l'avoir recroisée totalement par hasard le réjouissait. Ca faisait du bien d'avoir des nouvelles et encore plus de retomber sur une personne épanouie, qui avançait et parvenait à vaincre son traumatisme ! Wade alluma la radio, pour la mettre en fond, parce que même en causant, ça risquait d'être encore un peu long ! Comme si Dieu cherchait à récompenser sa bonne action, il s'écoula quelques minutes avant que la voix d'Aretha Franklin n'entonne "Think". Wade, voiture arrêtée à cause des bouchons, ferma les yeux et commença à bouger en rythme avec la musique. Il commença à chanter, transporté par la musique. Bon, son talent, c'était de danser, il n'était pas chanteur et ça s'entendait, mais il arrivait à être juste, ce qui, en soi, était un atout pour les oreilles de sa passagère. Il fut presque déçu quand la chanson fut terminée. Il soupira :

- Bon sang... le monde ne sera plus le même sans Aretha ! Cette femme, c'était un véritable déesse de la musique ! Tiens, en parlant de ça, tu as révisé tes chants de Noël ? Parait que c'est à la mode en ce moment !

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Quand on ne peut revenir en arrière, on ne doit se préoccuper que de la meilleure façon d’aller de l’avant.
♛ by wiise

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