When doves cry (w/ Nathan)

When doves cry

Christopher & @Nathan Peñali

Christopher avait beau adorer son frère, il fallait avouer qu’il venait avec quelques désavantages. Son plus gros, c’était sans aucun doute la morgue. Il avait jamais compris comment on pouvait avoir envie de travailler avec des morts, Chris, mais soit. Si son frère avait décidé d’être l’enfant glauque de la famille, alors il n’y pourrait rien. Chacun trouvait son réconfort et ses passions là où il le pouvait, après tout. En attendant, lui, s’il pouvait éviter d’y mettre les pieds, il s’en portait mieux. Mais parfois, il n’avait pas le choix. Enfin, si, il avait toujours le choix, mais il ressentait une certaine excitation à venir sans s’annoncer. Allait-il tomber nez à nez avec un cadavre ? Avec Nathan un scalpel planté dans une poitrine livide ? Avec des têtes tranchées ? Ok, peut-être que lui aussi, était un des enfants glauques de la famille.

C’était pas une visite de courtoisie. C’était jamais une visite de courtoisie. Quand il devait se rendre là-bas, Chris, il avait toujours une raison. Il avait beau avoir un rush d’adrénaline en ouvrant la porte, se demandant chaque fois sur quoi il allait tomber, voir des morts lui faisait peur. Et ça, depuis tout petit. Le premier qu’il avait vu, c’était son père, et ça l’avait grandement traumatisé. Le temps n’avait pas été clément avec lui, et les quelques autres cadavres qu’il avait pu voir lui avaient tous donné le même sentiment : de l’anxiété. C’était terrifiant, de voir un corps sans vie. Où en était l’âme ? Etait-elle morte avec lui ? Au Paradis ? Attribuée à un tout nouveau corps ? Ouais, de l’anxiété, une dose assez forte pour le calmer.

Il était au commissariat. On l’avait appelé, et il avait pas eu besoin de se demander pourquoi.
« Une plainte contre toi. » Avait direct annoncé le flic qui le prit en charge. Ils se connaissaient bien maintenant, ça faisait des années que Chris se faisait convier au commissariat pour ceci ou cela. Il faisait jamais rien de trop grave, mais heureusement que son travail ne demandait pas un casier vierge. Quand il chercherait à changer d’appartement, un jour peut-être, ce serait sans doute différent, il aurait sans doute plus de mal. Et c’est bien pour ça qu’il descendit à la morgue cet après-midi là. Parce qu’il avait une faveur, une énième, et qu’il avait beau être familier avec certains flics, il n’y avait qu’une seule personne ici à qui il saurait vraiment graisser la patte.

« C’est vraiment des conneries. » Il était rentré en trombe, sans s’annoncer, en poussant juste violemment la porte. Son ton, lui, était plus fort qu’énervé, mais sa frustration était trahie par ses mots et sa mâchoire serrée. « Y’a des gens, ils ont un sacré culot. » Oui, lui par exemple, à l’instant. « T’as un mec qui ose faire chier tout le monde dans un bar, et quand quelqu’un décide enfin de l’emmerder en retour, il se prend une plainte à la gueule ? » Les sourcils froncés, Chris s’avança vers la chaise la plus près de lui. Le dos courbé, les mains dans les poches, les sourcils froncés et la mine boudeuse. « Franchement j’ai rien fait ! » Si, Chris, t’en serais pas là, sinon. « Moi j’ai essayé d’aider, c’est tout. Et je m’en prends encore plein la gueule ? Ca fait la 3ème en moins d’un an. » Pauvre chou. « Je suis quoi moi, un délinquant ? » Oui, exactement. « Non non non, c’était un service rendu à la nation là. » Oui oui Chris, continue, parle pour toi. Il souffla un gros coup, croisa ses bras et releva finalement les yeux vers son frère. « Tu bosses sur quoi ? » C’était vraiment le maître, pour faire ça. Pour se plaindre, l’air de rien, hurler ses misères, avant de poser une question sans rapport, comme si toute l’attention n’était pas déjà portée sur lui.

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When doves cry

Christopher & Nathan

L’impulsivité et l’agressivité étaient deux symptômes de l’hyperactivité. Maintenant, est-ce que ces traits de caractère chez Chris étaient réellement dû à son problème de santé, impossible de vérifier. Peut-être aurait-il été tout autant rentre dedans s’il avait été aussi sain que son frère, peut-être que c’était juste comme ça qu’il était dans n’importe quel monde parallèle, ou peut-être était-ce aussi du aux souvenirs de son père biologique qui n’hésitait pas à lever ses poings à la moindre contrariété. Impossible de savoir, et la raison ne changeait pas les faits. Christopher était un vrai taureau, celui qu’on enfermait dans une arène pour lui faire perdre patience. Un sacré comble, quand on savait qu’il était toujours en retard, toujours à remplir ses obligations à la dernière minute. Mais ça, encore une fois, c’était juste un symptôme de l’hyperactivité. Peut-être qu’elle contrôlait un peu trop sa vie, ou peut-être était-ce seulement pile qui il était censé être.

Il s’était bien calmé, à un moment de sa vie. Mais ça venait pas de lui, c’était bien loin de sa volonté. C’était arrivé plusieurs fois, il avait eu quelques périodes de sa vie où on lui avait donné des médicaments, car il était impossible à gérer. Mais il n’en avait plus pris depuis une bonne quinzaine d’années, maintenant. Ils avaient trouvé un compromis dans le sport, mais Chris arrivait toujours à perdre la tête. Oui, c’était sûrement pas juste l’hyperactivité, c’était sûrement lui. Il était né pour être comme ça.

« Roh ça va. » Il leva ses yeux au ciel, serrant un peu plus ses bras contre son torse alors que le froid de la pièce commençait à caresser sa peau. Il voyait pas ce qu’il faisait de mal, Chris, il s’occupait de faire régner la justice, selon lui. Mais il ne faisait régner que sa justice, alors ses emmerdes légales étaient atrocement justifiées. « J’l’ai peut-être légèrement fait saigner du nez. » Il lui avait fracassé la gueule contre le bar. Mélange de frustration et d’alcool. « Mais il m’a niqué aussi ! » Assura-t-il comme si ça changeait quoi que ce soit. « Sauf que moi, j’viens pas pleurer à la police. » Non, lui, il venait pleurer un étage plus bas. Christopher décroisa ses bras et releva la manche de sa veste pour présenter son avant-bras recouvert d’un bandage, clairement fait à l’arrache. Il avait pas non plus été pleurer à l’hôpital. « Lui, il m’a carrément explosé un verre sur le bras, alors je vois pas pourquoi il vient chouiner. »

Il déglutit, un frisson lui parcourant l’échine. Christopher avait l’habitude du sang, maintenant, mais des morts… Oui, Nathan avait raison, il avait eu de la chance d’être arrivé à temps. Peut-être que ça lui aurait pas fait de mal de voir un cadavre, après, peut-être que ça l’aurait calmé pendant quelques semaines, peut-être qu’il aurait eu peur d’être ici, un jour, le corps plus blanc qu’aujourd’hui, son frère forcé de l’autopsier. Son estomac se tordit à cette pensée, et ses yeux, froncés depuis son entrée, s’adoucirent. « Le seul métier plus glauque que t’aurais pu choisir, c’est thanatopracteur. » Sur ces mots, Chris se leva directement de sa chaise pour aller dans le bureau de son frère, s’asseyant sur un coin de son bureau. Mais sa frustration l’empêcha de rester calme, alors sa jambe droite ne resta pas tranquille bien longtemps, sautillant d’impatience. « Como te mantienes la calma frente a eso ? ¹ » Fit-il référence à tous ces morts dans ces frigos. « Como duermes por la noche ? ² »

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When doves cry

Christopher & Nathan

Chris haussa ses épaules. Peut-être qu’un jour il aurait honte du comportement qu’il avait, peut-être qu’un jour il écouterait sa famille qui lui disait qu’il devait apprendre à être patient, qu’il devrait peut-être voir un psy comme il le faisait dans son enfance et son adolescence, juste pour voir, juste pour s’assurer que tout allait bien. Un sophrologue peut-être ? N’importe quoi qui réussirait à le calmer un tant soit peu, n’importe quoi qui l’aurait fait agir comme un adulte responsable. L’opposé de ce qu’il était, donc. Et il aurait bien aimé, Chris, être plus mature, plus posé. Il aurait aimé être comme son grand-frère. Avoir une femme, des projets, un avenir, savoir être diplomate quand il le fallait, garder un boulot sur le long terme et pas changer tous les 7 ans parce qu’on s’ennuie, qu’on s’embrouille avec les clients, les collègues, les patrons… Il aurait aimé, au fin fond de lui, avoir tout ça. Mais c’était un but inatteignable, et du haut de ses 36 ans, il le prouvait une énième fois.

« La même rengaine que d’habitude, ils doivent me rappeler pour témoigner et ils verront ensuite ce que donne la plainte. Avec un peu de chance ils décideront de pas y donner suite. » Et il l’espérait vraiment, parce qu’il avait pas envie de se retrouver au tribunal pour un nez amoché. Encore moins vu l’état de son bras à lui aussi. Pour lui, chacun avait été blessé, donc les choses étaient censées se finir là. Chacun avait déjà eu sa part, sa punition.

Christopher défit sa veste pour donner un meilleur accès à son bras, alors qu’il se rendait compte, une nouvelle fois, d’à quel point Nathan était humain malgré l’aspect de mort de son travail. Il avait sûrement (même clairement) un métier sous-estimé, sous-côté. Oui, Christopher se sentait petit à côté de son frère, gamin. Parce qu’il voulait faire le bien, lui. Il voulait aider les gens, aider les familles des victimes. Savoir la cause d’une mort, c’était quand même important pour faire son deuil, non ? Plus on avait de réponses à nos questions, moins elles tournaient dans nos têtes, plus la réalité était facile à accepter. Il voulait juste faire de ce monde un monde meilleur, et on ne pouvait que l’admirer pour ça. Il déglutit, avant une nouvelle annonce qui le fit rire. Un rire jaune, désespéré et exaspéré à la fois. « Les gens sont des putain de cons. » Assura-t-il comme si ça changeait quelque chose. Christopher était le mouton noir de sa famille, ou plutôt le mouton blanc. Il voyait bien le racisme qui les entourait, mais n’en avait jamais vraiment aucune conséquence directe. Lui, il était blanc, blond, et ses yeux étaient bleus. Les seules remarques qu’il s’était pris, c’était sur sa famille, pas sur lui-même. Ca semblait bizarre, aux yeux des autres, des hispaniques qui adoptaient un petit mec qui ne leur ressemblait en rien.

« Vale, vale. ¹ » Présenta-t-il finalement son bras à son frère. Mais il comptait bien rester sur leur discussion, celle qui lui fendait le coeur à chaque fois que le sujet avait été mis sur la table à la maison. « Ils se rendent pas compte de la chance qu’ils auraient de t’avoir de leur côté. T’as du travailler 20 fois plus pour en arriver là et te faire une place, alors que ces enculés de blancs, ils peuvent faire tout et n’importe quoi. » A trop côtoyer des Chiliens, il oubliait sûrement qu’il était blanc, lui aussi, finalement. Surtout qu’il profitait pas mal du système lui aussi. Même si c’était Nathan qui l’aidait la plupart du temps, il savait bien qu’un mec de couleur aurait eu bien moins de chance de voir sauter des amendes, mains courantes voire plaintes. Mais, encore une fois, Chris ne vivait pas dans un monde où il faisait des erreurs. « Attend, y’en a plein qui payent pour réussir leurs années de fac, j’aurais pas confiance perso, c’est sûrement les pires. » Après, il était sûrement dans les extrêmes, comme toujours. Mais tout était toujours soit tout noir soit tout blanc, avec lui. Le roi des euphémismes et hyperboles.

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When doves cry

Christopher & Nathan

Le visage de Chris se tordit en une grimace alors que Nathan entreprenait de nettoyer ses bêtises. Ouais, il avait beau déjà avoir eu affaire à toutes sortes d’alcool, bien plus d’une fois chacun dans sa vie, il ne s’habituerait jamais ç la sensation de brûlure et de picotement qui allait avec. Il était peut-être pas si brave, finalement, le Peñali. M’enfin, c’était peut-être aussi juste le fait qu’il agissait encore comme un gamin. Ca suivait bien avec le personnage.

Le nez plissé, il fut plutôt surpris que Nathan ne semble pas croire à ses histoires de corruption. Chris, lui, il en voyait partout. Parfois juste par mauvaise foi, parfois par réelle conviction. Mais ça, il en avait entendu parler plus d’une fois, non seulement dans des reportages sous couverture qu’il regardait la nuit quand il avait du mal à s’endormir, mais aussi directement à son travail. Il était entouré de personnes plus ou moins riches, et les langues se déliaient facilement. « C’est connu. » Répondit-il facilement, mais il voulait éviter de trop s’attarder sur le sujet, finalement, car Nathan liait le sujet à… Un mensonge. Enfin, un mensonge, non. Pas vraiment ? S’il venait souvent voir Nathan en cas de problème, Chris n’en était pas bête pour autant. Hors de question de venir à chaque fois, comme son frère le pensait pourtant. Il venait quoi… La moitié du temps ? Peut-être un peu moins.

Au travail, Chris avait rencontré Casey, un jeune ambulancier qui venait réparer les pots cassés qu’étaient les cascadeurs. Il avait fini par se lier d’amitié avec lui (fallait dire qu’ils se voyaient relativement souvent), et le Peñali y avait vu une opportunité à laquelle il n’avait pas pu tourner le dos. Maintenant, ses blessures étaient partagées entre Nathan et Casey.

S’il ne disait rien à son frère, c’était, selon lui, pour protéger leur relation. Il avait juste trop peur qu’il en ai marre. Puis c’était pas mentir, pas vrai ? C’était juste pas dire toute la vérité. Il omettait des détails de sa vie.

« Va chier. » Ricana Chris alors que son frère se foutait ouvertement de sa gueule. Mais bon, il pouvait pas lui en vouloir, il les réclamait, ces bisous magiques, quand il était petit. Et même s’il gardait un certain syndrome de Peter Pan, bébé avait grandit. « Gracias. » Le remercia-t-il tout de même avant de se relever. Au bon moment, car sa jambe avait de nouveau commencé à trembler alors qu’il n’avait pas bougé depuis ce que son corps jugeait comme trop longtemps. Ses pulpeuses demi-lunes courbées en un sourire en coin, léger mais visible, il rattrapa sa veste pour vite l’enfiler.

« Je vais pas t’emmerder plus longtemps. » Il réajusta le col de sa veste avant de vite récupérer son portable dans sa poche. Un coup d’oeil vers ses notifications, et une grimace refit surface sur son visage en voyant les messages et appels manqués. Il leva son téléphone vers son frère. Pas assez pour qu’il lise (bien qu’il n’aurait rien contre), mais assez pour qu’il voit le nombre de notifications qui y traînaient. « J’ai oublié de prévenir le boulot que je devais passer au poste. » Et finalement, cette grimace se transforma en un léger rire. Parce que c’était pas si grave, mais aussi parce qu’il comprenait, une énième fois, à quel point il pouvait être incorrigible.

Quelques pas en avant, et il attrapa bien vite la tête de son frère pour laisser un baiser sur son front. Il aimait faire ça. Il était plus grand que lui, c’était facile, et ça lui donnait un petit air de dominance, du style « t’es le plus vieux mais je suis le plus grand », une nargue. « Te quiero, hermano. ¹ » Et il chercha pas à attendre une réponse, il prit directement le chemin de la fuite. « Prend soin de toi ! » Comme si Nathan avait besoin qu’on le lui dise. Il inversait les rôles. Et en un nouveau claquement de porte, le voilà parti.

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