there are no secrets that time does not reveal › tao ft. laya

L’inquiétude était grandissante dans l’esprit de Tao. Il venait d’apprendre que Siam était enceinte et pire, que l’enfant était peut-être de lui suite à leur aventure lors d’une soirée un peu trop arrosée. Cette annonce avait eu l’effet d’une bombe dans son cœur comme dans sa tête. A présent que la blonde lui avait confirmé que les dates étaient cohérentes et que doute subsistait, elle allait être obligée d’informer son petit-ami de leur relation. Si Tao éprouvait de la culpabilité à l’idée d’avoir franchi le pas et d’avoir trahi une des règles tacites de l’amitié, il appréhendait d’autant plus le moment de la révélation et sa confrontation avec Maddox car il savait que ce dernier aurait besoin de le mettre face à ses responsabilités.

Désarçonné, Tao ne savait vers qui se tournait. Son meilleur ami, Arlo, était le frère de la femme avec qui il avait eu une aventure et il craignait la réaction de ce dernier. Même en souhaitant taire le nom de la principale intéressée pour l’instant, l’affaire finirait forcément par exploser et le pot aux roses par être découvert et tant qu’il n’était pas sûr d’être véritablement le géniteur, il préférait s’abstenir. Son autre ami proche, Maddox, était l’homme trahi et Tao était sûr et certain qu’il n’en aurait que faire de ses états d’âme. En résumé, la seule option restante au génie de la cuisine était de faire appel à sa confidente féminine de premier rang, Laya. Il l’avait averti de son passage par un sms furtif composé des mots suivants « il faut que je te parle, j’amène le déjeuner », sans détailler ce dont il voulait lui faire part et avais aussitôt pris les devants pour aller la rejoindre hors d’Island Bay et en l’absence d’Arlo.

Connaissant les goûts de Laya, il avait opté pour deux pizzas et espérait que les jumeaux ne lui en voudraient pas trop d’entraîner leur mère dans la consommation de tels produits. Une fois arrivé à Porirua, il descendit de sa voiture les cartons de pizzas à la main et se dépêcha de rejoindre le porche pour sonner à la porte. Une partie de lui craignait la réaction de Laya, elle qui avait toujours su que Tao n’était pas dans l’optique de devenir père compte-tenu du fait qu’il avait lui-même était adopté et qu’un part de lui ne digérait pas cet épisode de son histoire personnelle. D’un autre côté, il savait aussi qu’il pourrait compter sur le soutien de la jeune femme et même si les relations avec Siam étaient plus que tendues, il connaissait son aptitude à faire la part des choses. « Salut » dit-il en voyant le visage de Laya se dévoiler au fur et à mesure qu’elle ouvrait la porte. « J’ai fait simple, j’avais peur que tu ne digères pas trop les huîtres… ».

@Laya Mehrtens  

Assise devant l’écran, Laya relut une ultime fois son article puis elle cliqua sur le bouton « envoyer ». La journaliste dressait le bilan à tirer de la déclaration d’urgence climatique un an après le vote de celle-ci au parlement néo-zélandais. Avait-elle vraiment eu les effets escomptés ? Non. Elle n’était qu’une première étape dans les mesures nécessaires à prendre en faveur de l’environnement, une politique où le pays qui avait accueilli Laya avait encore du chemin à faire pour arriver à l’objectif de production d’énergie 100% renouvelable qu’il s’était fixé d’ici 2035. Passionnée par son travail, la jeune maman continuait à s’impliquer dans les problématiques écologiques et environnementales. Depuis peu, elle avait repris le service et avait convenu avec son employeur de travailler principalement à domicile tant que les enfants étaient âgés de moins d’un an. En effet, lorsque Laya partait pour un reportage, elle s’absentait généralement plus d’une journée. Actuellement, il valait donc mieux opter pour du télétravail et se concentrer sur des articles qui ne nécessitaient pas de déplacement prolongé sur le terrain, un aménagement pratique pour elle puisqu’Arlo partait bosser au musée la journée. L’article terminé, elle prépara les biberons de ses enfants et les nourrit. Elle entendit son téléphone vibrer mais Laya termina d’abord avec ses enfants, s’occupant d’eux puis les glissant dans leur berceau pour leur sieste. Lorsqu’elle ouvrit son téléphone, elle découvrit le message de Tao. Un besoin de parler d’urgence. Elle lui répondit. « Pas de soucis. Ne fais pas trop de bruit en arrivant, Kala et Theo sont en pleine sieste. » Au vu du texto de Tao, Laya posa son après-midi et se déconnecta de l’ordinateur. Le travail attendrait, elle pressentait un sujet délicat pour que son ami débarque ainsi en l’absence d’Arlo. Lorsqu’il arriva enfin, la jeune maman lui ouvrit, tout sourire. « Salut ! » Tao était venu avec deux pizzas et rigola à propos d’huîtres que la jeune femme végétarienne n’aurait de toute façon pas mangé. « T’as bien fait. Les choses les plus simples sont souvent les meilleures. » Il était bien placé pour le savoir, lui, le professionnel de la cuisine. Laya l’accueillit dans la maison puis les deux partirent s’installer autour de la table de la salle à manger, les pizzas déballées sur la table. « Il y aura une bonne odeur de pizza ici, Arlo va croire que j’ai commandé ça en rentrant ce soir. » Ajouta-t-elle, amusée. « Que prendras-tu pour boire ? » Après la réponse, Laya partit chercher les boissons en cuisine, puis elle rejoignit Tao et reprit le fil de la discussion. « Tout va bien ? Ça avait l’air important, dans ton message. »

@tao walker

Comme le lui avait demandé Laya, Tao s’était fait discret en arrivant. De toute façon, le jeune homme n’était clairement pas du genre à s’exclamer à tout va et à faire le plus de bruit possible pour attirer l’attention. C’était la partie de l’éducation que sa mère lui avait légué à ça près que ses origines chinoises exigeaient qu’elle ne parle pas, ou très peu, de ses sentiments tandis que Tao avait été appris à extérioriser les choses importantes et cette fois-ci, c’était bien pour une problématique de taille qu’il venait s’adresser à l’une de ses meilleures amies. « Je sais, à défaut de pouvoir recevoir dans de bonnes conditions, je m’invite le plus discrètement possible » dit-il en faisant aux travaux encore bien présents dans la villa qu’il occupait. D’ailleurs, il allait peut-être devoir mettre les bouchées si le test de paternité tournait dans son sens car dans l’état actuel, sa maison était plus propice à être un repaire à tournevis et à marteaux qu’à biberons et couches.

Maintenant qu’ils étaient installés, les deux pizzas encore chaudes devant eux, Tao pouvait se saisir de l’instant. « Il y aura une bonne odeur de pizza ici, Arlo va croire que j’ai commandé ça en rentrant ce soir. » Pauvre Arlo qui croirait à une soirée détente sur le canapé à déguster sa pizza auprès de sa femme. Un instant, Tao culpabilisa à l’idée de le priver de ce plaisir. « Dire qu’il va s’imaginer engloutir une quatre fromages et qu’il va se retrouver avec des légumes cuits à la vapeur… Il faut vraiment que vous veniez dîner au restaurant, un jour, c’est moi qui invite » dit-il en imaginant la tête de son ami constater l’odeur de gras, humectant ses lèvres d’avance, et réaliser qu’il n’en n’était rien. S’agissant des boissons, Tao privilégiait l’eau plate. Sans être obsédé par son poids, il tenait à garder un tant soit peu la forme, déjà bien pénalisé par son métier qui exigeait qu’il goûte régulièrement les mets que lui et les autres préparaient. « Va pour un verre d’eau » dit-il en secouant la tête. Il lui restait quelques secondes pour soigner ses propos.

Quand Laya revint à ses côtés, déposant au passage le verre d’eau non loin du carton de sa pizza, le cuisinier prit une grande respiration avant de se décider à lui répondre. « J’me suis mis dans une situation compliquée » avoua-t-il pour commencer. Il savait qu’une fois le morceau craché, l’épouse d’Arlo aurait probablement de nombreuses questions à lui poser. « Lors de la soirée de Rayan, j’avais un peu trop bu et… Siam aussi. On va éviter de faire dans l’hypocrisie, j’ai été amoureux d’elle pendant des années et l’alcool désinhibant, on s’est laissé aller ». Devant sa révélation, les traits de Laya s’étirèrent et pourtant, elle n’était pas au bout de ses peines. « Et avant que tu n’enchaînes les questions, sache que ce n’est pas tout, mais disons que les pizzas risquent de refroidir si je ne m’arrête pas là pour le moment » prévint-il avant de décoller une part de quatre fromages pour la glisser entre ses lèvres.

« Oui et puis c’est plus facile pour moi aussi que tu viennes. » Répondit Laya lorsque Tao entra dans la maison. Dans les conditions actuelles, la jeune maman préférait recevoir que de s’inviter chez les autres. C’était plus simple avec des enfants en très bas âge. Et les circonstances s’accordaient bien avec celles dans la villa de Tao en plein chantier. « Les travaux avancent bien ? » Après cette petite introduction, les deux amis se dirigèrent vers la pièce de vie. Ils s’installèrent autour de la table, les pizzas devant eux, et le fil de la discussion reprit. Laya rigola en imaginant Arlo flairer la bonne odeur ambiante à son retour et découvrir un autre repas dans son assiette. « Des légumes cuits à la vapeur… T’es dur ! J’ai quand même un peu plus de créativité culinaire. Enfin, j’ose l’espérer. » Répondit-elle, sur le même ton de l’humour, jouant les fausses vexées. L’avantage, c’est que les deux jeunes parents se débrouillaient alors tous les deux se relayaient en cuisine d’un jour à l’autre. Laya avait remarqué qu’Arlo essayait de se plier en quatre sur tous les fronts pour lui rendre la vie plus facile mais elle ne voulait pas qu’il s’effondre de fatigue non plus, alors le couple avait trouvé un équilibre selon les jours. Evidemment, le talent de Tao en cuisine était d’un tout autre niveau puisqu’il en avait fait sa passion et son métier. Ainsi, la perspective d’être invité à diner au restaurant rattrapait sa petite plaisanterie. « Oui, oui, essaie de te faire pardonner. J’avoue que… ça fonctionnera très bien. » Amusée, Laya proposa ensuite de ramener les boissons pour accompagner leur repas. Quand il s’agissait d’un plat aussi lourd, il était impossible pour la jeune femme de manger sans entrecouper par une boisson. Joignant le geste à la parole, elle ramena deux verres et une bouteille d’eau, puis reprit place en face de Tao.

Préoccupée par la nature de son message, elle entra dans le vif du sujet. Le cuisinier lui révéla alors qu’il avait dérapé avec Siam lors d’une soirée un peu trop arrosée. C’est vrai, il était amoureux d’elle depuis longtemps. Le temps d’assimiler l’information, Laya resta bouchée bée un instant. « Attends, Siam, comme la petite sœur d’Arlo ? » Répéta-t-elle pour mieux encaisser la nouvelle. « Et qui est en couple avec Maddox, je crois ? A moins que j’aie raté des chapitres. » A la suite de l’accident d’Arlo et des problèmes avec la famille de son mari, Laya s’était éloignée des Mehrtens, du coup elle n’était peut-être pas au courant de toutes les dernières évolutions dans la vie de ses belles-sœurs. « Pas tout ? Ok ça m’a l’air bien compliqué tout ça. » Après avoir lâché cette nouvelle, Tao venait de couper court aux questions, désireux de savourer sa pizza tant que celle-ci était encore chaude. Comme si de rien était. « Bien, capitaine. » Laya attrapa une part de sa pizza et mangea la première part dans un silence sacré. Le repas, c’était un moment important dans la journée, trop important pour ne pas en profiter. « C’est trop bon. On sent que les pizzas ont été cuites au feu de bois. » Toutefois, c’était difficile d’oublier complètement la bouée qui avait été lancée à la mer et de faire comme si de rien était pendant tout le repas. « Pour ce que tu m’as dit tout à l’heure... Je suppose qu’Arlo ne le sait pas si tu es venu me voir quand il n’est pas là. » Perspicace, Laya avait assez facilement deviné cette évidence. Comme cette histoire touchait sa sœur, elle pouvait comprendre la difficulté de Tao de s’ouvrir à son ami. Avant de creuser plus loin, la jeune maman lui donna le temps dont il avait besoin pour rebondir sur cette remarque ou choisir de l'ignorer pour l'instant.

@tao walker, navrée pour l'énorme retard

« Classons les travaux dans la catégorie ‘sujets tabous’, si tu veux bien ». Les travaux n’avançaient pas plus que ça. Du moins, pas aussi vite qu’il ne se l’était espéré. Il avait déjà expérimenté des retards de fournisseurs, des pénuries de matériaux et voilà maintenant qu’il faisait les frais de l’incompétence de certains ouvriers. Les finitions de peinture, bâclées selon lui, devaient être corrigées mais l’entreprise concernée prenait un malin plaisir à le faire tourner en bourrique si bien qu’il songeait à délaisser son tablier de cuisine pour une blouse de travail.

Quoi qu’il en soit, si Tao avait opté pour les pizzas pour faire passer la pilule pour rapidement, la réaction de Laya fut immédiate quand il prononça le prénom de sa belle-sœur. Comme il l’avait si bien prévu, elle l’assena de questions et ce à juste titre quand on savait la complexité de la situation. Cependant, le cuisinier avait bien des priorités et répondre à ses interrogations au risque de laisser refroidir les pizzas n’aiderait en rien. Il devrait rentrer dans de longues explications pour que Laya quitte le brouillard dans lequel cette annonce venait de la plonger. Dégustant son plat tout en réfléchissant à la manière dont il allait aborder le sujet dans les détails, Tao ne put s’empêcher de prendre une légère déviation pour se dire que s’il était un chef d’exception, l’art de la pizza était un domaine qu’il n’avait pas encore étudié et qu’il lui faudrait peut-être dépoussiérer. La cuisson au feu de bois était un critère de taille, mais il savait qu’il devrait allier tradition et modernité pour convaincre. Pour le moment, il devait surtout des explications à la femme de son meilleur ami. « Bon » dit-il pour marquer le moment « Non, Arlo n’est au courant de rien. Du moins, pas encore, mais il va bien falloir qu’il l’apprenne ». Dans cette histoire, la réaction de son meilleur ami d’adolescence faisait partie du top 3 de choses qui l’angoissaient le plus après les nuits en dents de scie et le recherche du prénom idéal. Sans le vouloir, il fit craquer sa nuque et détendit ses épaules avant de se lancer. « Elle est… était… est, je ne sais pas trop, avec Maddox, oui » ce qui faisait d’elle une personne infidèle, certes, mais Tao se devait de mentionner le passif qu’il y avait entre eux. « On s’est longtemps tournés autour, mais sans qu’il ne se passe jamais rien. Maddox était plus courageux et plus incisif. Ca m’a pas mal retourné de voir qu’il tentait sa chance avec elle, à l’époque, au point de me tétaniser. Il a essayé, je n’ai pas réagi, elle l’a choisi. Peut-être que je ne l’intéressais pas vraiment… Enfin bref » conclut-il avant de reprendre son souffle pour éviter de s’éparpiller. « Il y a quelques temps, on s’est revus, ça a dérapé et on vient d’apprendre qu’elle était enceinte de moi, par un test ADN. La compatibilité est de 99,9%, ce qui laisse peu de place au doute. Elle l’a toujours su et moi j’avais besoin de le voir écrit noir sur blanc. Toujours est-il que maintenant, je suis bien dans la merde ».

Pas besoin d’être un génie pour comprendre que les travaux n’avançaient pas dans le sens espéré par Tao. D’un air désolé, Laya hocha la tête d’un air entendu. Les Mehrtens avaient terminé les leurs depuis peu puisqu’il avait fallu aménager et terminer la chambre des jumeaux en quatrième vitesse avant leur arrivée. Arlo avait aussi mis la main à la pâte quand il avait appris qu’il allait devenir père. Laya avait avancé aussi longtemps qu’elle avait pu mais en fin de grossesse, elle s’était résignée à lever le pied. « Si nous pouvons t’aider pour quoique ce soit, n’hésites pas. » A titre personnel, Laya était suffisamment débrouillarde pour repeindre un mur ou monter un meuble alors c’était toujours ça de pris.

Alors que les deux amis s’attablèrent autour de leur pizza, Tao lâcha une nouvelle qui fit l’effet d’une bombe sur Laya. Dans la foulée, il lui demanda d’en parler plus tard comme s’il venait simplement de lui annoncer la météo du lendemain. C’était difficile de respecter ce souhait et de ne pas vouloir en apprendre plus après une telle confidence. Cependant, la journaliste essaya de se retenir un peu après les questions initiales. Les premières bouchées passées, elle déduisit logiquement que son mari n’était pas au courant. Tao lui confirma son raisonnement puis reprit le fil de l’histoire. Il n’avait pas l’air sûr de la situation actuelle de Siam, un statut pour le moins compliqué. Tao s’était entiché d’elle depuis longtemps sans qu’il ne se passe rien entre eux parce qu’il n'avait jamais osé lui avouer qu’elle l’intéressait. « Et Maddox était au courant de tes sentiments envers elle ? » Laya se demandait si cet ami avait court-circuité Tao ou s’il avait profité de la situation à l’époque. Lorsque deux potes aimaient la même personne, c’était toujours compliqué. Pourtant, ce n’était rien à côté de la nouvelle qu’il devait encore lui annoncer. Tao et Siam avaient finalement cédé à leur attirance et ce dérapage avait entrainé la conception d’un bébé. Dans le feu de l’action, les deux n’avaient sans doute pas pris les précautions nécessaires et le résultat était là, test ADN à l’appui.

Laya redéposa sa part de pizza et s’essuya les mains à l’aide de la serviette. Son appétit était momentanément coupé, ça faisait beaucoup à digérer. « Ok… laisse-moi une seconde pour assimiler. » La jeune femme prit une inspiration et essaya de revenir sur certains points en particulier. « Tu vas devenir papa, et d’après le test, tu peux en être sûr. C’est énorme. Un bébé, c’est à la fois une source d’inquiétude et de bonheur. Que ressens-tu ? » Si Tao avait un jour caressé l’espoir de devenir père, il ne l’avait sans doute pas imaginé dans ces conditions. La vie réservait toujours des surprises, parfois des plus grosses que d’autres. C’était effrayant et compliqué, une situation que Laya pouvait en partie comprendre pour avoir vécu sa grossesse seule au début puisqu’Arlo avait été victime d’une amnésie. « Quels sont les plans pour la suite ? Vous en avez discuté ? » Laya supposait que Siam garderait le bébé, à moins que ce ne soit pas l’option qui avait été retenue. Par rapport à l’enfant, comment comptait-elle composer avec Tao ? Tout un tas de questions se posait pour le bien de l’enfant, outre celle en arrière-plan de ce qui s’était passé entre eux

Tao n’était pas franchement un grand bricoleur. Il savait monter un meuble, accrocher un tableau ou installer une étagère, mais le gros œuvre n’était pas dans ses cordes. Il lui était arrivé de participer à l’abattement d’une cloison pendant un week-end pour se détendre, mais il n’était pas dans son élément. Lui était un homme minutieux et de détails, pas un grand costaud prêt à démonter tout ce qui se trouvait sur son passage. « Ne t’en fais pas, j’ai bon espoir que ce soit terminé pour l’automne prochain quand même ». Il ferait le nécessaire pour que ce soit le cas, surtout qu’il devait maintenant assurer une sécurité pour son enfant.

Chaque fois que l’affaire avec Siam était mise sur le tapis, Maddox faisait partie du lot : sans le vouloir vraiment, ils formaient une sorte de triangle amoureux digne des plus grandes séries. Le jeune homme n’avait jamais révélé ses sentiments à qui que ce soit. Il avait gardé son attirance enfouie au fond de son cœur et elle avait fini par ressortir dans une situation plus que complexe. « Maddox ne savait rien. Siam non plus. Personne ne savait et ça avait fini par passer. Ce soir-là, c’était un concours de circonstances » admit-il sans la moindre culpabilité. Il était trop tard pour culpabiliser et cela ne changerait rien. Il fallait maintenant agir en conséquence.

Devant le silence de Laya, Tao se demanda s’il avait bien fait d’amener le sujet sur le tapis. Elle avait probablement besoin de temps pour assimiler toutes les informations qu’il venait de lui communiquer. Lui-même se demandait comment il avait pu vider son sac avec une telle franchise en quelques minutes. Il avait porté tellement de choses seul pendant des années qu’aujourd’hui, il avait la nécessité de changer sa méthode d’action. Ce qu’il ressentait ? Il avait de la peine à le verbaliser. Une part de lui était effrayée à l’idée d’avoir la responsabilité d’un autre être humain incapable d’extérioriser ses besoins et l’autre ravie d’accueillir cet enfant avec son amour de jeunesse. « On va élever l’enfant ensemble. Je ne sais pas exactement comment ça va se passer, mais j’ai dit que je serai présent pour lui comme pour elle, c’est le plan. J’ignore exactement comment on va s’organiser, mais on va réussir. D’apprendre que j’étais le père, ça nous a rapprochés. Quant à Maddox, j’ignore ce qu’il va se passer. C’est à eux de choisir, tant que je garde ma place de père, ça me va. Quand Arlo va apprendre ça… »