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❝ Excuse me ? Or excuse you ? ❞
Nina & Nathaniel

Je raccroche le telephone. Il était tant de boucler ce dossier. Ils m’auront tenu la jambe quinze jours. Deux semaines pour un meeting, on frôle la mauvaise foi. La diplomatie faisant partie de mon travail, je n’ai pas eu le choix que de ravaler ma fierté. Heureusement que je suis doué pour mentir. Avec les années, cette capacité s’est affinée. Je n’en suis pas forcément fier mais c’est utile et indispensable. Ma famille, mon nom, ma fortune, ce ne sont pas des choses que je souhaite que les gens sachent à mon égard. Ce n’est pas de la honte mais plutôt de l’auto-préservation. Je regarde mon écran et ferme le pc. Mon rapport attendra demain. Hors de question que je rende un travail médiocre. La rapidité ne vaut pas toujours qualité. Une caractéristique que j’ai gardé de mes années en tant qu’étudiant. Malette à la main, je rentre chez moi. Ce soir, j’ai envie de décompresser, m’amuser, lâcher prise. Sortir de ce costume-cravate et me faire du bien. Après avoir avalé quelque chose en vitesse, j’enfile un jean, un tee-shirt simple et un perfecto en cuir. Le trois pièce, on garde ça pour le travail. Et direction Wellington.

Ce soir, c’est en solo que je sors. Je n’ai pas de but de précis. Je ne sais pas si j’ai envie de rencontrer quelqu’un. Il faut bien reconnaitre que le bordel de ce côté-là. Je n’ai toujours pas digéré le coup du mariage arrangé par mes parents. Et il semblerait que ma promise non plus. Grâce à quelques contacts, j’ai appris qu’elle avait débarqué à Island Bay. Cela fait maintenant onze ans. Il serait peut-être temps qu’elle passe à autre chose. Pourtant j’ai l’impression que plus les années passent, plus sa volonté s’est accrue. Alors je mérite bien un verre, parce que quelque chose me dit que cette histoire est loin d’être terminée. Je me dirige vers le bar et commande une vodka. La foule se densifie rapidement. Beaucoup de jeunes femmes s’amusent. Je me dis que je devrais aller à leur rencontre, rien de mieux pour oublier. Je me fonds dans la masse, difficilement vu le nombre de personnes présentent ce soir. Une femme un peu trop volubile trébuche, je perds l’équilibre et bouscule quelqu’un d’autre. Elle lâche un juron « Et merde ! » Mes fringues sont éclaboussées et un rapide coup d’œil m’indique que je ne suis pas le seul « Désolé, je ne faisais pas attention » Mensonge, mais mieux que de dire qu’une nana de cinquantes kilos a réussi à me faire bouger. « Je vous en offre un autre ? C’est la moindre des choses » Autant essayer de se faire pardonner.

❝ Excuse me ? or Excuse you ? ❞
Nina & Nathaniel

Dans le genre maladroit, je peux être le roi. J’ai cet extérieur très sûr de moi, le costume y fait beaucoup et dans mon travail, c’est une obligation. La gestion de crise ne laisse pas de place à l’hésitation, au stress ou à l’angoisse. Et encore moins à la maladresse. Je contemple la jeune femme en face de moi. Sa robe est effectivement imbibée d’alcool, ce qui ne doit pas être agréable. Je crois que je m’en sors mieux. Ma bonne éducation m’oblige à me faire pardonner. Vu le prix des verres en boite, je lui dois bien ça. Elle accepte avec le sourire. Le manque de lumière m’empêche de voir à quoi elle ressemble. Fichus spots ! Mais elle semble avoir les traits fins. Elle me propose de se rejoindre au bar d’ici cinq minutes. Je hoche la tête « Parfait. A tout de suite. » Je la vois se diriger vers les toilettes. J’observe à nouveau l’état de mon tee-shirt. Ce ne serait pas une mauvaise de limiter les dégâts. Je me rends dans les toilettes pour homme, attrape rapidement un essui main histoire d’éponger le liquide. Mon perfecto n’a rien, heureusement. Je reste assez précautionneux avec mes affaires. « Bon, ca fera l’affaire » Un coup d’œil à mon montre m’indique que les cinq minutes se sont écoulées. Je prends la direction du bar et tente de repérer la jeune femme. Des reflets roux attirent mon attention. Je souris et me place juste à côté d’elle, regardant dans la même direction « On regarde quoi ? » Elle tourne la tête vers moi « Allez, choisis ton poison » lui dis-je en indiquant le bar. Je préfère la laisser choisir. Avec un peu de chance, ce verre ne finira sur vos vêtements. Nous nous approchons du comptoir. Je la laisse passer sa commande et fais de même « un dry martini s’il vous plait » Une boisson que j’ai appris à aimer lors de mon temps à Londres. Très James Bond. Une fois nos verres payés, je reporte mon attention sur la jeune femme. Elle a l’air bien plus intéressante que la moitié des gens présents dans cette boite. « Alors, comment dois-je t’appeler ? » Quitte à rester, autant apprendre à faire connaissance, surtout que cette jeune femme n'a pas l'air d'avoir sa langue dans sa poche.

❝ Excuse me ? or Excuse you ? ❞
Nina & Nathaniel

La soirée n’a pas commence sous les meilleurs hospices avec cette histoire de verre renversé. Je me dis que cela aurait pu être bien pire. La jeune femme aurait pu exploser, l’insulter voire même le « frapper ». Et franchement, la flemme de gérer ce genre de situation. Je passe mes journées à faire des rapports, lire des chiffres et conseiller les gens sur la manière de résoudre telle ou telle crise, minimiser les dégâts et ainsi de suite. Une fois posté à côté d’elle, je lui demande joueur ce qu’elle regarde. Elle choisit de rentrer dans mon jeu ce qui me fait sourire. Je hoche la tête, prétendant être très sérieux. Nous nous approchons du bar et je la laisse choisir sa boisson. Après tout, je ne sais pas ce qu’elle boit et je n’ai pas pris le temps d’essayer d’identifier le cocktail qui a atterri sur mon tee-shirt. Je fais donc de même. Elle se présente, à sa manière ce qui a le don de me faire rire. « C’est vrai, je pourrais être un tueur en série. Il parait qu’ils sont connus pour être banals, classiques, des mecs lambas. » Je me désigne de la tête au pied en souriant « Impossible que je sois un psychopathe alors » Je reconnais que je me vends un peu. Mais c’est le jeu et puis maintenant que je suis un peu plus près, je vois bien qu'elle est assez jolie. Elle m’indique s’appeler Nina, ou est-ce le pseudo qu’elle a choisi ? Je verrai bien mais je suis intrigué. « Enchanté, moi c’est Nath’ » A elle de deviner s’il s’agit de mon vrai prénom. Le barman nous sert nos verres, que je règle rapidement. Nous prenons nos commandes et je lève mon dry martini « Santé ! » Nina fait clinquer son verre contre le mien. Mon regard se perd dans la foule. Certains semblent tellement insouciant c’est un sentiment qui m’a quitté depuis un petit moment. Qu’on ne se méprenne pas, je sais m’amuser, j’en ai profité à la fac et encore aujourd’hui, j’apprécie sortir, aller au resto ou danser (oui oui même ça) mais j’ai davantage conscience de ce qu’est la vie à présent. Je reporte mon attention sur la rouquine à mes côtés. « Alors Nina, que fais-tu dans la vie ? » Elle a l’air dynamique, avec de la tchatche. Ce n’est visiblement pas un problème d’aller vers les autres, de communiquer. Je la verrai bien mettre ce côté-là de sa personnalité au profit de son travail.

❝ Excuse me ? or Excuse you ? ❞
Nina & Nathaniel

Je reconnais que je joue un peu mais ça fait du bien. Et c’est agréable parce que Nina a du répondant. L’avantage dans ce genre de situation, c’est que je peux me cacher, mentir facilement sur qui je suis. Depuis que mon père s’est expatrié, je suis d’autant plus vigilent sur les informations que je donne sur ma vie privée. La rouquine réagit rapidement à mes propos et je ris. Je hausse les épaules, mets les mains en l’air, avec ma tête d’ange « Je suis innocent votre Honneur » Mon nom l’intrigue et hoche la tête « Nathaniel. Bien trouvé » Jolie et intelligente. Je prends une gorgée de mon dry martini. Il n’est pas aussi bon que ceux que j’avais à Londres. Mais je ne peux pas leur en vouloir, je suis assez difficile sur cette boisson et le but des boites de nuit est de faire du chiffre. Lorsque je souhaite réellement me faire plaisir, je vais dans mon bar préféré à Wellington, un speakeasy, ambiance prohibition. Cela m’arrive après le travail en sortant assez tard, je passe faire un tour. Je continue mon « interrogatoire » et je ne suis pas déçu de la suite. Je recule d’un pas « En fait, c’est toi la psychopathe » lui dis-je en plaisantant. Je reste toutefois attentif à ces propos et hoche la tête lorsqu’elle me parle du 911. Dire que je connais que ce numéro est un euphémisme. New-yorkais, et plus largement américain, nous avons tous déjà eu à utiliser ce numéro. Elle s’intéresse à son tour à mon gagne-pain. J’ouvre la bouche pour lui répondre mais elle me prend de court. Nina tente de deviner ce qui peut bien composer mon quotidien et opte pour les métiers de la finance. Je secoue la tête « Nous avons déjà établi que c’était toi la psychopathe. Plus sérieusement, je travaille au cabinet du maire de Wellington » Je préfère ne pas m’étaler. Je n’ai pas honte de mon emploi mais ça peut être assez barbant à expliquer. Si je la revois, peut-être que je donnerai davantage de détails. A moins qu’elle ne se montre plus curieuse. Je termine mon dry martini et zieute la piste de dance. Si mes souvenirs sont bons, j’ai bousculé la rouquine à cet endroit. Peut-être qu’elle serait partante pour aller transpirer un peu « Ca te dis d’aller montrer à ces potentiels tueurs en série comment on fait ? » lui dis-je en désignant la piste de dance.

❝ Excuse me ? Or excuse you ? ❞
Nina & Nathaniel

 Finalement la soirée prend une tournure intéressante. J’aime bien cette rouquine. De manière générale, j’apprécie les femmes qui ont du caractère, du répondant. Avec mon caractère, j’ai parfois besoin d’être remis à ma place ou qu’on me tienne tête. Pas dans le sens aller à l’opposé ou chercher absolument les conflits, au contraire, mais davantage une personne qui a ses propres opinions et qui n’a pas peur de s’exprimer. Ce n’est pas aussi répandu qu’on pourrait le penser. Nina, elle, correspond à tout cela et j’ai envie d’en apprendre encore un peu plus sur elle. Elle a du l’humour, c’est évident et je ne peux m’empêcher de pouffer à sa blague. Elle n’a pas la tête du loup du Petit Chaperon Rouge. Vient mon tour de lui raconter ce que je fais dans la vie de tous les jours. Sa petite remarque ne tombe pas dans l’oreille d’un sourd « Joli garçon hein ? Je prends note » lui dis-je avec un clin d’œil. Ca fait toujours plaisir à l’égo, on ne va pas se mentir. Je lui explique alors ce que fait mon gagne-pain, tout en lui épargnant les détails. Ce n’est pas forcément très intéressant pour elle. Elle me dévisage quelques secondes et je ne peux qu’acquiescer. « C’est peut-être mieux, mais ma gueule d’ange peut parfois être utile dans mon travail » Une fois mon verre terminé, je lui propose d’aller danser. Elle fait de même avec le sien avant de s’élancer. Pas le temps de dire ouf, qu’elle a pris place dans la foule. Cette rouquine alors ! Allez Nath, rejoins-la. Je prends mon courage à deux mains et m’approche de Nina. Je ne suis pas un danseur professionnel, disons que je me débrouille assez pour ne pas me ridiculiser au milieu de tous ces gens. La foule se densifie rapidement et une fois n’est pas coutume, je me fais à nouveau bousculer. Cette fois-ci, je me retrouve très près de la jolie jeune femme. Vraiment très près et ce n’est pas désagréable. Je me penche à son oreille pour lui parler et couvrir le bruit de la musique « Excuse-moi, on m’a poussé » je lui confie, faussement désolé. J’espère que cette soudaine proximité ne la met pas mal à l’aise. Si tel était le cas, je reprendrai rapidement une certaine distance, plus respectueuse. Autant éviter de la faire fuir.

❝ Excuse me ? or Excuse you ? ❞
Nina & Nathaniel

Les compliments ne sont jamais ignorés. Et puis c’est réciproque mais encore faut-il trouver le moment opportun pour le lui dire. Si je lui répondais la même chose, elle pourrait ne pas me croire, ce qui serait très dommage. Puisqu’elle est très jolie. Et finalement elle me tend une perche. Je ris un peu « Ce serait mentir effectivement » Et sur ce sujet, je n’ai aucun intérêt particulier à ne pas dire la vérité. Je lui adresse un regard contrit « Et puis, je pense que tu n’es pas en reste n’est-ce pas ? » Parce que je ne la croirai pas non plus. Elle a l’air d’avoir ce côté pétillant et joyeux. Ça me plait. Nous apprenons à nous connaitre, petit à petit, jouant au question-réponse. Je n’ai pas très envie de m’étaler sur mon boulot. Déjà parce que je ne suis pas certain de pouvoir le vendre, en parler de manière que ce soit intéressant. J’ai beau être dans cet emploi depuis quelques années maintenant, je me pose toujours des questions sur ma voie. Et je ne peux même pas dire que ça paye les factures. Sans vouloir me vanter, je n’en ai pas besoin. On pourrait presque voir cela comme une couverture, un poste qui justifie un train de vie aisé. Il faut se rendre à l’évidence, j’ai un joli loft, des costumes assez chers. Difficile de pouvoir se permettre de telles choses avec un salaire de vendeur ou autre. Encore une fois, sans exagérer mais c’est la réalité de la vie. Alors si un jour je revois cette jolie demoiselle, je peux justifier mes biens sans avoir à lui dire confier que mes parents sont aussi riches que les Rothschild, mais bien plus sympathiques, c’est clair, et que mon père travaille à l’ambassade américaine d’Island Bay. Nina s’intéresse davantage et joue les détectives. Alors j’essaie d’esquiver la question et lui propose plutôt d’aller danser. Nous finissons nos verres et nous élançons sur la piste. Je me retrouve bien vite plus proche de la rouquine que je ne l’aurais cru. Sa remarque me tire un sourire « Faut croire. Ou alors, j’ai juste de la chance » Drague ? Rien qu’un peu. La jeune femme saisit alors mes mains et nous dansons ensemble. J’ai l’impression que l’on s’accorde plutôt bien tous les deux. « Merci, j’ai suivi quelques cours » Je remercie ma mère pour ça. Je me débrouille assez dans les danses de salon. Il faut dire que durant les évènements mondains new-yorkais, j’avais plutôt intérêt à ne pas faire un seul faux pas. « Toi aussi tu bouges bien. » Je lâche une de ses mains et la fait tourner sur elle-même avant de la pencher en arrière, un peu comme dans les films. Généralement, le prince charmant choisit ce moment précis pour voler un baiser à la jeune femme. Je la relève et nous nous retrouvons de nouveau nez à nez. Un sourire s’affiche sur mon visage « Et parfois, tu te laisses guider. J’en suis honoré » Parce que quelque chose me dit que ce n’est pas vraiment son genre.

❝ Excuse me ? or Excuse you ? ❞
Nina & Nathaniel

La soirée se passe bien mieux que je ne l’aurais pensé. Cette rencontre fortuite avec la jolie rouquine est une aubaine. Nous apprenons à nous connaitre. Et cette proximité entre nous me plait, je ne pourrais pas vraiment décrire ce que je ressens à cet instant précis. Tout ce que je sais, c’est que c’est agréable. Nina continue ses petites provocations, mais j’aime ça. Ce répondant, ce petit côté piquant. Je lève un sourcil en riant. « C’est noté. Pas besoin de tourner autour du pot avec vous demoiselle. Si j’ai envie de quelque chose, je demande franco, je n’hésiterai pas. » Peut-être y’aura-t-il une prochaine fois ? Cela ne dépend pas de moi, bien entendu. Nous continuons à nous amuser, à danser. Elle se débrouille plutôt bien, je reconnais que je ne suis pas en reste non plus. Ce qu’elle souligne. Je lâche alors une information sur moi. Je le regretterai presque. Les cours de danse ne sont pas donnés. Heureusement, je n’ai pas à m’étaler davantage et encore mois à préciser qu’il s’agit de danses de salon. J’aurais bien eu du mal à me dépatouiller pour le coup. Décidément, elle a toujours la réponse parfaite. Je me mets à rire. « Au moment le plus opportun alors. » La musique change soudainement. Nous étions sur de la pop, et à présent, nous passons sur des danses latines. Un rythme qui va nous obliger à changer de mouvements. Je pourrais lui montrer mes talents en salsa ou tango, mais il est peut-être encore un peu tôt pour ça. Je me penche à son oreille « Le collé-serré semble approprié à présent » Je m’approche d’elle, éliminant le peu de distance qui reste entre nous. Ma main passe dans son dos pour se poser sur ses reins. Ma bonne éducation fait que je reste respectueux en allant pas plus loin, sans son accord. Il est assez évident que la température monte d’un cran. Son visage n’est qu’à quelques millimètres du mien. Un sourire timide nait sur mes lèvres. C’est étrange comme sentiment. Il peut m’arriver d’être maladroit, mais je suis assez sûr de moi dans les relations. Je suis devenu un as du mensonge, me permettant de me sortir de pas mal de mauvais pas. Mais Nina, elle sort du lot. Ma seconde main dégage une mèche devant les yeux de la rouquine. Décidément, elle est vraiment jolie. Elle ferait presque oublier la réapparition de ma « promise ». Une sacrée épine dans le pied. J’ignore quelles sont les raisons de sa présence ici mais cela n’augure rien de bon. Il va falloir que je me penche sur ce problème avant qu’il ne soit ingérable. Pourtant, c’est bien Nina qui occupe mes pensées à cet instant précis. Et ce n’est pas plus mal.