feel the sun on your skin ☾ vesper

S’il y a quelque chose que Vesper aime beaucoup en Nouvelle Zélande, ce sont les étés. Au mois de février presque partout ailleurs – partout ailleurs où la texane s’est rendue, en tout cas -, il faut se couvrir. Enfin sauf chez elle au Texas où en hiver, y a quand même au moins quinze degrés. Mais ici, c’est la fin de l’été et le soleil est toujours au rendez-vous. Quand il ne pleut pas, évidemment. Car elle a tout de même remarqué qu’il pleuvait souvent. Quant à savoir si ça concerne tout le pays ou seulement la capitale et ses environs, aucune idée. Ça fait trois ans qu’elle est là et malgré ça, la blonde donne toujours l’impression de descendre de l’avion qui l’a amenée sur la terre du milieu du Seigneur des Anneaux pour la toute première fois. Ce qu’elle connaît bien en revanche, c’est le chemin à prendre pour la marina puisqu’elle l’emprunte assez souvent. Ce qui ne signifie pas qu’elle prend la mer à chaque fois mais elle aime prendre soin de son bateau dès que l’occasion se présente. Si elle l’emprunte ce matin, ce n’est pas pour rester à quai. Non, elle a donné rendez-vous à Joséphine un peu plus tard dans la journée pour se faire une petite virée entre filles puis peut-être un peu de plongée si l’envie leur prend.

Vesper passe donc toute la matinée à s’assurer que tout sera prêt pour l’arrivée de son amie. Le Billy Blue était fin prêt à prendre la mer, le matériel de plongée qu’elle continuait d’emprunter au centre nautique depuis la dernière fois – il y a fort longtemps, tellement qu’on pourrait croire à un vol mais elle n’a encore croisé personne qui le lui réclamait d’urgence, donc – n’attendait plus que d’être utilisé, elle a assez de nourriture en réserve pour tenir un week-end entier bien que les deux jeunes femmes n’aient prévu que l’après-midi. Bref, il est donc temps d’aller chercher Joey au point de rendez-vous, à savoir un banc non loin de là. Sans prendre le temps de verrouiller quoi que ce soit, la texane descend du bateau et parcourt les quelques mètres qui la séparent de ce fameux banc. Elle s’étonne aussitôt de trouver son amie seule.
« Bah alors, t’as pas pris Kayla ? Remarque, tu as peut-être raison, si c’est sa première fois sur un bateau, peut-être qu’elle ne serait pas rassurée. »
Elle lui fait signe de la suivre tandis qu’elle entame le chemin en sens inverse, remonte à bord et commence le tour du propriétaire. Le pont, la cabine, le cruiser est assez petit pour qu’on en ait vite fait le tour mais il dispose d’assez de place pour accueillir cinq personnes à la fois.
« J’envisage de louer mes services de capitaine une fois que j’aurai pris ma retraite. »
Un jour. Dans longtemps. Si on tient compte du fait que la blonde a déjà quitté Los Angeles pour se poser un peu.

Vesper pouffe en entendant que Kayla est attirée par l’eau et l’imagine vouloir les suivre au moment de plonger. C’est sûr, mieux vaut que ça n’arrive pas. Quant à l’attacher quelque part sur le bateau, elle conçoit que c’est un peu crève-cœur pour sa maîtresse. Qu’à cela ne tienne, Joséphine pourra la prendre une prochaine fois où la plongée ne serait pas prévue au programme pour l’habituer un peu. Très fière, la blonde lui fait rapidement faire le tour du propriétaire. Pas le plus grand bateau au monde mais elle n'a pas besoin de plus ; il suffit amplement à partir un week-end, voire une petite semaine à condition d’être moins et c’est tout ce dont elle a besoin. D’ailleurs, à son arrivée ici, sa cabine faisait plus souvent office de domicile que sa véritable maison. En même temps, en dehors de son jardin, la petite maison de north bay dans laquelle elle vivait autrefois n’avait vraiment rien d’incroyable. Bref, son amie a l’air impressionné, comme tout qui ne met pas souvent les pieds sur le pont d’un bateau et Vesper lui fait part de son projet de jouer les capitaines pour certains clients le jour où son emploi du temps le lui permettra.

Ce à quoi Joey rétorque qu’elle peut s’attendre à les avoir pour clients un de ces quatre. Nathan et elle, s’entend. Un sourire radieux étire alors ses lèvres.
« Avec plaisir ! »
Puis son amie s’enquiert de leur destination. La texane prend alors la direction du cockpit. Elle se penche ensuite sur la table jouxtant le poste de navigation et déplie une carte. De l’index, elle pointe un endroit dessus avant de s’expliquer :
« Là. L’épave du MS Mikhail Lermontov. Il s’agit d’un paquebot de croisière russe qui s’est échoué pas très loin d’ici. »
Ça ne devrait pas leur prendre trop de temps pour rejoindre le site de plongée. Elle se met donc à la barre et poursuit la conversation.
« Il paraît qu’il y a une autre épave très intéressante dans l’île nord, celle du Waikato mais ça demande un niveau 2 de plongée donc si l’expérience te plaît, on pourra éventuellement s’organiser ça plus tard. »
C’est que, mine de rien, ça l’intéresse elle aussi. Mais elle en oublierait presque les bonnes manières.
« En attendant, fais comme chez toi ; il y a tout ce qu’il faut pour se sustenter dans la kitchenette si besoin. »

Vesper capte un peu d’appréhension dans la voix de Joey lorsqu’elle lui expose son plan. Il est vrai qu’il s’agit d’une activité qui peut faire un peu peur quand on n’en a jamais fait. Mais la texane, sans pour autant être monitrice, n’en est pas à son coup d’essai, elle connaît les consignes de sécurité. Elle opine du chef au moment où son amie lui demande si elle est au courant qu’elle n’a encore jamais plongé. Oui bien sûr, elle s’est tout de même renseignée un minimum avant de se lancer.
« Oui, oui, je sais. Mais ne t’en fais pas, l’endroit où je t’emmène est sans risque. Et le plus important, c’est de respecter les paliers de décompression quand on remonte. »
Elle a vu un jour Rafa jouer à un jeu vidéo dans lequel un des personnages meurt de la maladie des caissons alors depuis, et bien que ça ne soit jamais qu’un jeu vidéo, elle fait d’autant plus attention à ça. Bref, histoire de la mettre un peu plus à l’aise, Vesper propose à Joséphine de se prendre un truc à boire ou à grignoter, ce qu’elle accepte volontiers.
« Je veux bien un coca zéro s’il te plaît. »
Puis, profitant de son absence, la blonde cherche une brochure qu’on lui a fournie en même temps que le matériel de plongée. Là, sous la carte. Dessus sont marquées toutes les contrindications ainsi que les consignes de sécurité dont on parlait un peu plus tôt. Elle attend que son amie revienne pour la lui désigner du menton.
« Tiens, regarde sur la table. C’est une brochure pour faire de la plongée en toute sécurité si jamais ça peut te rassurer. »
La brochure dit également de ne pas plonger si on en a pas envie afin d’éviter les crises de panique et tout ce qui s’ensuit. Mais Vesper reste sereine : comme dit précédemment, c’est loin d’être la première fois pour elle et tout s’est toujours très bien passé, il n’y a donc pas de raison pour qu’il en aille autrement cette fois-ci. Elle attrape ensuite sa cannette de soda pour l’ouvrir et y boire une gorgée avant de continuer à faire la discussion. Peut-être que si elles parlent d’autre chose, Joséphine en oubliera son stress.
« Comment va Nathan ? Et ton travail ? Tout se passe bien ? »

Un peu surchargé par le travail, hm ? Nathan ? Voilà qui n’étonne pas Vesper le moins du monde. Mais elle sait que Joséphine est du même genre alors ce qui l’étonne encore moins, c’est d’apprendre qu’elle voit cette journée comme un véritable privilège qu’elle s’accorde. Le rire de la blonde se mêle à celui de son amie.
« Alors tu me vois ravie que ce soit avec moi que tu as décidé de la passer. »
Et son métier étant intéressant, elle ne manquerait pas de revenir dessus. Une fois qu’elle aurait répondu à la question qu’elle lui retourne. Comment ça va de leur côté ? A elle ainsi que Rafa, s’entend. Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’eux ne sont sûrement pas surchargé par le travail, en revanche. Si la texane n’est pas encore à la retraite de son côté – bien qu’elle travaille bien moins qu’à l’époque où elle vivait à Los Angeles, même que c’est pour cette raison qu’elle est ici, précisément -, son petit ami en revanche, oui. Ce qui ne signifie bien sûr pas pour autant qu’il est inactif puisqu’il gère son propre centre communautaire mais il n’est plus major, en tout cas.
« Oh, tout est tranquilles de notre côté. On a décidé d’emménager ensemble y a quelques temps. Et j’aurais jamais cru mais ça a été une sacrée galère pour se trouver quelque chose de correct. Si bien que finalement, on a décidé de rester chez Rafa. »
Elle avait vendu sa mini-maisonnette pour une bouchée de pain, avait fait le peu de cartons qu’il y avait à faire et était donc partie pour south bay. Ce qu’elle ne regrette pas puisque la maison de Rafa est plutôt bien située et pas entourée de voisins trop louches. Et puis surtout, peu importe le lieu, l’essentiel c’est qu’ils soient ensemble.
« Tu travailles sur un nouveau livre en ce moment ? »
Si Joey est éditrice, elle écrit également. Et à choisir, c’est plutôt cette facette-là qui est intéressante. A moins de travailler également dans la littérature et de tout connaître du monde de l’édition mais ce n’est malheureusement pas son cas. Alors autant se renseigner sur ce qui peut bien inspirer une auteur le temps d’arriver au site de plongée qui n’est plus très loin.

Il était temps, voilà qui fait rire Vesper. Joséphine n’a pas tort quand elle dit ça ; ça fait trois ans que Rafa et elle sont ensemble alors il était peut-être temps de passer à l’étape suivante. Mais le fait est que ni l’un ni l’autre n’avait envie de trop brusquer les choses. Ils prennent leur temps, voient comment les choses évoluent sans jamais les forcer. Il n’y aura probablement pas de mariage ni d’enfants mais la texane est bien placée pour savoir que ça ne fait de toute manière pas tout, elle qui a déjà été fiancée une fois, il y a fort longtemps. Un peu par obligation, afin de ne pas froisser l’homme avec qui elle était en ce temps-là. Bon, elle a dû finir par le faire car ça s’est terminé en fuite alors qu’il l’attendait au pied de l’autel, mais il faut croire que ça n’est tout simplement pas pour elle. Dans tous les cas, son amie a une fois de plus raison lorsqu’elle parle de la maison de Rafa : elle est parfaite. Et ça reste la sienne, car même si elle y vit, il n’y a toujours que le nom de Rafa sur le contrat. Ce qui lui convient très bien. Sans doute parce que jusqu’ici, Vesper ne s’est jamais véritablement posée nulle part, alors tout ce qui touche à la propriété ne l’intéresse guère.
« C’est vrai, on habite le même quartier maintenant ! Je doute pas qu’on va pouvoir se faire moulte barbecues chaque été. »
Ainsi que d’autres choses l’hiver puisque c’est ce vers quoi on se dirige. Puis, s’intéressant à l’actualité de Joey, la blonde lui demande où elle en est de ses écrits et celle-ci lui répond qu’elle y travaille. Qu’elle pourra même lui faire parvenir un exemplaire en avant-première.
« Avec grand plaisir ! »
Vesper ne s’y connaît peut-être pas tant que ça en poésie mais ça ne signifie pas qu’elle n’aime pas. Au contraire, si c’est bien fait. Ce dont elle ne doute pas un seul instant alors elle a hâte de pouvoir le lire ainsi que lui donner ensuite son avis. Dans tous les cas, elle ralentit alors qu’elles approchent du site de plongée tout en hochant la tête en réponse à la question de son amie.
« Nous y voilà. »
Une fois le moteur coupé, elle lâche la barre et rassemble le matériel de plongée sur le pont afin qu’elles puissent toutes deux s’en équiper.

Ah, Joséphine n’a tristement pas tort quand elle dit que la météo ne va bientôt plus leur permettre de faire des barbecues quand ils le veulent et la blonde grimace un peu à cette idée. A part pour quelques jours comme ça, en passant, elle n’a jamais connu d’endroit aussi pluvieux que celui-ci. Ce dont elle ne se plaint pas spécialement, d’ailleurs, ça la change et c’est précisément ce qu’elle souhaitait en venant ici. Elle hoche la tête.
« C’est certain. Et puis on peut même se faire une fondue si on veut. Si je n’en ai pas parlé, c’est parce que là, tout de suite, ça me fait bien moins envie qu’un barbecue. »
Il fait encore un peu trop chaud à son goût pour la fondue mais ça reste néanmoins envisageable, donc, inutile de se presser si Joey et son mari sont tous les deux fort occupés ces temps-ci. Bref, le temps d’une seconde, les deux femmes discutent des projets littéraires de Joséphine, ce qui semble mettre celle-ci un peu dans l’embarras alors Vesper n’insiste pas. De toute manière, elles sont arrivées. La texane coupe le moteur, lâche l’ancre afin que son précieux bateau ne parte pas à la dérive et rassemble le matériel sur le pont avec l’aide de son amie. Qui lui demande bien vite par quoi commencer.
« Alors dans un premier temps, le plus important, c’est la combi. Je sais qu’il ne fait pas très froid aujourd’hui, mais l’eau peut quand même être un peu fraîche et il paraît qu’il n’y a rien de plus désagréable que de plonger en ayant froid. »
Et pour montrer l’exemple, elle enfile la sienne, ainsi que ses palmes.
« Ensuite, je propose qu’on commence avec un tuba pour que tu puisses t’exercer un peu avant de passer aux bonbonnes. D’accord, on va pas pouvoir descendre bien bas tout de suite et y aura pas grand-chose d’intéressant à voir, mais ça te fera un petit exercice qui sera sûrement pas de trop. »
Là-dessus, elle lui montre comment bien mettre tout ça, car une autre chose qui peut vite devenir chiante en plongée, c’est d’avoir de l’eau plein le masque, puis saute à l’eau. Effectivement, elle est fraîche mais rien de dramatique non plus étant donné qu’elles portent les combinaisons adéquates. Puis elle attend que Joey la rejoigne pour mettre l’embout de son tuba dans sa bouche et descendre un peu sous la surface.

Une fois dans l’eau, la blonde s’attache les cheveux. Ah, c’est sûr qu’ils sont magnifiques, qu’elle se donne du mal pour qu’ils aient cette allure mais nager alors qu’il lui flotte devant les yeux, c’est pas vraiment le top non plus. Puis elle peut accompagner Joséphine dans sa découverte des palmes et de la plongée avec tuba. Ce n’est pas parce que c’est ce qu’elle lui propose pour s’entraîner que c’est forcément plus facile. Disons que c’est comme pour tout ce qui est nouveau : il faut le temps de s’y faire.
« Ah c’est pas grave, ça va venir ! »
Un petit encouragement pour que Joey ne se laisse pas abattre, ce qui n’a de toute manière pas l’air d’être son genre puisqu’elle s’exclame elle-même qu’elle va réessayer. Parfait, c’est pas mal encourageant pour la suite, tout ça. Une fois que son amie se sent suffisamment à son aise, elles décident toutes les deux de remonter sur le pont pour troquer leurs tubas contre les bonbonnes. Un peu plus encombrant mais le spectacle en vaut le détour. Vesper aide ensuite Joséphine à s’équiper puis fait de même avant de retourner dans l’eau. Puis elle lui explique deux ou trois choses :
« Tâche de ne pas t’éloigner de moi. Si ça devait arriver, remonte à la surface puis sur le bateau si c’est possible. Ne force pas sur tes tympans, si tu sens que la pression est trop forte, fais-le moi savoir et on ne descendra pas plus bas. Et préviens-moi aussi si jamais tu ne te sens pas dans ton assiette ou si tu commences à paniquer. Je crois que c’est tout. De toute manière, rien de tout ça ne devrait arriver, c’est un site pour débutants. »
A savoir pas trop profond, sans éventuels courants qui pourraient les emmener à la dérive, ce genre de choses. Autrement dit, tout devrait bien se passer. Puis, petit sourire aux lèvres, la blonde ajoute :
« Je sais, ça fait beaucoup de consignes qui peuvent faire un peu peur mais tout va bien se passer ! Prête ? »
Elle attend son signal avant de s’immerger tout en battant des jambes pour rejoindre le fond ainsi que l’épave qui s’y trouve depuis des années. Par précaution, elle reste tout de même à bonne distance pour ne pas risquer de s’accrocher à cette vieille ferraille toute rouillée puisque ce serait le meilleur moyen de choper le tétanos. De toute manière, c’est bien plus intéressant d’observer qu’avec le temps, l’épave n’est plus un élément intrus du décor mais s’y intègre presque à la perfection.