Les animaux parlent, mais juste pour les personnes qui savent écouter | Alana

Alana Holt

ft. Jenna Louise Coleman

l'histoire de ma vie

Mon trousseau de clefs dans la main, je poussais la porte d’entrée de mon logement pour pouvoir accéder à ce dernier. Il était tard, surtout pour un jour de semaine. Demain, je devais me lever tôt pour aller travailler. Mais ça en valait le coup. Oui, ça avait été agréable de passé la soirée de mon trente-huitième anniversaire avec mes sœurs. Elles avaient mis leur vie de côté ce soir pour venir au restaurant avec moi et c’était définitivement mon meilleur cadeau. Je lance les clefs sur le meuble de l’entrée et je m’avance jusqu’à ma cuisine pour me préparer une infusion. Je sais que je devrais aller me coucher pour gratter un maximum d’heure de sommeil, mais en ce 31 mai 2022, je venais d’avoir trente-huit ans et ça demandait encore un peu de réflexion. Plus que deux ans avant la quarantaine fatidique. Et ce soir, je me demandais où j’en étais. Une fois l’eau chaude et la tasse remplie, j’attrapais cette dernière pour aller m’installer dans mon canapé. Sur le chemin, je m’arrêtais devant la carde posée sur mon meuble. Dedans, une photo me représentait avec mes sœurs la ferme familiale. J’étais assise sur les marches su porche avec D dans mes bras, Bailey était installé à mes côtés alors que Charleen était installé devant nous sur une marche inférieure. Je souriais en me souvenant que cette photographie avait été prise au retour de maman et D de la maternité. C’est la première fois que nous, les quatre sœurs Holt étions réunies. En tant qu’ainée, on m’avait confié la nouvelle-née le temps de la photo. Bailey, qui était deux ans plus jeune, m’avait un peu jalousé. Quant à Charleen, qui avait quatre années de moins que la cadette, elle prenait conscience qu’elle n’était plus la plus jeune de la famille. Cette photo était la première qui nous rassemblait toutes ensemble, les quatre sœurs Holt, fille de George, cultivateur et éleveur, & Babette, assistante sociale, Holt héritier de la ferme familiale qui occupait quelques terres de Lower Hutt.

C’est avec un sourire que je reposais, quittait le cadre de mes yeux pour finir la distance qui me séparait de mon canapé. Installé dans ce dernier, je repensais à mon enfance sur les terres de mes ancêtres. Grandir à la ferme m’avait appris les valeurs du travail, donné l’amour des bêtes et offert un terrain de jeux immense pour l’enfant plein de vie que j’étais. Je m’en étais écorché des genoux à courir et grimpés partout. Mes meilleurs souvenirs. En plus avec le temps, j’avais eu la chance d’avoir de gagner de super compagnons de jeu puisque je n’étais pas resté fille unique longtemps. Et comme j’étais l’aîné, il n’était pas rare que je revendique le droit de décision. Quand j’y pense aujourd’hui, heureusement que j’avais des sœurs adorables, elles auraient me trouver insupportable. Surtout qu’elles ont été les premières à devoir supporter mon humour de bas étage. Bon, de temps à autre, nous étions rejointes dans nos jeux et découvertes par les enfants/adolescents que nous hébergions en tant que famille d’accueil. Il n’y a pas à dire, ce sont toutes mes années à la ferme qui était à l’origine de beaucoup de ma vie d’aujourd’hui. Je devais beaucoup à mes parents et chaque jour, je leur en étais reconnaissante.

Quant à mes sœurs, elles n’étaient pas simplement mes compagnons de jeu, elles étaient tout pour moi. Je revendiquais souvent mon droit d’ainée pour les faire râler, mais en vérité, je prenais ce rôle très au sérieux. Les protégées étaient mon devoir, leur faire plaisir aussi. J’aimais les faire rire et chose étonnante, j’y arrivais. Je ne supportais pas que l’une d’elles soit triste et je voulais les protégés de toute déception, même si je savais cela impossible. Alors, lorsqu’à l’âge de dix-sept ans, je compris qu’aucun de mes parents n’était compatible pour venir en aide à Charleen, j’exigeais de moi aussi passé les tests nécessaires. Les résultats tombèrent, je pouvais lui donner un rein. Et si je craignais beaucoup le fait d’être endormie pour être opéré, je n’hésitais pas une seconde à lui donner ce bout de moi-même pour sauver ma sœur. Et si aujourd’hui, je lui faisais encore de temps un autre un petit chantage sur le ton de l'humour à ce propos, j’espérais qu’elle savait que jamais j’avais regretté ce choix et quand vérité, j’étais fière qu’elle ait surmonté cette épreuve. En fait, j’espérais que tous mes proches sachent combien j’étais fière de faire partie de leur famille.

En parlant de famille, mes pensées se dirigeaient vers le jour où j’avais appris que je ne pourrais pas donner naissance à la mienne. Ça faisait quelques années que l’on se fréquentait lui et moi. Je l’aimais et lui éprouvait de même pour moi. Et comme beaucoup de couple de notre âge, nous avions dans l’idée d’avoir notre propre famille. Je me voyais même leur transmettre les valeurs que m’avaient transmises mes parents, fière de ces dernières. Mais les mois passaient et aucun embryon ne trouvait sa place dans mon ventre. Bien que beaucoup nous disaient qu’il était parfois juste une question de temps. Nous avions fini par consulter le corps médical. Ils nous firent toute une batterie de tests qui finirent par nous apprendre que j’étais dans l’incapacité de donnée vie. Ce fut un choc pour moi. Si l’idée avait commencé à germer dans mon esprit depuis quelque temps, j’avais refusé d’accepter que ça puisse être une des vérités. Et pourtant. Ça l’était. Notre couple avait résisté à cette nouvelle. En-tout-cas pendant un temps. J’avais changé après cette nouvelle. Je le savais. M’étais renfermé, caché encore plus derrière l’humour (bien que toujours aussi mauvais). Il avait résisté un temps, puis avait fini par partir. Je ne l’avais pas retenue. Pourquoi l’aurais-je fait alors que je ne pouvais lui offrir ce qu’il souhaitait le plus ?

Depuis, les histoires d’amour n’avaient pas été mon fort. J’avais rencontré pas mal de rencard, quelques courtes histoires, d’autres plus longues, mais toutes avaient pris fin. Pourtant, avec le temps, j’avais accepté l’idée de ne pas mettre au monde ma famille. Mais il y avait d’autres moyens d’avoir une famille. Je le savais, mais dans tous ceux que j’avais croisés depuis lui, aucun n’avait été celui avec qui je voudrais sauter le pas. Et puis il a quelque temps, j’ai réalisé que je n’étais pas obligé d’attendre quelqu’un pour devenir maman et j’avais commencé à faire les papiers pour accueillir un enfant dans mon foyer. Je n’en avais pas encore parlé au mien, je ne voulais pas essuyer leur regard compatissant si ça échouait, mais je m’étais promis de leur en parler si j’avais un jour une réponse positive. C’était sur cette pensée que j’étais parvenue à la dernière gorgée de mon infusion. Je fermais les yeux à instant, priant qui de droit pour que mon dossier soit accepté, j’étais prête, et même si je serais son seul parent, je ne serais pas sa seule famille. Je le savais.

C’était sur cette pensée que je me levais du canapé, prenant la direction de ma cuisine. Cette fois, je m’arrêtais devant la photographie de mon meilleur ami. Un charmant berger australien rouge merle qui m’avait accompagné dans ma vie pendant quatorze années. Que ce soit chez moi, lors de mes vacances, lors de mes activités sportives, et même au boulot. Vétérinaire de métier, je pouvais me permettre de prendre mon compagnon avec moi, surtout quand je passais les fermes. En bon chien de berger, il s'était même parfois montré très utile. Bucky était arrivé au bout de sa vie, il y a quelques moins et m’avait quitté. Je sais, pour certains, ce n’était qu’un animal, mais pour moi, c’était mon meilleur ami, ma famille et sa perte avais laissé un vide dans mon cœur. Certains m’avaient conseillé de reprendre un autre animal, mais je ne m’y étais pas encore résolu. Et puis j’avais déjà commencé les démarches d’adoption avant ça, je n’étais donc pas sûr d’avoir l’énergie de me consacrer encore à l’éducation d’un nouveau compagnon. Notamment, si le dossier était accepté. En outre, je ne pourrais jamais remplacer Bucky, il était irremplaçable. Mais un jour, je pourrais peut-être accepter de ravoir un compagnon à quatre pattes. Et qui sait, il deviendrait peut-être le meilleur ami de l’enfant que l’on voudrait bien me confier.

C’est sur cette pensée que je plaçais ma tasse au lave-vaisselle et monter me coucher. Parce qu’aujourd’hui, j’avais eu trente-huit ans et que j’étais au début d’un nouveau chapitre de ma vie.