and truth be told...
tw : maladie, décès.
○ Caëlyan est né à Christchurch, sur l’île du Sud, le jour d’Halloween 1988. Il est le deuxième d’une fratrie de trois garçons. Il tient des origines américaines par son père, irlandaises par sa mère, mais à première vue, il n’est rien d’autre que néo-zélandais.
○ Il a grandi dans un cercle familial assez disproportionné où tous les espoirs étaient placés dans l’aîné, et tous les encouragements dans le cadet. Étant entre les deux, on n’a jamais appuyé ni descendu ses choix, ce n’était jamais suffisant, mais toujours mieux que rien.
○ Sans réelle attention de la part de ses parents, et sans lien fraternel concret, il s’est tout de suite trouvé le goût de l’indépendance. Il n’a pas voulu aller aux mêmes écoles que ses frères, ni entendre les avis de ses proches sur ses choix d’études. Il est devenu très vite l’électron invisible aux réunions de familles qu’il préférait éviter, n’y trouvant pas grand intérêt.
○ En marge de l’allure bienséante de la famille Lawson, il a toujours été celui qui disait non quand on attendait de lui un oui. Le genre à se présenter en jean et blouson en cuir aux réceptions qui demandaient costume-cravate. Celui qui bossait pour s’acheter une guitare quand ses frères demandaient à emprunter la maison de vacances pour le week-end. Parfois, il se trouvait si peu de points communs avec le reste de sa famille que cela en devenait inquiétant. Il avait l’impression d’être le seul à percevoir les couleurs dans un monde en noir et blanc.
○ Il tint tête une nouvelle fois au chemin qu’on tentait de lui tracer, et il s’orienta vers une carrière scientifique à l’opposé du cercle juridique des Lawson. En résumé, la petite famille parfaite était composée de Judy, la mère juriste, de Sean, le père procureur général, de l’aîné : Michael, avocat, du cadet : Sam, futur avocat… et de Caëlyan, celui dont on ne savait que trop rien, mais qui était là quand même.
○ Le nouvel étudiant choisit son université sur l’île Nord, volontairement. Son besoin de s’éloigner de ce carcan familial se faisait plus que sentir. Il pouvait ainsi faire ce qu’il aimait, sans subir les remarques des autres.
○ Au début de ses études supérieures, il apprit que ses parents se séparaient, mais cela n’eut pas vraiment d’impact sur lui. De toute manière, ils étaient calés niveau procédures juridiques, alors il ne s’en faisait pas pour eux.
○ Doué, Caëlyan valida ses années sans problème. Véritable passionné par la biologie et plus précisément encore, la microbiologie, il demanda et fut accepté dans un Master spécialisé en bactériologie dans ce domaine.
○ Lorsqu’il valida son dernier semestre avec brio, il n’eut pas le temps de se réjouir qu’il reçût un appel de sa mère. Étrange, pourtant, il ne lui devait pas d’argent... Cela pouvait paraître cruel, mais il n’avait jamais de véritables nouvelles, à part en cas de besoin. Sa famille était loin d’être parfaite, et même s’il ne se sentait pas fortement lié à ses proches, il ne pouvait s’empêcher d’y être attaché. Ce fut certainement pour cela qu’il fût si touché par l’annonce que Judy lui fit ce jour-là : son père avait fait un infarctus, et elle souhaitait réunir ses fils autour de lui, à sa sortie du bloc opératoire.
○ Caëlyan répondit présent. Et il fut le seul. Michael, pris dans un procès important, et Sam, en Australie pour ses études, n’avaient pas pu venir. Judy elle-même brillait par son absence, après tout, elle n’était plus que l’ex-femme et avait fait sa part des choses en appelant tout le monde.
○ Au réveil de son père, l’étudiant dû faire face aux annonces en chaîne des médecins : hémiplégie, aphasie, et la perte d’autonomie qui allait avec. À 24 ans, le jeune Lawson se retrouvait seul face au corps médical qui le martelait d’insistance pour savoir qui devait signer le dossier et accepter la responsabilité de Lawson Père pour la suite des évènements. Au bout de 48 heures, ayant tenté de joindre chacun de ses frères et sa mère, en vain, Caëlyan apposait sa signature sur les papiers, prenant en charge son père à partir de cet instant, et retirant sa candidature en doctorat par la même occasion.
○ À nouveau sur l’île du Sud, dans la grande maison familiale où il avait grandi, Caëlyan se mit à réorganiser sa vie pour en redonner une à son paternel. Il se démena pour trouver tout ce dont il avait besoin : entre séances de rééducation, kinésithérapeute, orthophoniste, psychologue… Il fit même aménager le rez-de-chaussée pour améliorer la mobilité de Sean.
○ Les années passaient lentement, la famille Lawson n’avait plus rien de sa superbe, ou du moins, Sean et Caëlyan n’en faisaient plus partie. La mère et ses deux autres fils exerçaient en Australie dorénavant et ne retournaient en Nouvelle-Zélande que les 29 février d’une année non-bissextile.
○ L’état de son père s’améliorait peu à peu, au fil du temps, il regagnait en autonomie et Caëlyan pu se reconcentrer sur sa carrière en suspens. Cette fois, il avait les encouragements de Sean, qui, dans sa convalescence, avait enfin fait la connaissance de son propre fils. Ce dernier trouva son premier poste de technicien de laboratoire biologique, à Christchurch.
○ Lorsqu’il eut 28 ans, son père insista pour qu’il prenne un appartement, il ne voulait pas que son garçon continue à sacrifier sa vie à ce point pour lui. Après hésitation et moult tentatives de marchandage, le fils accepta.
○ Quelques mois plus tard, l’ancien procureur général voulu une nouvelle fois encourager Caëlyan. Il contacta un ancien collègue et transmit son curriculum vitae au laboratoire médico-légal de la police néo-zélandaise. Il connaissait l’attrait qu’avait son fils pour la police scientifique.
○ Lorsqu’il reçut l’offre d’emploi de la part de la NZ Police, le jeune Lawson comprit l’ampleur des efforts que son père avait fait pour lui. Au même moment, il réalisait qu’il avait formé un vrai lien avec ce dernier, et que, pour une fois, il était considéré.
○ Son badge d’expert scientifique épinglé sur sa blouse, Caëlyan atteignait les 30 ans avec fierté. Consciencieux, appliqué, il n’eut aucun mal à se faire une place au sein de ce nouveau laboratoire. Sa vie professionnelle et personnelle avait atteint un certain équilibre malgré la distance courtoise avec la seconde partie de la famille.
○ Le 2 Janvier 2021, alors qu’il mettait un échantillon d’analyse sous scellé, il vit entrer deux de ses collègues dans le laboratoire, le visage grave et l’air déconfit. Il crut d’abord à une mauvaise blague pour la nouvelle année et puis la seconde d’après, il comprit que quelque chose de grave venait de se passer lorsque le directeur de recherche passa à son tour le seuil de la porte, un téléphone entre les mains.
○ Une nouvelle fois, face au même médecin, dans ce même hôpital, Caëlyan devait signer des papiers. On ne lui demandait plus d’engager sa responsabilité vis-à-vis de son père, non, on lui demandait cette fois de parapher l’acte de décès de celui-ci. Un nouvel infarctus avait mis un point final à l’existence de Sean Lawson.
○ Debout devant le cercueil, Caëlyan observait en silence sa famille qui s’était réunie entièrement pour veiller son père. Outre le fait de trouver cela extrêmement étrange de les voir dans la même pièce, il trouvait cela profondément hypocrite de leur part. Pas une seule fois, l’un d’entre eux n’était venu aider ou prendre des nouvelles de Sean à sa sortie de l’hôpital presque dix ans plus tôt, alors les voir verser des larmes et inonder l’endroit de leurs jérémiades… C’était de trop.
○ Avec beaucoup d’efforts, Caëlyan échappa aux conversations et évita même soigneusement de rester seul avec sa mère et ses deux frères. Il profita d’un moment de calme pour se recueillir auprès de son père. Cela devait être la première fois qu’il portait une chemise et une veste de costume en présence de sa famille, ironie du sort. Cela ne l’empêchait pas de mettre ses mains dans ses poches et d’avoir toujours son air récalcitrant au milieu de cette ambiance bienséante que formaient les Lawson.
○ Mué dans son silence, se demandant s’il aurait pu faire plus, s’il aurait pu être là, ce qu’il n’avait pas pu dire, ce qu’il aurait dû dire… Il ne remarqua pas que l’une de ses tantes réunissait la famille autour du cercueil pour les derniers hommages. Il sursauta presque quand il sentit qu’on lui touchait l’épaule. Il regarda la sœur de son défunt père un moment avant qu’elle ne lui demande de s’écarter accompagné d’un : « Excusez-moi, vous êtes de la famille ? » Caëlyan eut un moment de flottement à cette question. Ses yeux parcoururent la salle remplie des autres membres de la famille présents, il croisa le regard de sa mère, de ses frères, qui ne réagissaient pas et eut alors un rire nerveux qui traduisait bien sa colère de l’instant. Le reste ne fut plus très clair dans son esprit, une chose plutôt rare se produisit : il perdit son sang-froid. Dans les minutes qui suivirent, il mit tout le monde à la porte en ponctuant la chose par quelques jurons jusqu’à ce qu’il soit seul. Sa patience avait atteint ses limites, les personnes qu'il avait été forcé d'appeler 'famille' venaient de franchir un point de non-retour dans son esprit.
○ L’enterrement passé, Caëlyan prépara alors ses valises dès le lendemain. Après l’annonce du décès de son père, il avait demandé à être muté sur l’île du Nord, plus rien ne le retenait à Christchurch et son feu paternel savait que ce n’était qu’une question de temps pour que son fils retourne à Wellington.
○ En un éclair, il laissa tout derrière lui, ne prit pas soin de dire au revoir aux 'proches' encore en ville après l’enterrement, ce qui ne devait pas changer grand-chose pour ceux-ci pour qui il était un étranger.
○ Aujourd'hui, Caëlyan, qui a abandonné ce prénom pour sa contraction : Caël, comme l’appelait son père, a repris ses fonctions de technicien scientifique auprès de la police de la Nouvelle-Zélande. Il a emménagé sur West Bay, dans un duplex et compte bien reprendre, encore, le cours de sa vie. Recommencer à zéro, sans attache, était pour lui, la meilleure option et il compte bien saisir sa chance.
en bref ○ Caël a toujours été quelqu’un de très indépendant, par la force des choses. il n’a jamais eu un sens de la famille très prononcé, et n’a jamais eu un exemple véritable de ce que c’est. Il est le quiet kid qu’on remarque peu, mais qui sait se rappeler au monde dès que nécessaire. un vrai passionné par la science, il en a fait son métier. amoureux de la musique, il joue de la guitare, du piano et de la batterie.
Caël est quelqu’un qui paraît froid aux premiers abords, et sans se mentir : il l’est. il est d’un naturel méfiant puisqu’il fait et a toujours fait face à tout, seul. obstiné, impulsif et casse-cou sur les bords, il fonce souvent tête baissée quand il le juge nécessaire. ce voile sombre cache soigneusement son coté avenant et altruiste qu’il ne laisse entrevoir que plus rarement. pourtant, il est cette personne bienveillante, prévenante, qui aime aider et faire rire les autres. un être solaire qui s’ignore, et qui préfère passer sous silence cette facette protectrice.