nuit au musée (robin)

Aujourd’hui, je suis de repos, comme ma sœur et Elliot qui est en vacances. Forcément, avec ce timing favorable, j’ai eu envie de proposer une sortie à cinq : elle, Harper, mes deux garçons et moi. Ce n’est pas quelque chose qui arrive souvent, mais maintenant que ma nièce commence à s’éveiller de plus en plus, c’est le genre de rendez-vous que nous allons pouvoir faire encore et encore. Bien sûr, elle reste encore un peu jeune pour comprendre ce qui se passe vraiment autour d’elle. Mais pour créer des liens avec elle, il n’est jamais trop tard et cette sortie fait plaisir à ses cousins. À moi aussi, je ne rechigne jamais à l’idée de voir Robin et ma nièce. Il y a deux-trois jours, j’ai proposé à ma sœur que nous nous retrouvions au musée – après une idée lancée par mon aîné – et elle accepte. Alors après un petit-déjeuner en bonne et due forme, j’active un peu les garçons pour que nous soyons prêts dans les temps. Le rendez-vous est pris en fin de matinée et ce n’est pas plus mal, car à cette heure-là de la journée, la circulation est moins dense et c’est donc sans trop de retard que nous arrivons sur place. Pour être honnête, nous sommes même à l’heure ! Quelque chose qui devient de plus en plus rare à mesure que la famille s’agrandit. Pour l’instant, j’en suis à deux, mais rien ne dit que je vais m’arrêter là. Rassurez-vous, je ne suis pas une poule pondeuse. Néanmoins, ce rôle de mère est quelque chose que j’aime beaucoup. C’est d’ailleurs quelque chose qu’on ne comprend qu’une fois qu’on le devient. Bref.. ce n’est pas de ça dont il est question aujourd’hui. Les deux fauves descendus de la voiture, il se dirige avec hâte vers l’entrée de l’établissement. À l’intérieur, nous retrouvons ma sœur et sa famille. Je salue chaleureusement la première et gazouille à destination de la seconde. « Tu travailles ici et pourtant, je crois que c’est la première fois que je viens. » Ou alors, je ne m’en souviens pas. Mais ce serait plutôt dommage d’en arriver à ça. « Ce sera autant une découverte pour eux que pour moi. » Et autant dire que les deux garçons sont en forme. Leo le sera peut-être moins dans quelques minutes, c’est d’ailleurs pour cela que je me suis armée de sa poussette s’il désire se reposer un peu. « Comme tu connais plutôt bien l’endroit, tu pourras facilement être notre guide. » Je dis cela sur le ton de la plaisanterie. Elle est en repos, alors je comprendrais parfaitement qu’elle veuille juste être là pour le plaisir.

Pour vendre son travail, ou au moins pour remercier les personnes qui viennent le voir, Robin n'est sûrement pas la plus douée. Peut-être que certaines personnes sont passionnées par l'art et par l'histoire, deux points qui sont représentés au sein d'un musée. Néanmoins, pour ça, il faut avoir une certaine facilité financière, puisque je doute que tout le monde dans cette ville puisse se permettre d'acheter un billet d'entrée chaque semaine. « Halloween de cette année arrive à grands pas. S'il y a quelque chose de similaire, dis-le-moi et nous passerons sûrement y jeter un coup d'œil. » Le temps passe vite et nos plannings ne nous permettent pas toujours de pouvoir prendre du repos pour ce genre d'activité. Pourtant, j'adorerais venir ici plus souvent et découvrir le travail qu'elle fait. « Je te suis. » Les billets achetés, toute la petite troupe prend la direction qu'indique ma sœur. Ici, c'est elle qui maîtrise et comme elle accepte de jouer les guides – en quelques sortes, autant en profiter ! « Comment va ma nièce préférée ? » Dis-je, tout en regardant la petite fille dans la poussette. Comme j’ai pu le faire avec mes garçons – même encore aujourd’hui, j’offre de larges sourires à Harper dans le but d’avoir une réaction de sa part. Mon attention se porte ensuite sur les tableaux accrochés aux murs et à mes deux garçons qui se baladent dans la pièce, à une distance raisonnable de nous. Ils semblent s’épanouirent devant chaque œuvre d’art. Ils ne comprennent pas vraiment ce qu’il y a devant eux, mais ils sont jeunes et s’extasieront certainement devant tout ce qu’ils verront aujourd’hui. « Donc toi, si je ne me trompe pas, tu donnes une seconde vie à des œuvres d’art ? » Si nous nous rapprochons sur différents points, ce n’est pas vraiment le cas au niveau de nos métiers. La jeune femme est tournée vers l’art, alors que moi, je ne suis pas manuelle pour un sou. Au moins, indirectement, ça nous permet de découvrir des choses pour lesquelles nous ne nous serions jamais intéressées. « Est-ce que celles-ci en font partie ? » Si elle a la tâche de faire la visite privée aujourd’hui, sans avoir trop le choix, autant qu’elle en profite pour obtenir quelques compliments. De ma part, mais surtout de la part de ses neveux. Si Elliot apprend que sa tante a contribué à ces tableaux, alors il y a de fortes chances pour qu’il le cri sur tous les toits dans les minutes à venir. De la publicité gratuite, ce n’est sûrement pas une mauvaise chose. En parlant du petit garçon, je le rappelle à l’ordre lorsqu’il s’apprête à franchir la porte de la seconde salle.

Nous avons deux métiers bien différents, mais cela ne nous empêche pas d'échanger à ce sujet. Si nous évoluons dans des environnements différents, nous nous rapprochons sur le fait que nous faisons quelque chose qui nous passionne. Quand j'ai quitté mon poste de chargée de recrutement, juste avant la naissance d'Elliot, je ne pensais pas me retrouver aussi vite dans quelque chose que j'aimerais. Mais en tant que serveuse, et maintenant en tant que propriétaire, je me suis découverte certains talents. Je suis plutôt douée avec les gens et j'aime pouvoir enrichir mon vocabulaire, ainsi que mon livre de recettes, en côtoyant ceux qui travaillent sur l'élaboration des friandises proposées la journée. Robin, ce qui la passionne, ce sont les œuvres d'art et Halloween, ce que je ressens parfaitement quand elle parle de ce qu'ils ont proposé au musée l'an dernier pour l'occasion. « J'aime beaucoup cette idée. Avoir des passes-droits me donne l'impression d'être une vraie célébrité. » Dis-je, alors qu'elle propose de nous offrir des tickets si jamais cela se reproduit. Des échanges de bons procédés comme ça, c'est quelque chose qui arrive assez souvent entre nous. Par exemple, si elle passe au café certains jours, alors je lui offre sa consommation – café et friandises. Il est certain que ce n'est pas comme cela qu'est censé fonctionner une entreprise, mais si je ne le fais pas avec la famille, alors avec qui pourrais-je le faire ? Alors que les deux garçons sont occupés un peu plus loin, je m’intéresse à ma nièce. Robin m’apprend que la petite fille fait ses nuits et cela la réjouit. « Profitez-en, ça ne dure pas toujours. » Dis-je, quelque peu amusée. Il y a des périodes un peu plus tard où le sommeil peut se dérégler. En réalité, sans réelle raison, cela arrive assez souvent, à des âges variés. Parfois ça reprend un rythme dit normal rapidement et parfois non. Comme on dit, il faut dormir en même temps que bébé. Quand ils sont plus petits, c’est dès qu’on en a l’occasion et quand ils grandissent, c’est sur la durée des nuits qu’ils nous accordent. En sachant que les grasses matinées sont souvent rares avant plusieurs années, même si chaque enfant est différent. Elliot et Leo s’agitent un peu, pressés de passer à la pièce suivante, alors ça me fait sortir de mes pensées et je me concentre de nouveau sur le travail de ma sœur. « C’est très joli. » Je ne sais pas si j’aurais la patience de faire ce qu’elle fait et je crois surtout que j’aurais peur d’abîmer l’œuvre originelle. « Ce n’est pas trop compliqué pour vous de jongler entre vos boulots et Harper ? » Je suis la plus jeune et pourtant, je suis celle qui se fait du soucis, sûrement parce que je suis déjà passée par là. Pourtant, je ne devrais pas : être mère, c’est ce que Robin a toujours voulu et à en voir comment se porte la petite fille, elle s’en sort à merveille.

Avoir des billets gratuits pour le musée, ce n’est sûrement pas l’événement le plus prestigieux de l’année, cependant ça reste toujours bon à prendre. Qui sait, peut-être que grâce à cela, je finirais par arriver au sommet un jour. En réalité, j’en doute, mais j’ai bien le droit de rêver un peu. En cherchant un peu, je pourrais peut-être avoir des places dans certains événements, sportifs ou musicaux, grâce au café. Néanmoins, je ne me suis jamais renseignée sur le sujet, principalement parce que ma vie est plutôt bien remplie en ce moment. Arrivés dans cette première salle, nous abordons différentes choses : le boulot de Robin, la petite fille dans sa poussette et son rythme de sommeil. Pour les enfants, souvent ça va et ça vient : c’est une chose qu’il est compliqué de gérer – pour les adultes aussi quand on y pense bien. « Ne m’en parle pas.. je me demande d’où leur vient toute cette énergie. » Pour Leo, ça s’explique avec la ou les siestes qu’il fait encore. Mais pour Elliot, ça reste un mystère. Peut-être qu’enfant, Archie était un peu hyperactif, ou alors, c’est une partie de moi que j’ignorais jusque-là. Ou alors, ça vient de moi. Je n’ai jamais été molle, mais je me suis toujours considérée comme une enfant calme. « Une partie de moi a hâte qu’ils soient adolescents pour avoir le droit à une petite grasse matinée. » Et encore, je ne crois pas être en position pour pouvoir me plaindre. Je suis bien entourée et il n’est pas rare que ma famille ou Marley se proposent pour prendre l’un des deux, voire même les deux garçons, me laissant ainsi toute l’occasion de dormir plus longtemps – quand mon corps le permet, car il faut croire qu’avoir des enfants, ça abîme un peu l’horloge interne. Alors que mon attention se porte sur les tableaux face à nous, je ne peux m’empêcher de m’interroger sur le rythme qu’ils ont trouvé avec l’arrivée de la petite fille. Par chance, Matthew peut facilement s’adapter et Robin a fait le choix de réduire un peu ses activités à côté de son boulot pour pouvoir passer plus de temps avec Harper. « Oh oui ! Nous pouvons remercier ces gens qui acceptent de passer des journées entières entourés d’enfants en bas âge. » Dis-je, alors qu’elle évoque la crèche. Ça aussi, ça permet d’avoir un peu de temps pour soi et c’est important, même si c’est un moyen qui est souvent utilisé quand les parents sont au travail. Le tour de la pièce fait, nous pouvons maintenant passer à la suite. « C’est bon les garçons, vous pouvez y aller. » Ni une, ni deux, Elliot se lance dans la deuxième salle et il ne faut pas longtemps à Leo pour imiter son grand-frère. Je n’ai pas prémédité de les avoir – le deuxième encore moins –, mais finalement, je crois que leur différence d’âge est idéale. Elliot se débrouille seul pour beaucoup de choses maintenant, même s’il a toujours besoin que je sois dans les parages, et Leo adore prendre exemple sur lui. Avec un peu de chance, il s’éveillera plus rapidement et voudra à son tour faire les choses comme un grand.

Remettre la faute sur le père, surtout quand il n’est pas là dans mon cas, c’est plutôt simple et je pense que personne ne m’en voudra. Même si finalement, qu’ils soient actifs à leur âge, ce n’est pas bizarre. Ils découvrent encore le monde et ont hâte de pouvoir faire beaucoup de choses, en très peu de temps, de peur que ce ne soit plus possible le lendemain. Quand je les couche le soir, ce sont bien des adorables garçons que je retrouve. Et puis, après une journée riche en émotions, j’ai la chance de les voir dormir rapidement et d’une traite jusqu’au petit matin. Certes, je n’ai pas la chance de pouvoir faire de grasse matinée, mais je ne peux pas trop en demander, ça reste des enfants. Peut-être que plus tard, les choses seront différentes, mais ça voudra aussi dire que mes petits garçons ne seront plus si petits que ça et je ne suis clairement pas prête pour cela. De plus, comme le souligne ma sœur, l’adolescence n’est pas toujours une période facile. Avec le décès de notre père et l’aide que nous avons apporté à notre mère, on ne peut pas vraiment dire que nous avons causé beaucoup de problèmes en vivant la notre, mais nous avons vu celles de nos frères et sœurs – celle de Noah en particulier – et je ne suis pas sûre d’y être préparée encore.
Nous passons à la deuxième salle du musée et il ne faut pas longtemps à Elliot pour courir jusqu’à l’une des œuvres de la pièce, une momie. Je ne suis pas certaine qu’il sache vraiment de quoi il s’agit, sinon il ne tournerait pas autant autour. Pour l’instant, je le laisse faire. Lorsqu’une catastrophe se rapprochera, alors j’interviendrais. En attendant, je porte mon attention sur le buste que Robin me montre. « C’est vrai que ton métier te permet de voyager, j’ai tendance à l’oublier. » La Nouvelle-Zélande a une histoire, mais je suppose qu’on en a vite fait le tour et qu’il est intéressant de voir d’autres choses. Et puis, ajouter des voyages à son quotidien, c’est loin d’être déplaisant. Surtout quand ça nous permet de rencontrer l’amour de notre vie – si je ne me trompe pas, c’est comme cela qu’elle a fait la connaissance de Matthew. « C’est quelque chose que j’ai laissé de côté à la naissance de Leo. Je devrais peut-être changer cela et offrir aux garçons la possibilité de découvrir plus de choses, plus de pays. En dehors des musées. » Je ne suis pas milliardaire, mais je ne suis pas non plus la plus à plaindre en terme d’argent. Alors je pourrais facilement m’en servir pour organiser des voyages plusieurs fois dans l’année, même si ce n’est que pour quelques jours, une semaine par exemple. L’Australie n’est pas très loin et pourtant, Leo n’a jamais quitté le continent. Pire encore, il n’a pas quitté Wellington et ses environs. Avec le retour d’Eden dans ma vie et son arrivée dans celle des garçons, c’est quelque chose qui pourrait changer facilement : je ne serais pas contre l’idée de retourner en Angleterre et d’avoir l’institutrice comme guide. Même si avec les récents événements, elle préférerait peut-être rester loin de ce pays quelques semaines ou mois, le temps que les choses se tassent un peu avec son ex-femme.

À mesure que nous avançons dans ce musée, j'apprends des choses. Sur l'histoire principalement, mais je redécouvre aussi certains points liés à ma sœur. De tous les Wade, nous avons un lien un peu particulier, sûrement parce que nous sommes les deux aînées et que nous nous sommes retrouvées plus ou moins dans la même situation quand nous avons dû prendre soin des plus jeunes. Ce n'est pas comparable au lien qu'ont Lou et Lane, mais il est suffisamment important pour avoir le mérite d'être là. Dans cette deuxième pièce, Robin évoque un buste. À la fois, je l'écoute et je surveille Elliot du coin de l'œil, dans l'espoir qu'il ne fasse pas de bêtises avec la momie. En plus d'être manuel, ce métier a permis à la jeune femme de voyager. Une chose qui n'est sûrement pas négligeable quand on signe un contrat de travail. Néanmoins, cette opportunité ne s'est pas présentée depuis un certain temps et avec l'arrivée de Harper dans sa vie, ça se comprend. Avec Leo, c'est un peu pareil et encore, maintenant il a un an. « Nous sommes déjà allés en Australie, sur les îles Chatham, en Tasmanie et dans quelques villes sur l'île du Sud. » Dis-je, alors qu'elle me questionne sur les voyages que j'ai eus l'occasion de faire avec Elliot. « Le dernier voyage en date est celui pour notre séjour au Canada, pour les fêtes de fins d'années. » C’est là que j’ai appris pour Leo, avec tout le reste de la famille – pour cette grossesse surprise qui en était déjà à six mois. « Je n’ai jamais pris le risque de voyager loin, surtout en étant une maman célibataire. » Je pense pouvoir dire que j’ai bien élevé les garçons – du moins pour l’instant –, malgré le fait que j’étais seule. Mais voyager avec un enfant, c’est beaucoup de charge mentale et il n’est pas négligeable de pouvoir se reposer un peu sur quelqu’un d’autre. Maintenant que j’ai énoncé ces quelques destinations de voyage, je me rends compte que ma liste n’est pas forcément plus longue. « Je ne me souviens peut-être pas de tout, mais je ne crois pas en avoir fait beaucoup plus seule. » Dis-je, quelque peu amusée. « Je suis allée en Angleterre pour voir Eden et aux États-Unis où j’ai eu l’occasion de voir Noah. » Ma maison est ici et je n’ai jamais ressenti le besoin d’aller ailleurs trop souvent. Peut-être que l’idée de pousser mes enfants à voyager n’est pas une si bonne idée.. ou à l’inverse, ça pourrait leur permettre de se faire le propre avis et de ne pas simplement se baser sur mon expérience.

Visiblement, Elliot garde des souvenirs de nos voyages. Pour la Tasmanie du moins. Pour le reste, je ne serais pas surprise d’apprendre qu’il ne s’en souvient pas. Il était petit et à cet âge là, il est parfois compliqué d’avoir des souvenirs ou au moins d’en avoir des bien construits. Avec lui, je n’ai jamais eu de réelles difficultés, sûrement parce que je faisais en sorte d’être préparée et de l’être bien en avance. Avec deux enfants, ça serait peut-être pareil, mais comme le souligne Robin, ça doit être naturellement un peu plus compliqué. Je suppose que c’est une habitude qui doit se prendre. Je ne pense pas être la seule mère célibataire, à avoir deux enfants, alors il doit bien exister un moyen de voyager sereinement. Personnellement, même si l’idée de leur faire découvrir le monde, ou au moins les environs, me traverse l’esprit, je pense attendre encore un peu avant de me lancer. En terme de logistique, ce sera bien plus simple lorsque Leo sera propre, au moins la journée. Avant ça, c’est dingue à quel point les bagages avec un enfant sont grandes. Alors forcément, devoir préparer au moins trois valises et être seule pour les promener, en plus de faire suivre es garçons, ça fait beaucoup. Et si jamais, malgré ça, je décide de faire un voyage avant les deux ou trois ans du garçon, alors je devrais m'assurer d'être accompagnée et à bien y réfléchir, je suis presque sûre que je pourrais facilement trouver des personnes pour ça. Marley en serait sûrement ravie, Lou aussi quand elle aura des vacances. Et là, je ne prends pas encore en compte la femme qui partage ma vie, enfin.. si on peut vraiment dire cela. Si je n'arrive pas encore à mettre de mot sur notre relation, c'est peut-être un peu trop tôt pour lui proposer de faire un voyage avec mes enfants. L'évocation de Noah pousse la curiosité de ma sœur à ce sujet. « J'avais dû y aller une semaine, ou peut-être dix jours. Étant sur place, je me suis dit que je pouvais bien passer le voir. » Je crois que ma visite lui a plu, même si sentimentalement parlant, il ne s'est pas vraiment attardé pour me remercier. À l'inverse, si je ne l'avais pas fait, je suis presque sûre que j'aurais eu le droit à de nombreuses remarques. Comme quoi, il est plus facile de remarquer ce qui est oublié que d'être reconnaissant des efforts faits. Alors qu'Elliot – et par procuration Leo – lâche des yeux la momie, nous en profitons pour passer à la pièce suivante. Arrivés dans la salle destinée à l'art Maori, je ne peux m'empêcher de laisser mes yeux se perdre sur les différents éléments qui s'y trouvent. « C'est un univers que j'aime beaucoup. » Sûrement parce que ça fait partie de notre histoire, plus ou moins. Ce peuple est originaire de la Nouvelle-Zélande, tout comme nous. Je sais qu'enfant, je me plaisais parfois à dire que j'avais un grand-père Maori pour expliquer mon teint halé.

Dans une famille nombreuse, quand les enfants s'en vont à plusieurs coins de la planète, ça permet parfois de faire quelques voyages. Ce n'est pas avec l'attention de voir Noah que je suis partie aux États-Unis, mais je ne pouvais pas me résoudre à y aller sans faire une escale pour le voir. Il a toujours été l'enfant le plus turbulent de la famille et en voulant être le centre de l'intérêt, il m'a quelque peu effacé. Enfant, je n'ai jamais vraiment compris pourquoi il ressentait ce besoin de toujours sortir du lot, mais avec les années, ça m'est passé et aujourd'hui, même si ce n'est pas avec lui que j'entretiens la meilleure relation, il reste mon frère. « Pas vraiment. Il était encore novice. » Ne l'est-il plus aujourd'hui ? C'est une bonne question ça. Je suppose que s'il ne travaille plus à mi-temps au café, c'est que les choses roulent plutôt bien pour lui. Je ne tire que des hypothèses, puisque nous ne sommes pas vraiment du genre à nous raconter nos vies en détails. En réalité, depuis qu'il a porté un jugement sur mes fréquentations et comment je gérais ma vie, je ne me confie plus à lui. C'est sûrement un peu radical comme solution, mais ça nous évite de retomber dans une telle situation. Passé ce sujet, nous arrivons dans une nouvelle salle, celle dédiée à l'art Maori. Il ne faut pas longtemps pour comprendre que cette pièce m'émerveille. Ce n’est pas l’art le plus connu et pourtant, je trouve cela bien plus magique que ce que nous avons vu jusque là. C’est sûrement lié à nos racines et à ce que cela représente pour notre pays. Robin semble du même avis que moi, à un degré différent puisqu’elle s’y connaît plus que moi. Je ne suis pas une artiste dans l’âme, ce qui est un secret pour personne. Néanmoins, ce que ma sœur vient de citer, ce sont des choses que je pourrais vouloir tester. Ce sont des arts accessibles à tous, à des niveaux bien différents bien sûr : tout le monde n’a pas les moyens de se retrouver dans une galerie. Je ne sais pas si Harper est en désaccord avec nous ou s’il y a autre chose d’autre, mais elle s’agite dans sa poussette. Comme moi à l’époque, avec Elliot et Leo, Robin ne tarde pas à comprendre ce qui chagrine la petite fille. « Est-ce que tu as tout le nécessaire ? Je suppose que tu sais exactement où il est possible de faire réchauffer de l’eau ici. » À moins qu’elle ait prévu autre chose, un sac isotherme par exemple. Je reconnais que plus les enfants grandissent et plus c’est simple en terme d’organisation : plus besoin de se contenter exclusivement du lait.