et si on te trouvait l'amour ? (iggy)

Cela fait maintenant un peu plus d’une semaine que Sofia est partie pour Auckland. Face à elle, j’ai voulu faire la fille forte, mais il faut avouer que c’est un peu plus difficile que ce que je pensais : elle me manque. C’est dingue ce que les sentiments peuvent faire à une personne. Il y a plus d’un an, jamais je n’aurais pensé m’attacher à quelqu’un comme cela et voilà qu’aujourd’hui, je pourrais donner n’importe quoi pour être aux côtés de la jeune femme. Malheureusement, avec les cours, ce n’est pas possible et maintenant que je trouve un certain intérêt dans l’école, je ne peux pas — et il serait dommage de le faire — me contenter de tout lâcher, de faire mes valises et de partir la rejoindre. Cela arrivera à un moment donné, quand nous aurons un week-end de libre en commun, mais pas tout de suite. Alors en attendant, j’essaye de m’occuper l’esprit comme je peux, en faisant du sport ou avec mes amis notamment. La présence de ces derniers n’est pas négligeable et je les remercie de prendre plaisir à me faire sourire. Malheureusement, nous ne pouvons pas être ensemble à longueur de journée : ils ont des choses à faire, des proches à voir. C’est exactement ce qui se passe ce soir, Loris passe du temps avec Athena et les autres ont des obligations familiales. C’est donc chez moi, seule ou avec Iggy que je vais passer la soirée. Par chance, mes espérances ne sont pas élevées, ce qui devrait m’éviter une quelconque déception. Mon programme commence doucement, avec un exercice à rendre pour le lendemain. Puis je m’installe derrière ma batterie et joue quelques morceaux — comme le sport, c’est un excellent moyen de se défouler un peu. Les minutes passent et je viens m’allonger dans mon lit, face à une série. Seulement, après quelques minutes, je commence à avoir faim. Alors ni une, ni deux, je mets la vidéo en pause et descends au rez-de-chaussée. J’ouvre le réfrigérateur et regarde ce qui m’intéresse. Je jette mon dévolu sur un repas de la veille, que j’ai seulement à réchauffer avant de le manger. Pendant que le plat tourne dans le micro-onde, je marche jusqu’au salon, où je vois de la lumière. « Qu’est-ce que tu fais ? » Dis-je, à l’attention de ma mère. Je vois bien qu’elle est installée sur le canapé, mais avec elle, je ne suis pas à l’abri d’une surprise. De nous deux, c’est elle qui gagnerait à n’importe quel jeu vidéo et je ne pense pas qu’un autre jeune puisse dire cela de ses parents, alors je ne serais même pas étonnée si elle me disait qu’elle tournait un TikTok. « Avec Noël, je repensais à Asher. Je ne l’ai plus revu après ça. Est-ce qu’il va bien ? » Je m’avance un peu plus et viens m’appuyer contre le canapé.

Le micro-ondes lancé, j'ai quelques minutes à combler. Je pourrais me contenter d'utiliser mon téléphone, d'aller sur mes divers réseaux sociaux pour voir ce qui se dit, mais à la place de ça, comme il y a de la lumière dans le salon, je décide d'aller y jeter un coup d'œil. Sans grande surprise, c'est Iggy qui se trouve là, assise sur le canapé, devant la télévision. J'apprends que son attention est portée sur une série qu'elle vient de commencer. Elle me propose de regarder avec elle, si j'ai envie. « Je descendais juste pour manger. Une série m'attend en haut, aussi. » Il est vrai que j'aurais pu m'en tenir à la cuisine et donc ne pas venir la déranger, mais il faut croire que la tentation était trop forte. Et puis, nous vivons sous le même toit, il peut être bien d'échanger un peu parfois, surtout maintenant que je passe un peu plus de temps ici. Je ne sais pas exactement pourquoi, mais Asher traverse mon esprit et j'interroge ma mère à son sujet. Il y a un an, j'apprenais qu'ils avaient été mariés et que contrairement à d'autres hommes, il avait compté pour elle. Pour n'importe qui, ce serait donc normal que je m'y intéresse un peu. Visiblement, elle ne l'a pas vu depuis un certain temps maintenant, à cause des occupations de l'homme. Je suppose que c'est une bonne chose pour lui. « Est-ce que tu penses à lui parfois ? » C'est peut-être risqué comme question. Elle ne m’a rien demandé et voilà que je cherche à m’immiscer dans sa vie privée. Elle n’a plus qu’à espérer que l’appareil de la cuisine se mette à sonner, pour me distraire. Même si ça ne me prendrait pas beaucoup de temps pour revenir et poursuivre cette conversation. « Je veux dire.. je ne te vois pas souvent avec du monde, avec des hommes. Ça ne te manque pas ? » Peut-être que ma situation actuelle aide à ce que ma curiosité aille dans ce sens. Avant Sofia, je ne serais certainement pas allée dans ce sens, mais il faut croire que même loin de moi, la jeune femme continue à agir sur ma personne et sur mes sentiments. Elle me manque, ça n’aide sûrement pas. « Et si on t’inscrivait sur une application de rencontres ? Ça pourrait être marrant. » Je suppose que c’est une question de point de vue. Ce sera forcément plus marrant pour moi que pour elle, et encore, Iggy pourrait être le genre de personne qui s’amuse de cela. D’ailleurs, je n’imagine pas une autre réaction de sa part. Je ne sais pas pourquoi, mais je ne la vois pas prendre au sérieux ce genre d’application et se convaincre qu’elle peut trouver l’amour comme ça. Peut-être que je me trompe : après tout, ce n’est pas vraiment l’aspect de sa vie que je connais le plus.

Même si depuis plusieurs mois, les choses se passent un peu mieux entre Iggy et moi, il serait mentir de dire que notre relation est comme celles de toutes les autres familles du quartier – de la ville ou même du pays. Avec dix-sept ans passés loin l'une de l'autre, ce n'est pas vraiment surprenant et malheureusement, il y a des choses que le temps ne pourra pas rattraper. Mais parfois, j'ai la sensation que c'est un mal pour un bien, puisque nous partageons sûrement des choses que les autres ne feraient pas. Par exemple, là, avec Asher. Si j'avais grandi avec ma mère, je ne sais pas si je m'aventurerais sur cette pente glissante – surtout que j'aurais plus d'informations au sujet de cette histoire – et encore moins sur l'idée de lui trouver quelqu'un. Mes intentions ne sont pas mauvaises, alors qu'elles auraient pu l'être à mon arrivée en Nouvelle-Zélande. Je ne sais pas, je crois qu'être dans une relation stable me donne envie d'être romantique et de jouer les Cupidons. Ce ne sera peut-être pas aussi simple que cela en paraît, puisque la brune semble se plaire dans sa solitude. Sa réflexion se tient, je l'ai moi-même pensée un jour. Mais peut-être qu'en laissant quelqu'un entrer dans sa vie, alors elle serait agréablement surprise par l'effet que ça peut lui faire. Ça pourrait même combler un peu le vide de la villa, quand je ne suis pas là – un jour, je finirais par voler de mes propres ailes. Étrangement, alors que je pensais me faire remballer avec mon idée d’application de rencontre, Iggy s’y intéresse. « C’est à toi de voir. » Si je partais sur quelque chose de léger au début, là où on aurait pu voir le profil des hommes autour de chez nous et en rigoler un peu, je peux facilement changer mes plans pour coller à ce qu’elle espère. Si tout cela découle sur quelque chose de positif, c’est peut-être une bonne chose. « Le côté informations erronées peut être amusant, mais ça ne t’emmènera sûrement pas très loin avec un homme. Sauf si ça te permet de comprendre qu’il a un bon sens de l’humour. » Si Iggy tombe sur quelqu’un qui s’amuse de la situation et non qui se retrouve vexé d’avoir été mené en bateau, ce sera peut-être une perle rare, sa perle rare. « Tu peux être sérieuse. Peut-être pas en parlant de tout par contre.. je ne sais pas si le fait de parler de ta fille de vingt-trois ans soit une bonne idée. C’est sûrement mieux qu’un bambin qui reste collé à tes jambes, mais c’est sûrement un peu effrayant. » Surtout si elle doit parler de tout ce qui a entouré mon arrivée au monde et les années qui ont suivi.

Pour les informations à mettre dans son profil, en cas de vrai profil, nous ne semblons pas d'accord. Pour le coup, je ne fais que donner mon avis, car c'est bien elle qui aura le dernier mot à ce sujet à la fin. Après quelques minutes de réflexion, elle finit par pencher de mon côté. Est-ce que cela veut dire qu'elle partirait plus sur quelque chose de réel que sur une blague pour passer sa soirée ? Intéressant.. depuis quelques mois, je suis celle qui a été la plus romantique de nous deux, mais peut-être qu'Iggy n'est pas en reste et qu'elle a plus d'une surprise sous sa botte. « Est-ce que tu as déjà des photos de toi dans téléphone ou nous devons partir de zéro ? » Personnellement, j'ai quelques selfies de côté, mais peut-être que ce n'est pas le genre de ma mère. Si cela se confirme, alors nous serons obligées de faire une séance photos — cette soirée serait de plus en plus inattendue. « Ma série attendra : ce soir, je suis Cupidon ! » J'arque légèrement un sourcil, avant de tirer avec un arc invisible, comme le ferait le dieu de l'amour. Qui sait, peut-être qu'avec ce simple geste, je vais réussir à trouver l'amour à ma mère. « Je vais quand même aller me chercher mon repas, j'ai faim. » À trop parler, ce que j’ai mis à réchauffer va finir par refroidir et les quelques minutes à faire tourner le micro-ondes n’auront servi à rien. Je quitte le salon pour regagner la cuisine. Je récupère mon plat, des couverts et je retourne auprès de ma mère, directement sur le canapé cette fois-ci. Autant m’installer confortablement pour manger et pour mettre en place ce fameux profil. Si nous voulons mettre toutes les chances de notre côté, il faut qu’il dépote ! J’y mets de l’envie, peut-être un peu trop même, à croire que c’est moi qui cherche quelqu’un. Je n’en ai pourtant pas besoin, car même si Sofia est loin, il y a toujours quelque chose entre nous. « Tu as déjà une idée de ce que tu veux ? » Que ce soit pour le faux ou le vrai possible, mais aussi pour le style d’homme qu’elle espère attirer — car aux dernières nouvelles, il n’a jamais été question de femmes pour ma mère. « Je passerais derrière pour approuver.. on parle quand même de mon futur beau-père ! » Je m’emballe forcément un peu, mais ce n’est pas de ma faute, depuis qu’elle a accepté mon idée, je me sens comme surexcitée ! C’est fou, qui aurait pu croire que c’est cette activité qui pourrait nous rapprocher ?

De la distraction. C’est de ça que j’ai besoin et par chance, c’est ce qu’Iggy m’offre. À l’étage, ma série faisait déjà l’affaire, pour quelques heures au moins, mais là, la possibilité de créer un profil sur une application de rencontre à ma mère, c’est un tout autre niveau. Je m’éclipse quelques secondes dans la cuisine pour récupérer le plat que j’ai lancé à réchauffer avant de venir ici. À mon retour, je questionne ma mère sur ce qu’elle recherche exactement. Il reste encore à définir si nous partons sur un faux profil ou sur quelque chose de plus réel. Mais ce n’est pas vraiment dans ce sens qu’Iggy me répond puisqu’elle évoque le type d’hommes qui pourrait lui plaire. Grand brun, un peu baraqué. Ça ressemble vaguement a Sunny, mais je me garde bien de lui dire. D’ailleurs, est-il vraiment baraqué ? Je ne sais pas. Disons que la fois où je l’ai vu, je n’avais pas forcément l’idée de le détailler en long, en large et en travers. « De nous deux, tu auras été la première à le dire ! » Dis-je, tout en levant une main vers le ciel pour prouver mon innocence, lorsqu’elle évoque l’idée d’un mariage. Bien sûr, je ne m’attendais pas à en arriver là non plus : je n’ai jamais vu la brune avec un homme, alors je suppose que nous allons attendre encore un peu pour que je finisse demoiselle d’honneur à un événement de ce genre. « Pour la photo de ton profil, nous ne sommes pas obligées de partir sur quelque chose de trop officiel pour l’instant. » Nous sommes en le soir, je comprendrais qu’elle ne veuille pas faire trop d’efforts après la journée qu’elle a pu avoir — même si j’ignore ce qu’elle a fait pour occuper son temps. « Je ne sais pas.. nous pourrions te prendre de dos ? Et si jamais toute cette histoire prend une autre direction, alors nous pourrons toujours la modifier. » Si mon idée de base était de faire cela pour rire, nous ne sommes pas à l’abri d’une perle rare sur Tinder. Ce n’est sûrement pas ce qui arrive le plus souvent, mais ne faut-il pas jamais dire jamais ? « Alors, alors.. voyons voir. » Alors que je continue de manger, bouchée par bouchée, je me saisie de mon téléphone dans ma main libre. J’ouvre l’application et rentre les premières formalités pour arriver à la partie intéressante — il va de soi que je lui donnerais toutes les informations pour qu’elle se connecte un peu plus tard. « Pour la photo, on reviendra dessus un peu plus tard. Place à la description. Qu’est-ce que tu veux mettre ? » Du sérieux ? Du loufoque ? Les deux. Visiblement, il est recommandé de mettre quelque chose d’honnête, mais je suppose que nous ne finirons pas en prison si nous ne le faisons pas.

Animation intéressante pour une soirée qui ne promettait rien de très glorieux. Cette idée d’application de rencontre maintenant en tête, je mets tout en œuvre pour réussir mon coup à la perfection — finalement, c’est à se demander qui de nous deux est la plus emballée par tout ça. Comme pour chaque inscription, il y a des étapes à suivre. On pourrait croire que je suis une experte dans le domaine et pourtant, je n’ai jamais été sur ce genre d’application. Pour le pseudonyme et le mot-de-passe, je n’ai pas trop de mal. C’est au moment de la photo de profil que les choses se compliquent. Iggy n’en a pas et ce n’est pas forcément une heure pour se lancer dans un shooting — surtout si ce profil est voué à l’échec. Est-ce qu’une part de méchanceté s’était naturellement invitée dans ma phrase ? Peut-être. Ce n’était pourtant pas mon intention, puisque cette idée m’était venue pour éviter à ma mère de monter à l’étage pour se changer et se repoudrer le nez — quitte à faire les choses, autant les faire bien. À son coup d’épaule, je comprends qu’elle ne m’en tiendra pas rigueur. Ce n’est pas plus mal, car je n’avais pas spécialement envie de me lancer dans un débat à ce sujet. De dos ou de profil, ça lui ira. Elle propose même d’utiliser un filtre et ça me fait un peu grimacer, plus par surprise que par opposition. « Un filtre ? Finalement, tu es plus jeune que ce que tu laisses paraître. » Bien sûr, je plaisante. À l’âge où elle m’a eu, Iggy est la mère la plus jeune comparée à celles de mes amies. Rapidement, je l’imagine avec l’un de ces filtres. Le premier qui me vient en tête est le plus ancien à ma connaissance, celui avec la tête de chien et je ne peux m’empêcher de rire un peu. Pour le coup, la photographie de dos ajoute un peu de mystère. Mais si son choix se porte sur l’utilisation d’un filtre, alors je la suivrais. Après tout, c’est son compte, non ? Je laisse ce sujet de côté et demande à ma mère ce qu’elle compte mettre dessus. Selon elle, elle ne peut pas mettre qu’elle ne travaille pas avec une telle maison, au risque d’attirer quelqu’un qui en voudra à son argent. Ça se tient. Alors j’essaye de faire de mon mieux pour l’aider à trouver un métier. « Barmaid ? Même si ça ne justifie peut-être pas non plus la maison. » Ils sont rarement connus pour être les personnes les plus riches de la ville. « DJ ? Propriétaire d’une boîte de nuit ? Je ne sais pas, je te vois bien dans le monde de la nuit, de la fête. » Si elle a soulevé l’histoire de la photographie de dos, j’espère qu’elle ne prendra pas mal cette allusion aussi. « Et puis, il ne faut pas quelque chose de trop sérieux. Si tu tombes face à quelqu’un qui s’y connaît, tu vas te faire emmerder. » Elle pourra toujours envoyer chier la personne, ou l’ignorer — la connaissant, elle ne s’en privera pas si l’envie est là.

Mes réflexions étaient peut-être un peu osées, je l’avoue. Je l’ai su au moment même où les mots se sont échappés de mes lèvres, mais avec Iggy, je pensais que ça pourrait passer comme une lettre à la poste. Une fois, oui. Deux fois, non. Il ne faut pas abuser, elle est chez elle et voilà qu’elle se fait attaquer. Enfin.. attaquer est un bien grand mot, puisque aucun de mes propos ne se voulaient blessants au départ. Mais ça, ma mère en a bien conscience, car sa phrase est dite sur le ton de la plaisanterie. J’ai conscience de cette chance – si c’est une chance, car d’autres femmes n’auraient sûrement pas laissé passer cela de la part de leurs enfants. Peu importe le choix qu’elle décide de faire pour les photographies, nous ferons ça plus tard. En attendant, je commence à créer son profil. Je rentre les informations les plus simples et je l’écoute au moment où elle s’interroge sur ce qu’elle peut mettre ou non pour les autres points, pour ce qui touche à ce que les autres utilisateurs liront. Est-ce qu’elle se crée un personnage ? Est-ce qu’elle reste honnête ? Le deuxième point semble compliqué, rien que pour son boulot. Elle ne travaille pas et pourtant, elle a une belle maison, comment justifier ça ? Difficilement, surtout si l’homme intéressé se trouve être un croqueur de diamants. Je lui fais quelques propositions et Iggy semble accrocher sur celle de la boîte de nuit – avoir du pouvoir dans une vie imaginaire, quel choix étonnant. Je tape son choix dans la case correspondante et je lis ce qui nous attend par la suite. « Exactement. C’est l’une des prochaines questions. » C'est d'ailleurs étonnant que ce ne soit pas la première du lot. « Peu importe, je pense. » Dis-je, cette fois-ci en réponse à sa question. « Je veux dire, tu ne dois de compte à personne. Si tu mets que tu cherches l'amour et que tu décides de ghoster quelqu'un parce que ça ne colle pas à ce que tu attends, personne ne t'en voudra. » Enfin si.. la personne en question, du moins quelques temps si elle était vraiment intéressée. Si ça dure plus longtemps, alors peut-être que cela pourrait vouloir dire que c'est un psychopathe et dans ce cas-là, Iggy s'en sortirait bien. « Tu ne seras pas la première à le faire et certainement pas la dernière non plus. » D'ailleurs, même utiliser de fausses informations n'est sûrement pas quelque chose de rare : des personnes se créent des comptes juste pour le plaisir, pas seulement pour trouver l'amour. C'est ce qu'on fait ce soir, non ? Sauf si elle a déjà commencé à changer d'avis sur la question. Peut-être que l'idée de se trouver quelqu'un pour partager son quotidien n'est finalement pas une si mauvaise chose selon elle. « Tes loisirs ? » Il serait dommage de s'arrêter en si bon chemin, alors je décide d'enchaîner avec la prochaine partie proposée par l'application.

Son style, ses attentes. Voilà là beaucoup de questions qui ne semblent pas trouver réponses facilement auprès de ma mère. Cette idée de compte a été lancée comme ça, pour occuper notre soirée et pour combler un vide laissé par Sunny – d'après moi, mais peut-être pas d'après Iggy. Visiblement, elle ne semble pas encore prête à mettre de mot sur la recherche que nous allons entreprendre. Pas d'amour, pas de coup d'un soir, ça ne laisse plus beaucoup de place pour une relation amoureuse ou du moins physique. Bref.. je coche une case qui pourrait coller à cette situation, avant de poursuivre. Ses loisirs.. est-ce qu'Iggy en a ? Sûrement, elle n'est pas toujours ici. Parler de la fête serait cohérent avec le reste de son profil et ce n'est sûrement pas une mauvaise chose de donner l'impression que c'est une vraie personne derrière tout ça. Elle rajoute aussi la natation et les jeux vidéos. Une femme qui apprécie des choses bien différentes, ça doit sûrement plaire – sauf si elle se retrouve à les battre en jouant, ça pourrait les refroidir directement. « Tu veux mentionner la piscine, au cas où ils voudraient venir faire des longueurs ici. » Je suppose qu'avec certains, la vue ne serait pas déplaisante pour Iggy – même s'il y a une grande différence entre les nageurs du dimanche et les athlètes. « J’ai vraiment l’impression que tu fais ce compte juste pour me faire plaisir. » Dis-je, tout en haussant légèrement les épaules. C’est mignon dans le fond, même si ce profil finira sûrement à la poubelle dans quelques jours. « En fait, tu cherches juste à te faire des amis ? » C’est ce qu’elle a sous-entendu un peu plus tôt, mais je préfère en avoir le cœur net. « Ils n’ont pas répondu à ton invitation au club de Bridge ? » Clairement, je fais référence à son âge et cette fois-ci, c’est bien plus évidant que tout à l’heure. « Je rigole, je rigole ! » Je préfère me rattraper avant qu’il ne soit trop tard et qu’elle ne s’énerve inutilement – et puis, si elle va dans ce genre de club, je suis sûre que ce serait pour gagner et non pas pour se faire des amis. « Je pense que tout cela ne t’engage à rien. Nous pouvons mettre que tu recherches des relations amicales, mais si l’occasion se présente, je te suggère de t’amuser un peu. » Une nouvelle fois, je hausse les épaules. Mes propos sont lourds de sens, je le sais et c’est voulu. Mais n’est-ce pas un peu bizarre que ce soit moi qui dise cela à la mère – peu importe la relation que l’on a ?