burn baby burn ♪ → bash

Assise sur son plan de travail, la cuiller plantée dans un pot de glace à la fraise que sa mère avait fait tout spécialement pour elle, Aveleen hochait la tête en rythme avec la musique. Du hip-hop, bien sûr. En fait non, de la Kpop. Parce qu’un de ses collègues de la pizzéria était parvenu à la convaincre d’en écouter en lui envoyant toute une liste de chansons en train de défiler sur son enceinte. Cependant, étant donné qu’Aspen, sa collègue, assurait le service de livraison à sa place ce soir et qu’elle avait donc sa soirée de libre, pas question de n’écouter que ça non plus. Tendant le bras pour éteindre l’enceinte, elle attrapa ensuite son récepteur et passa quelques secondes sur les fréquences de tous les micros déposés chez les gens qu’elle trouvait suspect. Après s’être assurée que personne n’était en train de mentionner un plan visant à attenter à sa vie, la rouquine s’attarda sur une fréquence. Un homme et une femme en train de se disputer pour une raison inconnue. Aveleen n’avait pas besoin de connaître le pourquoi du comment et elle avait encore moins besoin de connaître leurs noms pour se divertir. Non, c’était pas vraiment très moral comme divertissement mais elle estimait que tant qu’elle n’en savait pas plus sur eux, c’était pas si dérangeant que ça, pas vrai ? Pas sûr que les principaux concernés soient du même avis, cela dit. Mais ils n’en sauraient jamais rien, aussi supposait-elle que c’était okay. Puis, au bout de plusieurs minutes d’éclats de voix, une porte claqua dans le fond et le silence tomba. Sans prendre la peine d’éteindre le récepteur, elle reprit le cours de ses activités ; à savoir jeter la cuiller dans l’évier et remettre le reste de glace au congélateur avant de s’affaler dans son canapé, télécommande en main, pour se mater un film ou une série. Une fois plongée dedans, la rouquine en avait carrément oublié l’émetteur et sursauta en entendant le bruit strident d’une alarme. Le temps de calmer les battements de son cœur, elle se dit que ça ressemblait quand même beaucoup à une alarme incendie, ça, et partant de là, tâcha de se remémorer l’adresse à laquelle elle avait déposé ce micro-là. Elle était pratiquement certaine que c’était à North Bay, mais où exactement ? Bon, le quartier n’était pas si grand que ça non plus et une alarme incendie, ça s’entendait de loin, elle finirait bien par trouver en passant pas trop loin. Enfilant ses baskets et sa veste en jean à la hâte, Aveleen attrapa ses clefs dans l’entrée et sortit en prenant soin de bien verrouiller derrière elle. L’alarme ne s’étant toujours pas tue, elle se dit qu’elle faisait bien de se déplacer et, sautant dans son vieux pick-up, commença à sillonner les rues de North Bay. Jusqu’à tomber dessus ; le bâtiment d’où provenait l’alarme. Merde ! Fallait évidemment que ça soit un immeuble et pas une maison… Poussant un soupir, la rouquine se gara devant l’entrée et bondit hors du pick-up. Si la lumière semble allumée dans les parties communes, et que le reste du voisinage commence à s’agiter tout doucement, personne ne donne l’impression de faire quelque chose de vraiment utile. La rouquine vit alors un type a l’air complètement paumé sortir par la porte principale et en profita pour se faufiler à l’intérieur. Tout lui revint : l’étage, la porte. Courant presque dans les escaliers, elle sortait déjà son téléphone pour appeler les pompiers. Son geste resta en suspens tandis qu’elle se campait devant la porte et commençait à tambouriner contre. Si ça se trouve, le claquement de porte de tout à l’heure signifiait que tout le monde avait quitté l’endroit, auquel cas, ça ne servait à rien de tambouriner comme une sauvage comme ça, mais puisqu’elle pouvait pas en être certaine… C’est à moitié hors d’haleine qu’elle prit la parole :
« Hé ! Y a le feu ! »
Mais s’il l’entendait elle et pas l’alarme, ça serait quand même bizarre. Aussi appuya-t-elle sur le bouton d’appel.

Enfoncé dans le fond du fauteuil, les genoux repliés contre toi, le menton posé sur eux. Position on ne peut plus confortable, qui ne tenait qu’à un fil, équilibre pouvait être perdu à tout moment. Etais trop concentré que pour te poser la question, que pour te faire la réflexion et y faire attention. Trop concentré et focalisé sur ce que tu faisais. Avais perdu totalement notion du temps, tasse de café bue aux trois quart, complètement froide était bien là pour le prouver. étais loin d’être prêt de la réchauffer ou de la jeter. Les yeux rivés sur l’écran, code qui posait problème et refusais de t’avouer vaincu, pas maintenant en tout cas. Ça faisait bien quelques jours que t’étais dessus, dès que tu rentrais de ton service au café à vrai dire. Ne comprenais pas ce qui clochait, et ongle du pouce en faisait les frais, à force de le mordiller. Les yeux aussi très certainement, à force de fixer l’écran, en clignant moins les yeux que d’habitude. Mais ne voulais pas et ne lâcherais pas l’affaire. Étais plus que dans les bonnes conditions pour être concentré, l’étais depuis un temps que tu n’arriverais même plus à déterminer.

Aurais pu continuer encore longtemps de la sorte, à relire le code, à chercher l’erreur, mais une odeur se faisait de plus en plus persistante, entêtant et inquiétante qui plus est. Rappelait celle du feu, et pas celle du feu de bois qu’un voisin dans le quartier aurait pu se décider à faire. Attention est attirée par l’agitation du golden qui avait apparemment déboulé dans la pièce qui te servait de bureau, essayait de te sauter à moitié dessus tout en tirant la manche à sa portée. « — oui, oui, attend deux secondes, je-» ne prends pas la peine de finir ta phrase, parce que Casque anti-bruit -qui fonctionnait un peu trop bien pour le coup-, à peine enlevé, bulle dans laquelle tu avais pu être jusqu’à maintenant éclate directement. Entre les aboiements plus ou moins étouffé du canidé, une alarme stridente que tu mets quelques secondes à identifier comme étant l’alarme incendie, et des tambourinements à la porte d’entrée, mets bien quelques secondes à percuter la situation.

Conclusion arrive en même temps qu’une voix étouffée à l’entrée, le feu, n’as plus le temps de te demander ce qui pouvait bien s’être enflammé, que bondis hors de ta chaise, suivis par ton chien, qui te dépasse, pour se rendre directement à la porte d’entrée, où sonnette retentit à son tour, se rajoutant à toute la cacophonie déjà présente. Première pensée va faire zane évidemment, paniques quelques secondes en te demandant s’il était sain et sauf, avant de te rappeler qu’il était chez sa mère. Penses ensuite au golden, fallait le mettre en sécurité, alors ouvres cette fameuse porte d’entrée, laisses le chien détaler un peu plus loin dans les communs, avant de te focaliser sur la silhouette qui te faisait face, silhouette qui n’est pas inconnue, rousse qui était déjà venue jusqu’ici d’ailleurs, mais était-ce vraiment le bon moment de se demander ce que livreuse de pizzas pouvait faire ici juste devant chez toi. « — merci, je… » ne serait pas pour le moment que t’arriverais à finir une phrase. Te retournes vers la cuisine, d’où vient toute la fumée, où t’avais laissé une casserole sur le feu, avant de totalement l’oublier. Abandonnes invitée impromptue pour te diriger vers ladite cuisine, tentes tant bien que mal d’ouvrir une fenêtre pour faire partir un minimum de fumée, aérer le tout. Pas grand-chose comme flammes présentes au final, instinct qui fonctionne avant tout, lorsque tu prends un essuie pour l’humidifier et le balancer sur la casserole. Peux te concentrer sur l’alarme, qui vous vrille toujours les tympans. N’as pas besoin de plus qu’une chaise pour pouvoir l’atteindre, la prendre en main et tenter de l’arrêter. Mais les doigts sont fébriles, n’arrivent ni à l’éteindre, ni à l’ouvrir pour pouvoir enlever les piles et arrêter ce hurlement strident. Grimaces en continuant les efforts, en lançant un regard désolé à ta cadette. «  — désolé, c’est- c’est vraiment casse-tête ces trucs-là. » ou tu n’étais peut-être tout simplement pas doué, aussi.

@Aveleen Maguire

Au moment où la porte s’ouvrit, Aveleen fit un pas de côté pour éviter l’énorme boule de poils qui venait de jaillir de là, mais dut surtout relever les yeux ; elle avait oublié que ce client la dépassait d’une tête. Ce qui était assez rare pour être souligné. Difficile à dire s’il était décontenancé par sa présence ou par tout ce remue-ménage. Les deux sûrement, quoi de plus normal ? Bon, de là où elle se trouvait, elle pouvait constater qu’il y avait pas mal de fumée, oui, mais elle n’apercevait pas de flammes. Elle avait peut-être été un peu trop prompte à appeler les secours mais mieux valait trop tôt que trop tard, supposait-elle. Bref, tout ça pour dire qu’en attendant, le client tenta un remerciement mais sans vraiment avoir l’occasion de poursuivre. Elle le vit ensuite tourner les talons pour essayer de minimiser les dégâts et la rouquine le suivit mais de quelques pas seulement. Juste de quoi le voir galérer avec son alarme après avoir jeté un linge mouillé sur la casserole. Au bout d’un essai ou deux, il lui adressa un regard désolé puis mit son excuse en forme. Aveleen s’avança davantage et haussa la voix à nouveau pour se faire entendre par-dessus tout ce vacarme.
« Vous voulez que je regarde ? »
Non, elle était pas particulièrement experte, mais ces derniers mois, elle avait manipulé suffisamment de gadgets de ce genre pour pouvoir essayer de l’éteindre. Et peut-être même y parvenir. Entrant tout à fait, elle s’approcha et tendit la main pour récupérer l’alarme qu’elle tourna entre ses doigts quelques instants. Puis elle trouva le compartiment à piles et la retira pour que le silence revienne. La rouquine poussa alors un soupir de soulagement et gratifia son hôte d’un sourire un brin complice.
« Ah, ça fait du bien quand ça s’arrête ! »
Elle lui rendit de l’alarme puis s’enquiert du chien.
« Vous voulez que j’aille chercher le chien ? »
Avant de faire à son tour la grimace. Pas à cause du chien mais du fait que les urgences allaient très probablement débarquer d’une minute à l’autre.
« Oh, je vous ai pas dit mais j’ai appelé les pompiers au cas où. Bon, ils pourront pas dire qu’ils se sont déplacés pour rien, mais j’espère quand même qu’ils vous feront pas payer la facture par ma faute. »
Ça, c’est sûr qu’elle s’en voudrait, surtout maintenant qu’elle pouvait constater qu’il y avait pas vraiment le feu. Plus qu’un peu de fumée. Qui mettrait pas bien longtemps avant de s’évaporer dans la nature, maintenant que la fenêtre était ouverte, qui plus est.