lost without you ∞ kenlee

je suis née dans une famille très pieuse. une famille qui n’a jamais manqué de rien, si ce n’est d’un peu d’humanité. ma mère se pensait stérile et mon arrivée a été accueillie comme un véritable miracle. il n’a fallu qu’une seconde pour que mes parents me mettent sur un piédestal et nourrissent à mon propos une véritable rage de réussir. j’ai évolué dans un environnement on ne peut plus parfait au regard des autres. un père juge, une mère chirurgienne qui a arrêté ses activités pour pouvoir m’élever à son image. école privée en école privée, cours particuliers de musique et bals de promos en grande pompe, j’étais la véritable princesse qu’on voulait que je sois. première en tout, à l’école principalement, j’étais la chouchoute des professeurs, et mon rang social me permettait d’avoir autour de moi tout un tas d’intéressés, des faux amis aux plus beaux petits amis du lycée. ♫ lorsque j’ai eu quinze ans, mon père a accepté un poste de juge à dublin, et j’ai choisi d’entrer dans un internat spécialisé dans les cours de musique à omagh. c’était ce dont j’avais toujours rêvé puisque la musique régissait ma vie depuis toute petite. ♫ la musique, c’est dans mon sang, je ne saurai l’expliquer. depuis toujours je rêvais d’en faire mon quotidien, de jouer des heures chaque jour. et j’ai réussi, grâce à une détermination sans faille. ♫ à l’internat, j’ai appris à renier tout ce que j’avais appris en grandissant, à cracher sur tous ces dimanches passés à l’église. c’est à cette période que j’ai compris aussi que la famille et l’amour ne se résumait pas à la seule présence d’un père, d’une mère et d’enfants à élever. je sais que mes parents ont fait comme ils ont pu, mais c’est à cette période que j’ai mis un grand coup de pied dans le piédestal qu’ils m’avaient érigé. au départ, pas devant eux, mais simplement en commençant une période de rébellion au lycée, une crise d’ado à ma sauce. ♫ c’est à l’internat que j’ai rencontré niamh, cette beauté blonde aux formes déjà parfaites. elle a attiré mon regard sans que je n’en comprenne vraiment les tenants et aboutissants. elle pensait comme moi, rêvait d’ailleurs, mais j’étais loin d’être quelqu’un pour elle, ou elle pour moi. mon statut de petite princesse la révoltait, et ce n’est que lorsqu’on nous a mises ensemble, en duo face à une partition que tout a commencé. la musique a scellé nos âmes ce jour là. le plus beau duo que je n’ai jamais formé. elle à la harpe et moi au violon, je me souviens à la perfection du frisson qui a parcouru mon dos ce jour là, la transe qui s’est invitée en moi ♫ comme une évidence, niamh et moi avons fini par former un couple, dans la musique comme dans la vie. les années ont passé et au sortir du lycée, nous avons décidé d’officialiser notre couple. mais mes parents n’ont pas compris. avec l’éducation chrétienne que j’avais reçue, il était imposable que je finisse dans les bras d’une femme, alors que j’avais tous les jeunes hommes de bonne famille à mes pieds. ♫ c’est l’année de nos 18 ans que nous avons fui pour belfast après le carnage qu’avait été l’annonce à mes parents. une nouvelle vie, un nouveau chapitre de notre histoire. ça n’a pas été facile mais nous avons réussi à construire là bas notre cocon, notre vie à deux. j’ai suivi des cours du soir de psychologie et donné des cours de musique, alors que niamh enchaînait les petits boulots. ♫ alors que nous avions commencé les essais pour fonder une famille, il est arrivé ce que je peux appeler le plus gros drame de ma vie. cette agression que je ne pourrai jamais oublier. je me souviens avec justesse de chaque mot de ces trois hommes, chaque regard empli de dédain. l’intonnation de leurs voix lorsqu’ils scandaient ‘sales gouines’. ça aurait pu être pire, ils auraient pu nous violer pour nous montrer qu’il n’y avait que ça de vrai. mais les coups ont été plus forts. niamh a même perdu connaissance ce soir là, et j’ai pleuré des heures durant ♫ la peur a pris le pas sur le reste, me bouffant de l’intérieur. cette nuit là, j’ai fui, une nouvelle fois. je n’ai laissé qu’un mot à la femme de ma vie, je savais qu’elle ne me pardonnerait pas, mais j’étais simplement incapable de vivre ça à nouveau, de fonder une famille avec une femme, de mettre en danger mon propre enfant à cause de ces connards homophobes ♫ retour à la case départ, retour à londres. je me suis laissée embourber dans un mariage perdu d’avance. oh, j’ai rendu fiers mes parents de revenir et d’accepter que j’avais eu tord. bien sûr. et moi dans tout ça ? et mon coeur ? mon coeur a toujours été avec elle, aussi loin qu’elle puise être ♫ retrouvant mon rang social, avec un mari pdg d’une grande entreprise internationale, je n’avais ‘besoin de rien’, si ce n’est de vivre. alors depuis dix ans, j’ai pris l’habitude de tromper lewis avec des femmes, toujours des femmes et uniquement des femmes. ♫ cet été, la boîte de lewis a été délocalisée en nouvelle zélande, à wellington plus particulièrement. la nouvelle a été rude, mais je l’ai suivi, sans doute dans l’espoir de la revoir. sans doute ♫ depuis la rentrée de septembre j’ai accepté un poste comme professeur de musique au conservatoire. je continue de faire des aller-retour à londres pour me produire en tant que soliste avec le plus grand orchestre symphonique du pays. ♫ après mon installation à Island Bay avec Lewis, j'ai enchaîné les histoires sans lendemain avec plusieurs femmes, et puis je suis tombée sur Niamh au conservatoire. d'abord le choc, et puis elle m'a appris qu'elle était enceinte il y a 17 ans lorsque je suis partie, et que cette gamine que j'appréciais, était en fait notre fille ♫ après le choc de cette nouvelle, je n'ai pas cherché à recontacter Niamh, mais j'ai fait la rencontre de Leither, une jeune musicienne qui a tenté coûte que coûte de me réveiller, m'aider à vivre, à me sortir de ce carcan dans lequel je m'étais embourbée. mais tout a bousculé lorsqu'une nouvelle agression a eu lieu...