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Billy & Jo

FIRST MEETING

« Bon matin », lui susurra une délicate voix. Billy ouvrit les yeux et découvrit Caroline? Carolane? Catherine?… il ne se souvenait plus de son nom. En fait, il ne se souvenait plus de rien. Il avait encore bu la veille et, ne faisant pas exception à ses habitudes, il avait atteint l’excès. Il avait vraisemblablement ramené une femme dans sa chambre, vu la nudité dans laquelle tout deux se trouvaient. « Bon matin », lui répondit-il en s’étirant. Ses yeux se posèrent sur le cadran, lui provoquant un terrible soubresaut. Il était en retard, très en retard. Il agrippa rapidement ses vêtements de la veille et les enfila en un rien de temps. « Je suis désolée, je suis en retard pour un rendez-vous. Il faudrait que tu partes aussi », lui lança-t-il de la façon la plus insensible qui fût. De toute façon, il ne comptait pas la revoir. Également, il ne voulait pas que sa soeur ne la surprenne en train de fouiller dans leur armoire… imaginez le malaise! Le jeune homme attendit qu’elle se rhabillât et tous deux quittèrent la demeure des Tomson. Il lui fit la bise (faut quand même être un peu courtois quand même…) et lui souhaita une bonne journée avant de s’élancer sur la route. Johanna allait lui dé-vis-ser la tête. Elle allait lui arracher, la piétiner, cracher dessus puis l’utiliser comme combustible. Leur différend avait été mis de côté; les choses semblaient se placer en ordre. Et voilà qu’il arriverait en retard à leur premier important meeting pour la presse. Ils s’étaient pourtant promis mettre des siens pour que cette collaboration fonctionne, pour qu’ils fassent de ces deux mois une vraie fierté pour Thomas. Mais comme à chaque fois, il faisait en sorte que les choses s’enveniment, que Johanna puise en lui une autre source de frustration. Sur son cellulaire se trouvait une masse de textos non lus ainsi que quelques appels manqués. Une heure de retard exactement. Une putain d’heure. Je devrais engager un garde du corps, elle va littéralement finir par me tuer, se dit-il à voix haute, les yeux rivés sur la route. Sa tête se secoua doucement d’un côté et de l’autre, ne parvenant pas à saisir comment il pouvait être aussi con et désorganisé. Et pourtant, il ne le faisait pas exprès. Il avait un don pour dire les mauvaises choses au mauvais moment et pour agir en con quand il devait être le plus sérieux du monde. C’était comme un don naturel, juste un peu moins excitant que de pouvoir voler ou devenir invisible.

Billy arriva enfin devant le building où étaient situés les locaux de la presse de Thomas. La route qui semblait avoir duré une éternité était enfin terminée, et il était maintenant temps de courir le marathon jusqu’au 6e étage. Que de bonheur quand l’ascenseur est hors service depuis une semaine! Le jeune homme escalada à grandes enjambées la multitude de marches. Il entra en trombe dans les locaux puis fila jusqu’à dans la salle de réunion qui, à son grand malheur, était occupée par Johanna qui faisait les cent pas. Il n’attendit même pas d’avoir repris son souffle avant de s’excuser: « Je suis complètement désolée! J’ai manqué le réveil. Je suis vraiment, vraiment désolée », lui dit-il en se penchant par en avant, les mains appuyées sur les cuisses. Il était épuisé de sa course qui, vu l’expression de Johanna, n’avait pas du tout été gagnée.

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Je ne suis que peu étonnée d'être la première à franchir le seuil de la presse de Thomas. Située au sixième étage d'un immeuble imposant, elle se trouve être immensément grande, plus que je ne l'aurais crue. Je me sens toute drôle à l'idée de fouler le sol de l'entreprise de mon ami. Surtout maintenant qu'elle est techniquement à 50% à moi, tout du moins pour deux mois. Je ne sais trop quoi faire, où aller. Je mets d'ailleurs un certain temps à trouver la salle de réunion. Plusieurs sièges sont à disposition et je ne sais pas lequel choisir. Ça peut paraître bête mais sur le coup, ça m'apparaît être un dilemme insurmontable. Il faut blâmer le stress je suppose. Ainsi, comme une andouille, j'essaie toutes les chaises une à une. Me dandinant sur la dernière, mal à laisse, je décide de retenter de m'asseoir sur la première. Décidément, rien à faire, je ne me sens pas à ma place ici. Mais alors vraiment pas. Un chef d'entreprise est censé en imposer et me voilà , tremblante à essayer des sièges comme s'il s'agissait d'un choix capitale. Je me fais penser quelques secondes à Sheldon Cooper dans la série The big bang theory. "Merde." Je jure dans ma barbe. Si les employés de la petite entreprise de feu mon meilleur ami me voyait ainsi, il se ficherait de moi à coup sûr. Finalement je décide de me reprendre et de rester sur le siège sur lequel je suis prestement assise, ça suffit les conneries.

En attendant Billy, je sors un petit cahier de mon sac et un stylo. Je ne sais pas trop pourquoi je les ai acheté ce matin, je pensais que ça pouvait être utile. J'en ai aussi profité pour me procurer un paquet de chips. Quand je stresse j'adore manger des chips. Ça en deviendrait presque compulsif. Dix minutes plus tard, je me décide à ouvrir le paquet, les mains légèrement tremblantes. Quarante-cinq minutes plus tard, j'ai les ai fini et je ne suis plus du tout stresser. Non, bien au contraire, je suis agacée. Il a presque une heure de retard ! Je ne sais même pas pourquoi ça m'étonne en fait. Je devrais pourtant y être habituée. On dirait qu'il fait tout pour me mettre en rogne, c'est fou ! Surtout que là, c'est important, il s'agit de la presse de son frère quand même ! Ça ne signifie donc rien pour lui ? Ennuyée, je tourne en rond dans la pièce. Mon regard se braque sur l'entrée quand les portes de la salle s'ouvre enfin pour laisser place à un Billy essoufflé. "Je suis complètement désolé ! J’ai manqué le réveil. Je suis vraiment, vraiment désolé." Je lève un indexe menaçant en l'air, je fulmine intérieurement. Je finis par soupirer. "Tu sais quoi ? Je m'en fou. C'était à prévoir de toute manière." Je suis on ne peut plus dépitée. Je ne sais même plus quoi dire à force. "Est-ce que tu comptes faire cette réunion ou tu passais juste pour te montrer ?" Ironique à souhait, je croise les bras en l'assassinant du regard. Plus j'y pense, plus je me dis que c'est moi qui ait un soucis. Après tout ce temps, je devrais me ficher complètement de son comportement pourtant, ce n'est pas le cas et je ne sais pas pourquoi.

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Le jeune homme devait peut-être revoir ses choix de vie ou du moins, sa façon de faire son deuil. Cela faisait presque trois mois que Thomas était parti et il était encore au stade où il avait besoin de boire de l’alcool et de cumuler les conquêtes. Il n’était pas encore prêt à faire face à la musique, à cette réalité qui lui déchirait les entrailles et l’empêchait d’attraper son souffle. Il préférait la voiler sous une masse de conneries qui, bien qu’elles semblaient l’aider dans son aveuglement, avaient des conséquences néfastes sur son entourage. Non seulement Sage n’en pouvait plus de le voir débarquer le soir avec des femmes qu’elle n’avait jamais vues auparavant, mais aussi de le voir ne rien faire d’utile dans la maison, ni même dans sa vie. Billy savait que son comportement était répréhensible et qu’il faisait preuve d’une grande immaturité, mais c’était comme s’il n’était pas capable de faire un trait sur son frère. Il était incapable d’accepter que ce dernier était parti pour de bon, que sa mort ne pouvait être renversée. Il préférait vivre dans le déni, sous les effets de substances qui lui permettaient de tenir loin de lui tout ce qui lui rappelait son frère. Il en avait aussi marre d’essayer de prétendre que tout allait bien, que la douleur s’était quelque peu dissipée, alors qu’en réalité il n’avait envie que de pleurer. Pleurer jusqu’à ce que son corps se déshydrate, que l’eau se soit vidée en intégralité. Parce qu’au fond de lui, il n’y avait personne pour l’aider, personne pour se sentir aimé ni important. Il n’avait pas de copine, n’avait qu’une soeur qui désertait la maison la majorité du temps dû à son emploi du temps chargé, de nouveaux collègues de travail qu’ils ne connaissaient pas. Tout ce qu’il avait, c’était Roxy qui prenait le temps de l’appeler, de lui demander comment il allait. Et du moment où ils raccrochaient, il retrouvait sa pénombre; l’obscurité des souvenirs qui le hantaient jour et nuit. Alors il préférait boire pour tenir ces songes loin, très loin de lui. Il préférait partager sa nuit avec des femmes qu’il ne connaissait pas pour ne pas avoir à broyer du noir. Il était incapable d’affronter sa mort, incapable de s’avouer que c’était terminé, qu’il ne reviendrait pas.
Alors oui, il agissait en con. De toute façon, ce n’était pas comme s’il sentait que sa vie avait encore un sens. Il tournait en rond sans savoir quelle sortie prendre, quelle chemin le mènerait vers la tranquillité d’esprit. Jo avait mille et une raisons de lui en vouloir pour agir de la sorte, mais il n’avait pas la force de changer parce que cela voudrait dire qu’il aurait à affronter... et lâcher prise était beaucoup plus facile que de se lever et de se battre.
"Tu sais quoi ? Je m'en fou. C'était à prévoir de toute manière. », lui lança-t-elle lorsqu’il eut terminé de s’excuser. Le jeune homme soupira, son comportement ne surprenait personne, pas même lui-même. "Est-ce que tu comptes faire cette réunion ou tu passais juste pour te montrer ? », enchaina la jeune femme, toujours animée par la frustration. Le scientifique prit place sur une chaise choisie aléatoirement. « Oui, je te l’assure. J’ai eu une dure nuit », répliqua-t-il tout simplement sans donner davantage de détails sur sa nuit passée avec une belle inconnue. Il sortit son ordinateur, un calepin et un crayon. Il ignorait pourquoi il avait amené toutes ces choses, car il ne savait en réalité même pas ce qu’ils allaient faire entre ces murs oppressants.

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"Oui, je te l’assure. J’ai eu une dure nuit." Je hoche la tête d'un air absent. "Huhum." Je me contente de marmonner, je n'ai aucune envie d'épiloguer sur sa soirée. Quelque chose me dit que je réprouverai ce qu'il a fait de toute manière. Alors autant éviter d'aborder les sujets qui fâchent, on n'est pas là pour ça. Je me suis promis que j'agirais de manière professionnelle et je compte bien le faire, quoiqu'il m'en coûte. Je me suis mise une pression d'enfer avec toute cette histoire, je veux faire les choses bien pour Thomas. Le problème, c'est que je ne sais pas quoi faire. Ni comment faire. C'est très déstabilisant, je n'y connais rien au monde des affaires et pourtant je dois gérer une entreprise."Bon bah on va essayer de s'y mettre." Je prends de nouveau place sur le siège que j'avais choisi si durement quelques minutes auparavant alors que je prononce ces mots. J'essaie d'avoir l'air convaincue mais ma voix reflète mon anxiété. Je ne suis pas à l'aise et ça se transparait dans ma façon d'agir. "Si on pouvait terminer avant le déjeuner, ça m'arrangerait, j'ai rencard." Logan a réservé dans un bistrot tout ce qu'il y a de plus charmant et je n'ai pas envie de louper ça, surtout pas pour rester coincer avec Billy et faire de la paperasse. "Je crois qu'il faut qu'on parle du rendement de la boîte." Je n'ai absolument aucune idée de ce qu'il convient de faire dans ce genre de réunion. Plus pommée que moi, tu meurs, je l'avoue. Cela-dit, j'ai quand même fait un petit tour sur le net hier soir pour m'informer un peu. J'ouvre tout de même mon calepin et me munit d'un stylo. "Ils sont apparemment en baisse depuis..." Je me racle la gorge, mal à l'aise. "Depuis la mort de Thomas." Je me gratte la tête, un peu perdue. Je me doute qu'il faut remonter les chiffres, mais comment ? Je n'en ai strictement aucune idée, putain. Je suis dans de beaux draps, on est dans de beaux draps. "Je pense qu'il faudrait organiser une réunion du personnel ou un truc comme ça." J'estime que c'est le chose à faire, pour discuter un peu avec les employés, parler de la boîte. Ils en savent sans doute plus que moi. Ceci-dit, ça n'engage que moi. Je ne pense pas avoir toutes les réponses pour le coup mais alors vraiment pas. "Est-ce tu as des choses en tête ? Tu as peut-être des idées ? Ou est-ce que ta dure nuit t'a empêché d'y penser ?" Je ne peux m'empêcher de lui lancer une petite pique, rien de bien méchant, j'esquisse même un petit sourire.

Dernière édition par Johanna Wade le Sam 18 Fév - 15:20, édité 1 fois

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À peine était-il assis qu’il savait que cette rencontre n’allait pas prendre une bonne tournure. Il sentait que Johanna était encore tendue, déjà exaspérée par son comportement. Il préférait ainsi ne pas trop parler pour ne pas encore dire quelque chose qui la mettrait hors d’elle. Il s’affairait plutôt à passer à travers des documents qu’il ne comprenait pas tout à fait et qui suscitaient une sorte de rage montante en lui. Les yeux rivés sur les graphiques, concentré sur la compréhension de l’information que les documents transmettaient, le jeune homme tentait de masquer la frustration qui naissait en lui. "Si on pouvait terminer avant le déjeuner, ça m'arrangerait, j'ai rencard.", lui lança Jo, ébranlant la concentration que Billy commençait enfin à avoir. "Oui, oui. On ne fera pas attendre ton petit Logan.", lui répondit-il en ne levant même pas les yeux vers elle. "Je crois qu'il faut qu'on parle du rendement de la boîte.", poursuivit-elle. Billy continuait à analyser les graphiques et la panoplie de chiffres qui constituaient le bilan financier de la presse. "Oui, c’est ce que je remarque ici.", dit-il tout simplement. Lorsque Billy était concentré, il n’était pas la personne la plus sociale qui fût. C’était la raison pour laquelle il était un bon astrophysicien; lorsque les chiffres et les calculs s’enlignaient dans sa tête, il était transporté sur une autre planète, totalement à l’écart des personnes qui pouvaient l’entourer. Même pas le bruit d’une mouche qui vole ne pouvait le tirer hors de son monde. Toutefois, lorsqu’elle mentionna le décès de son frère comme étant le point d’origine de la baisse des chiffres d’affaires, le jeune homme ne put s’empêcher de relever la tête vers sa collègue, un peu remué par la mention de l’événement. Il préféra ne dire mot, ne pas extérioriser les émotions que cela remuait en lui. Sans plus, il replongea son nez dans les documents, cherchant à comprendre ce qui avait bien pu causer cette baisse de profits. "Je pense qu'il faudrait organiser une réunion du personnel ou un truc comme ça.", suggéra Johanna. Billy devait consentir qu’il ne s’agissait pas d’une mauvaise idée. Après tout, les employés devaient sûrement être mieux renseignés sur l’état de la presse, d’autant plus qu’ils pourraient certainement leur apporter de nouvelles idées innovatrices pour redonner un souffle à l’entreprise. Il s’apprêtait, pour une des rares fois, à manifester son support envers son idée, mais n’eut même pas le temps d’ouvrir la bouche avant que Jo ne reprît parole. "Est-ce tu as des choses en tête ? Tu as peut-être des idées ? Ou est-ce que ta dure nuit t'a empêché d'y penser ?", lui lança-t-elle, une mine légèrement amusée dessinée sur son visage. « Ha, ha, ha. », s'exclama-t-il, simulant être insulté par sa remarque. « On ne s’arrêtera pas sur la jalousie qui doit certainement t’allumer en ce moment », répliqua-t-il à la blague lui aussi, non sans jeter un coup d’oeil coquin en sa direction. « Plus sérieusement, je crois qu’un meeting serait impératif. Les employés pourront certainement nous donner des pistes pour mettre sur pied un plan d’action », partagea-t-il avec Jo. S’ils voulaient redorer l’image de la presse, ils devaient confectionner un plan détaillé et constructif et cela, ils ne pouvaient le réaliser seuls.

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"Oui, oui. On ne fera pas attendre ton petit Logan." Je me retourne vivement vers lui, qu'est-ce qu'il a dit ? C'est typiquement le type de comportement qui m'agace profondément chez Billy, pourtant, pour la deuxième fois de la journée, je prends sur moi. J'ai décidé que je ne m'énerverai pas et je vais m'y tenir. Hors de question de sortir de mes gonds comme j'ai pu le faire au lendemain de mon anniversaire. Ainsi, je me contente de le remercier d'un ton sec. "Merci." Nous nous mettons donc au travail, nous afférent à analyser les chiffres de l'entreprise du mieux que nous pouvons. Ce qui est, pour ma part, que peu concluant. Billy, lui, bien qu'étant dans un domaine très différent, à fait des études. Moi ? Je n'ai jamais été douée et encore moins avec les chiffres. Ceci-dit, je remarque tout de même une baisse des bénéfices, baisse que Billy lui aussi semble noter. "Oui, c’est ce que je remarque ici." Perdue dans les papiers, je cherche désespérément une solution. Organiser une réunion du personnel semble être la chose à faire. Oui, c'est ce qu'il faut. "Ha, ha, ha." Voilà ce que Billy rétorque d'un air offusqué quand je le taquine sur sa nuit d'hier. "On ne s’arrêtera pas sur la jalousie qui doit certainement t’allumer en ce moment." Il me jette un regard de biais alors que je soupire. "Mais oui bien sûr, je crève de jalousie, tu ne peux pas savoir !" J'ironise, évitant soigneusement son regard, j'aimerais autant éviter d'entrer dans ce genre de débat parce que je sais pertinemment que ça nous amènerait à parler de la nuit que nous avons passé ensemble... Et ça, ce serait tout productif. Ça me déstabilise bien trop. Et il ne faut pas que je le sois, non, il faut que je sois concentrée afin de prendre soin de l'entreprise de Thomas. Voilà pourquoi je me suis soulagée d'entendre Billy reparler de la presse. "Plus sérieusement, je crois qu’un meeting serait impératif. Les employés pourront certainement nous donner des pistes pour mettre sur pied un plan d’action." Je hoche la tête. Pour une fois, on est sur la même longueur d'onde. Ce qui est assez... rassurant. Je n'aurais pas aimé avoir à me disputer sur ce sujet-l) avec lui."Espérons qu'ils soient plus qualifiés que nous !" Je plaisante comme pour détendre un peu l'atmosphère. "Je vais être très honnête avec toi, hormis ça, je ne sais pas quoi faire d'autre." Je soupire, faisant valdinguer légèrement les feuilles que j'avais en main au passage. "Je suis paumée, paumée, paumée." Dépitée, je repose ma tête sur la table en maugréant.

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"Mais oui bien sûr, je crève de jalousie, tu ne peux pas savoir !”, lui dit sarcastiquement Jo. Évidemment, Billy ne put s’empêcher de rouler les yeux de la façon la plus enfantine. Il aimait particulièrement s’en prendre à Jo, la pousser à bout pour qu’elle finisse par se fâcher. C’était son petit jeu préféré. Il essayait toutefois retenir ses envies de la provoquer, car il savait qu’ils avaient une sérieuse tâche à accomplir et que l’heure n’était pas à la blague. Il préféra donc ne pas continuer sur cette pente, d’autant plus que considérant leur passé, celle-ci aurait été très sinueuse si empruntée. Il décida donc d’ouvrir son calepin et d’attraper son stylo pour ensuite écrire quelques bullet points. Un meeting avec l’équipe, un plan d’action pour remettre la presse sur le droit chemin. Ils avaient deux idées, mais ce n’était pas suffisant. "Espérons qu'ils soient plus qualifiés que nous !”, lui lança Jo. Le jeune homme ne pouvait qu'approuver; il espérait vraiment que d’organiser une rencontre avec l’ensemble de l’équipe leur permettrait de trouver une solution aux problèmes de la presse. lls ne pouvaient laisser la presse mariner dans cette baisse de profits, sans quoi cela signerait son arrêt de mort. Billy n’avait pas envie que la presse rejoigne Thomas dans sa tombe; il en ferait ainsi sa priorité. “Ça, je n’en doute même pas”, lui répondit-il en gardant ses yeux rivés sur les documents parfaitement disposés devant lui. “Il faudrait qu’elle aille lieu d’ici les prochains jours, je doute que l’on puisse laisser ça stagner plus longtemps”, renchérit-il en levant les yeux vers Jo, attendant son approbation. À part cela, qu’y avait-il à faire sauf espérer que leur travail mène miraculeusement à une solution effective sur le long terme? Deux mois semblaient extrêmement longs, et il ne pouvait qu’espérer atteindre cette échéance le plus rapidement possible tant il se sentait déjà démuni de ses moyens. Être forcé à travailler sur un aussi gros projet sans même avoir les connaissances nécessaires, ni même de références, c’était colossal et semblait effleurer l’impossible. “Je me sens pauvre en solution, moi aussi. Y’a une raison pour laquelle Thomas faisait toujours mes devoirs d’économie!”, lança-t-il à la blague. “Je vais préparer le e-mail qu’on enverra à l’équipe”, proposa-t-il en ouvrant le clapet de son ordinateur. Pendant que ce dernier s’allumait, il proposa à Johanna de lui remplir sa tasse de café; leurs méninges étant particulièrement sollicités, une seule tasse n’était pas suffisante pour les ravitailler en énergie. Alors qu’il versait la délicieuse boisson opaque, il plongea involontairement son regard dans celui de Johanna. Et sans même comprendre pourquoi, un frisson l’envahit. Ses yeux se posèrent sur ses lèvres, son cou et sur sa poitrine qui lui rappelaient avec vivacité leur nuit endiablée. Il avait envie de l’embrasser langoureusement et de la prendre contre le bureau. Rapidement, il balaya ces idées malsaines de sa tête et reposa la carafe à où elle l’était. Un léger malaise s’installa en lui, alors il préféra poser ses yeux sur son ordinateur pour écrire ce foutu message voulant à tout prix oublier les instants précédents.

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"Ça, je n’en doute même pas" Je soupire, on fait vraiment de piètre chef d'entreprise. Je me fais l'impression d'être une gamine de cinq ans qui fait semblant de bosser comme sa mère, je ne sais pas ce que je fais mais je le fais. Oh mon dieu... En fait j'ai l'impression d'être de retour à l'école : l'horreur. "Il faudrait qu’elle aille lieu d’ici les prochains jours, je doute que l’on puisse laisser ça stagner plus longtemps." J'aimerais tellement que tout se passe bien, que tout soit facile, sans soucis. Mais ce n'est pas le cas, bien évidemment. La vie ne fait pas de cadeaux comme on dit. "Ouais ce serait pas mal. Pour évitez que ça ne se dégrade plus." Enfin je dis ça mais je ne sais absolument pas si la réunion va vraiment changer quelque chose. Après tout qui nous dit que le problème n'est pas plus profond qu'il n'y paraît ? Qui nous dit que les employés pourront nous aider ? Rien et ça, ça me fait peur. Je vis toujours de façon si spontanée, je me dis carpe diem et ça me convient parfaitement. Sauf que là, il ne s'agit pas de moi, il s'agit de Thomas. Et il ne faut pas que je fasse tout foirer mais c'est si dure... "Je me sens pauvre en solution, moi aussi. Y’a une raison pour laquelle Thomas faisait toujours mes devoirs d’économie !" Je ris légèrement, je m'en rappelle comme si c'était hier. Ils s'arrangeait toujours et leur complicité ressortait à travers cela. "Et tu faisais ses devoirs de physique, je me rappelle." Tellement de souvenirs, tellement de bons moments passés ensemble, jamais je ne pourrais les oublier. Je l'aimerais quelque chose, je me dis que ce serait plus facile si je ne me souvenais plus de ton Thomas, si je ne me souvenais plus que j'avais perdu mon meilleur ami... Je balaye ses idées de ma tête, inutile de ressasser tout ça. Je dois me concentrer, rester efficace... ou tout du moins essayer. "Je vais préparer le e-mail qu’on enverra à l’équipe." Un sourire soulagé se dessine instinctivement sur mes lèvres. Je ne suis vraiment pas très doué pour les courriers officiels. Je me souviens encore de quand j'ai dû rédiger ma lettre de stage en troisième, au collège, j'étais perdue, Sage a dû m'apporter son aide tant c'était désastreux. "Génial, merci beaucoup !" Mon soulagement transparait dans ma voix. C'est alors que Billy me propose un café. "Oh oui je veux bien ça pourra peut-être me donner du courage." C'est tout du moins ce que j'espère. Il s'affaire et une fois fait, il baisse son regard qui rencontre le mien. Rien de bien méchant au départ mais, alors que les secondes s'égrènent et que ses yeux sont toujours rivés aux miens, une intensité nouvelle se crée entre nous. Quelque chose de spontané, de profond. Mon coeur s'emballe sans que je ne puisse le contrôler, ma respiration devient plus lourde, saccadée. Tout un tas d'image traversent alors mon esprit, des images tout sauf catholiques. J'ai comme l'impression que son regard me consume... J'ai l'envie suprême, pendant un instant, qu'il me touche. Rhoo c'est ridicule, il ne m'attire même pas (Ding ! Ding ! Mensonge). Bon d'accord mais alors rien qu'un peu... Non, non, et non ! C'est Billy, Billy qui m'agace tout le monde (et vice et versa), je ne l'apprécie même pas. C'est ce que je suis obligée de me dire pour arriver à détourner les yeux alors qu'il pose la carafe sur la table. "Hummm, on devrait... ouais... enfin... on devrait se mettre à rédiger le mail... enfin toi... Oui, oui parce que c'est toi qui rédige le mail." Je me racle la gorge, fouillant dans mes papiers, à la recherche de je ne sais quoi. "Moi je vais... ja vais..." Je ne sais pas vraiment pas quoi faire de mes dix doigts en ce moment. "Ben... je vais lire ça !" Je m'empare d'une feuille comme s'il s'agissait du Messi. Mon trouble est plus que visible et il n'y a aucun doute : Billy s'en est aperçu. Mes joues sont légèrement rosies, je bégaie, l'archétype même de la personne troublée. Et ça me gêne terriblement qu'il puisse savoir à quel point il m'a fait de l'effet il y a quelques instants...

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Il était curieux de voir Billy aussi concentré dans l’exécution d’une tâche, surtout depuis les trois derniers mois. Certes, il était un garçon très travaillant qui fournissait toujours les efforts nécessaires pour répondre de ses fonctions. Mais depuis le décès de Thomas, le jeune scientifique était dans un éternel laisser-aller et il était rare de le voir concentré sur quelque chose d’autre que l’absorption d’alcool ou ses projets de recherche. Le deuil lui avait fait complètement perdre la carte. À vrai dire, il refusait d’accepter la réalité; il préférait donc tout faire en son pouvoir pour ne pas y penser, car ça le tuait à petit feu de se dire qu’il ne reverrait jamais plus Thomas. Alors, d’une manière ou d’une autre, il faisait en sorte que ses pensées vaquent vers quelque chose qui n’impliquait pas son frère. Et bien souvent, il optait pour boire, parce que c’était la meilleure façon d’oublier. "Et tu faisais ses devoirs de physique, je me rappelle”, renchérit Johanna. Cela fit sourire Billy, suscitant l’apparition de souvenirs. D’entre les deux, Billy était celui qui réussissait le mieux à l’école. Il y avait certes quelques matières dans lesquelles il avait plus de misère, mais de façon général, il n’avait rien à envier à Thomas. En dehors de l’école, son frère jumeau avait toutefois tout pour lui: une masse d’amis, la popularité et bien sûr, un charisme à tout racler. Billy adorait son frère, mais il lui était parfois difficile de vivre dans son ombre. Alors il l’enviait secrètement parce que sa vie semblait parfaite sous tous ses angles. Et Billy, il n’avait qu’un bulletin qui rendait papa et maman très fiers. Néanmoins, il ne pouvait pas dire que sa vie était remplie de malheur; au contraire, il avait une multitude de souvenirs qu’il chérirait pour le restant de sa vie, car ultimement, il était bien entouré, pour le peu qu'il avait.
Lorsqu’il eut terminé de verser du café dans la tasse de Jo, il y eut un malaise général. Billy plongea son regard sur son écran d’ordinateur, s’affairant à entamer la rédaction du email. Il se demandait si Jo avait lu le désir dans ses yeux, si elle avait deviné ce qui se passait dans la tête du scientifique. En réalité, il ne voulait pas savoir, ayant trop peur de la réponse. Il était très, très mal à l’aise de ces quelques petites secondes, ces dernières ayant suffi pour charger l’air d’une tension électrique sans pareil. “Je me sens d’ailleurs inspiré pour le email”, dit-il pour justifier sa concentration soudaine. En réalité, il n’avait aucune foutue idée de quoi écrire, outre le fait qu’il devait y avoir une rencontre d’urgence d’ici les prochains jours. Néanmoins, il s’attarda à sa tâche sans dire un mot de plus, préférant s’enfermer dans sa bulle.

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"Je me sens d’ailleurs inspiré pour le email." Je hoche la tête vivement. "C'est bien, c'est bien !" Oui, oui c'est bien... Il écrit le mail, on s'en va et je prétends que tout ceci ne s'est passé. Enfin, techniquement il ne s'est rien passé, non... C'est simplement ma tête qui me joue des tours. Oui c'est ça. Billy se concentre donc sur son ordinateur et le silence retombe. Je fais toujours mine de jeter un coup d'oeil aux papiers. Je ne sais même pas ce que je regarde, ce sont des chiffres à ce que je vois mais je n'ai aucune idée de ce qu'ils représentent. Heureusement que je n'ai pas ma propre affaire, je serais tout bonnement perdue. Le silence est si profond que la sonnerie de mon propre portable me fait sursauter. "Bordel !" Je m'en empare rapidement. "C'est Logan, désolée." J'esquisse un sourire gêné avant de décrocher. "Hey toi ! Qu'est-ce qu'il y a ? Je suis toujours en réunion... [...] Oui je sais moi aussi ça me fait bizarre. [...] Hein ? Tu vas être en retard ? [...] Comment ça tu viens pas ? [...] En quoi c'est mon problème qu'Austin ait trop picolé la nuit dernière ? [...] On a une réservation Logan, on a dû attendre plus d'un mois !" Je me lève d'un bond, je n'arrive pas à y croire... J'aime bien Austin, c'est vrai mais ce n'est pas la première fois qu'il boit et que Logan doit rattraper ses conneries. Ça va bien cinq minutes mais ça commence réellement à m'agacer. "Pourquoi je m'énerve ? Tu es sérieux ? [...] Je sais très bien que c'est ton ami... [...] Tu veux savoir ce qui me soul ? C'est qu'il y a toujours quelque chose Logan ! C'est soit ton boulot, soit Austin... Qu'est-ce que ce sera la prochaine fois ? [...] Mais rends-toi compte, s'il boit, il doit faire face aux conséquences de ses actes ! [...] Ce n'est pas trop problème et ce n'est certainement pas le mien. [...] Donc en gros on ne fête nos deux mois ?" Je suis tellement en colère que j'en oublie la présence de Billy. Pire que ça, je suis hors de moi, c'est la première fois que je suis réellement sérieuse avec un gars, la première que je m'implique autant et voilà qu'il fait ça... Je sais bien qu'il est important d'être présent pour ses amis, mais si Austin fait un peu trop la fête, il devrait être capable de se remettre tout seul. Ce qu'il dit ensuite ne fait qu'exacerber ma rage. "Comment ça c'est comme moi ? [...] Je n'ai annulé q'une seule fois un rencard avec toi ! [...] Sage venait d'arriver en ville, ça faisait des mois que je ne l'avais pas vu... En plus avec ce qui s'est passé... Je n'arrive pas à croire que tu puisses me le reprocher ! [...] Tu te fous de moi ou quoi ? Je ne te laisse pas quoi... [...] Bien sûr que non je suis pas distante ! D'où je serais distante ? [...] Oui j'aime avoir un peu d'intimité, où est le mal ? [...] Je n'arrive pas à y croire... [...] Non tu sais quoi ? Tais toi, je ne veux plus rien entendre ! [...] Non, non, non... Je me suis ouverte à toi comme je ne l'ai jamais fait Logan et le fait que tu me reproches ça prouve que tu ne me connais pas du tout. Alors je te dis au revoir. [...] Au revoir Logan !" Je jette le téléphone sur la table, furibonde. Comment peut-il croire ça de moi ? Après tout ce que je lui ai confié, après tout ce qu'on a partagé ? Je serre et desserre les poings sans pouvoir m'en empêcher. Lorsque je me retourne, je croise le regard de Billy... Mon dieu je viens de me donner en spectacle devant lui. J'ai totalement oublié sa présence. J'ouvre la bouche, incapable de trouver quoi dire. Je reste là, plantée devant lui, pendant une bonne minute. "Désolée, ça a dû te déconcentrer." Je lance ça d'un ton neutre, m'essayant de nouveau pour me concentrer sur les papiers que j'avais lu et non compris il y a quelques minutes. Ça semble quelque peu dérisoire de lui sortir cela au vu de la situation mais je n'ai aucune idée de comment justifier ce qui vient de se passer. Plus le temps passe, plus ma gêne s'accentue. Ce n'est décidément pas ma journée. Qu'es-ce que j'ai fait au bon dieu pour mériter ça ? Je ne sais pas mais il doit définitivement avoir quelque chose contre moi. Alors que je fins de lire les divers documents à ma disposition, je ne peux m'empêcher de ressasser la conversation que je viens d'avoir avec Logan. Sans que je ne puisse le contrôler une seule et unique larme de frustration coule sur ma joue. Mais quelle andouille je suis !

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Billy & Jo

FIRST MEETING

Billy commença la rédaction du courriel en essayant de faire abstraction de la présence de Johanna. Il n’avait pas envie d’être dérangé une seconde fois par des idées perverses qui traversent clandestinement son esprit. Il prit donc une bonne gorgée de café, posa ses doigts sur son clavier et tapa les premières choses qui lui venaient à l’esprit, espérant garder un ton professionnel dans ses écrits. Ça lui faisait bizarre d’écrire un tel email. Normalement, lorsqu’il communique par courriels, c’est pour écrire avec des termes que personne, hormis des scientifiques en astrophysique ou domaines connexes, ne pouvait comprendre. Il essayait donc de soigner son anglais, d’écrire en utilisant des termes plus soutenus. Il espérait vraiment que Jo ne se moque pas de son absence de compétence pour tout ce qui est du domaine de la gestion.
Alors qu’il avait bien commencé l’écriture du email, qui semblait être la tâche la plus ardue du monde, le portable de Jo se mit à sonner. Il ne put s’empêcher de lever les yeux vers elle, soudainement extirpé de sa bulle. Bien sûr que c’est Logan qui l’appelait, biiiiiien sûr! Le scientifique roula ses yeux en direction de Jo pour lui témoigner de son agacement. Après tout, n’étaient-ils pas en meeting? Il posa derechef son regard sur son écran d’ordinateur pour reprendre la tâche là où il l’avait laissée. Toutefois, sa concentration ne revint pas, trop occupée à s’attarder à son cortex auditif. Il ne put s’empêcher d’observer Johanna qui s’énervait contre Logan au téléphone pour une histoire de rendez-vous et de cancellation de dernière minute. Une forte envie de lui faire des grimaces le prit, mais il la balaya du revers de la main. Ils étaient parvenus à ne pas s’énerver l’un contre l’autre ce matin-là, aussi bien continuer sur ce chemin qui semblait, jusqu’à présent, sécuritaire. Un peu mal à l’aise, il tenta de poursuivre la composition du message, mais il ne parvint pas à enchainer deux mots tant il était concentré à écouter l’houleuse conversation téléphonique. Après ce qui lui sembla une éternité, Johanna mit fin à leur querelle. "Désolée, ça a dû te déconcentrer”, lui dit-elle de toute évidence très énervée. Billy ne savait pas quoi lui dire se sentant soudainement de trop dans la pièce. “Non non, ça va”, répondit-il tout simplement. Certes, il avait été complètement déconcentré et avait été incapable de ne pas écouter chacune des paroles prononcées lors de cet appel. Alors qu’il tentait de continuer pour une énième fois son foutu courriel, il jeta, de temps à autre, de furtifs petits coups d’oeil vers Johanna qui semblait toujours aussi irritée. Ne sachant pas trop si cela était approprié, il prit parole : “Tu… tu veux en parler?” Il ne savait pas trop à quoi s’attendre de la part de Johanna. Les confessions n’étaient pas communes dans leur relation, mais il pouvait quand même se permettre de lui prêter son oreille.

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Billy & Jo'

"Non non, ça va." Voilà ce qu'il me répond quand je m'excuse du dérangement. Je dois être rouge comme pivoine en ce moment si je ne suis pas blanche comme un cachet d'aspirine. J'ai l'impression de bouillir intérieurement tout en étant vidé. Ce n'est pas la première fois qu'on se dispute avec Logan, ça fait un petit moment que c'est tendu entre nous. Il ne semble pas comprendre mon besoin d'indépendance. Je l'aime beaucoup, vraiment mais je ne me sens pas apte à passer chaque seconde de chaque journée avec lui. Et il me le reproche sans cesse. À chaque fois qu'il fait quelque chose de mal, comme décommander un rendez-vous il m'affuble de ce reproche. C'est tellement injuste, tellement frustrant ! "Tu… tu veux en parler ?" Je lève brusquement la tête dans sa direction alors que, dans un mouvement maladroit, je fais tomber certaines des feuilles que je tenais en main au sol. Je ris nerveusement, me hâtant de ramasser les quelques bout de papiers. Me voilà maintenant à quatre pattes sur le carrelage froid : de mieux en mieux... "Je suis bien trop maladroite." Je dis cela comme pour combler les blancs. Alors que je me rassois à ma place, je repense à ce qu'il vient de me demander. Est-ce que j'ai envie de lui en parler ? Est-ce que je le devrais ? Lui et moi n'avons jamais été proches, il est loin d'être une personne à qui j'imagine me confier. Quand j'étais jeune, Thomas était mon confident je lui disais presque tout, excepté pour les trucs de "fille" si on peut dire ça comme ça, pour ce genre de chose je parlais à Sage. Aujourd'hui je me confie à Nina ou même à Noa, ce sont de véritables piliers pour moi, ça a été dure de m'ouvrir à elles mais je suis contente de l'avoir fait. Pour être franche, je ne suis pas trop du genre à étaler mes soucis. Je préfère faire comme si tout allait bien... Enfin, tout ça pour dire que Billy est sans doute la dernière personne à laquelle j'aurais pensé parler. Et je ne suis pas sûre de me sentir assez confiance pour lui dévoiler ce genre de détail de ma vie. Je me suis toujours montré forte devant Billy, toujours à le taquiner, toujours à lui sortir une punch-line bien sentie. La seule fois où je me suis montrée vulnérable alors qu'il était présent c'était quand j'ai cru qu'il m'avait mis enceinte. Voilà pourquoi je me sens si déstabilisée par sa proposition. Surtout que, soyons honnête, jamais Billy ne s'est senti réellement intéressé par mes états d'âmes. Alors, à ma décharge, c'est plutôt étonnant. Donc je vais refuser, c'est ce qui semble le plus logique à faire. Je ne peux pas lui faire confiance pour ce genre de chose, la preuve : il a déballé à tout le monde ce qu'on a fait à mon anniversaire, c'est pour dire. Pourtant... pourtant ça me démange ! J'ai besoin d'un avis, besoin de savoir si j'ai raison ou bien son contraire. Je sais bien que Billy est loin d'être la personne la plus objective, surtout quand il s'agit de moi mais je tente ma chance. J'ai absolument besoin qu'on me dise que j'ai raison, que je ne suis pas névrosée. Oui, il le faut. "Il annule notre rencard et c'est à moi qu'on reproche des choses ? Il est sérieux ?" Je lève les bras en l'air, dépitée. "Monsieur pense que je suis distante ? Moi distante ?!?" Et c'est parti pour un tour. Je ne suis certes pas forcément très encline à parler de moi mais quand je commence à déblatérer, tout le monde sait qu'il n'y a plus personne pour m'arrêter. "Je me suis quand même impliquée avec lui ! Je passe plus de la moitié de la semaine chez lui, j'ai un tiroir dans sa chambre !" Ça peut paraître futile mais pour moi, ça veut dire beaucoup. Ça veut dire que je suis prête à prendre une véritable place dans sa vie et vice et versa. "Est-ce tu m'as vu faire ça avec quiconque au paravant ?" Je ne lui laisse "Oh noooon ! Pour la simple et bonne raison que je ne suis jamais autant impliqué !" Et c'est bien vrai, je me donne du mal pour que tout ça fonctionne. "Ça devrait signifier quelque chose mais il s'en fiche il est pas croyable !" Je soupire, passer mes nerf m'a fait du bien, cela-dit ça me laisse un léger goût amer. Plus calme, je continue. "Je..." Je l'aime beaucoup, c'est ce que je voulais dire mais je n'en suis pas capable. "Tu penses que c'est de ma faute ? Tu penses que je suis la cause de tout ça ? Est-ce que quelque chose clocherait chez moi ?" Je pensais enfin avoir trouvé quelqu'un avec qui ça pourrait marcher. Pourtant je commence à avoir des doutes. J'en suis néanmoins sûre, Logan est quelqu'un de bien. Si ce n'est pas lui le fautif, est-ce moi ? Suis-je à ce point démolie ? Comme à chaque fois que je me laisse emporter, je finis par regretter mes paroles. "Laisse-tomber fais comme si je n'avais rien dit !" Mes joues rosissent quelque peu sous le coup de la gêne. J'en ai vraiment trop dit, bien trop.

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Billy s’attendait à ce que Johanna se mette à ricaner, amusée par le fait qu’il puisse croire un instant qu’elle se confierait à lui. Et pourtant, sa proposition fut suivie d’un moment de silence. Le jeune homme était quelque peu mal à l’aise, se demandant s’il avait dépassé les bornes en lui offrant son écoute. Jo et lui n’avaient jamais été très proches, et il était normal de penser que de telles confidences n’auraient jamais leur place dans leur relation. Il fut ainsi surpris de la voir prendre parole, déballant rapidement son sac. Elle était très énervée par la situation et, très clairement, fâchée contre Logan. Billy pensait pourtant que leur relation allait si bien, pensait que son petit Logan était l’homme de sa vie. Eh bien pourtant, tout ne semblait pas aller pour le mieux. Il l’observa donc s’énerver et gesticuler dans tous les sens pour guider la masse de reproches qu’elle avait contre Logan. Il ne dit pas mot, attendant patiemment qu’elle ait terminé son monologue. Il n’aurait également pas osé la couper dans son discours, craignant trop attirer les foudres sur son cas. Il se contenta donc de rester silencieux et d’écouter ce qu’elle avait à dire avec attention. Une petite partie de lui était amusée, voire satisfaite, de voir que leur relation n’était pas aussi parfaite qu’il le croyait; que Logan n’était pas le prince charmant comme elle laissait croire. Il se sentait un peu comme un monstre de penser ainsi, mais il ne pouvait s’en empêcher. Il ne comprenait toutefois pas pourquoi il se sentait de cette façon. Ne devrait-il pas être entièrement détaché vis-à-vis sa relation avec Logan? Ne devrait-il pas tout simplement s’en foutre? Et pourtant, ça lui suscitait un petit tiraillement qui lui était étranger. Il ne voulait pas chercher à comprendre le pourquoi de sa présence, préférant balayer son existence du revers de la main. "Laisse-tomber fais comme si je n'avais rien dit !”, finit-elle par lâcher, complètement exaspérée. Billy avait quand même l’habitude d’écouter les histoires amoureuses de Roxy. Alors, il savait quand même comment s’y prendre pour écouter et conseiller. Du moins, il essayait de le faire au meilleur de ses capacités. “Non, ça va, y’a aucun souci”, le rassura-t-il immédiatement. Il ne voulait pas qu’elle se sente mal d’avoir exposé au grand jour les bobos de son couple. “Je comprends que ça puisse te fâcher”, enchaina-t-il pour calmer le jeu. Il savait très bien qu’il n’était pas un pionnier en matière de relation, tout simplement parce qu’il n’avait jamais été le prince charmant dont rêvent toutes les femmes, mais il était quand même capable de reconnaitre que Logan semblait avoir des torts, en commençant par son incapacité de reconnaitre les efforts que mettaient Johanna dans leur couple. “Je crois que tu devrais peut-être en discuter avec lui. Il n’est peut-être pas conscient de ce qu’il dit ou fait. Enfin... il ne sait peut-être pas dans quel état ça te met”, poursuivit-il sur un ton qui se voulait doux. Sans s’en rendre compte, il avait déposé sa main sur l’avant-bras de son amie, comme pour la consoler pendant qu’il prononçait ses dernières paroles. Lorsqu’il se rendit compte de son geste, il retira prestement sa main. “Désolé”, souffla-t-il, quelque peu embarrassé.

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Billy & Jo'

"Non, ça va, y’a aucun soucis." Je ne comprends pas bien pourquoi mais je me sens soulagée d'avoir son approbation. Sans doute parce que j'ai réellement besoin de me confier à quelqu'un et que j'aurais très mal supportée qu'il me rejette dans un moment pareil. Il faut me comprendre, c'est tout nouveau pour moi. Je n'ai jamais été assez sérieuse avec un homme auparavant pour avoir des problèmes de couple. Je n'ai aucune idée de comment gérer tout ça, j'admet avoir besoin d'aide. "Je comprends que ça puisse te fâcher." Je soupire, rassurée. Je ne suis donc pas complètement névrosée, j'ai bien le droit d'être en colère. Ouais... Ça ne m'avance pas beaucoup, ne vous méprenez pas, je suis ravie de savoir que j'ai raison mais ça ne me dit pas ce que je dois faire. Comment arranger les choses ? Et surtout, peuvent-elles être arrêté ? "C'est plus dur que ce que je pensais..." Je murmure cet aveu si bas qu'il doit tendre l'oreille pour l'entendre. Je n'aime pas me montrer faible, quelque soit la raison. Et avouer ne pas réussir quelque chose d'aussi enfantin qu'entretenir une relation est bien une preuve de faiblesse quelque part. Le plus ironique dans tout ça, c'est que j'arrive à en discuter avec Billy, la personne avec qui, théoriquement, je devrais avoir le plus de mal à le faire. C'est presque... naturel. Je ne saurais pas l'expliquer, tout ce que je peux dire c'est que sa présence m'aide d'une manière étrange. "Je crois que tu devrais peut-être en discuter avec lui. Il n’est peut-être pas conscient de ce qu’il dit ou fait. Enfin... il ne sait peut-être pas dans quel état ça te met." Je n'écoute même plus ce qu'il me dit, toute mon attention est focalisée sur sa main, main qui repose actuellement sur mon bras. Mon souffle se meurt et je ne peux pas m'empêcher de frissonner sous son contact. "Désolé." Il retire sa main rapidement, semblant réaliser à l'instant même ce qu'il a fait et j'en suis presque... déçue ? Je déglutis péniblement, encore plus perdue que je ne l'étais déjà. Mon regard s'ancre au sien et inévitablement, mon coeur se met à battre la chamade. Billy a un effet particulier sur moi que je ne comprends pas. Il est capable me rendre complètement cinglée et d'autre fois, de me surprendre par sa gentillesse comme il le fait maintenant. Je n'arrive jamais à savoir ce qu'il va faire et ça rend le tout tellement plus compliqué. Pourtant, je suis heureuse qu'il fasse parti de ma vie, je m'en rends compte maintenant. "Tu m'as manqué, je suis heureuse que tu t'installes ici." Qui aurait cru que je puisse lui avouer un truc pareil ?

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Billy & Jo

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Il était plutôt inusuel pour la paire d’entrer dans les confidences. Ils étaient amis depuis si longtemps et pourtant, jamais n’avaient-ils réellement été en mesure de se confier l’un à l’autre. Ils avaient toujours eu une relation amicale particulière. Ils se chamaillaient sans cesse comme deux gamins incapables de prendre sur eux-mêmes. Thomas avait toujours été le plus posé des deux et c’était possiblement celui à qui Johanna pouvait se confier. Il était plus mature et savait toujours utiliser les bons mots pour raccrocher un sourire sur le visage d’une personne chagrinée. Billy, quant à lui, n’avait jamais été celui à qui on se confiait. Outre Roxy, personne ne lui disait vraiment quoi que ce soit. Inutile de dire qu’il était donc surpris que Johanna se confie ainsi à lui sur sa relation amoureuse. Néanmoins, il se sentait privilégié qu’elle s’ouvre à lui. Il sentait qu’il avait de l’importance; qu’il n’était plus l’ombre qu’on passe sans considérer. Il l’avait donc écoutée avec toute l’attention du monde, avec une oreille attentive et un regard compatissant. Peut-être avait-il poussé la chose en déposant sa main sur son bras. En réalité, il n’avait pas vraiment songé à son geste. Ce dernier s’était fait tout naturellement, comme s’ils avaient l’habitude d’entrer dans des discussions aussi intimes. Ils n’avaient vécu qu’une seule et unique situation qui les avait à la fois éloignés et rapprochés. Billy se souvenait de cette crainte qu’ils avaient eu comme si elle s’était produite hier et pourtant, cela s’était passé plus de deux ans auparavant. Tant de choses avaient changé depuis. Ils ne s’étaient pas réellement parlé au courant des deux dernières années et pourtant, il sentait qu’il retrouvait l’amie qui, à travers leur malheur, il avait appris à apprécier davantage. Certes, le décès de Thomas en avait beaucoup à jouer dans leur rapprochement. Billy se sentait seul dans ce deuil. Il était complètement parti à la dérive, se permettant les pires écarts de conduite. Bientôt, il se rapprocherait lentement mais sûrement de la rive et éventuellement, il marcherait sur la terre ferme. Ces simples moments avec Johanna lui permettait de penser à autre chose qu’à son frère, et ce, même s’ils avaient à travailler sur sa presse. La blessure se fermerait éventuellement...quand les saignements auront enfin cessé.
"Tu m'as manqué, je suis heureuse que tu t'installes ici”, lui avoua Johanna. Billy fut immédiatement sorti de sa rêverie et plongea son regard dans le sien. Il ne put retenir le sourire qui s’afficha sur son visage. “Tu m’as manquée aussi, Jo”, lui répondit-il avec tout la sincérité du monde, non sans conserver ce beau sourire sur ses lèvres. “J’aurais souhaité que mon déménagement se fasse dans des circonstances plus joyeuses, mais je suis heureux de rester”, poursuivit-il. Il baissa les yeux un instant et lâcha un soupir. Son sourire s’était effacé aussi vite qu’il n’était apparu. “Il me manque”, finit-il par lâcher d’une voix brisée.

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