contexte › island bay ressemble à n’importe quelle petite ville côtière de nouvelle-zélande, mais il n’en est rien. en bordure de wellington, à une trentaine de minutes en voiture, se trouve un parfait petit endroit où se mélangent étroites maisons en location et grandes villas de propriétaires fortunés. c’est un endroit où il fait bon vivre, du moins d’apparence, puisque comme on sait, l’herbe semble toujours plus verte de l’autre côté de la clôture. tous les habitants d'island bay se sentent ici comme à la maison, en quelque sorte. mais n’en est-il pas autrement de leurs voisins ?
8° - 17° // températures stables, mais vent à venir
initiales interdites. › personnages inventés de 25 ans minimum. › 3 ans de différence entre l'avatar et l'âge du personnage. › 15 lignes minimum par rp › un rp par mois.
une rencontre lors d'un stage et la seule chose qu'ils ont en commun c'est leur passion pour le sport, pour le reste ils sont diamétralement opposés
elles sont soeurs et n'ont pas connaissance du lien qui les unis
Sujet: growing pains ○ Blake (#) Sam 4 Mar - 10:49
growing pains
Avery ○ AJ
Garée sur une place de parking improvisée, les roues de mon cabriolet quasiment collées au trottoir que des passants foulent pour aller profiter de la nuit encore jeune et remplie de promesses, je reste immobile et interdite, soudainement figée dans le temps comme ces statues aux expressions gravées dans le marbre qu'on admire dans les musées. Je m'expose désespérée aux yeux de quiconque voulant les poser sur moi à travers les vitres de ma voiture, de petites perles étincelantes et silencieuses roulant sur mes joues tremblantes. Les doigts crispés sur le volant, je n'arrive pour l'instant pas à bouger et je tente de ne pas imploser pour retrouver mes esprits au plus vite. Mon téléphone portable vibre sur le siège passager à côté de moi, je n'y fais que vaguement attention. Je parviens enfin à relâcher l'emprise de mes mains et viens les porter à mon visage que je frotte énergiquement avant de rabattre toute mèche de cheveux emmerdante venant serpenter sur ma peau humidifiée par des larmes que je chasse avec violence d'un revers de pouce. C'est pas croyable l'état dans lequel je me retrouve à chaque fois que je ressors d'un rendez-vous planifié chez mon avocat, j'aurais jamais pensé me payer les services de l'un d'entre eux pour déchirer en mille morceaux et réduire en lambeaux l'histoire sentimentale la plus importante et vibrante de toute mon existence. Celle que j'imaginais perdurer à tout jamais, celle que j'avais l'audace et sans doute la présomption de croire invincible. Je ferme les yeux dans le silence pesant de l'habitacle, plaque mes doigts contre mes lèvres pour me forcer à reprendre un rythme cardiaque régulier et habituel puis soupire longuement comme pour déclarer un cessez-le-feu à mes entrailles qui se lacèrent dans une douleur dévastatrice. Mon téléphone portable vibre de nouveau mais je ne le laisse cette fois pas s'animer tout seul dans son coin. « Oui ? » Je reconnais aussitôt la voix d'une bonne amie à l'autre bout du fil, elle entend ma voix chevrotante et s'en inquiète comme une bonne camarade mais j'esquive tout sujet de conversation pouvant se rapporter à mon état actuel, je m'intéresse plutôt à la raison de son appel. Sortir, simplement aller boire un verre entre copines pour se changer les idées et chasser les sombres pensées. J'accepte sa proposition sans m'en rendre vraiment compte, j'imagine que mon subconscient exprime ses besoins d'évasion et de divertissement à ma place, ce n'est pas plus mal dans le fond puisque sinon je n'aurais pas su quoi répondre à cette offre de sortie de dernière minute. Elle me donne l'adresse d'un établissement qu'elle fréquente pas mal ces derniers temps avec sa bande de joyeux lurons, je regarde rapidement sur mon GPS où se trouve le fameux bar et lui réponds en fin de compte que je serai là d'ici un petit quart d'heure. Ça raccroche dans la foulée. Je me regarde brièvement dans le rétroviseur central, efface du bout de l'index des traces de mascara fuyard et démarre la voiture pour me rendre au FOXGLOVE, décrit par mon acolyte comme l'un des endroits les plus branchés de la capitale, un lieu festif ascendant en gros. Pourquoi pas, ma foi, je verrai bien ce que ça donnera toute cette histoire.
« Avery, je suis tellement contente de te voir ma chérie. » « Moi aussi. » Mon amie fantasque et délicieusement délurée me prend immédiatement dans le creux de ses bras avec enthousiasme, sautillant sur place d'une excitation non contenue. Je me décolle de son étreinte et remarque aussi vite dans son regard qu'elle a déjà bien entamé la soirée. J'échappe un léger rire, j'ai l'impression d'être des montagnes russes émotionnelles ces dernières semaines, je passe des pleurs au rire en un battement de cils. C'est aussi utile qu'effrayant. Je salue amicalement tous ses compatriotes en leur faisant la bise à tour de rôle et refuse une moitié de bière qu'un des mecs torchés me tend avec des yeux qui se disent merde. « Non merci, non, je vais plutôt aller me chercher un cocktail au bar. » Je jette mon sac à main sur mon épaule et glisse dans l'oreille de mon amie que je reviens d'ici quelques petites minutes, elle me supplie de faire vite et je ris de nouveau. Elle n'est jamais aussi avenante que quand elle est bourrée, décidément. Je profite d'un tabouret libre, une aubaine, m'y hisse dessus et croise les jambes. Une première serveuse passe devant moi, des traits étrangement masculins, un regard perçant et un sourire mutin en coin qui en dit long, elle ne s'arrête pas. Après quelques instants, un jeune homme se rapproche de moi et je lui adresse alors un large sourire exagérément radieux. « Bonsoir, servez-moi ce que vous avez de plus fort en réserve, s'il vous plaît. N'y allez pas de main morte, je suis rodée. » J'échappe un rire et me dis que ça sera peut-être là l'occasion de tout oublier l'espace d'une soirée. @Blake Johnson
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Sujet: Re: growing pains ○ Blake (#) Dim 5 Mar - 0:47
Cette journée c’était vraiment de la merde. Je l’ai passé à mater des vieilles photos d’Eliott et moi. J’ai passé la journée dans mon lit, comme souvent. En plus j’ai pas eu besoin de sortir donc je me suis pris la douche qu’à la dernière minute avant de devoir partir au boulot. Au moins j’étais pas fatigué. J’ai carrément pas envie d’aller bosser ce soir. J’espère qu’il va y avoir beaucoup de monde pour que la soirée passe vite. J’hésite presque à envoyer un SMS à Tawny pour dire que je suis malade mais non, j’oserai pas. Je suis juste un peu déprimé comme souvent. Heureusement le bar me redonne le sourire la plupart du temps. C’est un endroit où j’aime être. Où je me sens bien. Et puis tout cet alcool partout, je ne peux que me sentir bien.
La soirée commence plutôt doucement, il n’y a pas trop de monde et les quelques clients que j’ai eu en face de moi n’étais pas très clément pour faire la conversation. Du coup je me fais un peu chier. Jusqu’à ce qu’une jeune femme s’installe et me demande de lui servir quelque chose de fort.
« Bonsoir. »
Elle me fait sourire quand elle dit être rodé. On est deux comme ça.
« Et bien ce sera un shot de tequila pour commencer. Aux frais de la maison. »
Je profite au passage pour boire moi aussi. On fait souvent ça offrir des shots aux clients. J’ai pas beaucoup bu ce soir, un peu d’alcool dans le gosier ne me fera pas de mal. Au contraire.
« A la votre. »
Je n’attends pas qu’elle ait bu le sien pour boire le mien. Ca me fait du bien. Je lui en offrirai un autre plus tard si elle reste dans le coin. Si elle sait encaisser il va falloir qu’elle le montre. C’est un peu comme si on se mettait en compétition, mais sans qu’elle le sache. Je me fais ma propre compétition.
« Je peux vous proposer un cocktail assez chargé aussi si vous voulez. Quelque chose de plutôt sucré comme ça ça passe comme un rien. C’est pour fêter quelque chose ? »
En ce moment pour moi c’est plutôt pour oublier que pour fêter mais je préfère demander sur une note plus positive. Je me mets en marche et je lui fais son cocktail. Je suis assez rapide et précis dans mes gestes. Je fais ça bien et je lui mets sous le nez le cocktail avec une petite brochette de fruits en guise de garniture.
« Et voilà un Strawberry and Lime Cooler. Un cocktail avec de la vodka, du kiwi, des framboises, du citron et de la limonade. J'ai mis une double dose de Vodka. Bonne dégustation. »
Je lui fais un clin d'oeil.
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Sujet: Re: growing pains ○ Blake (#) Jeu 23 Mar - 2:15
growing pains
Avery ○ AJ
L'âme en peine et l'esprit pas franchement prédisposé à simplement se concentrer sur tous les bénéfices qu'une soirée passée en compagnie de mon amie et sa bande de lurons éméchés pourrait m'apporter, je me rends à cette évidence qui me saute au visage et me dis tout bas que sortir n'était sans doute pas la plus brillante idée du moment. Ma présence dans ce bar branché n'est en réalité que la somme de diverses émotions négatives auxquelles j'ai dû faire face aujourd'hui et lorsque le téléphone a, pour la énième fois, sonné dans la voiture je n'ai eu d'autre choix que de réagir en accord avec mes envies spontanées. Ma bouche a formé des mots qui ont tous ensemble répondu à un besoin irrépressible de changer d'air et de m'aérer l'esprit, avec pour seule humble ambition de me redonner un tant soit peu le sourire après cette journée de merde riche en conversations particulièrement douloureuses. Ce n'est un secret pour personne dans mon entourage, ce qui se passe entre Sean et moi ces derniers temps me fout carrément en l'air, d'autant plus qu'il n'est en fin de compte pas au courant de la plupart de mes préoccupations désormais passées et évanouies dans cette dernière année cauchemardesque. Nerveusement, je m'attaque à une serviette en papier qui traînait sur le comptoir où je suis assise et ne relève les yeux que lorsqu'un serveur daigne enfin remarquer ma présence et mon besoin de boire pour oublier. Noyer ses problèmes dans l'alcool n'a jamais été le remède à quoi que ce soit mais c'est la seule source de divertissement qui me vient présentement à l'esprit. Sans l'ombre d'une hésitation, j'implore le jeune homme me faisant face de me proposer ce qu'il a plus corsé en réserve – son apparence un peu rebelle tranche avec l'espèce de tristesse qui se fond dans ses yeux d'une plaisante teinte verte. Il esquisse un sourire et un brin de malice s'empare de son expression faciale, il semble enclin à me réconforter pour les minutes à venir. « Et bien ce sera un shot de tequila pour commencer. Aux frais de la maison. » Dans des gestes précis, il dépose deux verres adéquats devant moi et j'arque un sourcil en remarquant qu'il a décidé de se joindre à la partie. Je ne pensais pas les employés autorisés à se murger en compagnie des clients qu'ils prennent en charge mais après tout, il ne semble pas être le type de garçon à se plier aux règles du jeu. Il remplit les petits verres de l'alcool promis et m'incite à m'emparer de celui qui m'est destiné en me le désignant du menton. « A la votre. » « Ma soirée démarre sur les chapeaux de roues grâce à vous. » Je lui adresse un léger sourire reconnaissant et fais tinter mon verre contre le sien avant de pencher la tête en arrière pour avaler le contenu d'une traite. Un rictus déforme mon visage, j'échappe un faible râle et un rire s'ensuit. « La vache, ça faisait une éternité que je n'en avais pas bu. » Son regard amusé en dit long sur mes capacités à encaisser ce que je croyais être du petit lait. D'abord confiante en attestant être rodée, je ne suis maintenant plus aussi sûre de mes propos. « Je peux vous proposer un cocktail assez chargé si vous voulez. Quelque chose de plutôt sucré comme ça ça passe comme un rien. » Je hausse brièvement les épaules, la tête penchée sur le côté. « Pourquoi pas, soyons fous, je suis là pour m'amuser paraît-il. » « C'est pour fêter quelque chose ? » Je déglutis difficilement en entendant cette question, je renifle discrètement et pousse le verre à shot en sa direction sans le regarder pour autant. « Non, non... Je ne suis pas du genre à célébrer les échecs. » En quelques mots comme en mille, je lui fais comprendre que c'est une corde sensible qu'il vient de toucher. Tout est encore beaucoup trop frais et me confier à un barmaid me semble insensé, déjà que j'ai un mal de chien à poser des mots sur mon malheur devant ma psychologue. Il n'insiste pas, s'affaire à concocter la boisson qu'il semble avoir en tête, les mouvements qu'il effectue avec le shaker ne trompent pas. Un verre, le liquide coloré qui s'y déverse et une brochette fruitée se tiennent quelques secondes plus tard devant moi. « Qu'est-ce que c'est, exactement ? » Il m'a dit que c'était sucré et compte tenu des couleurs acidulées, je veux bien le croire sur parole. Le nom qu'il m'annonce ne me dit rien de plus mais les ingrédients qu'il liste me mettent la puce à l'oreille. J'ai envie de l'engloutir comme l'on siroterait une banale orangeade. « J'ai mis une double dose de vodka. » « Ah d'accord, vous prenez vraiment ce que je vous ai dit au pied de la lettre. » « Bonne dégustation. » Un clin d'oeil suit sa formule de politesse et je hausse les sourcils en guise de réponse. Allez ma vieille, tu l'as voulu, c'est pas le moment de te dégonfler maintenant. Je m'empare du verre, porte le liquide à mes lèvres et en avale quelques généreuses gorgées d'un coup. Une quinte de toux me prend aussitôt. « Putain, c'est aussi bon que c'est fort. » M'étouffant à moitié en raison du glucose mélangé aux saveurs puissantes de l'alcool, je me mets à rire et regarde le serveur à l'air joueur. « Vous avez l'intention de me saouler, avouez-le tout de suite. » J'échappe un soupir, souris à mes voisins de comptoir qui rient en me voyant en galère et me racle la gorge pour terminer le cocktail sans réfléchir avant de brandir le verre vide en l'air. « Un autre ! » Il s'exécute et je m'installe un peu plus confortablement sur mon tabouret haut. « Vous avez envie de me joindre à moi pour le prochain ? Peut-être que vous avez quelque chose à célébrer, de votre côté ? » Ce serait l'occasion, pour le coup. @Blake Johnson
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Sujet: Re: growing pains ○ Blake (#) Mer 29 Mar - 15:17
Ce n’est donc pas pour fêter mais plutôt pour oublier qu’elle veut boire. Et bien on est deux. Je n’en demande pas plus sur ses raisons, j’ai une assez belle image comme ça. Quand je lui mets le cocktail sous le nez elle est surprise par ma remarque sur la double dose de vodka.
« Je ne plaisante jamais quand je parle d’alcool. »
J’ai un sourire amusé sur les lèvres. Je sais ce que c’est que d’avoir besoin de boire pour oublier, alors j’essaie de faire au mieux pour changer les idées de mes clients le plus rapidement possible. Je la regarde s’emparer du verre et boire une gorgée. Elle s’en étouffe presque, mais elle a l’air d’apprécier le cocktail quand même. Je ris un peu quand elle demande si j’ai l’intention de la saouler.
« C’était pas votre intention ? »
Je fais mon petit saint, je suis très amusé par la situation.
« Le prochain je le ferai moins fort si vous voulez. »
Parce que je l’imagine déjà me commander un autre verre. Et je n’ai pas tort quand je la vois avaler tout le cocktail en un temps record.
« Wow ! Vous avez une super descente. »
Elle en demande un autre et loin de moi l’idée de lui faire moins fort. Elle l’a bien descendu et elle doit vouloir oublier son échec. Je pars un peu dans des hypothèses, qu’est ce qu’elle aurait pu échouer ? Un entretient d’embauche ? Un truc important je dirai, je ne pense pas que ce soit aussi futile que de louper un gâteau ou une recette quelconque.
« Je reste sur la double dose, vous avez l’air d’avoir tellement apprécié. »
Je commence à lui préparer le cocktail quand elle me propose de me joindre à elle pour le prochain. J’hésite un bref instant et puis je cède.
« Allé soyons fou ! »
Et je commence à mettre la double dose dans le shaker pour faire ça bien. Je ne fais pas souvent ça, suivre les clients sur des cocktails carrément, pour ne pas dire jamais, mais cette fois je me fais une exception à la règle. Ca ne me tuera pas, même au contraire, ça va me faire du bien. Je suis plutôt du genre à ne pas suivre les règles.
« Mais c’est vous qui offrez. »
Je ne peux pas faire un cocktail sans le charger. Ca passe pour les shots mais pas pour les boissons normales. Je ne vais pas mettre la double dose de vodka dans le mien. Un simple fera l’affaire et elle ne le saura pas. Il faut que je bosse moi quand même. Je tiens très bien l’alcool mais il est encore assez tôt dans la soirée et ça ne va pas être mon seul verre.
« J’ai rien à fêter de particulier non, mais on peut toujours trouver une bonne raison de boire. »
Je ne vais pas lui étaler mes problèmes, je n’ai pas envie de plomber l’ambiance. Je suis quand même sur mon lieu de travail, pas chez le psy.
« Vous êtes ma cliente préféré de la soirée, on peut boire en votre honneur. Ca me ferait plaisir. Et puis je sens que je vais vous offrir encore un shot avant que vous ne disparaissiez. »
J’en fais peut être un peu trop mais elle me met réellement de bonne humeur. Je termine de préparer les boissons, je suis toujours très précis dans mes gestes et je ne suis pas dérangé de discuter en même temps. Au contraire. Je sors deux verres et je les remplis du précieux liquide. Je mets la garniture correctement sur le côté du verre. Je serai plutôt pour ne pas mettre de garniture sur mon verre car je ne suis pas un client mais je le fais quand même, après tout je lui charge le cocktail, il faut qu’il soit beau. Je m’empare de la bouteille de vodka et je la regarde.
« On reste sur une double dose pour vous ? Je vais pas vous suivre là dessus, il faut que je tienne toute la soirée. »
Je souris en la regardant et je fais comme elle le demande, double dose ou non. Je repose la bouteille de vodka et je prends mon verre dans la main.
« A la votre ! »
Je fais tinter mon verre avec le sien et je bois une longue gorgée de mon cocktail. Je sens presque que le sucre plutôt que l’alcool, c’est ça qui est traitre dans ce genre de boisson, mais j’apprécie, ça se boit bien.
« Au fait moi c’est Blake. »
Je me présente parce que je suis du genre à me faire une petite clientèle d’habituer qui aiment être servi par moi histoire de continuer à discuter avec les gens. Prendre des nouvelles. Pour l’instant je n’ai pas trop de ce genre de clients parce que ça ne fait que deux mois que je bosse ici, mais ça viendra, j’en suis sûr. Il faut juste être patient.
« Vous êtes venu passé la soirée toute seule ? »
Histoire de voir si on va discuter encore longtemps ou pas. Je sens un bon feeling avec elle et j’en suis presque à espérer qu’elle n’a personne à rejoindre. En même temps je commence à tapoter sur l’écran tactile de la caisse pour insérer dans la machine sa commande. Il va bien falloir qu’elle paie à un moment donner. Quand elle décidera de partir.
« C'était pas votre intention ? » Touchée. Haussant les sourcils en guise de réponse à cette question forcément rhétorique, je feins l'outrage avec une crédibilité douteuse alors que je tente de contenir l'alcool aux mille saveurs explosives en moi. « Peut-être bien. » Bien qu'ayant été une adolescente plutôt fêtarde qui savait engloutir des shots d'alcools variés sans les mains comme personne, ça fait bien longtemps que je n'ai plus bu dans le seul but de m'enivrer et ce verre s'impose déjà comme une véritable épreuve pour mon estomac qui s'insurge déjà de la présence du liquide entre ses parois. Faut dire que le serveur n'y a pas été de main morte mais après tout, c'est moi qui l'ai voulu alors je ne peux en aucun cas le lui reprocher, il ne fait que se plier aux requêtes d'une cliente en recherche d'un divertissement vital. Intéressé par mon attitude, le jeune homme qui me fait face m'adresse un sourire qui traduit sans faute son envie de se joindre à mon jeu spontané, reste maintenant plus qu'à savoir qui sera pompette le plus vite entre nous deux. Ce sera probablement moi, il semble bien plus entraîné à l'exercice que ce que je lui laisse sous-entendre. « Le prochain je le ferai moins fort si vous voulez. » « Ne me prenez pas pour une mauviette, c'est assez réducteur. » J'arque un sourcil en signe de provocation et porte le restant du verre à mes lèvres avant de me l'enfiler d'une traite, ce que je regretterai d'ici quelques minutes j'en suis persuadée. Advienne que pourra. Ma fierté de femme digne l'emporte lorsque je fais claquer le cul du verre sur le comptoir en bois verni et réclame d'être aussitôt resservie, mes dents légèrement enfoncées dans ma lèvre inférieure dans un désir de me faire plus persuasive. « Wow ! Vous avez une super descente. » Un gloussement franchit mes lèvres et je me redresse sur mon tabouret avec une expression assurée sur le visage. « Des années d'entraînement précèdent cette soirée, figurez-vous. » Aussi loin dans le passé soient-elles. « Je reste sur la double dose, vous avez l'air d'avoir tellement apprécié. » « Faites donc. » J'observe ses mouvements habiles et la rapidité avec laquelle il concocte un nouveau mélange tout aussi fort que celui que je viens à peine de me prendre en plein dans la gueule. Déterminée à tenter par tous les moyens de ne pas passer pour une pathétique soûlarde qui écume tous les établissements du coin proposant des cocktails, je lui propose de se joindre à la dégustation et de récolter les fruits de son propre travail méticuleux et fascinant. Je ne sais pas vraiment pourquoi mais quelque chose dans son comportement me met la puce à l'oreille et me laisse croire que je ne suis pas la seule à vouloir me mettre le coeur à l'envers. « Allez soyons fou ! » « J'aime ce que j'entends ! » Précédée d'une brève hésitation, cette acceptation me met en joie et je l'applaudis de mes deux mains, ravie de m'être dénichée un partenaire pour la soirée. Même si à la base, j'étais venue des suites de l'appel inopiné d'une bonne amie, je n'ai pas la tête à me joindre à la foule et danser jusqu'au bout de la nuit pour tromper la mélancolie qui m'habite. « Mais c'est vous qui offrez. » Sourire étiré avec exagération, je plonge la main dans mon sac orné de cordages élégants et en ressors mon porte-feuilles avant de le bazarder devant lui, triomphante. « Si vous insistez. » Le shaker se balance entre ses mains expertes et les glaçons qu'il contient produisent un bruit des plus plaisant. « J'ai rien à fêter de particulier non, mais on peut toujours trouver une bonne raison de boire. » Je fronce les sourcils, soudainement pensive. Malgré toute ma bonne volonté dans l'instant, je n'arrive pas à mettre le doigt sur la moindre raison positive justifiant ma soif inétanchable. « Vous êtes ma cliente préférée de la soirée, on peut boire en votre honneur. Ça me ferait plaisir. Et puis je sens que je vais vous offrir encore un shot avant que vous ne disparaissiez. » Je ris de bon coeur tout en secouant la tête de gauche à droite, il ne vise décidément pas la personne adéquate à célébrer. « Si vous aimez boire au nom des épaves, alors soit, trinquons à ma vie de merde. Mais si je me mets à pleurer alors vous en assumerez l'entière responsabilité. » Les deux verres sur le comptoir se remplissent à une allure folle et le jeune homme s'empare d'une large bouteille de vodka avant de me scruter de son regard ténébreux et énigmatique. « On reste sur une double dose pour vous ? Je vais pas vous suivre là-dessus, il faut que je tienne toute la soirée. » « Arrêtez de me poser cette question, je vais rapidement m'en lasser. » Simple, double ou bien même triple dose, c'est bien le cadet de mes soucis actuellement, j'ai juste envie de sentir mes pensées s'entremêler et perdre le contrôle de mes émotions pour m'en délester. Je suis épuisée de ressasser sans arrêt les mêmes choses, de me perdre dans les méandres de mon esprit. Ceux qui affirment que le coeur d'une femme est un labyrinthe voient la vérité sous sa lumière la plus crue et honnête. « A la votre ! » Nos verres s'entrechoquent et je le regarde du coin de l'oeil siroter son cocktail alors que j'avale le mien comme si je n'avais plus bu depuis des lustres. Ce qui, dans une certaine mesure, n'est pas si faux que cela. « Au fait moi c'est Blake. » « Avery. Avery Sawyers. » Je ferme les yeux un instant, me sentant stupide à cause de ce fichu réflexe à toujours me pavaner avec ce nom de famille destiné à ne plus être le mien. Je n'en fais plus partie, je suis autre. Une étrangère condamnée à partir en quête d'une identité nouvelle. « Vous êtes venu passer la soirée toute seule ? » Je m'empare e la petite brochette de fruits tenant en équilibre incertain sur les quelques glaçons dans mon verre et croque dedans sans ménagement. Si je veux me bourrer la gueule, autant ne pas rester à jeun pour limiter les dégâts. Sans même répondre, je pivote sur moi-même et scanne la pièce à la recherche de la bande d'énergumènes que j'étais à la base venue rencontrer. Portés disparus. « Disons que non mais je préfère faire bande à part pour ce soir, je n'ai pas le coeur à la fête. » Je hausse les épaules, lui faisant de nouveau face alors qu'il tapote sur l'écran de la caisse enregistreuse le montant encore temporaire des festivités. « Tenez. » J'extirpe ma carte bancaire de mon porte-feuilles et lui tends avec résignation. « Débitez jusqu'à ce que je décide d'abandonner. » J'échappe un nouveau rire et termine le bout de fraise embroché avant de casser la baguette de bois en deux, juste pour le plaisir de briser quelque chose autre que mon mariage. « Vous êtes célibataire, Blake ? » Je plonge mon regard dans le sien, adoptant une attitude un peu plus sérieuse. Son regard m'arrache un large sourire malicieux. « Je ne suis pas en train de vous draguer, je suis simplement curieuse. » Je hausse les épaules et fais claquer plusieurs fois mon verre sur le comptoir pour lui faire comprendre que maman n'a pas encore fini de s'amuser. « Racontez-moi votre histoire, j'ai du temps à tuer. » De plus, j'ai vraiment envie d'en savoir plus à son propos. @Blake Johnson
Elle vient bel et bien pour se cuiter, elle ne veut pas que je réduise la dose, elle a l’air bien décidée. J’aime bien les femmes qui sont sûres d’elles comme ça. Ca a un côté assez charmeur je trouve. Ce n’est donc pas sa première soirée à s’en mettre plein la panse, ça confirme qu’on doit être assez similaire elle et moi. Je propose de boire à sa santé si on doit trouver une excuse pour boire et elle se qualifie d’épave. Je la trouve plutôt très jolie pour une épave mais je ne vais pas lui dire ça. Je flirte parfois avec les clients pour avoir de plus gros pourboire mais ce soir je n’ai pas envie de lancer de faux signaux à la jolie demoiselle. Elle dit qu’elle a une vie de merde et pour l’instant je me retrouve dans tout ce qu’elle dit.
« Je risque de pleurer avec vous si c’est le cas. »
J’en ris un petit peu mais c’est la triste vérité. Il m’arrive de me mettre à chialer comme un bébé quand j’ai trop bu et que je suis tout seul dans ma chambre. Je laisse une dernière chance à ma cliente de se rétracter sur la double dose mais elle ne mange pas de ce pain là. Elle veut un truc bien fort et elle me le fait bien comprendre. J’ai comme douté de sa capacité à boire et elle se lasse. Je retiens de ne plus remettre en cause ses paroles pour les prochains verres que je lui servirai. Parce que oui, je suis sûr qu’il va y en avoir d’autres. Déjà je lui ai promis un shot de plus avant qu’elle ne me fausse compagnie. Après avoir trinquer et bu une gorgée de mon cocktail, je me présente et j’apprends qu’elle s’appelle Avery. Un prénom mixte, comme le mien. On a décidément pas mal de points communs. Ok ce sont des petits détails mais je prends en notes tout de même. Elle dit qu’elle est venu avec quelqu’un, ou plusieurs personnes mais qu’elle a envie d’être seule. Ca se comprend. Je commence à émettre l’hypothèse que son envie de boire provient de ces amis avec qui elle est venue. Je n’irai pas jusqu’à lui demander plus de détails là dessus, c’est assez indiscret. Elle n’a donc pas le coeur à la fête, c’est dommage, le bar est généralement un bon endroit pour s’amuser avec cette bonne musique qui tourne. Ok la musique n’est peut être pas si bonne puisqu’elle est choisi par les employés sur la playlist spotify du Fox, mais on a plutôt bons goûts je dirai. Elle me tend sa carte bleu et je la prends, posant mon cocktail. Je mets la carte dans la machine et je lui fais une note de ce qu’elle a consommé. Je lui tends l’appareil pour qu’elle tape son code et je range le tout, lui rendant sa carte bleu.
« Je suis sûr que vous allez me la redonner un peu plus tard dans la soirée. Vous n’allez pas être assez bourré avec ce deuxième cocktail. Quoi que… »
Je souris un peu amusé et je reprends de siroter mon verre. Un client à côté arrive et me demande une bière. Simple. Je peux continuer largement de faire la conversation avec Avery, d’ailleurs celle ci me demande si je suis célibataire. Question compliqué. Elle précise qu’elle n’est pas en train de me draguer.
« Je ne suis pas inquiet. Et techniquement oui. Je suis célibataire. »
Je ne rentre pas dans les détails, sauf qu’elle ajoute qu’elle veut savoir mon histoire. Je serre et j’encaisse le client d’à côté qui est déjà en train de partir avec son verre. Je me tourne vers Avery après avoir réfléchit à quoi dire.
« Je vous préviens c’est pas gai. »
Je ne sais pas pourquoi je me décide à m’ouvrir à elle. Je sens un bon feeling avec elle, alors pourquoi pas. Après tout, elle n’est qu’une cliente parmi tant d’autres, je ne la reverrai sûrement jamais, à moins qu’elle se prenne un abonnement pour boire ici. Dans ce cas là ça ne me dérangera pas de la revoir. Mon histoire est ce qu’elle est, je n’en ai pas honte.
« Et bien je suis techniquement célibataire parce que mon boyfriend est décédé l’année dernière. »
Je baisse un peu la tête, regardant mon verre et puis je relève les yeux pour reprendre la parole.
« Depuis j’ai personne dans ma vie. Sinon du côté plus joyeux, je suis musicien, même si ça fait un moment que j’ai plus touché à ma guitare. »
En plus je suis sûr que je serai bien inspiré pour écrire de la nouvelle musique à présent mais je n’ai pas encore eu le courage de reprendre ma guitare dans les mains.
« J’ai participé à The Voice y’a quelques années, c’était plutôt cool. Vous regardez l’émission ? C’était la version Australienne. »
Je passe les détails comme quoi c’est Eliott, mon boyfriend, qui m’avait inscrit.
« Et mon passe temps préféré c’est de boire tout seul chez moi. »
Je ris un peu et je bois une grosse gorgée de mon verre.
« Je suis sûr que vous allez me la redonner un peu plus tard dans la soirée. Vous n'allez pas être assez bourrée avec ce deuxième cocktail. Quoi que… » L'expression amusée qui inonde son visage avec cette réplique dont les sous-entendus se révèlent à demi-mots me fait me redresser sur mon tabouret haut, avant d'hausser les sourcils. Il me tend le petit appareil électronique sur lequel je tape en vitesse mon code confidentiel lui permettant de me sucrer de l'argent tant qu'il continue aussi de sucrer mes cocktails. Dubitative, je réfléchis un instant avant de reprendre la parole, les effets de l'alcool commençant de plus en plus à se faire ressentir à l'intérieur. « Alors ne me la rendez pas pour l'instant, j'ai le paiement sans contact je crois alors ça facilite les choses. » J'aurais probablement dû le signaler plus tôt pour lui éviter de se battre avec la petite machine apparemment capricieuse mais je n'ai plus vraiment toute la clarté d'esprit actuellement pour penser à émettre ce genre de précisions pourtant fortement utiles. Luttant contre une imprévue sensation de fatigue qui m'écrase sans prévenir, je secoue légèrement la tête en faisant virevolter ma chevelure lisse dans toutes les directions puis décide de m'intéresser à son histoire et sa sphère personnelle lorsque je plonge mon regard dans celui du jeune serveur, Blake de son petit nom. Des lettres qui lui vont d'ailleurs à ravir, quand j'y réfléchis avec attention quelques secondes. Inquisitrice, je m'enquiers pour commencer de son statut social, une question d'une banalité effarante dans le fond mais me permettant déjà d'en apprendre un tout petit peu plus à son propos. « Je ne suis pas inquiet. Et techniquement oui. Je suis célibataire. » Fronçant légèrement les sourcils sous le poids de l'incompréhension qui m'accable et me déstabilise bien plus qu'elle ne le devrait, sans doute à cause des cocktails que je m'enfile sans vergogne à l'égard de mon corps à l'énergie basse l'affaiblissant déjà suffisamment sans en rajouter, je ne remarque qu'à l'instant qu'un homme vient de prendre place sur l'un des tabourets à côté de moi. Il commande une bière et j'aimerais lui ordonner de ficher le camp pour que je puisse poursuivre ma conversation avec mon compagnon de fortune sans que nous ne soyons dérangés de façon importune. « Attendez, comment ça techniquement ? Ça veut rien dire ça, soit vous en avez trop dit, soit clairement pas assez. » Insistante, je suis prête à frapper du verre sur le comptoir pour obtenir une réponse complète et claire sur sa situation amoureuse. Techniquement. Alors quoi, il est en relation libre avec la personne qui partage sa vie ? « Je vous préviens c'est pas gai. » J'écarquille les yeux, c'est typiquement le genre de déclaration qui ne me dit rien qui vaille. « Et bien je suis techniquement célibataire parce que mon boyfriend est décédé l'année dernière. » Submergée par l'émotion d'une telle confession, je plaque une main contre ma bouche pour m'empêcher d'émettre le moindre cri du stupéfaction. Quitte à ce que je n'y comprenne rien, j'aurais largement préféré qu'il me déclare être en relation libre décidément. Je sens des larmes de précipiter au bord de mes paupières et je penche la tête en l'arrière pour les chasser. « Pardonnez-moi, je pense que c'est l'alcool qui me transforme en éponge émotive. Je suis sincèrement navrée pour vous, mes condoléances Blake. » Le fait que je ne la connaisse pas ne témoigne pas du manque de sincérité dans mes paroles, je ne dis que ce que je pense généralement. Pas mon genre de graisser la patte de personnes m'étant indifférentes. « Depuis j'ai personne dans ma vie. » Ça n'a rien d'étonnant, c'est encore si frais, je n'ose imaginer sa douleur même si j'ai eu un aperçu de ce qu'est la perte avec ma fausse couche de l'année dernière. Outre cela, c'est un musicien et il joue apparemment de la guitare, voilà qui est chouette en revanche. C'est un peu moyen d'exprimer ses émotions la musique, je suis sûr que c'est un excellent exutoire à sa peine, et probablement un certain sentiment de colère qu'il doit également ressentir. Tout cela est si injuste, il semble si jeune pour vivre de tels événements catastrophiques. « J'ai participé à The Voice y a quelques années, c'était plutôt cool. Vous regardez l'émission ? C'était la version australienne. » « Il m'arrive parfois de regarder des extraits sur internet quand j'ai un peu de temps à tuer sur les bras. » Je déglutis difficilement en m'entendant prononcer ce mot synonyme de mort, il n'est pas franchement de circonstance compte tenu de la conversation. « Mais sinon non, je ne regarde que très rarement la télévision ou même ce genre d'émissions. En revanche, si vous pouvez retrouver votre prestation sur internet, j'aimerais bien la voir si ça ne vous dérange pas. » Le timbre de sa voix est plaisant alors j'imagine qu'il doit être encore plus agréable lorsqu'il chante. « Vous êtes allé loin dans la compétition ou vous avez simplement participé aux auditions ? » Mon deuxième verre est déjà vide, que le temps passe vite en fin de compte. « Et mon passe temps préféré c'est de boire tout seul chez moi. » Il rit alors qu'il avale une gorgée de son propre cocktail, le même que celui que je viens de descendre en vitesse. « Ce soir, vous avez de la compagnie. » Je lui souris de façon amicale et pousse le verre vidé en sa direction, signifiant que je suis prête pour une nouvelle rasade alcoolisée. « Et vous ? Votre histoire ? » Je pousse un long et profond soupir, pas vraiment d'attaque à aborder tous les aspects de ma vie qui clochent ces derniers temps. C'est une montagne sentimentale que je chercher encore à gravir par tous les moyens. Sacré bordel. « Je crains que ce ne soit pas vraiment joyeux, non plus. Vous êtes prévenu. » Je hausse brièvement les épaules et me racle la gorge avant de prendre mon courage à deux mains et me lancer, ça ne me ressemble pourtant tellement pas de me confier au premier venu. L'alcool me désinhibe et peut-être que ce n'est pas plus mal que ça, ça me permet au moins de vider mon sac et ce que j'ai sur le coeur. « Je suis tombée enceinte de mon mari l'année dernière. Le problème, c'est que je n'ai jamais rien osé lui dire à ce propos parce que je sais pertinemment qu'il a une aversion étrange pour les enfants. Peut-être que ça aurait été différent avec le sien mais bref, toujours est-il que je n'ai pas réussi à lui en toucher le moindre mot. Par peur, j'imagine. Peur de me faire rejeter, de me retrouver seule avec cette vie que je portais en moi. » Je n'arrive pas à croire que je sois en train de lui raconter tout ça. L'émotion est à son comble, je baisse le regard pour ne pas me ridiculiser plus encore que par le biais des boissons que j'aligne sans réfléchir aux conséquences. « Alors je me suis réfugiée dans mon travail, je suis chirurgienne pédiatrique à l'hôpital de Wellington. Je me suis oubliée et j'ai négligé mes besoins primaires, rongée par le stress et l'angoisse. Et puis j'ai perdu mon bébé. » J'écrase une larme qui perle sur ma joue. « Mon mari n'est pas au courant. » Voilà mon histoire.
Je garde donc la carte bleu de ma cliente de la soirée. Oui, elle est un peu ma cliente spécial ce soir. C’est à elle que je passe le claire de mon temps à discuter. Il y a un bon feeling entre nous je trouve et j’ai de la chance que ceux qui s’installe sur le siège voisin pour commander ne restent pas forcément au bar après coup. D’ailleurs un nouveau client arrive aux côtés de Avery, il me commande un de ces cocktails fancy. Je commence à faire le mélange. Je ne loupe quand même pas une miette de notre conversation avec la jeune femme, je sais faire les deux ça roule tout seul, comme sur des roulettes. Je prends le verre spécifique à cette boisson, un verre muni d’une partie en osier. C’est un cocktail qui a pas mal de succès, j’en fais de plus en plus ces derniers temps.
On commence à parler un peu plus sérieusement avec Avery et je lui parle de Eliott et moi. Elle est bien évidemment surprise et choquée par cette nouvelle. Elle est très émotive et ça me touche même si on se connait à peine. Je pense que l’alcool y est pour quelque chose. Elle me présente ses condoléances et je me demande s’il y a une date limite à donner les condoléances. Ca fait plus d’un an maintenant. J’ai un peu fait mon deuil, même si je suis encore très touché par tout ça.
« Merci… »
Je ne vais pas lui donner les détails de la mort d’Eliott, comme quoi il a été tabassé dans une ruelle et qu’il a été frappé au ventre et à la tête à plusieurs reprises. C’est son cerveau qui a lâché en premier à cause des coups. Je déteste y repenser mais ça me revient à chaque fois que je parle de sa mort. Il a dû souffrir comme un chien et il ne méritait pas ça. Je bois une gorgée de mon cocktail, même deux, et trois pour essayer d’oublier les images du beau visage de mon Eliott complètement défiguré par les blessures. Le sujet devient un peu plus léger, on parle de The Voice et elle voudrait voir ma prestation. Je souris un peu plus largement et j’hoche la tête. Elle me demande jusqu’où je suis arrivé dans la compétition et là j’en suis pas peu fier.
« Je suis arrivé jusqu’aux shows en direct. J’ai été dans les trois derniers. J’en suis encore très surpris moi aussi. Je pensais pas que les gens aimeraient autant ma musique. »
Ca m’a fait gagné un tas de followers sur instagram. Je souris quand elle me dit que ce soir je bois pas seul, c’est vrai. Cette jeune femme me plaît. Je lui retourne la question pour savoir son histoire et elle n’est pas joyeuse non plus comme elle me le dit. Je m’attends au pire et je suis surpris par l’honnêteté dont elle fait preuve. Elle m’avoue des choses qu’elle n’a pas osé dire à son mari, c’est quand même fort. Je suis touché de cette confiance qu’elle me donne. Il est évident que je ne vais pas aller voir son mari car je ne le connais pas, mais quand même. Elle fait une pause dans son récit et je suis bloqué en la regardant, je cherche quoi dire mais je ne trouve pas. Elle reprend la parole et je l’écoute, complètement absorbé par son récit. J’apprends qu’elle fait un métier très important, il en faut pour être chirurgien pédiatrique. Le plot twist arrive et elle me dit non seulement qu’elle a perdu le gosse mais aussi qu’elle a dû vivre tout ça sans le soutien de son époux.
« Wow… Je suis désolé pour tout ça… Comme quoi 2016 c’était vraiment une année de merde. »
On en a eu des belles elle et moi. Je sors deux verres à shots pour faire passer le tout. Je prépare un petit mélange composé de Bacardi, Whisky, Everclear et Tequila. Ca se prépare en moins de deux minutes et je lui en mets un sous le nez.
« Cadeau. Tu m’en diras des nouvelles. »
C’est assez naturellement que le tutoiement m’est venu. Nous ne sommes plus du tout des étrangers maintenant. Je bois le shot d’un trait. Ca fait du bien. Je regarde ma montre, j’en ai encore pour plusieurs heures à bosser, je suppose qu’elle sera partie avant la fin de mon service.
« On va avoir une belle gueule de bois demain, mais ça en vaut le coup. »
Je ris un peu et je range quelques trucs derrière le bar.
« Peut être pas si je pense à prendre du paracétamol avant de me coucher. »
Je suis un habitué maintenant, j’en prends assez régulièrement avec tout ce que je bois. Je dois dire que ça fait un bon effet chez moi et j’en suis assez chanceux. Une autre cliente arrive au bar et me demande une coupe de champagne, rien de plus simple. Elle me fait les yeux doux par contre, je l’ai bien remarqué mais je fais comme si ce n’était pas le cas. Je n’ai pas envie de me faire draguer ce soir, je suis avec la brune. Cette jeune femme m’a touché comme personne depuis un moment. J’encaisse la cliente et je me retourne vers Avery.
« C’est quoi ta chanson préféré Avery ? »
Ca en dit beaucoup sur une personne sa chanson préféré.
« Moi pour l’instant je dirai que c’est Hollow de Favourite Weapon. Y’a une phrase dedans qui me plaît beaucoup, ça fait… »
« I swore that I was fine, but I told a lie. I’m hollow on the inside. Hollow on the inside. »
Je souris un peu tristement d’avoir avouer ça et je regarde Avery.
« Je suis tombé dessus par hasard en écoutant Spotify, ils me font une playlist selon mes goûts toutes les semaines. Je dois dire que leur algorithme est doué pour m’avoir si bien cerné. »