cops and robbers [Henry]

Elle avait traîné pour rentrer. Comme d'habitude depuis quelques jours, en réalité. Après avoir passé une partie de la journée à jouer les bonnes femmes au foyer, la blonde avait refourgué les enfants à Rhys dès qu'il avait passé le pas de la porte pour disparaître aussi sec. Pour l'instant, ce genre de comportement fuyant et immature à fuir les responsabilités n'avait pas encore suscité de disputes. Cela ne saurait tarder ; un peu comme un orage d'été qu'on attend sans empressement en sachant pertinemment qu'il tombera violemment quand on aura commencé à baisser la garde. Au moins, elle ne comptait pas se barrer dans son pays d'origines sans laisser de mot ou d'informations. Elle était injoignable, pas disparue. Il y avait sa fille pour l'enchaîner à la maison. Au moins ce soir, elle ne découcherait pas, ne rentrerait pas passablement alcoolisée. Peut-être même qu'elle serait à l'heure pour aller dire bonne nuit à Cillian la terreur des cours de récréation. Provoquer une bagarre jusqu'à se péter la main, sérieusement... Il en fallait peu pour perturber un enfant. Et c'était angoissant de se dire qu'un jour, Emily prendrait le relais pour lui en faire baver, lui faire payer toutes ses fautes de mère pas assez parfaite. Elle n'était pas pressée.

Tout comme elle n'était toujours pas pressée de passer le pas de la porte. Pourtant elle était dans le quartier de South Bay, dans sa rue avec toutes ces maisons identiques mais assez éloignées les unes des autres pour faire penser à un peu d'intimité. De l'autre côté, il y avait ce bruit caractéristique des vagues frappant le sable, de l'écume bouillonnante, et cette odeur iodée. C'était relativement différent de l'odeur de pollution new-yorkaise à laquelle elle avait été habituée. Tout semblait plus pur, plus beau, plus clair. Comme si rien n'était encrassé, excepté les habitants de la maison 114 et leurs histoires respectives. Personne n'avait besoin de savoir, ils s'étaient mis d'accord là-dessus. À Island Bay, ils étaient des inconnus, juste des sources de commérages concernant leur étrange ménage. Pour l'instant, aucun d'eux n'avait eu l'idée de génie pour justifier leur cohabitation d'ailleurs.

Elle soupira un peu plus violemment en poussant le portail et en traversant le petit jardin qui accompagnait jusqu'à la porte d'entrée. Il n'y avait pas de bruit. Soit l'un des deux hommes était parti aussi, soit la petite s'était endormie en plein milieu du salon. Vu la galère que c'était de la rendormir étant donné que mademoiselle faisait ses dents, ils avaient pris cette sale manie de la laisser dormir peu importe où elle fermait les yeux. C'était un bon prétexte pour pousser la porte extrêmement prudemment, parcourir les premiers mètres sur la pointe des pieds tout droit en direction de l'escalier. Elle irait prendre une douche avant tout, se débarrasser de l'odeur de cigarette, odeur de l'addiction revenue, et ensuite grignoter un truc. Avec un peu de chance, elle n'aurait pas à discuter avec qui que ce soit.

Seulement, à peine arrivée en haut des marches, elle dût se résoudre à redescendre. Serviette et vêtements se trouvaient dans sa chambre, en bas. La nudité était assez hors de question en sachant que le gamin de Rhys pourrait la surprendre. Alors, elle fit volte face, fit quelques pas pour se figer aussi sec. Un type lui bloquait le passage. C'était pour ça, que tout était silencieux ? « Dégagez d'ici ! » Elle montra les crocs directement, le cœur emballé, la gorge serrée à imaginer ce qui arriverait s'il avait été envoyé par la Cosa Nostra.

T'as passé la journée au boulot, t'es épuisé, t'en peux plus et t'as qu'une seule envie, te mettre au lit. En entrant chez toi tu ne prends même pas la peine de te préparer à manger, tu t'installes dans ton canapé avec un paquet de chips comme unique compagnie, faisant en même temps office de repas. T'aurais très bien pu t'arrêter dans un restaurant sur la route mais t'avais trop la flemme, flemme de faire la queue, flemme d'attendre d'être servi. Toi qui essaye de manger le plus sain possible pour avoir un corps de rêve, autant dire que ce soir, le repas ne serait pas approuvé par ton coach sportif, tu te garderas bien de le lui dire lors de votre prochain entraînement. Il n'est pas obligé de tout savoir de toute façon. Tu regardes encore une de ces émissions à la con qui passe à l'heure où la plupart des gens dorment, ce genre de rediffusion dont tout le monde s'en fout. Une fois ton estomac rassasié, tu files sous la douche avant de te mettre au lit.

Une fois sous la couette, tu fermes les yeux, le sommeil ne tardant pas à t'emporter. Tandis que tu commences à t'endormir, t'entends soudainement du bruit venant du couloir, ce qui te paraît de suite étrange étant donner que tu vis seul. Autant dire que depuis que tu t'es fait cambriolé, t'as tendance à devenir quelque peu parano au moindre bruits suspect que t'entends. T'as peur que les cambrioleurs reviennent, qu'ils finissent ce qu'ils ont commencés. T'es pas serein. Tu te lèves d'un bond, attrapant au passage une batte de base-ball que tu as acheté spécialement pour ce genre d'occasion. Tu ouvres doucement la porte de ta chambre, voulant à tout prix prendre l'intrus par surprise, histoire de lui faire peur une bonne fois pour toute. Sur la pointe des pieds t'avance vers l'escalier et c'est à ce moment-là que tu restes figé sur place. Une femme, c'est une femme qui se trouve actuellement chez toi. Est-ce que c'est elle qui est venu te cambriolé la première fois ? Tu ne penses pas. Elle n'a pas le profil de la parfaite cambrioleuse mais après tout, on ne sait jamais de quoi sont capables les gens. « Dégagez d'ici ! » Tu ne peux t'empêcher de rire lorsqu'elle prononce ces mots, était-elle réellement en train de lui demander de dégager de chez lui ? Certainement une blague de mauvais goût. « C'est une blague ? Vous entrez chez moi et vous me demandez de foutre le camp ? » Tu glisses une main dans tes cheveux, posant la batte de base-ball contre le mur. Elle a l'air inoffensif cette demoiselle et en plus de ça, elle a l'air complètement paumée. « On s'est déjà croisés non ? Il me semble que vous habitez quelques maisons plus loin. » Elle s'était certainement trompé de maison, ça expliquerait son incompréhension en voyant Henry débarquait en caleçon une batte à la main. « Ne me dites pas que vous vous êtes trompée de villa tout de même ? » Tu te mets à rire aux éclats, la situation était vachement drôle tout compte fait.