Batman appelle Robin. | Tom & Augustus.

Il y avait ce soigneur qui s'occupait du secteur des volatiles, Arthur. Il se l'était beaucoup ramenée récemment et avait osé piquer la part de gâteau que Tom avait apporté pour son déjeuner. Alors même si le blond aurait pu ne rien dire et passer outre, il avait plutôt pris la décision d'égayer un peu leur quotidien. D'ici quelques semaines, les touristes afflueraient pour découvrir le zoo et toutes les espèces s'y trouvant. Il y aurait encore des imbéciles pour demander des pandas géants, et encore des pauvres soigneurs pour expliquer calmement qu'à moins de les louer un million de dollars l'année à la Chine, ils devraient se contenter des pandas roux. Comme d'habitude, il faudrait surveiller les gamins qui escaladent les barrières, les flashs qui viennent troubler le calme des animaux. Sauf que voilà, ils n'y étaient pas encore. Le zoo était assez vide, les visiteurs pas si nombreux, la plupart des employés en vacances. Ou en voyage d'affaires comme le patron, encore que Tom n'y croyait pas la moindre seconde. Il n'y avait pas d'enjeu assez important à discuter en ce moment pour qu'il ait besoin de rencontrer des éminences à l'autre bout du monde.

Enfin bref, tout ceci pour en revenir à Arthur-le-voleur-de-gâteau qui ne s'en sortirait pas impunément aujourd'hui. L'idée avait germée alors qu'il finissait de vacciner la bande de kiwis. Tom s'était laissé aller à se moquer des flamants roses et leur démarche ridicule en groupe, avant d'imaginer ce que ça serait si la bande se baladait dans les allées du zoo. Comme chaque soigneur était responsable de son enclos... Ce serait extrêmement drôle de mettre Arthur dans la mouise le temps d'une petite heure. Les bordures du zoo étaient assez sécurisées pour que les animaux ne puissent pas s'enfuir, après tout.

Cela justifiait que Gus et lui soient aussi loin de leurs secteurs de prédilection, les talkies-walkies prêts à transmettre toutes les informations. « Les héros Marvel sont mieux, mais Batman est le seul à avoir un bras-droit utile. » Comme à son habitude, Tom se marre, retourne à sa tâche. Il fallait rapatrier les animaux et même s'ils aimaient déambuler en groupe, ils avaient tendance à s'éparpiller  quand un humain se baladait parmi eux. Alors le blond avait dû trouver une autre solution : la corde. Ingénieusement attachée à un bout de l'enclos, il l'avait tendue jusqu'à l'autre bout et marchait désormais vers la sortie pour réduire l'espace et forcer les flamants roses à sortir. « Si y a le champs libre, tu ouvres et tu décampes ! » Le bruit manifeste du loquet retentit, et l'homme n'eut plus qu'à agiter la corde pour stresser les oiseaux et les encourager à se faufiler par la sortie. En l'espace d'une minute, ce fut une horde de plumes roses qui prirent la fuite tout droit sur les routes pavées, faisant piailler les volatiles voisins. Son méfait accompli, Tom se dépêcha de rentrer pour détacher la corde et la balancer par-dessus bord.

C'était avec un large sourire aux lèvres qu'il rejoignit son collègue. « On s'éloigne et j'te laisse le plaisir de sonner l'alerte ! » Après tout, ils n'y étaient pour rien eux. Pas vrai ?

« Putain mais t'es plein de bonnes idées ! Tu voudrais pas me masser ? » Il éclate de rire avant de retourner à son acte maléfique. Un massage, il ne dirait pas non. Peut-être pas avec Gus tout de même, l'amitié avait ses limites. À moins que ce soit entre les mains sadiques d'un kiné, Tom avait été habitué aux massages à connotation sexuelle alors bon, l'envie ne se faisait pas réellement ressentir. De toute façon, il était persuadé que même si les preuves n'étaient pas flagrantes, les nuits palpitantes de Robin et Batman ne se résumaient pas à courir après les méchants. Enfin, c'était une théorie dont ils discuteraient une autre fois. Pour le moment, ils se devaient d'être rapides et efficaces. Le troupeau d'oiseaux libéré, il se dépêcha de rejoindre son collègue et de lui emboîter le pas. Mieux valait déguerpir avant qu'on ne puisse les soupçonner, oui. D'ailleurs, cela releva de l'effort de surhomme de ne pas exploser de rire et ainsi trahir leur responsabilité. Vu le ''merde'' retentissant, Arthur devait être en train d'arriver au pas de course pour se rassurer. « On file vers le secteur félins, on sera grillé si on nous voit ailleurs ouais ! » Heureusement que le secteur était juste à côté. Ils seraient fichus de toute manière si l'on venait à regarder les vidéos des caméras de sécurité. A priori, ils ne courraient pas ce risque, Arthur aurait trop honte de voir son oubli sur grand écran. Cela pourrait, si cela s'avérait, lui coûter son poste alors l'éventualité ne seraient probablement pas envisagées.

De là à savoir s'il demanderait de l'aide... « Seulement s'il ne retrouve pas tous les oiseaux. Je crois qu'il est mal barré, regarde ! » Hilare, il fit signe à son ami de regarder derrière eux, où trois flamants roses se promenaient, bec en l'air. Sur un groupe d'une bonne trentaine, s'ils commençaient à se séparer de la sorte, cela risquait de prendre une bonne partie de l'après-midi pour rassembler toutes ces plumes roses. « Heureusement quand même qu'il s'occupe des oiseaux et qu'il y en a des abrutis... On n'aurait pas pu faire cette blague avec toi, je pense que des tigres qui se baladent dans le zoo, ça aurait pas fait le même effet. » Il se marre, prend le virage. À peine la cage des pumas passée, il sort son talkie-walkie à son tour à l'adresse de la sécurité à l'entrée du zoo. « Les gars, on a des flamants roses en fuite. Barricadez les sorties, Arthur est à leur poursuite. Je vais chercher des seringues de tranquillisant au cas où. Je suis avec Augustus, on va voir ce qu'on peut faire. » Il coupa le micro, attendit quelques secondes la réponse de Jeff, chef de la sécurité. « On sait, on vient d'en voir un passer. Putain quel bordel, qui est l'abruti qui a fait ça ?! » Autrement dit, c'était parti pour la chasse aux flamants roses. « Bien joué partenaire ! » s'exclama le blond en réalisant un high five particulièrement fier. Quels cons ils faisaient.

Tom était pourtant du genre sérieux et rigoureux dans son boulot. Il avait beau tout prendre à la déconnade, la santé et le bien-être des animaux passaient avant tout. Jamais il ne ferait aucune action susceptible de blesser un animal quel qu'il soit. S'il avait validé le coup des flamants roses, c'était en sachant pertinemment que les volatiles avaient assez de jugeotte pour ne pas reprendre leur totale liberté ou alors courir vers le danger. Ils étaient faciles à approcher, localisables grâce à des puces électroniques... Un chaos maîtrisé, en somme. Il était certain qu'il aurait un peu plus galéré s'il avait voulu faire ce genre de blague à Augustus et ses gros matous sauvages. C'est clair que personne ne les aurait loupé ! « J'pense qu'on aurait fait une entrée remarquée en taule, ouais ! Tu penses qu'on aurait eu droit à un petit surnom bien classe dans les journaux ? Genre les libérateurs de fauves ? » Il penche légèrement la tête, fronce les sourcils en y pensant avant de finalement hausser les épaules. « J'ai jamais été doué pour trouver des noms cools, on dirait un nom de militants GreenPeace. » De toute façon, le mieux, c'était de rester dans le total anonymat. L'enclos des oiseaux n'était pas franchement surveillé, les caméras trop peu présentes pour surveiller tous les pensionnaires. Tant mieux d'ailleurs, parce que l'homme avait quand même assez de sens des responsabilités pour ne pas avoir une folle envie de perdre son boulot et de se retrouver avec un procès au cul pour il ne saurait trop dire quel motif crédible et sérieux.

Viendrait quand même le moment de réparer leurs bêtises. Cela ferait une chasse aux trésors sympathique pour les visiteurs du zoo, appeler la sécurité au moindre flamant rose repéré et gagner ainsi un bon de réduction sur les boutiques souvenirs... Nourrir les bestioles étaient une bonne idée aussi, mais si certains s'aventuraient trop loin, ils ne seraient pas attirés par les graines. La solution ne couvrerait pas le zoo entier. « On fait croire aux visiteurs que c'est un jeu, et qu'ils gagnent des cadeaux s'ils trouvent un flamant rose. En plus ça nous fait un bon coup de pub. Mais ouais, la pause d'abord. » Tom éclata de rire en passant son bras sur l'épaule de son collègue comme il le ferait avec un complice de connerie, ce qu'ils étaient en l'occurrence.

Pour que la pause en soit réellement une, il faudrait qu'ils disparaissent gentiment de la circulation histoire qu'on ne vienne pas les déranger inutilement... Tom gardait toujours son talkie-walkie allumé au cas où, mais comme aucune urgence ne semblait sur le point d'éclater, il était pour le moment de tranquillité. « Tant qu'à semer la panique, on se fait une intrusion dans les cuisines du restaurant pour se prendre un goûter, et on va se poser du côté des singes? » proposa-t-il gaiement. Les singes avaient tous une partie de l'enclos à l'intérieur afin d'éviter le mauvais temps et le public. Pour le personnel, c'était un couloir entier d'accès aux enclos et cages verts, aménagés, et où ils avaient souvent droit à la présence des bébés et des mamans.

Quand il se disait que Gus approchait de la quarantaine, Tom devait bien avouer perdre un peu l'espoir que leur cas à tous les deux s'arrangent. Peut-être qu'ils seraient ces vieux à la maison de retraite à faire des blagues douteuses, à glisser des dentiers sous les fesses des gens avant qu'ils s'asseyent, à mettre des squelettes en plastique dans les ascenseurs pour faire peur aux aide-soignants, ou à jouer les morts pour ensuite faire « bouh » et provoquer des arrêts cardiaques. Ce genre de blague qui ne plairait pas, tout comme la libération des flamants roses ne serait pas pour plaire à quelques militants convaincus. En travaillant dans des zoos et, précisons le, avec la volonté du bien-être de l'animal, les deux hommes auraient dû être convaincus par des causes luttant contre la violence animale. Sauf que voilà, ils étaient deux êtres rationnels ; manger de la viande n'était rien d'autre que la chaîne alimentaire par exemple, tout comme utiliser des produits animaliers pour produire d'autres choses était une base du marché depuis la Préhistoire. Le tout était d'empêcher les animaux d'en souffrir. « J'avoue que j'serais curieux de voir jusqu'où irait leur amour des animaux. » Ils pouvaient bien gueuler contre les cages et les enclos, si on les enlevait, ils ne tiendraient certainement pas le même discours.

Pour l'instant, il s'agissait surtout de faire profil bas pour éviter de subir les conséquences de leurs actes. Et puis, Arthur pouvait bien se débrouiller. Eux, ils prenaient leur pause. C'était l'heure du goûter, en plus. Le plan de piller un restaurant du zoo était tellement parfait que Tom ne put s'empêcher de prendre un air catastrophé, atterré, choqué déçu en se retournant vers son compère. Bon, ce qu'il disait avait du sens ; les singes faisaient partie des animaux les plus intelligents dans ce zoo, assez teigneux également pour avoir envie d'une part du butin. Pour des raisons de santé, ils n'auraient pas de barres chocolatées ou des conneries du genre alors les fruits, ce n'était pas bête. C'était sur le principe, qu'il ne pouvait pas adhérer. « Ok alors, je reformule. Et si on allait dans le restaurant s'infiltrer dans les cuisines, faire une mission commando et voler des vivres vu que ce n'est plus l'heure du service ? Tu sais, sans que personne ne le sache puisqu'on est décidé à jouer les hors la loi aujourd'hui. » Juste demander, ce n'était pas drôle. « Et ensuite, pourquoi je devrais faire moi le numéro de charme ? Tente ta chance un peu, elle est jolie la petite blonde en plus. Depuis quand t'es célibataire, sérieusement ? »

Peut-être un peu trop taquin, Tom s'arrêta net, attrapa le bras de son ami. « T'sais quoi, tu as raison. C'est bien plus drôle si tu t'occupes toi de nous procurer des vivres. T'as besoin que je te coache ? Que je te dise quoi dire ? Tu veux que je joue le rôle de la blondinette, comme ça on prépare ton entrée en matière ? » Il n'avait qu'à tout de suite accepter l'idée du cambriolage alimentaire. Tant pis pour lui.

Stages compris, cela faisait près de 15 ans que Tom bossait pour ce zoo. Il avait vu du personnel défiler, des animaux aussi. Il avait peut-être un peu perdu de vue les limites imposées, ce qu'il pouvait se permettre ou non... Mais il n'empêchait que voir la méfiance et le peu d'enthousiasme de son collègue pour le raid dans la cuisine, ça le décevait un peu. Il se sentait comme un gamin qui n'aurait pas de partenaire de jeu pour faire une course de petites voitures par exemple. Pourtant, s'il était un peu adulte, il fallait dire ce qu'il était : un tour dans les cuisines, ce serait du vol. pas que ça les mènerait à la faillite, mais quand même. C'était moins drôle. « Je m'abaisserai jamais à draguer qui que ce soit pour avoir à manger, c'est quoi cette forme de prostitution pourrie ? » Si Gus ne le soutenait pas, et si lui n'allait pas voir la blonde, alors cela finirait qu'ils n'auraient plus qu'à retourner à la salle de repos en espérant qu'un collègue ait apporté un paquet de gâteaux et l'ait mis à disposition. Sinon, ils n'auraient plus qu'à retourner au travail et éventuellement contribuer à réparer leurs bêtises. C'était qu'en plus, le brun faisait l'offusqué, chose qui fit lever les yeux au ciel à Tom. Elle était jolie cette serveuse, souriante, et il ne lui semblait même pas l'avoir vue le regarder un jour. Qu'elle soit jeune n'avait rien d'un problème, bien au contraire. C'était plus frais et joyeux qu'une mégère de 40 ans qui sort d'un divorce et qui est en conflit avec son fils Kevin, 15 ans. « Je t'ai jamais vu avec une nana. Mais t'as l'air tellement peu motivé que je vais finir par penser que tu préfères les animaux. Peut-être que le cuistot est toujours là, tu pourrais le draguer lui... »

Après un truc pareil, il ne put même pas protester quand Gus compara sa chevelure à celle de la blonde. C'était pas faux. « Elle est magnifique, je sais. » La chevelure. Blonde, soyeuse, sauvage. Totalement à son image. Il déchanta vite ceci dit en constatant que son ami changea d'avis. Brusquement, et sans nouvel argument. Ça pouvait pas être motivé par la faim, ça. « J'imiterai un oiseau pour faire croire que j'essaye d'appeler les flamants roses, ce sera suspect sinon. Mais attends, tu vas vraiment le faire... ? » Il n'y croyait pas, si bien qu'il resta con en voyant le brun s'éloigner, droit sur le restaurant où se trouvait la jeune femme. Faire le guet. Noté.

Il manquait de maturité quand il s'agissait de sortir de la droiture prédéfinie et d'enfreindre les règles. Raisonnablement, il aurait déjà du être en train de chercher les derniers animaux manquants pour les remettre dans leur enclos et clore cette histoire au plus vite. Il prenait juste trop de plaisir à charrier Augustus, remettre sa parole et son courage en doute. C'est que finalement il avait fini par se donner envie d'un goûter à côté des singes... Et il aurait tout aussi bien pu l'acheter, utiliser son salaire pour en plus approvisionner le zoo. Mais il préférait le défi et la délinquance dans lequel son collègue ne le suivrait pas. Non, il restait buté dans sa version du plan qui consistait juste à gentiment demander en faisant les yeux doux à une midinette. « Fonce, champion ! » Lui resta finalement dans son coin à faire le guet comme c'était prévu, à surveiller les alentours pour qu'aucun supérieur ne vienne les reprendre à l'ordre, ou pour ne pas laisser filer un flamant rose égaré. Honnêtement, il s'attendait pas à ce que Gus lui offre un grand spectacle. Mais il put admirer l'air interloqué des demoiselles qu'il enlaça sans aucunes raisons apparentes, le doigt d'honneur pointé en sa direction, l'air attentif de la blonde suivi de son rire et du regard en biais vers le compère, et surtout des vivres qui glissèrent dans les mains de son ami. En louchant il crut même le voir tendre un papier avec ce qu'il imaginait être un numéro de téléphone. Fallait reconnaître ça : il avait réussi avec brio.

Bon joueur, il applaudit quand le brun revient vers lui, fier comme un paon. « Tu parles, t'as choisi la facilité. Mais félicitations, t'as réussi la première partie. Maintenant si t'es un homme, tu lui proposes un verre si elle t'envoie un message. » Il eut un sourire mutin. Il s'imaginait déjà débarquer dans le bar, s'asseoir dans un coin et surveiller de loin. Il allait peut-être réussir à le caser, le Gus. « Bon allez, j'te rappelle qu'on est en cavale, si on nous voit en train de prendre un bout au snack ça va faire désordre. Allons rejoindre nos mangeurs de banane préférés ! » En attendant, il ne se fit pas prier pour plonger la main dans le sac et en ressortir, ce qui était... suspense... une barre chocolatée Cadbury. Pas une mauvaise pioche. « Et faut qu'on se trouve un alibi pour l'heure du méfait. Tu sais, juste au cas où. Tu pouvais faire quoi toi à environ 15h23 ce jour ? » demanda le blond en déchirant le papier violet.

Tellement lancé dans la perspective de mettre Augustus au défi, Tom ne s'attendait pas à ce que le piège se retourne contre lui. Et quand son collègue lui fit comprendre qu'il n'avait pas eu des couilles -comme le blond l'aurait pensé-, mais avait juste évité à la midinette d'avoir à demander le numéro du vétérinaire... eh bien, ce dernier se figea juste net. C'était foireux comme plan. « T'es con et pas stratège du tout Gus ! Tu lui as dit quoi ? Parce que si je la repousse ou si je réponds pas, on pourra plus la soudoyer pour avoir de la nourriture gratos. J'espère que tu t'en souviendras, et c'est à charge de revanche ! » Le blond se retourna quand même une dernière fois sur la petite nana qui lui sourit de toutes ses dents avant de retourner à sa tâche. Eux, ils avaient à disparaître avant de se faire pincer en train de faire tout sauf travailler et venir en aide aux chasseurs de flamants roses. Et s'ils étaient partis sur l'idée de se faire discret, ce couillon ne respecta pas tout à fait les règles, se mettant à attirer l'attention de tous les visiteurs du coin en chantant et déambulant, hilare. Les quelques personnes présentes le dévisagèrent comme s'il était fou. Malheureusement, le tee-shirt avec le nom du zoo ne laissait pas trop de doutes sur la provenance de cet étrange spécimen. Aussi, histoire de préserver leur réputation, Tom se sentit obligé de suivre en criant à plein poumons. « C'EST LE SEUL TYPE ASSEZ TIMBRÉ POUR ALLER NOURRIR LES TIGRES ET LES PUMAS, C'EST NORMAAAAAL » ! Tellement normal qu'il bouscula légèrement Gus pour qu'il avance plus vite et qu'ils puissent disparaître.

Raisonnablement, personne ne penserait qu'ils avaient pu faire un coup aussi foireux. Mais il était vrai que dans le doute, Tom préférait couvrir ses arrières. Et ce n'était pas gagné. « T'es soigneur référent au secteur félins, qu'est-ce que tu ficherais avec les chimpanzés ? » C'était pas tant crédible. Machinalement, le blond se frotta le bouc, réfléchissant à ce que lui aurait pu bien faire. « Y a un aigle qui s'est un peu esquinté. J'aurais pu aller faire un tour là-bas, partir pour chercher des seringues anesthésiantes mais comme l'équipe avait la situation sous contrôle, je serai parti pour aller voir comment se portent les chimpanzés... J'aurais pu avoir besoin d'en examiner un et étant donné que tu aurais été le seul soigneur que j'ai croisé, c'est à toi que j'aurais demandé ? » Quel merdier. Comme s'ils avaient pu avoir le temps de faire ça en un quart d'heure.

Arrivés dans la pièce réservée au personnel, Tom soupira en s'asseyant sur le banc. À peine Gus approché qu'il tira une barre chocolatée, l'ouvrit pour croquer directement dedans. Leur présence avait attiré les singes, aussi il tira une poignée de bananes qu'il commença à éplucher. « T'chais, chuis pas chûr qu'ils cherchent un rechponchable, vont vouloir étouffer l'affaire. » supposa le blond la bouche pleine.