we don't know each other, but.. (noemi)

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{we don't know each other, but..}
crédit/ tumblr ✰ noemi.

Le retour à Island Bay a été compliqué. Je pensais que notre voyage à Seattle, à Azel et moi, dans sa famille nous ferait le plus grand bien, mais à la place de cela, il nous a éloigné. Nos envies ne semblent pas être les mêmes et par facilité, Azel a préféré mettre fin à tout cela, à nous. Je la pense égoïste, pourtant, je ne suis pas certaine d'être mieux. Si elle a décidé de prendre de la distance, c'est parce que je ne veux pas d'enfants, ni de mariage, pas pour l'instant en tout cas. J'ai vingt-et-un ans, elle devrait comprendre, non ? Je suis bien trop jeune pour assumer tout cela et c'est dans ce genre de situation que notre différence d'âge se fait ressentir. Neuf mois. Nous avons pourtant passé dix mois ensemble et cela ne semblait pas la déranger. Je veux dire, elle aurait dû se douter qu'une telle discussion allait arriver un jour, alors pourquoi ne l'a-t-elle pas évité ? Elle aurait pu me dire non quand elle a eu l'occasion, cela aurait certainement été moins douloureux. Aujourd'hui, je suis complètement perdue, complètement dévastée, beaucoup plus que lors de ma rupture avec Declan. Peut-être parce qu'avec lui, il n'y avait plus de sentiments. Avec Azel, c'est bien différent, je suis amoureuse d'elle, folle amoureuse d'elle même et j'ai bien du mal à me dire que c'est terminé entre nous. Cela me tue à petits feux. Je n'arrive plus à dormir, je mange moins et ma vie sociale est au point mort. Enfin presque, il n'y a que Noa. C'est chez elle que j'ai été après ma rupture et c'est elle qui m'a ramassé à la petite cuillère. N'est-ce pas comme ça que l'on reconnaît les vraies amies ? J'ai été horrible avec elle et pourtant, elle a été là pour m'accueillir quand j'en ai eu besoin. Quoiqu’il en soit, la vie continue et je ne peux pas rester enfermée sous prétexte que j’ai été larguée. Je dois me rendre au boulot, maintenant que j’en ai un. Qui sait, c’est peut-être lui qui va me permettre de m’en sortir. Aujourd’hui, je suis celle qui fait l’ouverture du cabinet et je suis censée finir tard, une telle journée devrait me faire penser à autre chose. J’arrive au bâtiment et me dirige rapidement vers les vestiaires. J’enfile alors ma blouse et retourne ensuite au bureau de l’accueil. Il n’y a pour le moment personne, mais je suis vite rejoins par la secrétaire, des collègues, mais aussi des patients. J’attends un petit peu, puis je repère le nom de la personne que je dois voir. Quelqu’un qui n’est visiblement jamais venu ici, car il n’y a pas de dossier. Je me rends dans la salle d’attendre et appelle. « Madame Wilson ? » Une jeune femme, blonde, se lève. « Bonjour. Je suis la kiné qui va s’occuper de vous. » Je lui tends la main pour qu’elle la serre, un sourire sur les lèvres pour paraître chaleureuse. « Veuillez me suivre. » Dis-je après tout ça. Je prends la direction d’une pièce de soin où se trouve une table de massage et tout le nécessaire pour une séance de rééducation. Une fois toutes les deux dans la pièce, je referme la porte. Ce qui se dira ici restera entre nous, inutile que les personnes qui passeront dans le couloir soient au courant de la raison qui amène cette femme ici. « Qu’est-ce que vous avez ? »

J’ai l’impression de vivre un rêve éveillé depuis quelques semaines. Depuis qu’Eleanor a succombé à mes avances, et que nous avons partagé une première fois ensemble, j’ai l’impression d’être de retour dans mon adolescence. Nos trente ans de différence sont rapidement oubliés, laissant place à la folie, à la passion, mais surtout à la discrétion pour notre relation. Nombreux sont les gestes sensuels dans le couloir, les baisers volés dans une pièce à l’abri des regards, et les moments d’amour planqué dans la salle de bain. Ce n’est pas l’endroit le plus romantique, c’est sûr, mais avec elle, tout semble différent à mes yeux. Du moment que mes lèvres ne se séparent pas des siennes, ce qui nous entoure m’importe peu, je me sens vivante, je me sens sienne, et pour rien au monde je ne voudrais arrêter ça. C’est une véritable relation, j’en suis sûre, maintenant qu’elle n’est plus si réticente. J’ai l’impression en l’espace de quelques semaines de ne plus être moi même, je ne me comporte plus de la même façon. J’abandonne peu à peu mes nombreuses conquêtes pour me concentrer sur celle qui attise la flamme de mon coeur, mais avant tout, j’ai pris une immense décision. Je connais l’existence d’une soeur, fille de ma mère biologique, qui habite dans la même ville que moi. Si avant j’avais la trouille, pire que ça même, une peur paralysante de la rencontrer, je me sens enfin prête de lui dévoiler ce secret. Je ne savais pas comment m’y prendre au départ, et finalement, j’ai tout simplement pris rendez-vous avec elle pour une séance de kinésithérapie il y a quelques jours, prétextant à la secrétaire un affreux mal de dos. Mensonge, en réalité, je n’ai pas mal au dos du tout et je suis en pleine forme, mais il faut parfois faire des concessions pour arriver à nos fins. Vêtue d’un jean et d’un sweat-shirt léger puisque l’hiver semble s’installer doucement sur l’île,  j’arrive dans le cabinet avec environ quinze minutes d’avance, et je m’installe dans la salle d’attente pour attendre cette fameuse Reagan, la boule au ventre. Ce n’est pas rien, c’est un grand jour pour moi et… pour elle aussi. Quand elle apparait en face de moi, je déglutis. « Madame Wilson ? » Je lui souris, et me lève pour m’avancer vers elle. « Noemi. Bonjour. » Je souris un peu, mal à l’aise. « Bonjour. Je suis la kiné qui va s’occuper de vous. » Je lui serre la main, et j’ai déjà l’impression que ça ne va pas être de la tarte. Elle a pas l’air à l’aise elle non plus, je ne sais pas si c’est parce qu’elle a ses règles ou quoi, mais elle a pas l’air dans son assiette. « Veuillez me suivre. »  J’hoche la tête, et je la suis, pas à pas vers une salle de soin, qui semble être la sienne, j’imagine. Une fois à l’intérieur, elle referme la porte, et je joue avec mes doigts pour éviter de trop stresser. « Qu’est-ce que vous avez ? » Je soupire un peu, et c’est avec la voix tremblante que j’annonce la chose, le mensonge. « Je me suis fait mal au dos en.. enfin pas besoin de faire de schéma. » Je passe un peu la main dans mes cheveux, et je m’assoie sur la table de massage avant de relever la tête vers la jeune femme. « Je dois vous parler, pour être honnête, je dois vous parler depuis quelques mois et mon dos va bien. » Je baisse la tête, honteuse. « Vous êtes bien Reagan Wiess ? » Je lui souris, histoire de ne pas lui faire peur. Normalement, c’est bien elle, mais on ne sait jamais.

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Rien laisser paraître, voilà la meilleure des choses à faire et pourtant, c’est difficile. Chacune de mes pensées est dirigée vers Azel. Elles sont d’abord positives, joyeuses, bien évidement, puis doucement, elles se transforment et se rapprochent de la réalité actuelle : Azel et moi, c’est fini. Elle ne veut plus de moi, elle m’a largué, de la pire des manières, à des milliers de kilomètres de chez moi. Je dois donc passer à autre chose, moi aussi, même si ça sera dur. Je dois mettre tout cela de côté et me concentrer sur mes patients. D’ailleurs, la première de la journée doit être arrivée, il est grand temps que j’aille la chercher. « Noemi. Bonjour. » Nous nous serrons la main, comme je le fais avec tous mes patients, puis je l’emmène dans la salle d’examen où je pratique, afin de m’occuper d’elle et de son dos, d’après ce que dit son dossier. Je ne sais pas grand-chose sur elle, je n’ai même pas le nom de son médecin traitant, je pense donc qu’il s’agit d’une urgence. Une fois la porte fermée, je l’invite à s’installer, à se mettre à l’aise et je lui demande ce qui l’amène ici. Autant aller droit au but, plus vite je saurais ce qu’elle a, plus vite je pourrais mettre en place un traitement pour qu’elle se sente mieux. « Je me suis fait mal au dos en.. enfin pas besoin de faire de schéma. » Je fronce légèrement les sourcils. Malheureusement, elle va devoir faire un schéma, ou du moins m’expliquer un peu plus en détail ce qui lui arrive, car avec son peu d’explications, je ne vais pas pouvoir faire grand-chose. Mais rapidement, la jeune femme se redresse sur la table de massage, visiblement pas tant douloureuse que ça. « Je dois vous parler, pour être honnête, je dois vous parler depuis quelques mois et mon dos va bien. » C’est la meilleure ça. J’ai passé une semaine de merde, il en sera certainement de même pour les prochaines et il faut que des personnes cherchent à me faire perdre mon temps. Je secoue légèrement la tête et m’apprête à hausser la voix quand elle reprend la parole et me surprend avec sa question. « Vous êtes bien Reagan Wiess ? » Cette question est tellement simple et en même temps idiote, car si elle est ici, elle est censée savoir mon identité, ou du moins mon nom. Pourtant, je sens qu’il y a autre chose, qu’elle est là pour une raison bien particulière, c’est ce qui l’a poussé à prétexter un rendez-vous médical avec moi. « Oui, c’est bien moi. Pourquoi ? » Dis-je en fronçant les sourcils. Elle a demandé mon identité, c’est vrai, mais je ne dois pas oublier qu’avant ça, elle a mentionné le fait qu’elle devait me parler. « On se connaît ? » Je pense que ça me reviendrait, mais je tente quand même, ça simplifierait les choses, faut se le dire. Je l’ai peut-être rencontré quand j’étais enfant, je sais que mes parents côtoyaient beaucoup de monde. C’est donc probable, mais j’espère quand même que j’aurais des souvenirs de ça, pas forcément de qui elle est, mais simplement de ses traits. « Pourquoi est-ce que vous êtes là ? » Je n’ai pas envie de tourner autour du pot. Pas aujourd’hui.

Ça fait déjà plusieurs semaines que j’ai pris la décision de débarquer enfin dans la vie de ma soeur, biologique je veux dire. Je ne savais pas vraiment comment m’y prendre, il faut dire qu’elle ne sait pas que j’existe, et j’imagine que mon arrivée dans sa vie va chambouler un peu la sienne. J’ai finalement décidé de prendre un rendez-vous dans son cabinet, et quand j’arrive, j’ai la boule au ventre. Je ne sais pas comment ça va se passer, mais quand elle m’appelle, je respire un grand coup. Nous nous dirigeons vers une petite salle d’examen, et elle me demande ce que j’ai. Je soupire un peu avant de lui dire que j’ai mal au dos, prétextant à demi-mot que je me suis fait ça en couchant avec quelqu’un, mais elle n’a pas l’air de comprendre. Je m’assois sur la table de massage, et je me redresse d’un coup pour ne pas tourner en rond. J’ai besoin de lui parler, mon dos va très bien, et je lui en fait part. Nous y sommes, ça y est. Je lui demande si elle est bien Reagan Wiess, même si je n’ai aucun doute, c’est simplement pour m’assurer de ne pas dire de connerie devant un de ses clones. « Oui, c’est bien moi. Pourquoi ? » Je relève les yeux vers elle, et me mord la lèvre inférieure. Je ne sais même pas par où commencer, c’est compliqué. « On se connaît ? » Je secoue doucement la tête, et baisse un peu les yeux. « Non. » Elle doit avoir sacrément la trouille, moi à sa place j’aurais peur en tout cas. Et même si je suis celle qui en sait le plus sur l’autre, j’ai vraiment la trouille de lui annoncer la bombe. Personne n’est préparé à apprendre qu’il a une soeur, et encore moins elle, j’imagine. « Pourquoi est-ce que vous êtes là ? »  Je déglutis à nouveau, et je passe un peu ma main dans mes cheveux, témoignage de mon malaise. J’ai envie d’y aller en douceur avec elle, je ne sais pas comment elle va réagir, mais on ne sait jamais. « Je suis ta soeur. » Ok, pour le fait d’y aller en douceur, on en reparlera plus tard. Je la regarde, le tutoiement s’invite naturellement dans mes paroles, de toute façon, elle est plus jeune que moi et au point où on en est. Je me lève un peu, et m’approche d’elle pour lui demander de s’asseoir. Elle est pâle comme un linge, j’ai pas envie qu’elle fasse un malaise. « Assieds-toi, je vais t’expliquer. Mais je te promets c’est pas des conneries, j’ai des preuves. » Je me mord la lèvre inférieure encore, je vais finir par la faire saigner, et je commence à faire les cents pas dans la petite salle d’examen. Je joue avec mes doigts, je soupire, je me mord l’intérieur de la joue, c’est la panique. Finalement, je me retourne pour la brune pour vérifier que tout va bien. « J’ai été adopté, moi aussi. On a… la même mère. » Je déglutis. « Purée je sais pas comment te dire ça. Tu te sens bien ? Pardon, j'ai été trop cash je crois. » Comme si ça ne se voyait pas. Comment elle aurait fait elle à ma place ?

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crédit/ tumblr ✰ noemi.

« Non. » Je fronce légèrement les sourcils. Qu'est-ce que je pourrais bien faire d'autre ? La jeune femme qui se tient face à moi vient clairement de m'annoncer que l'on ne se connaît pas, mais que c'est bien moi qu'elle cherche. C'est plutôt flippant, non ? D'ailleurs, je fais un pas en arrière, pour prendre un peu de distance. On ne sait pas, elle est peut-être folle et ainsi, il sera plus facile pour moi de quitter la pièce et de partir en courant. « Je suis ta soeur. » Finit-elle par ajouter. Il n'est alors plus question de prendre mes jambes à mon cou et de partir, j'en suis bien incapable. Je tente bien de dire quelque chose, mais seule ma bouche s'ouvre, aucun mot n'en sort. Je n'ai aucune idée de la manière dont je dois réagir. J'ai déjà eu du mal lorsque l'on m'a dit que j'étais adoptée, alors je trouve cela normal qu'il en soit de même pour l'annonce d'une sœur. « Assieds-toi, je vais t'expliquer. Mais je te promets c'est pas des conneries, j'ai des preuves. » Elle s'est rapprochée de moi et m'a proposé de m'asseoir. Je l'ai fait, ne voyant pas vraiment d'autre choix quant à l'occupation de mon corps. Mais à aucun moment, je n'ai cherché à me rapprocher d'elle, à rentrer en contact avec. Non, bien trop effrayée pour cela, si jamais elle dit vrai, j'ai préféré garder mes distances. « J'ai été adoptée, moi aussi. On a… la même mère. » J'ai du mal à y croire, encore et toujours. En même temps, cette conversation me paraît complètement surréaliste. J'avais commencé à faire des recherches sur ma mère il y a quelques mois, mais cela n'avait abouti à rien. Je pensais alors que c'était fichu, que je devrais rester avec mes questions et mes ignorances. Mais voilà qu'aujourd'hui, cette fameuse Noemi vient à moi. « Purée je sais pas comment te dire ça. Tu te sens bien ? Pardon, j'ai été trop cash je crois. » « Non. » Il y a ça, forcément, mais pas que. Et malheureusement pour moi, l'enchaînement des différents événements rend cette annonce un peu plus compliquée. J'ai envie de pleurer, parce que tout cela me ramène une nouvelle fois à Azel, j'avais commencé mes recherches avec elle, mais je me dois d'être forte. Craquer devant une inconnue ne me rendrait que plus pitoyable, que ce soit ma sœur ou non. « Ce n'est pas possible. » Elle a l'air convaincue de ce qu'elle m'avance, mais je ne peux m'empêcher de croire qu'il s'agit d'une bêtise. Comment peut-elle être aussi sûre d'elle, alors que moi, je n'ai rien pu trouver ? « J'ai fait des recherches et je n'ai rien trouvé. Pourquoi est-ce que vous, vous seriez au courant de tout ça ? » Contrairement à elle, je continue de la vouvoyer : encore et toujours ce besoin de mettre de la distance tant que tout ceci ne sera pas un peu plus clair. « C'est bien facile de dire à quelqu'un qui est adopté qu'il fait parti de votre famille. » Mon histoire n'est certainement plus un secret d'état. Entre mes grands-parents, mes parents, leurs amis, les miens, les bruits ont circulé et cela doit donc être facile de me piéger. « Quelles sont vos preuves ? » Autant rentrer directement dans le sujet. J'ai besoin de certitudes et elle dit en avoir, autant sauter sur l'occasion.

Nous y sommes, c’est enfin le moment pour moi de lancer la bombe. Avouer à une jeune femme qui n’a sans doute rien demandé qu’elle a une soeur, et que sa mère est une prostituée, ou l’a été qui plus est. Je ne sais pas comment ça s’est passée pour elle, et je crois que ce n’est pas une information qu’elle est prête à entendre pour le moment. Je décide d’être cash, et de lui avouer directement que je suis sa soeur. Elle ne réagit pas. Il faut dire que je ne lui en laisse pas le temps, l’invitant à s’asseoir pour que je lui explique ce qu’il est en train de se passer. Elle m’écoute, et je n’y passe pas par quatre chemins. J’aurais peut-être dû, j’ai l’impression qu’elle va faire une crise cardiaque sur place. D’ailleurs, je ne tarde pas à lui demander si elle se sent bien, en m’excusant pour ma manière trop directe de dire les choses. « Non. » Je me mord la lèvre, je me sens tout simplement nulle. C’est le cas, je joue avec mes doigts, je me mord l’intérieur de la joue. Je ne peux plus faire chemin arrière, c’est impossible et pourtant, je n’ai qu’une envie : celle de m’enfuir à toutes jambes. C’est idiot, c’est moi qui voulait lui annoncer et maintenant… est-ce que nous étions prêtes toutes les deux ? Je n’en sais rien. « Ce n’est pas possible. » Je baisse un peu la tête, forcément, ça ne va pas être simple je m’y attendais. « J'ai fait des recherches et je n'ai rien trouvé. Pourquoi est-ce que vous, vous seriez au courant de tout ça ? » Je me mord une dernière fois la joue, je saigne, c’est bien pour moi ça, bravo. « Je… » Mais je n’ai pas le temps de poursuivre qu’elle me coupe déjà la parole. « C'est bien facile de dire à quelqu'un qui est adopté qu'il fait parti de votre famille. » Elle a tout à fait raison, je n’y aurais pas cru moi non plus. Mais c’est pourtant la simple vérité. « Quelles sont vos preuves ? » Je déglutis, et regarde un peu mes mains avant de reprendre la parole. « Ma mère m’a reconnu à la naissance. Son nom figurait dans un dossier, dossier que je n’ai jamais voulu ouvrir jusqu’à il y a quelques mois. Mes parents m’ont un peu forcé la main. » Je soupire. « J’ai eu son nom, et j’ai commencé des recherches et c’est comme ça que je t’ai trouvé. Tu sais, c’est pas difficile de retrouver une personne quand on a suffisamment d’informations… » Je baisse un peu la tête, j’aurais aimé lui annoncer autrement finalement. « Je ne veux pas en venir à faire un test ADN, je pense que la confiance peut suffire, j’espère mais si tu en a besoin je veux bien. » Je me mord la lèvre, un peu honteuse. Je ne sais pas pourquoi, c’est certainement idiot d’ailleurs, mais je ne veux pas la blesser non plus, ou trop lui changer sa vie. J’aurais dû y penser avant.

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« Je… » La pauvre. Je suis plutôt dure et en plus de ça, je ne lui laisse aucune occasion de se justifier. J'ai besoin de sortir tout ce que j'ai à lui dire, de peur de ne plus pouvoir le faire après si elle m'interrompt. « Ma mère m'a reconnu à la naissance. Son nom figurait dans un dossier, dossier que je n'ai jamais voulu ouvrir jusqu'à il y a quelques mois. Mes parents m'ont un peu forcé la main. » Visiblement, nous n'avons pas du tout été élevées de la même manière. Si les miens auraient pu garder le secret sur mon adoption plus longtemps, ils l'auraient fait. Ils n'étaient pas question pour eux que je rencontre ma mère biologique. « J'ai eu son nom, et j'ai commencé des recherches et c'est comme ça que je t'ai trouvé. Tu sais, c'est pas difficile de retrouver une personne quand on a suffisamment d'informations… » C'est certainement cela mon problème, je n'avais rien pour chercher, pas de base, alors forcément, je tournais en rond. « Je ne veux pas en venir à faire un test ADN, je pense que la confiance peut suffire, j'espère mais si tu en as besoin je veux bien. » Me proposer cela augmente un peu plus la confiance que je devrais avoir pour elle. Si elle est prête à les faire, c'est qu'elle n'a pas peur des résultats et qu'elle les connaît. Il va donc falloir que je la crois. « Je ne l'ai jamais vu. Je n'ai ni son prénom, ni son nom. » Dis-je simplement. Autant mettre les choses au clair directement et se dire ce que l'on sait, non ? « Je ne suis que le fruit d'une agression pour elle, pourquoi voudrait-elle affaire à moi ? » Un viol. C'est la seule chose que mes parents ont bien voulu me dire quand j'ai appris. Ça justifie presque l'abandon. « J'ai voulu savoir à un moment. Mais je ne suis plus certaine de le vouloir désormais. » On pourrait facilement me qualifier de faible. Ça serait justifié. Et tout cela est lié à l'annonce de Noemi. J'ai l'occasion d'avoir une part de la vérité, ou du moins de sa vérité à elle et pourtant, je suis effrayée. Effrayée à l'idée qu'elle a pu connaître quelque chose avec notre mère, qu'elle a été heureuse avec, qu'elle a pu se loger dans ses bras, alors que moi, je n'ai jamais eu l'occasion de faire tout cela. Pourtant, je n'ai jamais manqué de rien et c'est presque égoïste de ma part de vouloir plus, mais c'est cette partie biologique de moi qui m'intrigue. J'ai vécu presque vingt ans dans le mensonge, c'est normal de vouloir connaître la vérité, non ? Aussi douloureuse soit elle. J'ai rapidement lancé les recherches après la découverte sur mon adoption, je voulais savoir, j'en avais besoin, mais rien n'a abouti et j'ai finalement baissé les bras. J'avais Azel à mes côtés, Côme, mes parents adoptifs et leurs familles respectives, c'était suffisant. Mais maintenant, la moitié ne répond plus présent, alors c'est peut-être l'occasion de me replonger dans ses recherches. Repenser à mon ancienne petite-amie et aux moments que l'on a partagés sur mon dossier d'adoption fait remonter à la surface des souvenirs, des bons bien sûr, mais ceci étant désormais fini, des larmes viennent presque naturellement perler sur mes joues. Je les balaie rapidement de mes mains, avant de me justifier. Comme si c'était nécessaire, je ne lui dois rien après tout. « Ce n'est pas de ta faute. C'est juste une accumulation de plusieurs choses et comme on pourrait dire : c'est la goutte d'eau qui a fait déborder le vase. »

J’ai l’impression d’avoir été trop cash avec la jeune femme. C’est le ressenti que j’ai, et je me trompe rarement. Elle n’était pas préparée à apprendre une nouvelle pareille, et moi j’arrive sans aucun stress à lui dire ‘Eh salut je suis ta soeur’, sans prévenir avant pour qu’elle se prépare. J’aurais pu la rencontrer, apprendre à la connaître et lui dire ensuite, et j’ai fait l’inverse. Tout en même temps, et je ne sais pas si c’est la meilleure des manières. Enfin à quoi bon regretter, ce qui est fait est fait, je ne peux rien y changer. Elle a besoin d’explication, et je comprend complètement. Je décide alors d’être le plus précise possible, et reprend la parole afin de lui expliquer comment je m’y suis prise. Je commence par le début, j’ai été reconnu à la naissance, et c’est après qu’elle m’a abandonné. Ce sont mes parents qui m’ont obligé à connaître son identité. Cependant, je me reprend rapidement pour lui expliquer que malgré ça, c’est moi qui ait effectué des recherches, et je l’ai trouvé. J’avais suffisamment d’informations, et contre toute attente, j’étais dans la bonne ville. Si je suis née en Australie, Reagan est née ici, alors c’est plutôt bien tombé. Je lui souris légèrement pour la rassurer et faire passer la pilule plus facilement, et je reprend la parole afin de lui expliquer que je peux faire un test ADN si elle en a besoin, mais que je n’en ai pas envie. En ce qui me concerne, la confiance suffit, mais c’est peut-être différent pour elle. « Je ne l'ai jamais vu. Je n'ai ni son prénom, ni son nom. » Je baisse un peu la tête. Je ne sais pas comment elle est venue au monde, dans quelles circonstances. « Je peux te donner ces informations si tu le souhaite. » Je lui souris, j’ai besoin de la savoir en confiance. « Je ne suis que le fruit d'une agression pour elle, pourquoi voudrait-elle affaire à moi ? » Je me mord la lèvre, non, les circonstances ne sont pas les mêmes que moi, elle a l’air de sous-entendre qu’elle est issue d’un viol. Je n’arrive pas à y croire, j’en ai toujours voulu à ma mère biologique de m’avoir abandonné lâchement, mais maintenant, je ressens presque de la pitié. « J'ai voulu savoir à un moment. Mais je ne suis plus certaine de le vouloir désormais. » J’hoche un peu la tête, je comprend. Au fond de moi, j’aimerais construire une relation avec elle, réussir à la considérer véritablement comme ma soeur et non comme une inconnue qui a le même sang que moi. Elle a l’air attachante, en plus. « Je suis là si tu as besoin d’information, mais tu fais comme tu le sens. » Je baisse un peu les yeux, et un léger silence s’installe, nous permettant à toutes les deux de réfléchir à la situation, j’imagine. Quand je relève la tête vers la jeune femme, ce sont des larmes que j’aperçois sur ses joues, et mon coeur se serre. La voir comme ça, je n’aime pas ça, et savoir que j’en suis peut-être la cause n’arrange rien. « Ce n'est pas de ta faute. C'est juste une accumulation de plusieurs choses et comme on pourrait dire : c'est la goutte d'eau qui a fait déborder le vase. » Je me mord la lèvre, et secoue un peu la tête en posant ma main sur la sienne. « Tu n’as pas à te justifier, si tu as besoin de pleurer, tu peux le faire. Je suis même là si tu en as besoin d’accord ? Et si tu as besoin d’en parler, je suis là aussi. C’est plus facile de parler à une inconnue. » A une inconnue qui a le même sang, certes, mais une inconnue quand même. Mais elle reste ma petite soeur, biologiquement parlant, et ça me semble évident de lui proposer mon aide si elle en a besoin. C’est mon devoir, je crois.

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crédit/ tumblr ✰ noemi.

La jeune femme semble honnête, je ne peux pas le nier. Les informations qu'elle me donne semblent tenir debout, même si je ne connais pas son histoire. Et puis, qui voudrait prendre le risque de mentir à une fille de vingt-et-un ans si c'est ensuite pour lui balancer au visage que ce n'était que des conneries ? Personne, je pense. Je n'ai pas beaucoup d'argent, alors elle ne vient pas pour ça. Elle a une famille aussi, donc ce n'est visiblement pas ce qu'elle vient chercher ici. Elle n'attend que la vérité et il semblerait que je sois la seule à pouvoir lui apporte une partie de cela. « Je peux te donner ces informations si tu le souhaites. » Je ne suis plus sûre de rien désormais. J'ai l'impression que tout m'échappe en ce moment, que je n'ai plus rien à quoi me raccrocher et ça me fait peur. Je hausse alors les épaules comme simple réponse, après tout, avoir les informations me permettrait peut-être de me lancer dans quelque chose de nouveau, dans des recherches que j'ai abandonnées. Je me confie à elle à ce sujet, lui faisant ainsi part de mes doutes. J'ignore pourquoi je me confie à elle, je ne la connais pas après tout. Mais il faut croire qu'en ce moment, je n'ai pas beaucoup de personnes à qui parler, ou du moins, je ne m'autorise pas à le faire. « Je suis là si tu as besoin d'information, mais tu fais comme tu le sens. » Un fin sourire se dessine sur mes lèvres, le premier depuis le début de notre conversation, il me semble. Au final, elle n'a pas l'air méchante, alors que moi, j'ai été plutôt agressive pour une première approche. Je m'adoucis doucement et lui explique qu'elle n'est pas à l'origine de mon pétage de plomb, de mes larmes non plus. Ça, c’est le manque d’Azel. Elle était censée être là, avec moi, pour m’aider à affronter cette étape et voilà que nous ne nous parlons même plus. J’appréhende un peu le jour où nous allons nous recroiser à MODE, car je sais pertinemment que je n’arriverais pas à être aussi forte qu’elle : je vais craquer et je vais vouloir plus que de simples regards furtifs. « Tu n’as pas à te justifier, si tu as besoin de pleurer, tu peux le faire. Je suis même là si tu en as besoin d’accord ? Et si tu as besoin d’en parler, je suis là aussi. C’est plus facile de parler à une inconnue. » Je n’ai pas pour habitude de le faire, ou très rarement, alors il est difficile de me dire que je peux le faire avec une inconnue, même si elle me le propose gentiment. Et puis, lui faire ressentir de la pitié n’est certainement pas la meilleure des choses à faire pour une première rencontre. « Je suppose que tu n’as pas grandi ici ? » Island Bay reste une ville familiale, quelque chose de petit où en général, tu connais tout le monde ou presque et je n’ai aucun souvenir de la jeune femme. « Tu es arrivée pour moi ? Ou alors il y a autre chose ? Quelqu’un d’autre plutôt, on ne se déplace que rarement pour une chose. » Mes paroles sont confuses, mais surtout prononcées à une vitesse folle. C’est comme ça quand je panique. Je ne suis clairement pas la femme la plus à l’aise de la Terre à ce moment précis, mais elle est ici, alors autant en profiter pour parler un peu, même s’il y a beaucoup de chances pour que ça n’aille pas très loin : j’ai un ou une autre patiente après elle et je devrais donc lui demander de partir.

J’essaie d’être la plus douce possible avec ma soeur. Ce ne sera pas facile pour elle désormais, de savoir qu’elle a une soeur. Dans le fond, peut-être qu’elle ne voulait même pas être au courant. Cependant, si elle a besoin d’informations, je suis là pour lui offrir si elle le souhaite. Je lui dis une fois, puis deux, afin qu’elle se sente plus à l’aise avec moi. Un léger silence s’installe, nous permettant de réfléchir. Quand des larmes se mettent à couler sur les joues de Reagan, je ne peux m’empêcher de ressentir un léger pincement au coeur. Elle me rassure et me dit que ce n’est pas, ou presque pas de ma faute, et s’excuse. Je pose ma main sur la sienne, et l’invite à me dire ce qu’il ne va pas. Je l’ai bien compris, je ne suis pas dupe, il n’y a pas que moi. Elle est libre de le faire ou non, dans tout les cas, je serais là pour elle si elle en ressent le besoin. C’est le rôle d’une grande soeur, non ? Je crois. « Je suppose que tu n’as pas grandi ici ? »  Je secoue un peu la tête. « Non, je suis née à Melbourne. Mais j’ai été adopté par une famille originaire de New York et j’ai grandi là bas. » Je lui souris tendrement. « Tu es arrivée pour moi ? Ou alors il y a autre chose ? Quelqu’un d’autre plutôt, on ne se déplace que rarement pour une chose. » Je secoue à nouveau la tête, elle est en train de paniquer et n’est sans doute pas très rassurée non plus. Je décide de lui expliquer en détail les raisons de ma venue ici, il y a neuf ans déjà. Presque dix, ça passe tellement vite. « Je ne m’entend pas avec mes parents. Alors à mes dix-sept ans, j’ai trouvé un boulot de fille au pair dans une famille d’Island Bay. » Je souris un peu, et fais craquer mes doigts. C’est une habitude que j’ai quand je stresse, c’est idiot et surtout inutile. Enfin, ça me détend, c’est le but. « Je ne suis jamais repartie. J’ai changé de famille récemment, et je suis manager au Foxglove aussi. Tu connais ? » Elle connait sans doute, qui ne connait pas ? Ce n’est pas facile de parler de moi, je n’ai pas l’habitude et je n’aime pas vraiment parler de mon passé. Avec Reagan, j’imagine que c’est important pour que nous apprenons à nous connaître. « Et toi, tu as grandi ici ? J’ai vu que tu es née à Wellington. » Bon, ça fait un peu détective mais elle doit s’en douter que j’ai plus d’informations sur elle, qu’elle en a pour moi. J’ai conscience qu’il est important que je détende un peu l’atmosphère, pour éviter qu’elle ne se remette à pleurer mais je ne suis pas sûre que lui demander de parler de son enfance est une bonne chose pour elle. Je décide alors de changer rapidement de sujet, un qui me semble moins difficile pour elle ou du moins je l’espère. « Tu as toujours voulu être kinésithérapeute ? » Je lui souris à nouveau, l’invitant à me parler davantage de son métier que de son enfance. Nous en parlerons sans doute un jour, quand elle sera plus à l’aise. Si elle accepte qu’on apprenne à se connaître, j’espère.

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{we don't know each other, but..}
crédit/ tumblr ✰ noemi.

Je ne la connais que depuis quelques minutes et pourtant, je commence déjà à tirer des conclusions hâtives. J’essaye de lui imaginer une vie, un mari ou du moins un compagnon, des enfants peut-être. Néanmoins, imaginer des choses pour elle ne me mènera nulle part. Par contre, obtenir des informations de sa part oui. « Non, je suis née à Melbourne. Mais j’ai été adopté par une famille originaire de New York et j’ai grandi là bas. » Elle semble avoir voyagé, plus que moi en tout cas. Comme notre mère visiblement, ce n’est pas donné à tout le monde de pondre des filles en Australie et en Nouvelle-Zélande. « Je ne m’entend pas avec mes parents. Alors à mes dix-sept ans, j’ai trouvé un boulot de fille au pair dans une famille d’Island Bay. » Pour le premier point, c’est plutôt quelque chose que l’on a en commun. Depuis l’annonce de mon adoption, mes relations avec mes parents sont plutôt tendues. Néanmoins, je ne m’arrête pas là-dessus, mais plus sur la suite de sa phrase. « Je ne suis jamais repartie. J’ai changé de famille récemment, et je suis manager au Foxglove aussi. Tu connais ? » Depuis ses dix-sept ans et elle n’est jamais repartie ? Je pensais plutôt que son arrivée était récente, quelques semaines ou alors quelques mois. « Depuis tes dix-sept ans ? » Je ne connais malheureusement rien d’elle et par conséquent, pas l’âge qu’elle a aujourd’hui. Mais si elle est née avant moi, cela veut dire qu’elle a eu dix-sept ans il y a quelque temps et donc qu’elle est ici depuis autant de temps. Alors pourquoi venir me voir aujourd’hui ? Je ne comprends pas. Cela semble flagrant d’ailleurs, elle me parle de son bar et moi, je ne trouve rien de mieux à faire que de lui demander confirmation sur sa présence à Island Bay. « Je connais, que de nom par contre. » Dis-je doucement, tentant de me rattraper comme je peux. Après tout, son choix de venir aujourd’hui ou un autre jour ne regarde qu’elle, je n’ai rien à dire là-dessus. « Et toi, tu as grandi ici ? J’ai vu que tu es née à Wellington. » Je hoche timidement la tête. La Nouvelle-Zélande est bien l’une des rares terres que j’ai pu connaître. Le seul autre voyage que j’ai fait en dehors, c’est Seattle pour rencontrer les parents d’Azel et vu la réussite que cela a été, je ne suis pas certaine que ce soit une bonne chose de compter cela comme un réel voyage. « Tu as toujours voulu être kinésithérapeute ? » « Oui, enfin aussi loin que je m’en souvienne. » Je me trouve expéditive et je m’en veux d’être ainsi, pourtant, je suis bien incapable de contrer cela. Me livrer à elle, c’est lui ouvrir ma vie et lui offrir par la même occasion la possibilité de me blesser. C’est triste de penser cela, mais en ce moment, on ne peut pas dire que mes pensées sont très joyeuses. « Je ne fais pas que ça. Je tiens un blog et une chaîne Youtube où je parle un peu de tout. Je fais également certains articles pour un magasine. » Les derniers mots sont difficiles à prononcer parce qu’ils font référence à Azel, mais Noemi m’a parlé de quelque chose de personnel, alors je dois en faire de même. « Mais, le métier de kinésithérapeute est ma priorité et en parlant de cela, je suis désolée, mais j’ai d’autres patients après toi. » Je grimace légèrement, lui faisant comprendre ainsi que notre discussion ne va pas pouvoir s’éterniser trop longtemps.

Reagan semble vouloir en savoir plus sur moi, et j’ai de bonne raison de comprendre qu’elle s’y oblige plus ou moins. Je lui explique ainsi ma vie, ma naissance, rapidement mon adoption. Je lui explique par la suite la raison de ma venue à Island Bay. Ça fait un moment, bientôt dix ans d’ailleurs, ça passe tellement vite c’est incroyable. « Depuis tes dix-sept ans ? » J’hoche la tête, elle semble surprise et je ne comprend pas vraiment pourquoi. En fait, je me rend compte que si moi je connais son âge, ce n’est pas le cas pour elle. Je me sens obligée de préciser. « J’ai vingt-six ans, au cas où tu te demandais. » Je lui souris tendrement, c’est la première chose qu’elle aurait dû savoir sur moi. Je ne sais pas si elle peut voir cette information sur mon dossier patient, mais quand j’ai pris le rendez-vous, la secrétaire ne m’a pas demandé ma date de naissance alors j’imagine que non. « Je connais, que de nom par contre. » Elle parle de mon bar, et je souris à nouveau. Reagan est assez muette et ne semble pas encline à la conversation, alors je décide d’essayer d’en apprendre davantage sur elle, à savoir si elle a grandi ici. Mais elle semble désormais complètement fermée à l’idée d’en parler, son enfance n’est peut-être pas un souvenir heureux alors je me contente de son hochement de tête, ça suffira j’imagine. Je soupire un peu, et lui demande si elle a toujours voulu être kinésithérapeute. C’est quand même particulier comme métier, on ne le devient pas par hasard. « Oui, enfin aussi loin que je m’en souvienne. » Je souris un peu, décidément, elle n'est pas très bavarde. Mais je sais que je ne peux pas trop lui en demander, elle est certainement encore sous le choc de la nouvelle, et c’est normal. « Je ne fais pas que ça. Je tiens un blog et une chaîne Youtube où je parle un peu de tout. Je fais également certains articles pour un magasine. » J’étais au courant de tout ça, et je me contente de sourire un peu. « C’est quoi ton pseudo ? Je peux faire de la pub si tu le souhaite, ou y jeter un coup d’oeil. » J’essaye de m’intéresser à elle, j’imagine que c’est la meilleure des choses à faire dans une situation pareille. Nous sommes soeurs, et que nous le voulions ou non, nous sommes définitivement liées par les liens du sang. « Mais, le métier de kinésithérapeute est ma priorité et en parlant de cela, je suis désolée, mais j’ai d’autres patients après toi. » Je baisse un peu les yeux, mais reste quand même souriante, forcément, je me doutais que je n’allais pas avoir plus de temps pour lui parler. Ça passe trop vite, vraiment. « Oui, je vais y aller pas de soucis. » Je lui souris et attrape mon sac. « Mon numéro de portable est dans le fichier client. Appelle-moi ou envoie moi un message quand tu veux, c’est à toi que revient le choix de poursuivre ou non cette rencontre. » Je déglutis, je ne peux pas la forcer, mais j’espère qu’elle sera encline à une nouvelle rencontre pour mieux nous connaître. « Bon courage pour la fin de la journée, et à bientôt peut-être. » Je ne lui fais pas la bise, c’est encore impossible et ce serait de trop, alors je me contente d’un sourire, et je quitte son cabinet, le coeur léger d’avoir enfin cracher ce qu’il pesait sur mon coeur depuis des mois.

fin du rp