Smoke and Mirrors ♦ Isaac

Isaac Waters

Deep in my heart, deep in my mind

les informations en vrac

la partie anecdotes ○ Renfermé, il n'aime pas trop la compagnie des gens qu'il ne connaît pas. Il n'accorde sa confiance à quasiment personne sauf à celle qu'il appelle affectueusement Birdie (Eanna), sa demi-soeur. ♦ Il dort très peu, c'est un oiseau de nuit. Jouant dans les pubs jusqu'à ce que tous les clients soient partis, il aime jouer avec des étrangers qu'il ne reverra jamais. ♦ Il est plutôt correct comme homme, il ne joue pas trop avec les coeurs. Pourtant c'est un dragueur parfois, il sait jouer des mots. Mais il a passé l'âge de la drague facile. S'il a une aventure, c'est clair à l'avance. Il ne se joue pas des femmes, pas comme lorsqu'il avait 20 ans du moins. ♦ Il a un chien, un Husky qui a quatre ans. Appelé Lover, ce chien c'est une boule de poils qu'il adore plus que tout. Et s'il ne veut pas rester à la rue, c'est surtout pour ne pas être obligé de se séparer de son compagnon sur pattes. ♦ Il joue de la guitare et chante. Mais son plus grand plaisir c'est de composer ses propres chansons et de regarder les réactions des gens lorsqu'il les expose pour la première fois. ♦ Il est plutôt distant avec les gens qu'il ne connaît pas, voire froid. La sociabilité, c'est pas son truc. Il fait rarement le premier pas. ♦ Côté coeur, il a eu des relations plus ou moins stables mais il ne cherche pas forcément à se caser. C'est plutôt une âme vagabonde que romantique. ♦ Il ne possède pas de télévision ni d'ordinateur. Son téléphone le gêne mais il en a besoin pour rester en contact avec les quelques gens auxquels il tient. ♦ Il aime voyager même s'il ne l'a pas beaucoup fait jusqu'ici. Son pays préféré reste l'Irlande. Et pourtant il déteste aussi ce pays. Ses sentiments sont souvent très paradoxaux. ♦ La seule famille qui lui reste c'est Eanna, sa demi-soeur et @Jensen Whitaker son cousin de par sa mère. Il y a quatre ans, Valentina était en voiture avec les parents de Jensen et ils ont tous trois perdu la vie. Cet événement a rapproché les deux cousins qui étaient déjà de bons amis. Jensen a toujours été le petit protégé d'Isaac. L'initiant à la musique au début et ensuite gardant toujours un oeil sur lui, Jensen est comme le frère qu'il n'a jamais eu.

les indiscrétions sur le joueur

 

Code:

<pris>○ colin o'donoghue</pris> isaac waters

l'histoire de ma vie

This is my word, this is my way
Show me a sign, sweep me away

Marchant sur les sentiers perdus de la contrée qui était la mienne, je regarde cette étendue verte qui ne me parle pas. Les forêts irlandaises sont tellement belles qu'il paraît qu'elles peuvent vous couper le souffle. Et pourtant, je ne perds rien. Probablement parce que j'ai déjà trop perdu. Je le vois encore ouvrir la porte, regarder mon allure et ensuite me demander ce que je veux lui vendre. Il avait l'air de penser que j'étais un junkie prêt à venir frapper à sa porte pour lui refiler de la drogue. Humilié, je lui ai demandé s'il se souvenait de Valentina Waters sans trop savoir si je voulais qu'il me réponde. Son regard s'est obscurci quand il a entendu le nom de ma mère. Evidemment, il a tout de suite compris. Et moi aussi. J'ai vu dans son regard qu'il ne voulait pas entendre la vérité que j'étais venu lui livrer. J'ai vu dans ses yeux qu'il ne voulait pas d'un fils. Il n'a pas eu le temps de répondre que j'ai entendu une petite voix derrière lui lui crier "Papa!!" et agripper ses mains autour de sa taille. Elle devait avoir une dizaine d'années cette gamine, c'est-à-dire huit de moins que moi. Et elle, elle a le droit d'avoir un père. Moi... Je n'ai droit à rien. Rien qu'une porte qui se claque derrière moi. Un homme qui m'a regardé quelques secondes avant de me demander de partir. Il ne l'a pas vraiment fait, il n'a rien formulé mais son regard parlait pour lui. Maman m'avait dit qu'il n'était pas l'homme que j'espérais. Et pourtant nous étions venus ici mon sac à dos, ma veste en cuir et moi. Je ne sais pas ce que j'attendais. Peut-être qu'une lueur brille dans ses yeux en me reconnaissant, qu'il voit en moi des traits qu'il voit dans son miroir et qu'il me prenne dans ses bras? Foutaises. D'où me vient ce sentimentalisme? Je suis un mec, pas une quiche molle. Mais voilà, j'ai le souvenir de ces yeux perçants qui m'analysent avant de refermer la porte sur moi. Ces yeux que j'ai hérité de lui, ainsi que la coupe de cheveux désordonnée, qu'ai-je d'autre qui lui appartienne? Les pierres roulent sous mes pieds et je mets un coup à un caillou un peu plus gros que je vois voltiger jusqu'au bas de la colline. Je hais cet homme. Voilà pourquoi je suis venu. J'avais besoin de le voir pour pouvoir accepter cette vérité. Il n'est pas mon père. Il n'est qu'un morceau de la science qui a participé à ma création. Il n'est qu'un homme que ma mère a fréquenté pendant qu'elle voyageait en Irlande. Pauvre maman... C'étaient ses premières vacances, la première fois qu'elle foulait un autre sol que le sien. Avait-il fallu qu'elle tombe amoureuse de cet homme? Il lui avait vendu la lune pour obtenir ses faveurs. Et quand elle était tombée enceinte, il avait senti que la terre ne serait pas suffisante pour y vivre à deux. Il voyait l'étau se resserrer et par lâcheté n'avait rien dit à celle qui portait son enfant. Puis, sans prévenir personne, il avait commencé à en fréquenter une autre. J'étais né, j'avais quatre mois quand maman a découvert le pot aux roses. Et il lui a dit de partir. Maintenant je l'imagine très bien. Maintenant que j'ai vu son visage froid et ses traits tellement durs, j'imagine comment il a dû la chasser elle aussi. Le vent de Galway me gifle de plein fouet, c'est mon rappel à la réalité. Voilà pourquoi la patrie de mon sang ne me plaît pas. Parce que le monstre qui me sert de géniteur y est lui aussi né. Pourtant, ces forêts et ces verdures qui s'étalent devant mes yeux sont à vous couper le souffle paraît-il. Mais moi, j'ai surtout perdu ma voie.


La foule est en délire. Au premier rang, je vois les yeux bleus de la petite perle qui me suit depuis trois mois déjà. C'est une fille à papa, une petite riche qui n'a que faire de l'argent perdu pour suivre les R.E.D. en tournée. Pourtant, elle n'a jamais osé franchir les portes du backstage. Je sais qu'Eagle lui a fait signe de venir avant le concert de ce soir. Il m'a raconté qu'elle a rougi à s'en éclater le visage. Elle est mignonne dans son genre. Même si j'avoue qu'elle me déconcentre un peu. Elle n'a d'yeux que pour moi. Elle pourrait remarquer la moindre de mes fausses notes si elle ne semblait pas si obnubilée par ma personne. Pourtant, je garde mes distances avec elle. Les groupies, ça commence à me connaître. J'aime jouer de la musique, j'adore chanter au micro, j'aime les fans qui crient nos noms. Mais je me méfie des femmes. Elles attirent les problèmes. J'ai bien vu comment Eagle et Dove se prennent la tête entre chaque concert. Le bus de tournée est un véritable festival d'insultes grâce à eux. Des "Dove tu exagères" par-ci, des "Eagle, sale enfoiré!" par là. J'en reviens toujours pas qu'ils aient accepté qu'on prenne ces noms de scène d'ailleurs. Mais les fans semblent adorer cela. Raven Eagle Dove. Et en raccourci: RED. Chaque fan exprime sa préférence pour son artiste préféré en agitant des drapeaux avec l'oiseau qui le représente. L'aigle est certes plus majestueux que le corbeau mais j'ai l'âme d'un de ces oiseaux noirs. Déjà de par ma chevelure je suis plus sombre que les deux autres qui m'accompagnent et en plus... j'ai toujours trouvé un certain charme à ces bêtes qui semblent surveiller les cadavres. On se ressemble elles et moi. Nous avons un côté sinistre mais luisant de par nos plumes noires. Le concert est fini et Eagle me prend dans ses bras. Nous avons fait salle comble apparemment et nous sommes en bénéfice. 4152$ pour cette soirée. C'est pas énorme mais cela comble les pertes d'autres bars où moins de gens étaient venus. Nous allons bientôt partir jouer en Grande-Bretagne, c'est pour le mois prochain. Et ensuite... l'Irlande. Mon coeur se serre à cette pensée. C'est là qu'à l'âge de 18 ans j'ai découvert la musique. J'avais honte de rentrer en Nouvelle-Zélande. Maman m'attendait et je savais qu'elle voudrait tout connaître de ma rencontre avec mon père. Mais loin de moi l'envie d'en parler, j'avais besoin de temps. J'ai donc pris une chambre dans une auberge de jeunesse. Juste pour quelques jours, pour me remettre du choc ressenti. Et dans un pub, un gars jouait de la guitare. J'étais sous le charme de ses notes, de cette ambiance. C'était ma seule passion: la musique. Mais je n'avais jamais envisagé d'en faire en public. Je jouais pour moi, dans ma chambre, quand j'étais en colère le plus souvent. A la fin de la soirée, le chanteur avait demandé si des gens dans le pub voulaient s'essayer à jouer avec lui. J'avais bu un peu et il y avait une fille qui me dévisageait au bar. Probablement pour faire bonne impression, je me suis levé et j'ai rejoint le type. C'était une des meilleures soirées de ma vie. J'étais tellement abattu par cette rencontre avec mon paternel que j'avais besoin d'extérioriser ça. Et là, dans l'intimité de ce petit pub irlandais, j'ai laissé aller toute ma rage. Le gars m'a demandé d'où je venais ensuite. On a causé quelques minutes et sans trop savoir comment, j'ai accepté de revenir jouer avec lui le lendemain. Les jours se sont transformés en semaines et ce n'est qu'au bout de sept mois que je suis rentré à Wellington. Avec dans mes bagages un tout nouveau rêve. La guitare elle ne me décevrait pas. Parce que la guitare elle, elle m'aimait. C'était comme une évidence. La musique m'avait choisi au moment où mon père me reniait. Et retourner en Irlande bientôt, cela a un goût de rêve. Car ce n'est plus la patrie du bâtard qui m'a abandonné mais celle d'où est née ma musique. C'est celle qui m'a donné vie. "Birdie est là." Soudain, je refais surface. Je m'étais plongé dans le vert de mon pays natal mais voilà que Dove me regarde avec cet air entendu. Mon visage doit montrer mon incompréhension car elle répète. "Birdie est là. Ton petit oisillon qui te suit partout. Elle a enfin osé venir et elle demande à te voir." Le sourire de Dove en dit long sur ce qu'elle pense qui va arriver. Mais je ne suis pas ce genre d'hommes. Oui, j'ai couché avec quelques unes de mes fans, parce qu'après tout, je demeure un homme. Mais je ne les chasse pas. Et cette fille qui me suivait partout depuis près de trois mois, elle me faisait un peu peur. Elle était clairement plus jeune que moi. Son regard semblait voir à travers mon âme, comme si lorsque je chantais, elle faisait fusion avec ma personne. Et je déteste ça. Je déteste que quelqu'un me comprenne. Parce que du coup, je sais qu'elle voit qui je suis, qu'elle sait un peu trop de choses sur moi. Pour les autres fans, je ne suis qu'un mec plutôt pas mal pour son âge, qui chante bien. Je suis un fantasme: le chanteur avec qui on a envie de faire des galipettes dans les coulisses. Mais elle... elle a l'air différente. Elle entre dans la pièce avant même que j'aie pu dire à Dove de l'inviter à l'intérieur. La petite est toute rouge et je vois qu'elle est sur le point de s'évanouir tant la pression est à son comble. Puis là, elle fait quelque chose de tout à fait inattendu: elle me prend dans ses bras. Comme si on se connaissait depuis toujours. L'énergie entre nous est bizarre. Elle me regarde avec ses grands yeux que je connais très bien maintenant et soudain je reconnais mon sourire dans le sien. Je m'écarte, effrayé de ce que je pense comprendre. «  Bonjour Isaac, je m'appelle Eanna. » Cet accent ne trompe personne. Elle est irlandaise. Elle est bien plus jeune que moi. C'est la fille que j'ai vue sur le pas de la porte des années plus tôt. Sa fille. «  Je suis... » Je pose un index sur ses lèvres pour l'interrompre. Je sais qui elle est. Mais je ne veux pas que les autres sachent eux aussi. On s'isole tous les deux. Je comprends enfin pourquoi malgré sa grande beauté, je n'ai jamais été attiré par elle. Une nuit ne suffit pas pour que l'on se parle de nous. Et pourtant nous essayons. Parce qu'elle a soif de connaître son sang tout comme moi à son âge. Elle était venue me voir quand j'étais en Irlande. Sa soeur aînée m'avait suivi quand j'avais quitté la maison de leur père et par la suite, elle avait emmené Eanna avec elle à une de mes représentations ultérieures. Ces soeurs que je ne connais pas mais qui m'ont suivi sans que je ne le sache, cela me bouleverse. Eanna... son prénom en gaélique se traduit par "oiseau". Cette coïncidence est trop forte que pour être sans relief. Nous sommes liés elle et moi. Maman est morte il y a deux ans, je me croyais seul au monde. Et voilà que j'ai une demi-soeur. Une demi-soeur qui ne veut pas me fermer la porte au nez. Non, une demi-soeur qui est prête à me suivre partout tant le lien qui nous unit semble fort et mystérieux.


Je n'arrive plus à dormir. Je regarde le ciel au dessus de moi et je sais que je devrais rentrer dans mon petit appartement deux pièces plutôt que de rester dehors. Mais autant m'habituer à vivre dans la rue dès maintenant. Combien de temps avant que mes petits boulots ne suffisent plus à m'offrir un toit sur la tête? Je revois Eagle qui me riait au nez quand je lui disais que la gloire c'était éphémère. Il nous a bien roulé Dove et moi. La presse a été violente, tellement violente. Les journalistes étaient partout autour de nous, nous accablant de questions. Comme si nous avions envie de leur parler de ce qui venait de se passer. Dove était à terre, elle pleurait comme jamais je n'avais vu un être humain pleurer. J'étais totalement sobre. Parce que moi je ne me droguais pas, jamais. Eux... eux bien. C'était ce qui faisait le ciment de leur couple, ils aimaient planer ensemble. Mais quand ils étaient sans rien dans les veines ou dans les poumons, leur amour battait de l'aile. Puis l'inévitable est arrivé. Elle est tombée enceinte et a décidé de tout arrêter. Dove était une fille intelligente, elle se droguait par amour de son art plus que par besoin. Et aussi parce que ça la rapprochait d'Eagle. Mais lui... lui il avait besoin de la came pour survire. Il m'avait raconté ses souffrances de jeunesse et je savais à quel point fuir la réalité lui était nécessaire. Mais il n'y arrivait pas tout seul. Cela faisait cinq mois seulement qu'elle avait arrêté et il n'en pouvait plus. Ils se disputaient sans cesse. Elle voulait qu'il arrête et lui qu'elle reprenne. Puis, il avait accepté mais sans nous dire comment il arrêterait. Il avait pris toutes les doses qui lui restaient et se les était injectées en une fois. Sa mort avait été rapide. On l'avait trouvé couché par terre dans le studio, un sourire désagréable sur le visage. Dove avait commencé à le frapper. Et quelques heures plus tard, on l'avait séparé du cadavre par la force. Elle se tenait à lui comme si sa vie en dépendait. Quatre jours plus tard elle faisait une fausse-couche qui avait failli lui coûter la vie à elle aussi. Et moi, je perdais tout dans ce courant de tragédie. Notre groupe était mort avec Eagle, paix à son âme. Dove perdait pied et notre amitié devenait tendue. J'avais survécu, son fiancé non. Pourtant tous les deux nous partagions quelque chose, nous avions une souffrance commune. Notre trio était ce qui comptait le plus pour chacun d'entre nous. Notre vie avait subi un choc immense. Et petit à petit, alors que nous étions en deuil, elle et moi nous nous sommes rapprochés. Trop. On avait ce besoin de se réconforter l'un l'autre et d'avoir quelqu'un qui nous comprenne. Mais les médias ne nous lâchaient pas, les fans aussi. Puis, il y avait cette culpabilité immense à chaque regard implicite, à chaque geste tendancieux. Pourtant, nous ne pouvions nous empêcher de nous rapprocher. C'était comme une évidence. Elle était la colombe de ma liberté. Mais nous ne pouvions laisser la passion nous consumer. Le fantôme d'Eagle semblait vivre entre nous et nous rappeler à chaque fois que nous étions des traîtres à sa mémoire. J'ai pris mes distances et je sais qu'elle l'a mal vécu. Pourtant tous les deux nous savions que c'était la seule solution. Depuis, nous cherchons à nous éviter. Mais nos mondes tournent dans le même sens et parfois, il nous est impossible de changer de trottoir quand nos chemins se croisent. Un frôlement de main suffit parfois à nous remettre d'aplomb. Et que ne donnerais-je cette nuit pour qu'elle soit étendue près de moi, qu'elle ait son bras le long du mien et que nous respirions le même air. C'est tout. Cela me ferait tellement de bien.


«  Où est Eanna? » Je ne l'ai pas tout de suite reconnue, comment aurais-je pu? 15 années se sont écoulées depuis ce moment-là. Elle me fusille du regard et fait le tour de mon petit appartement. Pense-t-elle vraiment que ma petite soeur vit ici? «  Elle n'est pas ici. » Aslinn me regarde avec mauvaise humeur. Elle n'a pas l'air d'être quelqu'un d'ouvert à l'humour donc je ne tente rien. Puis de toute façon, mis à part avec Eanna, je ne suis pas l'homme le plus sympathique qui soit non plus. J'aimerais qu'elle se présente mais elle ne le fait pas, elle tourne comme un lion en cage. Elle analyse la pièce et pose ses yeux sur le matelas qui traîne par terre près de mon lit. Oui, parfois elle dort chez moi. On passe nos soirées à parler de philosophie et autres trucs du genre. Ca fait plus de sept ans qu'Eanna est entrée dans ma vie. Elle est repartie en Irlande après m'avoir avoué qui elle était mais malgré cela, elle n'est jamais sortie de mon coeur. On s'est écrit pendant des mois jusqu'à ce que je l'invite à déménager ici. Elle adorait notre père et n'arrivait pas à quitter Galway mais l'envie de découvrir de nouveaux horizons a lutté en ma faveur. A ce moment-là j'étais dans une phase où le groupe allait bien. On était assez connus et je gagnais plus qu'assez que pour lui payer son billet d'avion jusqu'ici. Elle n'avait pas besoin de cette faveur, papa était apparemment assez aisé. Eanna était venue et n'était plus repartie. Elle m'avait dit que personne ne savait où elle était allée, sinon on serait venu la rechercher. Fréquenter le musicien qu'était son frère, celui abandonné, c'était pas vraiment dans les plans de ses parents. Mais voilà qu'Aslinn apparaissait à ma porte seize mois plus tard. Elle ne lui ressemblait aucunement, aucun trait commun avec lui. Certes, nous étions bruns tous deux mais les traits du visage différaient. Pourquoi? Je n'en sais rien. Je m'en fiche. Elle est la soeur qui veut me retirer la seule personne qui me reste, ma seule famille. «  Pourquoi?» «  Son père... » elle marqua une pause avant de se corriger «  ...votre père est malade. » Pourquoi s'excluait-elle du lot? J'ai un haut le coeur. Cet homme que je hais tant était donc au précipice de la mort. Et évidemment Eanna me quittera pour aller dire adieu au padre. Mais moi? Je ne peux le faire, je ne peux lui offrir l'absolution. C'est impossible. Et cela risque de tendre mes rapports avec notre cadette. Aslinn ne prit pas la peine de me confirmer qu'elle était ma demi-soeur et partit chercher Eanna à l'endroit que je lui ai indiqué. Ce n'est que quelques jours plus tard, en la voyant de loin près de la digue que je me suis souvenu pourquoi son visage me semblait familier. C'était elle la jeune femme pour qui j'étais monté sur la scène mon premier soir à Galway. C'était elle que je voulais impressionner. J'avais l'estomac noué à l'idée que je voulais draguer ma demi-soeur. Eanna m'avait dit qu'elle m'avait suivie mais je n'avais jamais fait le rapprochement. C'était mon autre soeur, celle dont je ne savais rien. Celle dont Eanna évitait de parler parce qu'elle lui en voulait des rapports tendus qu'Aslinn entretenait avec notre père. Elle ne m'en parlait pas, surtout parce qu'elle se doutait que je serais du côté d'Aslinn. Car je n'étais pas le premier fan de cet homme qui nous avait donné la vie. Du coup, elle était une étrangère pour moi. Et pourtant, je me souvenais de son sourire dans le pub, de sa manière de m'encourager sans dire un mot. Elle avait été ma muse pour les trois premières chansons que j'avais écrites à l'époque. Et une des chansons de notre groupe s'appelait même "Foreign Girl" en hommage à celle qui avait provoqué ma vocation sans le savoir. Elle regardait la mer sans me voir, elle me tournait le dos et j'avais envie d'aller lui parler. Je voulais qu'elle me dise pourquoi elle était si remontée contre cet homme que je haïssais. Mais je me suis abstenu. Parce qu'elle appartient à un autre monde, le monde des illusions.